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10/11/2005 | FRANCE | N°04VE03272

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 10 novembre 2005, 04VE03272


Vu la requête, enregistrée le 24 septembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Johann , demeurant ..., par Me Granier, par laquelle M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200384 en date du 18 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation du titre de perception en date du 25 avril 2001 par lequel le ministre de la défense l'a constitué débiteur d'une somme de 93 178,30 F, correspondant aux frais supportés par l'Etat pour sa scolarité à l'école

du service de santé des armées de Bordeaux, et, d'autre part, à la d...

Vu la requête, enregistrée le 24 septembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Johann , demeurant ..., par Me Granier, par laquelle M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0200384 en date du 18 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation du titre de perception en date du 25 avril 2001 par lequel le ministre de la défense l'a constitué débiteur d'une somme de 93 178,30 F, correspondant aux frais supportés par l'Etat pour sa scolarité à l'école du service de santé des armées de Bordeaux, et, d'autre part, à la décharge de cette somme ;

2°) d'annuler ledit titre de perception ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 600 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le tribunal a, à tort, jugé qu'il n'était plus recevable à exciper de l'illégalité de la décision du 3 août 2000 l'excluant de l'école du service de santé des armées, qui est devenue définitive, alors que cette décision ne mentionnait que les délais de recours contentieux mais non la possibilité et les délais d'un recours administratif ; que, quand bien même cette décision serait devenue définitive, elle pouvait encore être contestée par la voie de l'exception dès lors qu'elle servait de fondement au titre de recettes contesté ; que la décision du 3 août 2000 a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la décision de renvoi devant le conseil d'instruction ne faisait pas mention de son droit à consulter son dossier ; que celui-ci n'a pas non plus pu avoir accès au rapport préalable du médecin principal ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il avait apporté suffisamment d'éléments de nature à établir l'existence d'un détournement de procédure, consistant à l'avoir renvoyé du fait de ses problèmes de santé ; qu'il n'a pas eu droit à un procès équitable dans la mesure où l'administration n'a pas versé au dossier l'avis du conseil d'instruction et où les premiers juges n'en ont pas ordonné la production ; qu'à défaut d'une telle production les juges auraient du tenir les allégations du requérant pour établies ; que le tribunal a, à tort également, jugé que l'obligation de remboursement instituée par le décret du 17 mai 1974 ne portait pas atteinte au droit de propriété tel que consacré par le paragraphe 1er de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'article 5 de l'ordonnance de 1959 relative aux lois de finances ne peut servir de fondement juridique à l'article 32 du décret du 17 mai 1974 puisque cette ordonnance ne vise pas le cas des remboursements forcés ;

................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel ;

Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances ;

Vu la décision n°69-57 L du Conseil Constitutionnel du 24 octobre 1969 ;

Vu le décret n°74-515 modifié du 17 mai 1974 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2005 :

- le rapport de Mme Labetoulle, conseiller ;

- les observations de Me Granier, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une décision du 3 août 2000, le ministre de la défense a prononcé l'exclusion de M. de l'école du service de santé des armées de Bordeaux à l'issue de sa première année de scolarité et a mis à sa charge le remboursement de ses frais de scolarité ; qu'à la suite de cette décision le ministre de la défense a émis à l'encontre de l'intéressé le titre de perception en date du 25 avril 2001, contesté dans le cadre de la présente instance , le constituant débiteur d'une somme de 93 178,30 F correspondant aux dits frais ;

Considérant que si, comme l'a jugé le tribunal administratif, la décision du 3 août 2000, qui comportait la mention des voies et délais de recours, était devenue définitive lorsque M. a saisi le tribunal de sa demande, le 4 février 2002, l'intéressé restait néanmoins recevable à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa demande dirigée contre le titre de perception du 25 avril 2001, dès lors qu'elle formait avec celui-ci une opération complexe ; qu'il est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé qu'il n'était plus recevable à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa demande d'annulation du titre de perception du 25 avril 2001 ;

Considérant que si l'instruction du 5 août 1924, prise pour l'application du décret du 13 mai 1975, régissant la procédure devant le conseil de révision prévoit que le dossier doit être communiqué à l'intéressé, elle ne prévoit pas en revanche que l'élève doit être avisé de la possibilité de le consulter lors de la notification qui lui est faite de l'ordre d'envoi devant le conseil d'instruction ; que, par ailleurs, il ressort des pièces versées au dossier que le rapport du médecin principal Roumegou, établi le 7 juillet 2000, chargé de rapporter sur le cas de M. X, mentionne qu'il a été communiqué à l'intéressé à cette même date ; que celui-ci, qui ne conteste pas l'exactitude de cette mention et n'établit d'ailleurs pas avoir entrepris quelque démarche que ce soit pour obtenir communication dudit rapport, doit, dés lors, être regardé comme en ayant eu connaissance à la date du 7 juillet 2000, soit onze jours avant la réunion du conseil d'instruction ;

Considérant que si le requérant soutient ensuite que le tribunal aurait, à tort, écarté son moyen tiré du détournement de procédure dont serait entachée la décision du 3 août 2000, laquelle aurait en réalité prononcé son exclusion pour raisons médicales , il ressort du rapport du médecin principal Roumegou que celui-ci a proposé son exclusion du fait de sa fragilité psychologique, de ses difficultés d'adaptation aux études médicales et à la vie en collectivité et du caractère trop aléatoire de ses chances de réussite en cas de redoublement ; que lui-même, dans sa lettre du 4 juillet 2000, pour expliquer son échec, invoque notamment un problème de méthode de travail ainsi que des démotivations ; qu'il ne ressort pas dès lors des pièces du dossier qu'il aurait en réalité été exclu pour des raisons médicales ; que, par ailleurs, si le conseil d'instruction, pour proposer son exclusion, s'est fondé sur ses difficultés d'adaptation et sa personnalité fragile tandis que le ministre s'est fondé sur ses résultats insuffisants en école, c'est à juste titre que le tribunal a jugé que cette différence de motifs n'était pas de nature, à elle seule, à caractériser un détournement de procédure alors, surtout, que le ministre n'est pas lié par l'avis du conseil d'instruction ;

Considérant, ensuite, qu'aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne physique a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ; que l'obligation de remboursement de frais de scolarité ne constitue pas la privation d'un bien au sens de ces dispositions ; que c'est, dès lors, à juste titre également que le tribunal a jugé que le requérant n'était pas fondé à invoquer la violation de ces stipulations ;

Considérant, enfin, qu'ainsi que l'a jugé le conseil constitutionnel dans sa décision du 24 octobre 1969 s'agissant des élèves de l'Ecole Polytechnique, le remboursement de frais de scolarité des élèves suivant une formation qui les destine à servir ensuite dans la fonction publique trouve sa contrepartie directe dans des prestations fournies par le service et possède ainsi le caractère d'une rémunération pour service rendu et non celui d'une imposition ou d'une taxe ; qu'en vertu de l'article 5 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, la rémunération des services rendus par l'Etat ne peut être instituée que par voie réglementaire ; qu'il suit de là que le décret du 17 mai 1974 modifié pouvait organiser le régime de remboursement des frais de scolarité des élèves des écoles du service de santé des armées ; que c'est, dès lors, à juste titre que, en se fondant sur les dispositions de l'article 5 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, les premiers juges ont écarté le moyen tiré de ce que ledit décret manquerait de base légale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de perception émis à son encontre le 25 avril 2001 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. est rejetée.

N° 04VE03272 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 04VE03272
Date de la décision : 10/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Marie Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : GRANIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-11-10;04ve03272 ?
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