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12/04/2005 | FRANCE | N°02VE03805

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 12 avril 2005, 02VE03805


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la COMMUNE DE BEAUCHAMP représentée par son maire, domicilié à l'Hôtel de ville,

Place Camille Fouinat, Beauchamp (95250), par Me X... ;

Vu la ...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la COMMUNE DE BEAUCHAMP représentée par son maire, domicilié à l'Hôtel de ville, Place Camille Fouinat, Beauchamp (95250), par Me X... ;

Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2002 par télécopie et le 7 novembre 2002 par courrier au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle la COMMUNE DE BEAUCHAMP demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 987012 du 27 juin 2002 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Versailles n'a fait que partiellement droit à sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 1 355 062 F (206 578 euros)

2°) à titre principal, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 206 578 euros avec intérêts légaux sur les sommes dues à compter du 23 avril 1998 et capitalisation des intérêts ;

3°) à titre subsidiaire, de constater que l'administration reconnaît expressément lui devoir la somme de 73 175 euros ;

4°) de lui accorder la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la procédure suivie devant le tribunal administratif est irrégulière dès lors qu'en violation de l'article R 611-7 du code de justice administrative, le président de la formation de jugement l'a informée qu'un moyen d'ordre public était susceptible d'être soulevé après que l'affaire a donné lieu à une première audience le 30 mai 2002 et que le tribunal n'a pas adressé à son avocat les conclusions du commissaire du gouvernement malgré sa demande ; que l'administration a expressément reconnu sa responsabilité en proposant une indemnité transactionnelle de 480 000 F ; que le moyen d'ordre public tiré de ce que l'Etat ne peut être condamné à payer une somme qu'il ne doit pas a été soulevé à tort dès lors que ni la responsabilité de l'administration, ni le lien de causalité, ni le préjudice, ni l'identité de la personne responsable ne sont contestés ; que l'indemnité allouée ne correspond à aucune des sommes demandées par la commune ou proposées par le défendeur ; que le jugement est insuffisamment motivé s'agissant du préjudice ; que les principes de taxation du foyer Sonacotra étaient clairs et avaient été clairement rappelés par le service de législation fiscale dans des courriers du 23 septembre 1996 et 22 janvier 1997 ; que dans ces conditions, l'administration a commis une faute lourde de nature à engager sa responsabilité ; que le préjudice doit être évalué par différence entre la taxation réalisée durant les années 1993 à 1997 et la taxation qui aurait dû être faite compte tenu de la base imposable ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2005 :

- le rapport de M. Bresse, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R 611-7 du code de justice administrative : Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement (...) en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué ;

Considérant que si le président de la formation de jugement a communiqué aux parties le 31 mai 2002, soit postérieurement à la première audience tenue le 30 mai 2002, un moyen d'ordre public tiré de l'application du principe selon lequel l'Etat ne peut être condamné à payer une somme qu'il ne doit pas, l'affaire a été appelée à une seconde audience régulièrement fixée au 27 juin 2002 ; qu'ainsi, compte tenu de cette seconde audience, la règle selon laquelle le courrier informant les parties de ce que le jugement est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office doit être adressé aux parties avant la séance de jugement a été respectée, contrairement à ce que soutient la requérante ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, par courrier expédié au tribunal le 26 juin 2002, l'avocat de la COMMUNE DE BEAUCHAMP a demandé au président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Versailles de lui adresser les conclusions écrites du commissaire du gouvernement au motif qu'il ne pouvait pas être présent à l'audience ; que si les avocats qui le souhaitent peuvent demander, avant l'audience, au commissaire du gouvernement le sens général de ses conclusions afin de respecter le caractère contradictoire de la procédure, en revanche, ni le président de la formation de jugement, ni d'ailleurs le commissaire du gouvernement ne sont tenus de communiquer par écrit à l'avocat les conclusions, lesquelles peuvent ne pas être écrites, au seul motif qu'il ne peut être présent à l'audience ;

Considérant, en troisième lieu, que la COMMUNE DE BEAUCHAMP fait valoir que le jugement du 27 juin 2002 est insuffisamment motivé en ce qui concerne l'évaluation du préjudice, alors que le montant alloué ne correspond ni à sa demande, ni à une proposition du défendeur et qu'aucune précision n'est donnée sur les intérêts inclus dans la somme allouée ; que, cependant, le tribunal, après avoir précisé le chef de préjudice qu'il indemnisait, à savoir la faute résultant de l'absence d'assujettissement du foyer Sonacotra à la taxe professionnelle au titre de l'année 1993, a suffisamment motivé son jugement en précisant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice en allouant à la commune une somme de 22 900 euros tous intérêts compris à la date du jugement ;

Sur la responsabilité :

Considérant que les erreurs commises par l'administration fiscale lors de l'exécution d'opérations qui se rattachent aux procédures d'établissement ou de recouvrement de l'impôt ne sont, en principe, susceptibles, à raison des difficultés que présentent généralement la mise en oeuvre de ces procédures, d'engager la responsabilité de l'Etat que si elles constituent une faute lourde ; qu'il en va différemment lorsque l'appréciation de la situation du contribuable ne comporte pas de difficultés particulières ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : La taxe professionnelle a pour base : 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478 (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que la Sonacotra avait, au sens de l'article 1467 précité du code général des impôts, la disposition, pour les besoins de son activité professionnelle, des locaux qu'elle donnait en location ; que la circonstance que ces locaux étaient soumis à la taxe d'habitation au nom des locataires n'est pas de nature à conduire à exclure ces locaux de ses bases taxables ; qu'en conséquence, la question de savoir si la valeur locative des locaux soumis à la taxe d'habitation au nom des occupants doit être ou non incluse dans la base d'imposition du loueur en meublé ne présentait ainsi pas par elle-même de difficulté particulière tenant à l'appréciation de sa situation au regard de l'assiette de l'impôt ; que la COMMUNE DE BEAUCHAMP avait, en outre, attiré l'attention de l'administration fiscale sur ce point le 26 novembre 1996 avant que le délai de prescription ne soit expiré ; qu'au surplus, dans un courrier du 22janvier 1997, le service de la législation fiscale a répondu à un expert comptable mandaté par la commune qu'une société d'économie mixte qui exerce l'activité de loueur en meublé doit comprendre dans sa base d'imposition à la taxe professionnelle les logements imposés à la taxe d'habitation au nom des locataires ; que dans ces conditions, en s'abstenant de manière réitérée et délibérée de 1994 à 1997, d'inclure dans la base d'imposition de la Sonacotra la valeur locative des locaux donnés en location, le directeur des services fiscaux du Val-d'Oise a commis une faute qui est de nature à engager la responsabilité du service, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'il ressort des calculs produits par le ministre que la taxe professionnelle à laquelle aurait dû être soumise la société Sonacotra a été minorée indûment d'un montant de 65 033 F en 1995, 86 375 F en 1996, 129 334 F en 1997 représentant un montant total 280 742 F, soit 42 798,84 euros ; que si la commune soutient que ces calculs sont erronés, elle n'en apporte pas la preuve, faute notamment de démontrer l'existence d'une insuffisante prise en compte des équipements et biens mobiliers dont disposait la société Sonacotra, laquelle avait initialement déclaré à tort, à ce titre, des agencements déjà retenus pour la détermination de la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière ; qu'il y a lieu, en revanche, comme le fait valoir le ministre, pour évaluer le préjudice réellement subi par la commune, de déduire le trop-perçu au titre de l'année 1994 de 77 738 F, soit 11 851,08 euros ; qu'ainsi, l'indemnité supplémentaire à laquelle la COMMUNE DE BEAUCHAMP peut prétendre s'élève à 203 004 F, soit 30 947,76 euros, qui s'ajoute à celle déjà attribuée par le Tribunal administratif de Versailles correspondant au préjudice subi au titre de l'année 1993 ;

Sur les intérêts :

Considérant que la COMMUNE DE BEAUCHAMP a droit aux intérêts sur la somme de 30 947,76 euros à compter du jour de la réception par l'administration fiscale de sa demande d'indemnisation du 23 avril 1998 ;

Sur la capitalisation des intérêts :

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 7 novembre 2002 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande tant à cette date que, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que la commune n'a pas ensuite formulé de nouvelles demandes de capitalisation, à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à la COMMUNE DE BEAUCHAMP la somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er : L'indemnité que l'Etat a été condamné par le jugement n°987012 en date du 27 juin 2002 du Tribunal administratif de Versailles à verser à la COMMUNE DE BEAUCHAMP est majorée de la somme de trente mille neuf cent quarante sept euros et soixante seize centimes (30 947,76 euros) assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 avril 1998. Les intérêts échus à la date du 7 novembre 2002 puis à chaque nouvelle échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le jugement n°987012 en date du 27 juin 2002 du Tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : L'Etat est condamné à verser à la COMMUNE DE BEAUCHAMP une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE BEAUCHAMP est rejeté.

02VE03805 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 02VE03805
Date de la décision : 12/04/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : SIMON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-04-12;02ve03805 ?
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