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03/11/2005 | FRANCE | N°02VE00533

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 03 novembre 2005, 02VE00533


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles le recours présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Vu ledit recours, en

registré le 8 février 2002 au greffe de la Cour administrative ...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles le recours présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Vu ledit recours, enregistré le 8 février 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par lequel le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement 9500352-9500452 en date du 8 octobre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a accordé décharge partielle à la société Agribands Europe France des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles avaient été initialement assujetties les sociétés Duquesne Purina et Z...
Y... France au titre des années 1987 et 1988 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) à la remise à la charge de la société Agribands Europe France de ces cotisations, assorties des intérêts de retard ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE soutient que les opérations d'aller-retour dans les FCP Obuncour B, Danae 3 et Kleber Placement VI ont permis à la Sa Duquesne Y... de réaliser une économie d'impôt de 995.835 francs au titre de 1986/1987 et de 1.989.711 francs au titre de 1987/1988 ; que la mesure de tempérament énoncée par l'instruction du 13 janvier 1983 était subordonnée, à son paragraphe 100, à une condition expresse de conformité du fonctionnement des fonds de placements aux dispositions législatives, réglementaires ou statutaires qui les régissent et de respect de leurs obligations ; que pour les trois fonds de placement en cause, il y a eu confusion des fonctions de gérant et de dépositaire, en violation de l'article 5 de la loi du 5 juillet 1979 ; que les fonds étaient fermés de fait à la clientèle extérieure et le capital réduit au minimum, durant la phase de préparation, en violation de l'article 7 de la loi du 13 juillet 1979 ; que l'examen des variations de parts des trois FCP fait apparaître que les dépositaires ont manifestement appelé les souscripteurs au moment le plus opportun pour optimiser le coefficient multiplicateur d'impôt ; que le mécanisme des fonds turbo suppose qu'aucune souscription ne soit reçue avant la clôture de l'exercice ; que les opérations d'aller-retour n'ont pu être réalisées sans un démarchage préalable, comme le souligne la simultanéité des souscriptions ; que la matérialité du démarchage a été reconnue par le contribuable à propos des trois FCP qui ont donc méconnu l'article 9 de la loi du 13 juillet 1979 qui interdit le démarchage à domicile et dans les lieux publics ; qu'à la clôture de l'exercice 1986 l'actif net du fonds commun de placement Obuncour B comportait 96 % de liquidités, excédant ainsi le cinquième de la somme des actifs nets, prescrit par l'article 19 du décret du 2 mai 1983 ; que les commissions versées ont dépassé le montant fixé par l'article 8 de l'arrêté relatif aux FCP du 30 juin 1983 ( 5 % pour Obuncour B alors que le règlement ne prévoyait ni droit d'entrée ni commission de rachat) ou le plafond établi par les règlements propres aux deux autres FCP ; que les FCP n'ayant pas fonctionné conformément aux dispositions législatives, réglementaires et statutaires en vigueur, la société Agribands Europe France ne peut se prévaloir de la mesure d'assouplissement prévue par l'instruction administrative du 13 janvier 1983 et bénéficier par voie de conséquence de ses dispositions favorables permettant la revalorisation du crédit d'impôt ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2005 :

- le rapport de M. Brumeaux, premier conseiller ;

- les observations de Me X..., avocat ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite de vérifications de comptabilité portant sur les exercices clos en 1988, 1989 et 1990 de la société Ralston Purina, aux droits de laquelle intervient la Société Agribands Europe France puis la Société française de nutrition animale, le service des impôts a refusé l'imputation, sur l'impôt sur les sociétés dû par la société Ralston Purina, des crédits d'impôts appréhendés par celle-ci à la suite d'opérations relatives à des parts de fonds communs de placements ; que le contribuable a contesté ces redressements en invoquant l'instruction 4-K-1-83 du 13 janvier 1983 ; que par un jugement en date du 8 octobre 2001, le tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Agribands Europe France des compléments d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre des années 1987 et 1988 à concurrence des sommes respectives de 978.760 F et 1.949.494 F ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, qui fait appel de ce jugement, sollicite, dans son recours, la remise à la charge de la société Agribands Europe France des droits et pénalités dont le dégrèvement lui a été accordé ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par un mémoire enregistré le 13 novembre 2002, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE a déclaré renoncer à sa demande de rétablissement de la majoration de 40% prévue par l'article 1729 du code général des impôts en cas de mauvaise foi du contribuable, et a limité ses conclusions à la remise à la charge de la société Agribands Europe France des droits dont le dégrèvement lui a été accordé, augmentés des seuls intérêts de retard ;

Sur le principe de la substitution de base légale demandée par l'administration :

Considérant que l'administration, qui a établi l'imposition en litige dans le cadre de la répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales entend substituer à cette base légale celle prévue par les dispositions de l'article 199 ter A du code général des impôts, comme elle l'a mentionné dans ses observations enregistrées le 21 avril 1999 devant le tribunal administratif ; que l'administration, qui ne peut renoncer à appliquer la loi fiscale, est en droit à tout moment de justifier l'impôt sur un nouveau fondement légal qu'elle a compétence liée pour appliquer ; que, toutefois, cette substitution ne peut pas avoir pour effet, sauf à entraîner la décharge de l'imposition, de priver le contribuable des garanties attachées à ce nouveau fondement et dont il aurait pu bénéficier s'il avait été initialement retenu par l'administration ; qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que le contribuable n'a été privé d'aucune garantie du fait de cette substitution dès lors que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, contrairement à ce qui est soutenu, n'était pas compétente pour examiner le litige portant sur l'imputabilité de crédits d'impôt ;

Considérant en outre que si le contribuable fait valoir par la voie de l'appel incident que l'administration ne l'a pas informé de l'exercice de son droit de communication, ni du contenu et de la teneur des documents obtenus par ce biais ni des éléments de fait retenus par le service pour soutenir que le fonctionnement des fonds communs de placement étaient irrégulier, un tel moyen est inopérant, dans la mesure où la base légale justifiant le maintien des impositions litigieuses est exclusivement constituée par l'article 199 ter A du code général des impôts et où les informations recueillies auprès des gérants et dépositaires des fonds communs de placement n'ont été produites devant le juge que pour contester à la société le droit d'opposer aux prévisions de l'article 199 ter A les dispositions contraires contenues dans l'instruction 4-I-83 susmentionnée ;

Sur l'imputabilité des crédits d'impôt :

Considérant qu'aux termes de l'article 199 ter A du code général des impôts : Les porteurs de parts d'un fonds commun de placement peuvent effectuer l'imputation de tout ou partie des crédits d'impôts et avoirs fiscaux attachés aux produits des actifs compris dans ce fonds. Pour chaque année, le gérant du fonds calcule la somme totale à l'imputation de laquelle les produits encaissés par le fonds donnent droit. Le droit à imputation par chaque porteur est déterminé en proportion de sa quote-part dans la répartition faite au titre de l'année considérée ( ...). Ce droit à imputation ne peut excéder celui auquel l'intéressé aurait pu prétendre s'il avait perçu directement sa quote-part des mêmes produits... ;

Considérant qu'il est constant que le droit à imputation de crédits d'impôts qui a résulté pour la Société Ralston Purina des opérations effectuées avec les fonds communs de placement Obuncour B, Danaé 3 et , Kléber Placement VI a excédé celui auquel cette société aurait pu prétendre si elle avait perçu directement sa quote-part des mêmes produits et que les redressements résultant des crédits d'impôts excédant ce droit et non admis sont ainsi fondés au regard des dispositions précitées de l'article 199 ter A du code général des impôts ;

Considérant, toutefois, que la Société Ralston Purina a invoqué devant le tribunal administratif, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les dispositions des paragraphes 66 et 67 de l'instruction 4 K-1-83 du 13 janvier 1983 qui, à titre d'assouplissement, prévoient l'attribution aux parts supplémentaires créées entre la clôture de l'exercice et la date de mise en paiement des produits, d'un crédit d'impôt unitaire de même montant que celui alloué aux parts existant à la clôture de l'exercice ; que ces dispositions formelles ne sont susceptibles d'être invoquées par les contribuables pour faire échec à l'application des dispositions précitées de l'article 199 ter A du code général des impôts, que si l'ensemble des conditions posées par l'instruction sont remplies ; qu'aux termes du paragraphe 100 de cette instruction : l'application aux fonds communs de placement et à leurs membres des dispositions dérogatoires au droit commun dont ils peuvent bénéficier sur le plan fiscal, tant en matière de droits d'enregistrement que d'impôt sur les revenus, est subordonnée à la condition que ces organismes fonctionnent conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou statutaires qui les régissent et qu'ils respectent leurs obligations ;

En ce qui concerne la distribution d'acomptes excédant les revenus nets encaissés :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret susvisé du 2 mai 1983 fixant les conditions d'application de la loi susvisée du 13 juillet 1979 relative aux fonds communs de placement : les acomptes éventuellement distribués en avance des produits des actifs de l'exercice ne peuvent excéder les revenus nets encaissés ; que cette limite interdit à un fonds commun de placement d'inclure dans les sommes distribuables à titre d'acompte le solde du compte de régularisation où sont enregistrées les sommes reçues ou versées par le fonds à l'occasion des souscriptions ou rachats de parts, à raison de l'acquisition ou de la perte du droit au coupon couru, dès lors que les mouvements de ce compte ne font intervenir que des comptes de bilan et n'affectent donc pas les résultats du fonds ; que la circonstance qu'en vertu de l'article 21 de la loi du 13 juillet 1979, le solde du compte de régularisation est ajouté aux produits nets de l'exercice pour déterminer la distribution des résultats d'un exercice clos n'est pas de nature à modifier l'interprétation de la règle sus-énoncée qui est propre aux distributions d'acomptes ; que, par suite, la Société française de nutrition animale, qui ne conteste pas que les acomptes aient dépassé les revenus nets encaissés par le FCP Kléber Placement VI n'est pas fondée à soutenir, par la voie de l'appel incident, que le solde du compte de régularisation n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 7 précité ni à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Versailles a considéré pour ce motif le fonctionnement du fonds de placement comme irrégulier et rejeté, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire due au refus d'imputation des crédits d'impôt à raison de sa participation au capital de celui-ci au cours de l'exercice clos en 1988 ;

En ce qui concerne le montant des commissions :

Considérant qu'aux termes de l'article 18 de la loi susvisée du 13 juillet 1979, dans sa rédaction issue de la loi n° 87-416 du 17 juin 1987 : Le règlement prévu à l'article 16 fixe le mode de détermination des commissions qui pourront être perçues à l'occasion de la souscription et du rachat des parts ainsi que le mode de détermination et le montant maximum de la rémunération du gérant et du dépositaire ; que selon l'article 8 de l'arrêté du 30 juin 1983 pris pour l'application de cet article 18 le montant maximum des commissions qui peuvent être perçues à l'occasion de la souscription et du rachat des parts est fixé à 4 % de la valeur liquidative de la part ; que si le ministre fait valoir que des commissions supérieures à ce montant ont été versées à la société financière Monnet et à la Banque Hervet, celles-ci ne sont ni les gérants des fonds concernés, ni leurs dépositaires ; que cette circonstance est dès lors sans incidence sur la régularité de la gestion des fonds eux-mêmes ;

En ce qui concerne le montant cumulé des liquidités :

Considérant qu'aux termes l'article 19 du décret susvisé du 2 mai 1983 fixant les conditions d'application de la loi susvisée du 13 juillet 1979 relative aux fonds communs de placement : le montant cumulé des liquidités constatées lors de l'établissement de chacune des valeurs liquidatives des douze derniers mois ne peut excéder le cinquième de la somme des actifs nets de la même période ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration s'est bornée à relever que le montant des liquidités à la date de clôture de l'exercice 1986 excédait la proportion des actifs nets ; que toutefois ce constat n'est pas suffisant dès lors qu'il ne ressort pas de l'instruction que le montant cumulé des liquidités à l'établissement de chacune des valeurs liquidatives excédait le plafond légal qui s'apprécie par rapport à la somme des actifs nets de la même période ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge partielle des cotisations litigieuses ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que si la société Agribands Europe France a demandé la condamnation de l'Etat à lui verser 4600 euros au titre des frais irrépétibles, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ces conclusions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : Les conclusions incidentes de la Société française de nutrition animale sont rejetées.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 02VE00533
Date de la décision : 03/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : HERREMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-11-03;02ve00533 ?
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