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24/05/2005 | FRANCE | N°02VE01464

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 24 mai 2005, 02VE01464


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SA ALLAN GARANTIE EUROPE, dont le siège social est 13, rue Théodule Villeret au P

lessis-Bouchard (95130), par Me Belouis ;

Vu la requête, en...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SA ALLAN GARANTIE EUROPE, dont le siège social est 13, rue Théodule Villeret au Plessis-Bouchard (95130), par Me Belouis ;

Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle la SA ALLAN GARANTIE EUROPE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 973258, en date du 7 février 2002, par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL Européenne de garantie, aux droits de laquelle elle vient, a été assujettie au titre des années 1991 et 1992 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle soutient que c'est à tort que l'administration, en se fondant sur le 3° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, a réintégré dans les résultats de la SARL Européenne de garantie une partie des intérêts afférents aux avances que lui a consenties la société Allan Garantie France, dont elle est une filiale, dès lors qu'aucun acte anormal de gestion ne peut être reproché à cette dernière société ; que l'avance sans intérêts consentie à la SCI AB Immobilier n'a pas constitué un acte anormal de gestion dès lors qu'elle a permis l'acquisition d'un local à Nevers donné en location à la société DEP France, dont M. X est le gérant, qui était l'unique fournisseur de la SARL Européenne de garantie ; que la réintégration dans les résultats de la société des rémunérations versées à Mme Nathalie X, ainsi que des charges patronales correspondantes, n'est pas justifiée dès lors que celle-ci, qui exerçait des fonctions de VRP, a accompli un travail réel et effectif et que les sommes versées étaient en rapport avec l'importance des prestations fournies ; que la mauvaise foi de la société Européenne de garantie n'est pas établie ; que les pénalités, qui ne sont motivées que par référence à la nature, l'importance et la fréquence des redressements, ne sont pas justifiées ; que leur application méconnaît l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que les intérêts de retard doivent être limités au taux de l'intérêt légal ;

................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2005 :

- le rapport de M. Davesne, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Sur l'application de l'article R. 200-5 du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 200-5 du livre des procédures fiscales : Lorsque l'administration n'a pas, à l'expiration d'un délai de six mois suivant la date de présentation de l'instance, produit ses observations, le président du tribunal administratif peut lui accorder un nouveau délai de trois mois qui peut être prolongé, en raison de circonstances exceptionnelles, sur demande motivée. Le président du tribunal administratif peut imposer des délais au redevable. Si c'est le demandeur qui n'a pas observé le délai, il est réputé s'être désisté ; si c'est la partie défenderesse, elle sera réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les recours. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'elles ne sont applicables que devant le tribunal administratif ; que, dès lors, la SA ALLAN GARANTIE EUROPE ne peut, en tout état de cause, utilement s'en prévaloir pour soutenir qu'en présentant son mémoire en défense deux ans et demi après l'enregistrement de sa requête d'appel, le ministre aurait acquiescé aux faits exposés dans cette requête ;

Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions litigieuses :

Considérant que si la SA ALLAN GARANTIE EUROPE demande, dans sa requête d'appel, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL Européenne de Garantie, aux droits de laquelle elle vient, a été assujettie au titre des années 1991 et 1992, il résulte de l'instruction qu'aucune imposition complémentaire n'a été mise en recouvrement au titre de l'année 1992 ; que dès lors, le litige ne porte que sur l'imposition de l'année 1991 ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant des intérêts de comptes courants d'associés :

Considérant qu'aux termes de l'article 212 du code général des impôts relatif à l'impôt sur les sociétés : Les intérêts afférents aux sommes que les associés laissent ou mettent à la disposition de la société sont admis dans les charges déductibles dans les conditions prévues au 3° du 1 de l'article 39. (...) ; qu'aux termes du 1 de l'article 39 du même code, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, (...), notamment : (...) 3° Les intérêts servis aux associés à raison des sommes qu'ils laissent ou mettent à la disposition de la société, en sus de leur part du capital, quelle que soit la forme de la société, dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de l'exercice clos en 1991, la société Allan Garantie France a consenti à la SARL Européenne de Garantie, dont elle détenait 35 % du capital, des avances de trésorerie rémunérées à des taux compris entre 14,91 % et 16 % et que cette dernière a déduit de ses bénéfices l'intégralité des intérêts qu'elle a ainsi supportés ; qu'il est constant que ces intérêts versés à la société Allan Garantie France à raison de ces avances étaient calculés à un taux supérieur à la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées ; que, dès lors, nonobstant la circonstance que la société Allan Garantie France n'aurait commis aucun acte anormal de gestion, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans les résultats de la SARL Européenne de Garantie la différence entre les intérêts supportés par cette dernière et ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées ;

S'agissant de l'avance consentie à la SCI AB Immobilier :

Considérant que l'administration a rehaussé les bénéfices de la SARL Européenne de Garantie au titre de l'année 1991 d'une somme de 30 780 F correspondant au montant des intérêts que cette société s'est abstenue de percevoir à l'occasion d'une avance, d'un montant de 300 000 F, qu'elle a consentie à la SCI AB Immobilier dont les associés sont le gérant de la SARL Européenne de Garantie et son épouse ; que si la société requérante soutient que, grâce à cette avance, la SCI AB Immobilier a acquis un local à Nevers donné en location à la société DEP France qui était le principal fournisseur de la SARL Européenne de Garantie, cette circonstance, qui n'est au demeurant pas établie, ne justifie pas de la renonciation à percevoir des intérêts ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que l'absence d'intérêts sur les avances consenties n'entrait pas dans le cadre d'une gestion commerciale normale ; que c'est dès lors à bon droit qu'elle a réintégré dans les résultats de la SARL Européenne de Garantie le montant des intérêts auxquels elle avait renoncé ;

S'agissant des rémunérations versées à Mme X :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, (...), notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre, (...). Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. (...) ;

Considérant que la SARL Européenne de Garantie a versé à Mme X, épouse du dirigeant et actionnaire, des rémunérations d'un montant de 278 716 F en 1991 ; que l'administration a réintégré ces rémunérations dans les résultats de la société, ainsi que les charges patronales correspondantes qui se sont élevées à 85 749 F en 1991, au motif que l'intéressée n'avait accompli aucun travail effectif ; que si la société requérante soutient que Mme X exerçait des fonctions de VRP et a eu une action déterminante dans le développement commercial de la SARL Européenne de Garantie, elle ne produit aucun élément tendant à établir la réalité de cette activité ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a réintégré les sommes correspondantes dans les résultats de la société ;

En ce qui concerne les pénalités pour mauvaise foi :

Considérant, en premier lieu, qu'en faisant état, dans la notification de redressement, de la nature des redressements concernés et du caractère répété des agissements de la société, le vérificateur a suffisamment motivé les majorations pour mauvaise foi ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi (...) incombe à l'administration ; que le ministre fait valoir que la SARL Européenne de Garantie a, au cours de l'année 1991, versé des rémunérations sans contrepartie à l'épouse du gérant et effectué une avance sans intérêt à la SCI AB Immobilier dont les associés sont le gérant de la SARL Européenne de Garantie et son épouse ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, le ministre doit, eu égard à la persistance d'un comportement ayant pour but de tenter d'éluder l'impôt, être regardé comme apportant la preuve à sa charge de la mauvaise foi du contribuable ;

Considérant, en troisième lieu, que les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts proportionnent les pénalités selon les agissements commis par le contribuable et prévoient des taux de majoration différents selon la qualification qui peut être donnée au comportement de celui-ci ; que le juge de l'impôt, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir ou d'appliquer la majoration effectivement encourue au taux prévu par la loi, sans pouvoir moduler celui-ci pour tenir compte de la gravité de la faute commise par le contribuable, soit, s'il estime que l'administration n'établit, ni que celui-ci se serait rendu coupable de manoeuvres frauduleuses, ni qu'il aurait agi de mauvaise foi, de ne laisser à sa charge que des intérêts de retard ; que ces dispositions sont ainsi compatibles avec les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si la SA ALLAN GARANTIE EUROPE entend invoquer la méconnaissance de l'article 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, elle n'apporte aucune précision à l'appui de ce moyen ;

En ce qui concerne les intérêts de retard :

Considérant, en premier lieu, que les intérêts de retard prévus au premier alinéa de l'article 1727 du code général des impôts s'appliquent indépendamment de toute appréciation portée par l'administration fiscale sur le comportement du contribuable et n'ont, dès lors, pas le caractère d'une sanction mais constituent, même pour la part qui excèderait l'application du taux d'intérêt légal, une réparation du préjudice subi par le Trésor public en raison du non respect par le contribuable de ses obligations déclaratives ; que, dès lors, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de l'absence de motivation de la part des intérêts de retard excédant l'application du taux d'intérêt légal pour en demander la décharge ; que la possibilité offerte à l'administration, par l'article L. 247 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue de la loi n°2003-1311 du 30 décembre 2003, de procéder à des remises à titre gracieux d'intérêts de retard est sans influence sur le taux de l'intérêt légalement applicable ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA ALLAN GARANTIE EUROPE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la SA ALLAN GARANTIE EUROPE doivent dès lors être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SA ALLAN GARANTIE EUROPE est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 02VE01464
Date de la décision : 24/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BRIN
Rapporteur ?: M. Sébastien DAVESNE
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : BELOUIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-05-24;02ve01464 ?
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