Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Marie-France X demeurant ..., par Me Favier ;
Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris par laquelle Mme Marie-France X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 février 2002 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du ministre de l'emploi et de la solidarité rejetant son recours hiérarchique présenté le 7 juillet 1999 contre la décision du directeur départemental du travail de l'emploi et de la formation professionnelle de l'Essonne du 5 mai 1999 refusant de faire droit à sa demande de révision du mode de calcul de son allocation de préretraite ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) subsidiairement d'enjoindre à l'administration de lui verser une indemnité égale aux sommes dont elle a été privée du fait de l'illégalité des décrets du 30 avril 1997 et du 24 mars 1993 ;
4°) de condamner l'Etat à lui payer 5.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Elle soutient que le tribunal a omis de statuer sur sa demande subsidiaire tendant à ce que la responsabilité de l'Etat soit reconnue du fait des conditions de son adhésion à une convention limitant illégalement l'assiette servant de base au calcul de son allocation ; que les premiers juges ont estimé à tort que l'illégalité des décrets de mars 1993 et avril 1997 était sans influence sur sa situation ; que les clauses de plafonnement figurant dans la convention ont été fixées par référence à ces deux décrets ; que l'arrêt du Conseil d'Etat annulant le décret de 1997 et déclarant illégal le décret de 1993 a privé de base légale les clauses de la convention fixant le plafonnement qui lui a été appliqué ; qu'à supposer même que sa situation puisse être regardée comme entièrement régie par la convention, les conditions dans lesquelles elle y a adhéré justifient qu'il soit fait droit à sa demande d'indemnisation ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2005 :
- le rapport de Mme Belle, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que la requérante fait valoir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé car il ne se prononce pas sur le point de savoir si l'édiction des décrets annulés était constitutive d'un faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le Tribunal, devant lequel ce moyen, qui n'était pas inopérant, a été soulevé, a effectivement omis de se prononcer sur ce point ; que, par suite, le jugement rendu le 7 février 2002 par le Tribunal administratif de Versailles doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Versailles ;
Sur les conséquences de l'illégalité des décrets 93-451 du 24 mars 1993 et 97-750 du 30 avril 1997 sur les modalités de calcul du montant des allocations spéciales dues à Mme X :
Considérant que l'article L. 322-4 du code du travail a prévu dans les régions ou à l'égard de professions atteintes ou menacées par un grave déséquilibre de l'emploi, des actions de reclassement et de placement et l'attribution, par voie de conventions passées avec des entreprises, d'allocations spéciales en faveur de travailleurs âgés lorsqu'il est établi qu'ils ne sont pas aptes à bénéficier de mesures de reclassement ; que l'article L. 322-6 du même code a renvoyé à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les modalités d'application de ces dispositions ; qu'aux termes de l'article R.322-7 du code du travail dans la rédaction que lui a donnée le décret en Conseil d'Etat n°93-450 du 24 mars 1993 : Les conventions mentionnées à l'article L. 322-4 peuvent prévoir l'attribution d'une allocation spéciale pour les travailleurs âgés faisant l'objet d'un licenciement pour motif économique qui, selon des modalités fixées par chaque convention, auront été déclarés non susceptibles de reclassement. Ces conventions fixent le montant des ressources garanties et le montant de l'allocation spéciale ( ...). ;
Considérant que Mme X fait valoir que la convention passée entre son employeur et l'Etat le 13 octobre 1997 ne pouvait lui être appliquée car elle avait été privée de base légale par l'arrêt du Conseil d'Etat du 12 juin 1998 annulant le décret du 30 avril 1997 modifiant le plafonnement de l'allocation et déclarant illégal le décret n°93-451 du 24 mars 1993 instituant le plafonnement au motif que ces deux décrets étaient entachés d'incompétence faute d'avoir été pris en Conseil d'Etat ; qu'il résulte cependant des dispositions ci-dessus rappelées du code du travail, en vigueur avant l'intervention du décret du 12 novembre 1998, qui a légalement repris les dispositions du décret du 30 avril 1997 que la convention qui, ainsi que le soutient à bon droit la requérante, l'a placée non pas dans une situation contractuelle mais dans une situation légale et réglementaire, était fondée sur les dispositions des articles L. 322-4 et R. 322-7 du code du travail ; qu'ainsi cette convention n'était pas dépourvue de base légale ; qu'en l'absence de dispositions réglementaires issues d'un autre texte pendant la période en litige, la situation de l'intéressée pouvait être réglée par cette convention, alors même que le montant de l'allocation qui en découlait était identique à celui qui aurait résulté des dispositions du décret annulé pour incompétence ; que le plafonnement qu'elle édictait n'était entaché ni d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en l'absence de décret applicable régissant sa situation quant au plafonnement de ses indemnités entre le 12 juin 1998 et le 12 novembre 1998, l'administration du travail aurait dû lui appliquer les textes antérieurs qui excluaient tout plafonnement des allocations, hormis celui prévu par la convention de retraite des cadres entrée en vigueur le 14 mars 1947 ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions prises par le directeur départemental du travail de l'Essonne et le ministre de l'emploi refusant de remettre en cause le plafonnement de ses allocations spéciales FNE ;
Sur la responsabilité de l'Etat sur le terrain de la perte d'une chance sérieuse et sur le terrain de la faute :
Considérant que Mme X fait valoir que du fait de l'application à sa situation personnelle, par l'effet de la convention, des dispositions censurées du décret du 30 avril 1997 elle a perdu une chance sérieuse de percevoir des allocations plafonnées à un niveau plus avantageux ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le plafonnement en cause lui était applicable en vertu des dispositions de la convention et n'était entaché d'aucune illégalité ; qu'elle fait valoir en outre qu'en édictant des décrets illégaux, l'Etat aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que si les décrets contestés sont entachés d'incompétence pour ne pas avoir été soumis à l'avis du Conseil d'Etat et si cette illégalité est constitutive d'une faute, la mesure de plafonnement entreprise était justifiée au fond ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat saisi du décret du 12 novembre 1998 reprenant des dispositions identiques à celles du décret du 30 avril 1997 ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que la faute invoquée est de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que la demande de Mme X tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité en réparation de son préjudice ne peut donc qu'être rejetée ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, en l'espèce, la partie perdante soit condamné à verser à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'ainsi les conclusions présentées à ce titre par Mme X doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 7 février 2002 rendu par le Tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Versailles et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetées.
02VE01569 2