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24/02/2005 | FRANCE | N°02VE02507

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 24 février 2005, 02VE02507


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la COMMUNE DE FOURQUEUX, représentée par son maire en exercice, par Me A... ;
>Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002 au greffe de la Cou...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la COMMUNE DE FOURQUEUX, représentée par son maire en exercice, par Me A... ;

Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle COMMUNE DE FOURQUEUX demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 964524-966284 en date du 30 avril 2002 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il l'a condamnée à verser aux consorts Z... une somme de 28 753,31 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 avril 1996 et capitalisation des intérêts à compter du 12 avril 2000, et une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande des consorts Z... présentée devant le Tribunal administratif de Versailles ;

3°) de condamner les consorts Z... à lui verser une somme de 700 euros en application des l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les premiers juges ont méconnu la portée de la lettre du 17 février 1994 en lui reconnaissant un caractère incitatif, constituant un encouragement de nature à engager la responsabilité de la commune sur le terrain de la faute extra- contractuelle ; que les premiers juges ont méconnu les termes de la convention du 22 juin 1994, en estimant qu'elle formalisait l'engagement de la commune de mettre en oeuvre sa compétence en matière de délivrance de certificat d'urbanisme, en contrepartie de la réalisation de travaux de viabilisation par les consorts Z... ; que les demandeurs ayant produit de simples devis estimatifs du coût des travaux, c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'ils justifiaient avoir exposé les frais correspondants ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2005 :

- le rapport de Mme Grand d'Esnon, premier conseiller ;

- les observations de Me B..., substituant Me A..., pour la COMMUNE DE FOURQUEUX et de Me Y..., substituant Me X..., pour les consorts Z... ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, propriétaires de terrains classés en zone NB par le plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE FOURQUEUX à la suite de sa révision approuvée en 1993, les consorts Z... ont souhaité y réaliser trois maisons individuelles ; que, le 17 février 1994, ils obtenaient un certificat d'urbanisme négatif en raison d'un défaut de desserte du terrain en équipements publics ; que la lettre d'envoi de ce certificat, signée par le maire, précisait que les travaux étaient trop coûteux pour pouvoir être assurés par la commune sur un seul exercice et ne pourraient être réalisés que dans des exercices ultérieurs, tout en indiquant qu'il est évident que la réalisation de cette extension par les propriétaires intéressés permettrait de raccourcir considérablement le délai au terme duquel le certificat d'urbanisme constatant la conformité des équipements avec ceux requis pour l'équipement de la zone pourra être délivré. ; que, forts de cette assurance, les consorts Z... se sont rapprochés du propriétaire d'un terrain voisin pour négocier, puis signer, le 22 juin 1994, une convention entre, d'une part, les propriétaires privés et, d'autre part, la COMMUNE DE FOURQUEUX, aux termes de laquelle, en échange de la prise en charge des travaux par les consorts Z... et l'autre propriétaire, la commune s'engageait à prendre les dispositions nécessaires pour que les installations dont l'aménagement est à la charge de la commune ... soient achevées en temps voulu afin que dès l'achèvement des travaux pris en charge par ces derniers les certificats d'urbanisme positifs puissent être établis pour les quatre parcelles constructibles après division ; qu'enfin, le 21 décembre 1994, ils obtenaient un certificat d'urbanisme positif lequel précisait, toutefois, conformément aux dispositions du règlement de zone applicable, qu'un permis de construire ne pourrait être délivré qu'à condition que la demande soit accompagnée d'une autorisation préalable de défrichement ; que, par décision en date du 11 janvier 1996, le ministre de l'agriculture refusait d'accorder l'autorisation de défrichement sollicitée le 11 avril de l'année précédente par les consorts Z... ; que se trouvant de ce fait dans l'impossibilité de réaliser leur projet de construction, les consorts Z... saisissaient alors, le 25 avril 1996, la commune d'une demande préalable d'indemnisation à raison de la perte de valeur vénale de leur terrain et des frais exposés pour réaliser les travaux de raccordement qu'ils avaient financés ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a condamné la COMMUNE DE FOURQUEUX à verser aux consorts Z... une somme de 2 853, 31 euros avec intérêts capitalisés, en réparation du seul préjudice lié aux frais exposés pour les travaux ;

Sur la responsabilité pour promesse illégale :

Considérant que, comme l'ont fait les premiers juges, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances de l'affaire pour apprécier si les promesses et encouragements donnés par la COMMUNE DE FOURQUEUX aux consorts Z... ont représenté ou non un caractère fautif ; qu'il suit de là que la circonstance que la lettre du 17 février 1994 ne comporte qu'une incitation à réaliser les travaux non assortie d'engagement précis, n'est pas de nature à ôter aux agissements de la commune leur caractère de promesses fautives, dès lors que ledit encouragement a été immédiatement suivi par la négociation et la conclusion de la convention susmentionnée en date du 22 juin 1994, par laquelle la commune, contrairement à ce qu'elle prétend, s'engageait non seulement à achever les travaux demeurant à sa charge en temps voulu mais aussi à agir ainsi afin que les certificats d'urbanisme positifs puissent être établis ; que la possibilité pour une collectivité locale d'accepter la réalisation et le financement de travaux normalement à sa charge en échange de la mise en oeuvre de ses propres compétences en matière d'urbanisme ne résulte d'aucune disposition légale applicable au cas d'espèce ; qu'ainsi la convention susmentionnée constitue un engagement inconsidéré ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, la commune doit être regardée comme ayant commis une faute de nature à engager sa responsabilité envers les requérants ;

Considérant, toutefois, que le préjudice subi par les consorts Z... résulte de l'impossibilité de construire sur leur terrain nonobstant la réalisation des travaux ; qu'il est constant que cette impossibilité de construire résulte du refus opposé par le ministre de l'agriculture à leur demande d'autorisation de défrichement et non de la promesse fautive et illégale de la commune que celle-ci a au demeurant tenue ; qu'il suit de là qu'en l'absence de tout lien de causalité direct entre la faute commise par la commune et le préjudice subi par les requérants, ceux-ci ne sont pas fondés à obtenir une quelconque indemnisation à ce titre ; qu'ainsi c'est à tort que, pour accorder une indemnité aux demandeurs, les premiers juges, qui avaient reconnu l'absence de lien de causalité directe entre le chef de préjudice tiré de la perte de valeur vénale des terrains et la faute de la commune, ont retenu un tel lien entre le préjudice tiré des frais exposés pour la réalisation des travaux et les agissements fautifs de la commune ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les consorts Z... devant le tribunal administratif de Versailles ;

Sur la responsabilité pour délivrance de renseignements erronés :

Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, le préjudice subi par les consorts Z... tant à raison de la perte de valeur vénale de leur terrain qu'à raison des frais exposés inutilement pour la réalisation des travaux incombant normalement à la commune est imputable à la non-constructibilité dudit terrain, laquelle résulte non des agissements fautifs de la commune mais du refus d'autorisation de défrichement régulièrement opposé par le ministre de l'agriculture ; qu'en outre, pour les motifs retenus par les premiers juges, la commune ne peut être regardée comme ayant fourni des renseignements erronés et par suite fautifs en délivrant les deux certificats d'urbanisme susmentionnés ; qu'il suit de là que doivent être rejetées les conclusions indemnitaires des consorts Z... présentées sur le terrain de la responsabilité de la commune pour délivrance de renseignements erronés ;

Sur l'enrichissement sans cause :

Considérant qu'en s'en tenant à la conviction qu'un certificat d'urbanisme positif suffisait à garantir la constructibilité d'un terrain, sans s'informer davantage sur la portée des dispositions de l'article NB.1 du règlement du plan d'occupation des sols applicable à leur terrain, lesquelles rappellent que les défrichements sont soumis à autorisation dans les espaces boisés non classés, les consorts Z... ont commis une imprudence constitutive d'une faute, qui est la seule cause de l'enrichissement allégué de la commune ; qu'il suit de là qu'ils ne sont pas fondés à invoquer utilement le principe de l'enrichissement sans cause ;

Sur la répétition de l'indu :

Considérant que les consorts Z... ne peuvent utilement invoquer les dispositions de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme qui prescrivent la répétition des sommes indûment perçues par les collectivités sous couvert de taxes et contributions de toute nature obtenues ou imposées en violation des dispositions de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme, dès lors que, n'étant pas bénéficiaires d'une autorisation de construire, ils n'entrent pas dans les prévisions de l'article L. 331-6 de ce code ;

Sur la responsabilité sans faute de la commune :

Considérant que si les consorts Z... ont réalisé à leurs frais les travaux de raccordement aux réseaux communaux, ils ne sauraient de ce seul fait, être regardés comme ayant agi à cet égard en qualité de collaborateurs occasionnels du service public ; que, par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que la responsabilité sans faute de la COMMUNE DE FOURQUEUX est engagée à leur égard ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE FOURQUEUX est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à verser aux consorts Z... une somme de 28 735,31 euros avec intérêts à compter du 27 juillet 1996 et capitalisation des intérêts à compter du 12 avril 2000 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la COMMUNE DE FOURQUEUX qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante soit condamnée à verser aux consorts Z... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de condamner les consorts Z... à verser à la COMMUNE DE FOURQUEUX la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 964524-966284 du Tribunal administratif de Versailles en date du 30 avril 2002 est annulé.

Article 2 : La demande des consorts Z... présentée devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la COMMUNE DE FOURQUEUX et des consorts Z... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 sont rejetées.

02VE02507 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 02VE02507
Date de la décision : 24/02/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: Mme Jenny GRAND D'ESNON
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : GRANGE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-02-24;02ve02507 ?
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