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10/11/2005 | FRANCE | N°04VE00895

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 10 novembre 2005, 04VE00895


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY, par Me Le Baut ;

Vu la requête, enregistrée

le 11 mars 2004, présentée pour la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY, r...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY, par Me Le Baut ;

Vu la requête, enregistrée le 11 mars 2004, présentée pour la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY, représentée par son maire en exercice, par Me Le Baut ; la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0002947 du 22 décembre 2003 en tant que le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à verser à Mme X la somme de 6 000 euros assortie des intérêts légaux en réparation des préjudices qu'elle aurait subis et à rembourser à l'intéressée la somme de 900 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Versailles ;

3°) de mettre à la charge de Mme X la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le motif du jugement tiré du non respect des dispositions de l'article 38 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 est erroné en droit puisque l'engagement de Mme X en tant que professeur de piano n'était pas susceptible d'être reconduit pour l'année scolaire suivante et du fait que ces dispositions ne peuvent avoir pour effet, sans méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales, d'imposer à une collectivité le choix du renouvellement ou non d'un contrat ; qu'en effet et d'une part, ces dispositions ne peuvent s'appliquer au fonctionnement du conservatoire municipal puisque le maintien de l'activité de Mme X pour l'année scolaire suivante était subordonné au nombre d'inscriptions des usagers qui ne sont connues qu'au début septembre ; que, d'autre part, ces dispositions aboutissent à instaurer une tutelle de l'Etat sur les décisions des collectivités territoriales ; que le montant de l'indemnité « tous préjudices confondus » est excessif eu égard aux nouvelles conditions de service de l'année scolaire 1999-2000 et au faible nombre d'élèves qui justifient la décision de ne pas renouveler le contrat ;

……………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la constitution ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 juillet 1984 ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2005 :

- le rapport de Mme Kermorgant, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 38 du décret susvisé du 15 février 1988 : « Lorsqu'un agent non titulaire a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : (…) 2°) au début du mois précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que Mme X a été employée par la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY en qualité de professeur de piano vacataire au conservatoire de la commune, pour la première fois au titre de l'année scolaire 1978-1979 ; qu'ensuite, par contrats successifs, sa nomination a été reconduite d'année en année et, en dernier lieu, pour l'année scolaire 1998-1999, par contrat du 8 septembre 1998 à raison de 7 heures de cours par semaine ; que la commune a avisé l'intéressée par lettre du 30 septembre 1999 de sa décision de ne pas la reconduire dans ses fonctions pour l'année scolaire 1999-2000 ; que, bien que l'engagement de Mme X ait été à durée déterminée et prévu pour prendre fin au terme de l'année scolaire 1998-1999, l'intéressée devait être regardée comme « un agent non titulaire engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite » au sens des dispositions sus-rappelées, dès lors que cet engagement avait déjà été reconduit vingt-deux fois, par contrats successifs ; que si la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY pouvait légalement décider de ne pas reconduire l'intéressée dans ses fonctions dans l'intérêt du service au terme normal de son engagement, elle ne pouvait le faire qu'en respectant le préavis résultant des dispositions sus-rappelées de l'article 38 du décret du 15 février 1988 et en lui notifiant son intention de ne pas renouveler l'engagement au début du mois précédant le terme de cet engagement ;

Considérant, d'autre part, que le respect du délai imparti par les dispositions précitées de l'article 38 du décret du 15 février 1988 n'est pas prescrit à peine de nullité de la décision refusant le renouvellement ; que lesdites dispositions réglementaires, qui ont pour objet de régir les relations entre les collectivités publiques et leurs agents non titulaires, se bornent à fixer les modalités d'emploi des agents non titulaires sans interférer dans l'opportunité des décisions de recrutement ; qu'en tout état de cause, si les collectivités territoriales s'administrent librement, c'est dans les conditions prévues par les lois ; qu'ainsi et dès lors que lesdites dispositions sont intervenues en application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 , la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY ne saurait utilement soutenir, pour s'y soustraire, qu'elles méconnaissent le principe de libre administration des collectivités locales territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution ; que, par suite, l'inobservation du préavis qui s'imposait à la commune est constitutive d'une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de Mme X ;

Considérant, en second lieu, que le maire a demandé à Mme X, par courrier du 18 juin 1999, de lui faire connaître son accord pour poursuivre son engagement au sein du conservatoire de musique, et, prenant acte de cet accord le 2 juillet suivant, lui a indiqué qu'il lui ferait parvenir le nouveau contrat au début du mois de septembre ; que cette lettre constituait une promesse d'engagement ; que cette promesse n'a pas été tenue dès lors que la commune lui a fait connaître le 30 septembre 1999 que son contrat n'était pas renouvelé ; qu'en ne respectant pas cette promesse et en notifiant tardivement le refus de renouvellement du contrat, la commune a également commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que la circonstance qu'elle ne pouvait prévoir en juin 1999 le nombre d'élèves inscrits pour l'année scolaire suivante n'est pas de nature à l'exonérer de cette responsabilité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Versailles a condamné la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY à la réparation du préjudice qui est résulté pour Mme X des fautes ainsi commises ;

Sur le préjudice :

Considérant que la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY soutient que l'indemnité de 6 000 euros fixée par le tribunal administratif en réparation des préjudices matériel et moral de Mme X est excessive en ce qu'elle ne tiendrait pas compte des contraintes du service, notamment de la difficulté de connaître en juin le nombre d'élèves inscrits aux cours de piano pour l'année scolaire suivante, lesdites inscriptions étant aléatoires ; qu'une telle circonstance ne saurait, comme il vient d'être dit, atténuer sa responsabilité ni diminuer l'importance des préjudices subis par Mme X ; qu'elle ne saurait, en outre, établir le caractère excessif de cette indemnité en soutenant que son montant correspond au traitement que Mme X aurait perçu pendant un an, compte tenu du service réduit à deux heures vingt minutes par semaines qu'impliquait le faible nombre d'inscriptions constatées en septembre 1999, alors, d'une part, que celle-ci a effectué pendant près de vingt-deux ans un service de sept à onze heures hebdomadaires suivant les années et que, d'autre part, un tel moyen, qui n'a trait qu'au préjudice matériel, n'a aucune incidence sur la réparation du préjudice moral invoqué ; que, par suite, nonobstant la circonstance que le motif de refus de renouveler le contrat a été pris dans l'intérêt du service, le Tribunal administratif de Versailles n'a pas fait une évaluation exagérée de ces préjudices en condamnant la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY à payer à ce titre à Mme X la somme de 6 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée au versement à Mme X d'une somme de 6 000 euros en réparation des préjudices subis ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY le paiement à Mme X de la somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE MONTFORT L'AMAURY versera à Mme X une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N°04VE00895


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 04VE00895
Date de la décision : 10/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Martine KERMORGANT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : MANN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-11-10;04ve00895 ?
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