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03/11/2005 | FRANCE | N°04VE00215

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 03 novembre 2005, 04VE00215


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Boualem X, demeurant ..., par Me Lehmann ;

Vu la requête, enregistrée le 1

9 janvier 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Pari...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Boualem X, demeurant ..., par Me Lehmann ;

Vu la requête, enregistrée le 19 janvier 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement N° 0206261 en date du 2 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 16 novembre 2001 par laquelle le ministre de l'intérieur a décidé son expulsion et de la décision du préfet du Val-d'Oise du même jour fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté et la décision précités ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le signataire de l'arrêté ministériel d'expulsion ne justifie pas avoir reçu une délégation de signature ; que la notification de l'arrêté d'expulsion par la voie orale dans le cadre d'une procédure d'interpellation est irrégulière ; que le ministre a commis une erreur d'appréciation en estimant que son expulsion constituait une nécessité impérieuse pour la sécurité publique ; que les condamnations visées dans les motifs de l'arrêté d'expulsion sont anciennes et moins graves que celles retenues par le Conseil d'Etat pour annuler certaines décisions d'expulsion ; que le ministre a commis une erreur de droit en prenant un arrêté d'expulsion à son encontre alors qu'il est protégé par les dispositions de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que le ministre a commis un détournement de pouvoir et de procédure ; que l'arrêté d'expulsion prononcé à son encontre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'entré en France à l'âge de trois ans, il y réside, comme d'ailleurs les membres de sa famille dont certains sont de nationalité française, de façon régulière et continue ; qu'il ne dispose plus d'attaches au Maroc en dehors d'un grand-père âgé et malade ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2005 :

- le rapport de M. Martin, premier conseiller ;

- les observations de Me Lehmann pour M. X ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions d'annulation de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 16 novembre 2001 prononçant l'expulsion de M. X :

Considérant, en premier lieu, que M. Y, administrateur civil chargé de la sous-direction des étrangers et de la circulation transfrontière à la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur, bénéficiait d'une délégation de signature du ministre de l'intérieur, accordée par décret du 8 novembre 2001 publié au Journal Officiel de la République française du 9 novembre 2001, lui permettant de prendre l'arrêté d'expulsion attaqué ; que le moyen tiré de l'absence de délégation de signature manque donc en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant soutient que l'arrêté prononçant l'expulsion à son encontre ne lui aurait été notifié qu'oralement, il résulte du procès-verbal de gendarmerie n° 3488/2002 de la brigade de Montmorency que l'arrêté en date du 16 novembre 2001 lui a été notifié lors de sa détention en qualité de personne gardée en vue, le 15 octobre 2002, et qu'il a expressément reconnu que cet arrêté le concernait ; qu'au demeurant, l'irrégularité d'une notification n'a aucune incidence sur la légalité d'une décision administrative ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 25 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 modifiée : Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : (...) 2°) L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ; 3°) L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis plus de quinze ans ainsi que l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention étudiant ; qu'aux termes de l'article 26 de la même ordonnance : L'expulsion peur être prononcée : (...) b) Lorsqu 'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation à l'article 25. ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est rendu coupable de nombreux faits délictueux de dégradations sur véhicules, de coups et blessures volontaires, de dégradations de biens mobiliers, de vols avec effraction en réunion de 1992 à 1995 ; qu'il a été condamné le 8 septembre 1995 par le Tribunal correctionnel de Pontoise à un an d'emprisonnement avec sursis pour violences suivies d'incapacité supérieure à huit jours et le 16 juin 2000, pour des faits commis en 1997, par la Cour d'assises du Val-d'Oise, à cinq ans d'emprisonnement pour tentative de vol avec armes ; qu'eu égard à la gravité et à la répétition de tels faits, qui ont d'ailleurs cessé avec son incarcération en 1997, ainsi qu'à l'ensemble du comportement de l'intéressé, le ministre de l'intérieur n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que l'expulsion de M. X constituait une nécessité impérieuse pour la sécurité publique ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être exposé le requérant relevait des dispositions de l'article 26 b) de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée qui permettent à l'administration d'ordonner l'expulsion d'un étranger visé à l'article 25 du même texte ; que M. X n'est donc pas fondé à soutenir que le ministre aurait commis un détournement de procédure en prenant un arrêté d'expulsion à son encontre alors qu'il était protégé par les dispositions de l'article 25 du fait de l'ancienneté de son séjour en France ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté prononçant son expulsion méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France, qui définissent les chefs de protection absolue contre la prise d'une mesure d'expulsion concernant les étrangers ayant tissé des liens personnels et familiaux d'une particulière intensité sur le territoire français et qui sont entrées en vigueur le 1er mars 2005, est inopérant ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que M. X fait valoir qu'il est entré en France à l'âge de trois ans, que ses parents, ses frères vivent sur le territoire français et pour certains sont de nationalité française et qu'il n'a plus d'attaches familiales proches au Maroc, en dehors d'un grand-père âgé et malade ; que toutefois, compte tenu de la gravité des actes qu'il a commis et de l'ensemble de son comportement et eu égard aux nécessités de protection de l'ordre public, le ministre de l'intérieur, en ordonnant l'expulsion de M. X, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ;

Sur les conclusions d'annulation de la décision du préfet du Val-d'Oise fixant le pays de destination :

Considérant que M. X ne présente aucun moyen à l'encontre de cette décision ; qu'ainsi ses conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 novembre 2001 par lequel le ministre de l'intérieur a décidé son expulsion et de la décision du même jour du préfet du Val-d'Oise fixant le pays à destination duquel il sera expulsé ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 04VE00215
Date de la décision : 03/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : LEHMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-11-03;04ve00215 ?
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