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03/03/2005 | FRANCE | N°02VE02698

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 03 mars 2005, 02VE02698


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS, dont le siège social est 16 boulevard de

l'Ouest au Raincy (93340), par Me Yves Kayat ;

Vu la requ...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS, dont le siège social est 16 boulevard de l'Ouest au Raincy (93340), par Me Yves Kayat ;

Vu la requête, enregistrée le 25 juillet 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0006962, en date du 20 juin 2002, en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1993, 1994 et 1995 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaires et des pénalités dont elles ont été assorties ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à payer les dépens ;

Elle soutient que le mémoire qu'elle a adressé à la direction des services fiscaux le 7 octobre 1998 en vue de la réunion de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires fixée au 19 octobre 1998 n'a pas été communiqué aux membres de cette commission avant la réunion ; que l'avis de la commission, qui était compétente pour connaître du litige contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, n'est pas motivé ; que le rapport de vérification, dont elle a demandé la communication le 12 novembre 1997, ne lui a été adressé que le 9 octobre 2001 ; que la réponse à ses observations du 26 mai 1997 ne précise pas si les pénalités de mauvaise foi sont maintenues et fixe à 625 544 F le montant du redressement de la base d'imposition de l'année 1992, alors que la somme mise en recouvrement le 30 septembre 1999 au titre de cette année s'élève à 816 555 F, correspondant à une base d'imposition de 2 401 632 F ; qu'elle n'a reçu la notification de redressement du 20 décembre 1996, relative à la période du 1er juin 1992 au 31 décembre 1993, que le 6 janvier 1997, date à laquelle le délai de reprise fixé par l'article L. 169 du livre des procédures fiscales était expiré ; qu'elle n'a pas été créée dans le cadre de la reprise d'activité de la société MZ et constitue ainsi une entreprise nouvelle au sens de l'article 44 sexies du code général des impôts ; que les intérêts de retard ne peuvent lui être appliqués dès lors qu'elle a demandé explicitement à être exonérée d'impôt sur les sociétés dans ses déclarations ;

………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 février 2005 :

- le rapport de M. Davesne, premier conseiller ;

- les observations de Me Kayat, avocat de la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions litigieuses :

En ce qui concerne la régularité de la procédure de redressement :

S'agissant de la communication du rapport de vérification :

Considérant que la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS soutient que le rapport de vérification ne lui a été communiqué que le 9 octobre 2001, alors que, le 12 novembre 1997, elle en avait demandé la communication sur le fondement de la loi du 17 juillet 1978 susvisé ; que, toutefois, le retard dont serait entachée cette communication est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

S'agissant du contenu de la réponse aux observations du contribuable :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : «L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (…) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si la notification de redressement du 20 décembre 1996 a fixé le montant du redressement, au titre de l'exercice clos en 1993, à 2 401 632 F et le montant des droits correspondants à 625 544 F, alors que, selon la réponse aux observations du contribuable du 26 mai 1997, le redressement maintenu s'élève à 625 544 F, cette simple erreur matérielle n'a pu induire en erreur la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS sur le montant de l'imposition restant en litige, dès lors que, dans sa réponse, le service a écarté l'argumentation de la société et confirmé que, selon lui, elle ne constituait pas une entreprise nouvelle pouvant bénéficier du régime d'exonération prévu par l'article 44 sexies du code général des impôts ;

Considérant que la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS ne peut, en tout état de cause, utilement soutenir que la réponse aux observations du contribuable du 26 mai 1997 ne précise pas si les pénalités de mauvaise foi mentionnées dans les notifications de redressement des 20 décembre 1996 et 25 février 1997 sont maintenues, dès lors qu'elle a été déchargée de ces pénalités par les premiers juges et que le ministre, en appel, ne demande pas leur rétablissement ;

S'agissant de la régularité de la consultation de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (…) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts ; qu'aux termes de l'article L. 59 A du même livre : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte (…) sur le montant du bénéfice industriel et commercial (…) déterminé selon un mode réel d'imposition ;

Considérant que le différend opposant la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS à l'administration fiscale portait exclusivement sur le bénéfice d'une exonération, donc sur le principe même de l'imposition, et non sur le montant du bénéfice industriel et commercial mentionné par l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales précité ; qu'une telle question de droit ne relevait pas de la compétence de la commission départementale, alors même que sa solution dépendait de l'appréciation de questions de fait ; qu'ainsi, c'est à bon droit qu'à l'issue de sa réunion du 19 octobre 1998, la commission s'est déclarée incompétente ; qu'il suit de là que les circonstances, d'une part, que le mémoire que la société requérante aurait adressé à l'administration fiscale dès le 7 octobre 1998 n'aurait été porté à la connaissance des membres de la commission qu'au cours de la réunion et non préalablement à celle-ci et, d'autre part, que l'avis rendu par la commission serait insuffisamment motivé, sont, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de la procédure de redressement ;

En ce qui concerne le bien fondé des impositions :

S'agissant de la prescription de l'imposition afférente à l'exercice clos en 1993 :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : « Pour (…) l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 189 du même livre : « La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement (…) » ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 209 du code général des impôts : « I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45, 53 A à 57 et 302 septies A bis (…). Toutefois, par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 37, l'impôt sur les sociétés dû par les entreprises créées à compter du 1er janvier 1984 est établi, lorsqu'aucun bilan n'est dressé au cours de la première année civile d'activité, sur les bénéfices de la période écoulée depuis le commencement des opérations jusqu'à la date de clôture du premier exercice et, au plus tard, jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle de la création » ;

Considérant que la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS a débuté son activité le 1er juin 1992 et clôturé son premier exercice le 31 décembre 1993 ; que, par application des dispositions précitées, l'administration fiscale disposait, pour exercer son droit de reprise sur les opérations effectuées au cours de ce premier exercice et envoyer une notification de redressement, d'un délai courant jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle de la clôture de cet exercice, soit jusqu'au 31 décembre 1996 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment d'une attestation établie par le chef d'établissement de la poste du Raincy, que l'administration fiscale a expédié, le 20 décembre 1996, à l'adresse du siège de la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS, une lettre recommandée avec demande d'avis de réception contenant une notification de redressement relative aux bénéfices de l'exercice clos le 31 décembre 1993 ; que ce pli, présenté le 23 décembre 1996, a été mis en instance au bureau distributeur du Raincy conformément aux instructions de la société qui avait déposé, le 20 décembre 1996, une demande de garde du courrier en instance valable du 23 décembre 1996 au 5 janvier 1997 ; que, dans ces conditions, le ministre doit être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe que le pli contenant la notification de redressement a été présenté à la société avant le 1er janvier 1997, alors même que cette dernière n'en a eu effectivement connaissance, conformément à ses instructions, que le 6 janvier 1997 ; qu'il suit de là que cette notification de redressement a valablement interrompu la prescription à l'égard de l'exercice ouvert le 1er juin 1992 et clos le 31 décembre 1993 ;

S'agissant de la remise en cause du régime d'exonération prévu en faveur des entreprises nouvelles :

Considérant qu'aux termes de l'article 44 sexies, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : « I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. Les bénéfices ne sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés que pour le quart, la moitié ou les trois quarts de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la seconde ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d'exonération. (…) III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au paragraphe I » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS, créée le 6 octobre 1992, a une activité de construction et de rénovation de bâtiments, identique à celle antérieurement exercée par la société MZ, dont la dissolution a été prononcée le 28 juillet 1992 ; que Mme Poirier, qui est président-directeur général de la nouvelle société dont elle détient 43 % du capital social, était antérieurement associée et salariée de la société MZ, tandis que M. Poirier, qui en est le directeur général et le conducteur des travaux et possède 52 % de son capital, était directeur commercial et conducteur de travaux de cette dernière ; que la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS a recruté en novembre et décembre 1992 treize anciens salariés de la société MZ qui ont été repris aux mêmes fonctions, puis, au cours de l'année 1993, la comptable et trois ouvriers de cette société ; qu'il n'est pas contesté qu'au cours de son premier exercice clos le 31 décembre 1993, elle a réalisé les trois quarts de son chiffre d'affaires avec la société Les Nouveaux Constructeurs pour laquelle travaillait déjà la société MZ ; que, dans ces conditions, et alors même que la requérante aurait ultérieurement diversifié sa clientèle, c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que la contribuable avait été créée pour reprendre l'activité précédemment exercée par la société MZ et ne pouvait, en conséquence, bénéficier du régime d'exonération prévu par l'article 44 sexies précité ;

En ce qui concerne les intérêts de retard :

Considérant qu'aux termes de l'article 1732 du code général des impôts : « Lorsqu'un contribuable fait connaître, par une indication expresse portée sur la déclaration ou l'acte, ou dans une note y annexée, les motifs de droit ou de fait pour lesquels il ne mentionne pas certains éléments d'imposition en totalité ou en partie, ou donne à ces éléments une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée, ou fait état de déductions qui sont ultérieurement reconnues injustifiées, les redressements opérés à ces titres n'entraînent pas l'application de l'intérêt de retard visé à l'article 1727. » ;

Considérant qu'en se bornant à cocher, sur sa déclaration de résultats, la case correspondant à l'application de l'article 44 sexies du code général des impôts, la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS n'a pas fait connaître à l'administration les motifs de droit ou de fait pour lesquels elle estimait pouvoir bénéficier du régime d'exonération prévu en faveur des entreprises nouvelles ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions précitées de l'article 1732 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions de sa requête tendant au versement d'intérêts moratoires ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS doivent, dès lors, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE ANONYME DES BATISSEURS PARISIENS est rejetée.

02VE02698 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 02VE02698
Date de la décision : 03/03/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: M. Sébastien DAVESNE
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : KAYAT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-03-03;02ve02698 ?
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