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04/11/2004 | FRANCE | N°02VE00542

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 04 novembre 2004, 02VE00542


Vu 1°) l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE ;

Vu la requête, enregistrée le 8 f

évrier 2002, sous le n° 02PA00542, au greffe de la Cour administrat...

Vu 1°) l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE ;

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2002, sous le n° 02PA00542, au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, présentée pour la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE, représentée par son maire en exercice, par Me Gentilhomme ;

La COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 863713 du 23 novembre 2001 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à garantir les héritiers de M. X à hauteur de 40% des condamnations mises à la charge de ce dernier par un arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 19 janvier 2000 ;

2°) de rejeter la demande des héritiers de M. X ;

3°) de condamner les héritiers de M. X à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement a été rendu au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la formation de jugement ayant rendu le délibéré est différente de celle qui a siégé à l'audience publique ; qu' en se fondant, pour retenir la compétence de la juridiction administrative, sur les articles 1792 et 2270 du code civil, alors que la commune n'avait pas la qualité de constructeur, et sur l'article 1251-3° du code civil, alors que M. X, architecte maître d'oeuvre, ne pouvait être regardé comme subrogé à la société d'H.L.M. Terre et Famille, maître de l'ouvrage, qui n'était pas codébiteur d'une dette non mise à sa charge, le tribunal a commis une double erreur de droit ; que la demande introductive d'instance était irrecevable faute de demande préalable et de conclusions chiffrées ; qu'à cet égard, le jugement est entaché de contradiction ; que la commune ne peut être tenue pour responsable à raison de la délivrance du permis de construire, accordé par le préfet, pour lequel elle n'a émis qu'un avis ; qu'elle n'a pas participé ni même été appelée aux expertises des experts judiciaires ; que le rapport de M. Dubus n'a pas été communiqué lors des débats devant le Tribunal ; que l'égout de l'avenue de la République a été mis hors de cause par le rapport de M. Bayle ;

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Vu 2°) l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE (S.I.A.H. ) ;

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2002, sous le n° 02PA00543, au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, présentée pour le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE, dont le siège social est 19 avenue Gabriel Péri ( 95500 ) Gonesse, par Me Gentilhomme ; le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 863713 du 23 novembre 2001 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Versailles l'a condamné à garantir les héritiers de M. X à hauteur de 30 % des condamnations mises à la charge de ce dernier, par l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 19 janvier 2000 ;

2°) de rejeter la demande des héritiers de M. X ;

3°) de condamner les héritiers de M. X à lui verser une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE reprend les mêmes moyens que ceux invoqués dans la requête n° 02PA00542, en ce qui concerne la régularité du jugement attaqué, la compétence de la juridiction administrative et la recevabilité de la demande introductive d'instance ; il soutient, en outre, qu'il n'est pas en charge d'un service obligatoire, qu'il n'est pas soumis à une obligation de résultat et qu'il réalise les travaux estimés nécessaires en fonction des moyens financiers dont il dispose ; qu'il a créé, dans les vallées du Croult et du Petit Rosne, des bassins de retenue d'une contenance totale de 1.400.000 m3 ; que le rapport de M. Dubus met en valeur les fautes commises par M. X et par le bureau d'études techniques en ne se renseignant pas sur la situation du terrain et en prévoyant une hauteur insuffisante pour les premiers niveaux habitables ; que le rapport de M. Bayle a établi l'insuffisance du réseau privé des immeubles qui a entraîné une remontée des eaux du Croult par ce réseau ; qu'en retenant une responsabilité plus importante pour lui que pour l'Etat, le Tribunal a fait une application erronée des principes afférents à la responsabilité de la puissance publique ;

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Vu 3°) l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles le dossier du recours du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER ;

Vu le recours, enregistré le 14 février 2002, sous le n° 02PA00618, au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, présenté par le SECRETAIRE D'ETAT AU LOGEMENT et le mémoire complémentaire, enregistré le 14 mars 2003, présenté par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 863713 du 23 novembre 2001 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat à garantir les héritiers de M. X à hauteur de 20% des condamnations mises à la charge de ce dernier, par l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 19 janvier 2000 ;

2°) de rejeter la demande des héritiers de M. X ;

Il soutient que la demande introductive d'instance était irrecevable faute de demande préalable et de conclusions chiffrées ; qu'il n'a pas commis de faute en délivrant le permis de construire de la société d'HLM Terre et Famille dès lors que le caractère inondable du terrain d'assiette de la construction prévue n'était pas établi à la date à laquelle il a été délivré et que le permis était assorti de prescriptions relatives au rejet des eaux pluviales ; qu'en condamnant l'Etat à garantir M. X, alors que celui-ci avait été condamné solidairement avec les autres constructeurs, le tribunal a fait une erreur de droit ; que le lien de causalité n'est pas établi dès lors que les inondations à l'origine des désordres ont eu lieu postérieurement à la date du permis et qu'elles ont trouvé leur origine dans la violence exceptionnelle des orages, dans l'aménagement d'un terrain de sport par la commune, dans la configuration du terrain situé dans une cuvette topographique, dans l'insuffisance du réseau d'assainissement de la commune, dans l'absence d'aménagement du Croult et dans la faute établie commise par M.X en ne faisant pas remblayer le terrain ; qu'en fixant à 20% la garantie due par l'Etat à M. X alors qu'aucune faute ne peut être retenue à son encontre, le Tribunal a sous-estimé à la fois les garanties dues par la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONNESSE et par le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE et la part de responsabilité de M. X dans la survenance des désordres ; qu'en condamnant l'Etat à garantir M. X, alors que celui-ci avait fait l'objet d'une condamnation solidaire, le Tribunal a commis une erreur de droit ; que les pièces du dossier ne font pas état d'un paiement global de la condamnation prononcée par le juge judiciaire par M. X ni du montant effectivement payé ; que les condamnations prononcées par le juge judiciaire n'ont jamais mis en cause la responsabilité de l'Etat dans la délivrance du permis de construire et ont, en réalité, exclu toute cause étrangère exonératoire ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code civil, notamment ses articles 1251 - 3°), 1792 et 2270 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2004 :

- le rapport de M. Dacre-Wright, président-assesseur ;

- les observations de Me Sourou, substituant Me Gentilhomme, pour la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes nos02VE00542 et 02VE00543, présentées respectivement par la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et par le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE (S.I.A.H.), et le recours n° 02VE00618, présenté par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER sont dirigés contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société d'HLM Terre et Famille, société de droit privé titulaire d'un permis de construire délivré le 14 mai 1979 par le préfet du Val-d'Oise, a réalisé en 1980 et 1981 plusieurs immeubles collectifs comportant 163 logements sur un terrain situé sur le territoire de la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE entre l'avenue de la République et le ruisseau Croult ; qu'à la suite de plusieurs orages survenus aux mois de juin 1982, 1983 et 1984, neuf appartements ont été inondés et endommagés ; que, par des arrêts devenus définitifs en date du 17 juin 1988 et du 5 mars 1993, la Cour d'appel de Versailles a, notamment, prononcé la résolution des ventes de ces appartements et condamné la société d'H.L.M. Terre et Famille à verser à leurs acquéreurs diverses indemnités ; que par un arrêt, également devenu définitif, en date du 19 janvier 2000, la Cour d'appel de Paris a condamné in solidum, en vertu des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, M. X, architecte maître d'oeuvre de l'opération, son assureur, la Mutuelle des Architectes Français, la société Bateg, venant au droit de l'entreprise générale Campenon-Bernard et la société Chagnaud, chargée de la réalisation des voies de desserte de la résidence et de ses réseaux intérieurs, à garantir la société d'H.L.M. Terre et Famille des condamnations prononcées à son encontre et ne relevant pas de sa qualité de vendeur ; que, dès le 31 janvier 1986, M. X avait saisi le Tribunal administratif de Versailles d' une demande tendant à être garanti par l'Etat, la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE (S.I.A.H.) des condamnations dont il pourrait faire l'objet ; qu'après son décès, ses héritiers ont repris l'instance ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a condamné les collectivités publiques précitées à garantir ces derniers des condamnations prononcées par l'arrêt du 19 janvier 2000 à hauteur, respectivement, de 20%, 40% et 30% ;

Sur la recevabilité du recours n° 02VE00618 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement du 23 novembre 2001 du Tribunal administratif de Versailles a été notifié au ministre de l'équipement, des transports et du logement le 18 décembre 2001 ; que le recours du secrétaire d'Etat au logement, dirigé contre ce jugement et dont le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER s'est ultérieurement approprié les conclusions, est parvenu au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris le 14 février 2002 par télécopie, soit dans le délai de deux mois imparti au ministre pour faire appel ; que, dès lors, même si l'original du recours n'a été enregistré que le 21 février 2002, ce recours n'est pas tardif ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant que lorsque le responsable d'un dommage, condamné par l'autorité judiciaire à en indemniser la victime, saisit la juridiction administrative d'un recours en vue de faire supporter la charge de la réparation par une collectivité publique co-auteur de ce dommage, sa demande a le caractère d'une action subrogatoire fondée, conformément au principe posé par l'article 1251 du code civil, sur les droits de la victime à l'égard de ladite collectivité ; qu'en mettant en cause les trois collectivités publiques précitées à raison des fautes qu'elles auraient commises à l'époque des faits et qui auraient concouru à la survenance des inondations à l'origine des dommages ayant entraîné sa condamnation, M.X, puis ses héritiers, ont engagé une action subrogatoire, fondée sur les droits que la société d'HLM Terre et Famille aurait pu faire valoir à l'encontre desdites collectivités, à laquelle ne faisait pas obstacle le fait que ces dernières n'avaient pas la qualité de constructeurs et n'étaient pas co-débiteurs des sommes mises à sa charge ; que l'appréciation du bien-fondé d'une telle action relève de la compétence de la juridiction administrative ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si les ampliations du jugement attaqué, notifiées à la Mutuelle des Architectes Français et aux héritiers de M. X ainsi qu'au SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE, mentionnent une composition du tribunal différente entre l'audience et le délibéré, la minute de ce jugement, demandée au tribunal et communiquée aux appelants précités, qui fait foi jusqu'à preuve contraire laquelle n'est pas apportée, indique que les mêmes magistrats ont siégé à l'audience du 9 novembre 2001 et ont délibéré le même jour ; qu'il suit de là que la simple erreur matérielle entachant les ampliations notifiées ne suffit pas à établir que le jugement est intervenu au terme d'une procédure irrégulière ;

Sur la recevabilité de la demande introductive d'instance :

Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable, repris à l'article R.421-1 du code de justice administrative : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision. ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. X agissait non pas en vertu d'un droit propre mais en tant que subrogé aux droits de la société d'HLM Terre et Famille ; que ses conclusions dirigées contre la COMMUNE D'ARNOUVILLE LE GONESSE et contre le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE, fondées sur l'insuffisance du réseau d'assainissement de l'avenue de la République et la création d'un terrain de sport aggravant les conditions de ruissellement des eaux de pluie ainsi que sur l'insuffisance des aménagements du ruisseau Croult, relevaient de travaux publics effectués ou insuffisants ; que, par suite, les conclusions précitées n'avaient pas à être précédées d' une demande adressée à la commune et au syndicat et étaient, ainsi, recevables ;

Considérant, en revanche, que les conclusions de M. X, dirigées contre la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et fondées sur la faute commise par celle-ci en donnant un avis favorable à la demande de permis de construire de la société d'HLM Terre et Famille, étaient irrecevables faute de demande préalable et de défense au fond par la collectivité mise en cause ;

Considérant, enfin, que le moyen, soulevé par le ministre appelant et tiré de l'absence de demande préalable, doit être écarté dès lors qu'aussi bien en première instance qu'en appel l'administration a défendu au fond et a, ainsi, lié le contentieux ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances : L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur. ; qu'il résulte de ces dispositions que le versement par l'assureur de l'indemnité à laquelle il est tenu en vertu du contrat d'assurance le liant à son assuré le subroge, dès cet instant et à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de son assuré contre le tiers responsable du dommage ; que, par suite, l'assureur a seul qualité pour agir et obtenir, s'il l'estime opportun, la réparation du préjudice qu'il a indemnisé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'après avoir saisi le tribunal administratif de Versailles de conclusions tendant à être garantie par les collectivités appelantes des condamnations prononcées à l'encontre des héritiers de M. X, dont elle était l'assureur, par la Cour d'appel de Paris dans son arrêt du 19 janvier 2000 qui précisait sans ambiguïté le montant des sommes en cause et l'amenait ainsi à chiffrer ses conclusions, la Mutuelle des Architectes Français a versé à la société d'HLM Terre et Famille, le 14 juin 2000, une somme de 262.064,64 euros et le 7 novembre 2001, une somme de 17.242,47 euros, le total correspondant à la quote-part non contestée des héritiers de M. X ; que ces derniers n'établissent pas ni même n'allèguent avoir été mis en cause par la société d'HLM Terre et Famille pour obtenir le versement des quote-part des sociétés Bateg et Chagnaud ; que, dans ces conditions, les conclusions de la Mutuelle des Architectes Français revêtaient le caractère d'une action subrogatoire et devaient, par suite, être regardées comme s'étant entièrement substituées à celles, de même objet, des héritiers de M. X ; que c'est dès lors à tort que le tribunal administratif de Versailles a accueilli partiellement les conclusions des héritiers de M. X et a rejeté pour irrecevabilité les conclusions de la Mutuelle des Architectes Français qui ne pouvaient être qualifiées d'intervention ; que le jugement attaqué doit, en conséquence, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la Mutuelle des Architectes Français devant le tribunal administratif de Versailles ;

Au fond :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des arrêts du 17 juin 1988 de la Cour d'appel de Versailles et du 19 janvier 2000 de la Cour d'appel de Paris ainsi que des rapports des experts désignés par l'autorité judiciaire lesquels, s'ils n'ont pas été établis contradictoirement avec les collectivités publiques mises en cause, constituent néanmoins des éléments d'appréciation pouvant être pris en compte par le juge administratif, que le permis de construire, délivré le 14 mai 1979 à la société d'HLM Terre et Famille par le préfet du Val-d'Oise, concernait un terrain constructible mais dont le caractère inondable était connu au moins de la commune ; que la création, par la commune, d'un terrain de sport établi sur un remblaiement a accru le ruissellement des eaux vers le terrain d'assiette des constructions autorisées lequel formait une cuvette topographique ; que le réseau d'assainissement de l'avenue de la République était manifestement insuffisant pour absorber, en cas d'orage, les eaux provenant de cette voie lesquelles se déversaient alors dans la cuvette précitée, circonstance établie, s'il en était besoin, par l'absence de ce type de ruissellement après que le réseau ait été renforcé ; qu'enfin, l'aménagement du ruisseau Croult ne permettait pas d'évacuer le débit des eaux en cas d'orage violent, circonstance établie également par la disparition des débordements après que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE eut procédé à la création de plusieurs bassins de retenue en amont ; que, de son côté, M. X ne pouvait ignorer ni les risques d'inondation du terrain dont il s'agit, ni les insuffisances des équipements publics de la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE, ni celles des aménagements du Croult ; qu'il s'est abstenu de prendre les précautions qui s'imposaient, s'agissant d'une construction réalisée sur un terrain inondable, quant au niveau des premiers locaux habitables ; qu'il n'a pas veillé, en sa qualité de maître d'oeuvre, à ce que les réseaux intérieurs de la résidence soient réalisés de telle sorte qu'en cas de crue du Croult les eaux de celui-ci ne soient pas refoulées par ces réseaux vers la résidence ; que la société d'HLM Terre et Famille, quant à elle, ne pouvait ignorer, en sa qualité de professionnel de l'immobilier, le caractère inondable du terrain ;

Considérant, en premier lieu, que la création, sans précautions particulières, d' un terrain de sport qui a accru le ruissellement des eaux de pluie vers le terrain d'assiette de la construction et le dimensionnement insuffisant du réseau d'assainissement de l'avenue de la République, incapable d'éviter l'envahissement de ce terrain par les eaux en provenant en cas d'orage, engagent la responsabilité de la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE à l'égard de la Mutuelle des Architectes Français qui a la qualité de tiers vis-à-vis de ces ouvrages publics qui ont concouru à la survenance des dommages ; qu'eu égard aux fautes commises par M. X et par la société d'H.L.M Terre et Famille, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en fixant à 20% le montant de la garantie due par la commune précitée à la Mutuelle des Architectes Français ;

Considérant, en second lieu, que la Mutuelle des Architectes Français a également la qualité de tiers vis-à-vis des travaux d'aménagement du ruisseau Croult dont les débordements ont concouru aux dommages ; que la responsabilité du SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE, chargé de ces travaux, est ainsi engagée à son égard ; qu'eu égard aux fautes commises, comme il vient d'être dit, par M. X et par la société d'H.L.M. Terre et Famille, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en fixant à 20% le montant de la garantie due par le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE à la Mutuelle des Architectes Français ;

Considérant, enfin, qu'en délivrant, sans l'assortir de prescriptions relatives aux précautions à prendre par le constructeur vis-à-vis des risques d'inondation, le permis de construire sollicité par la société d'H.L.M. Terre et Famille pour des constructions à édifier sur un terrain constructible alors que la commune, qui était la mieux à même de lui signaler les risques précités, avait émis un avis favorable, le préfet du Val d'Oise n'a commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de condamner la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE à verser, chacun, à la Mutuelle des Architectes Français une somme de 55 867,42 euros correspondant aux garanties définies ci-dessus ; que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 3 octobre 2002, date d'enregistrement du mémoire de la Mutuelle des Architectes Français les sollicitant pour la première fois ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la Mutuelle des Architectes Français , qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante vis-à-vis de la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et du SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE, soit condamnée à leur payer les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de condamner la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et le SYNDICAT INTERCOMMUNAL POUR L'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE à payer, chacun, à la Mutuelle des Architectes Français une somme de 750 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant, enfin, que les mêmes dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la Mutuelle des Architectes Français la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 863713 du 23 novembre 2001 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE sont condamnés à verser, chacun, à la Mutuelle des Architectes Français une somme de 55.867,42 euros. Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 3 octobre 2002.

Article 3 : La COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE et le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE verseront, chacun, à la Mutuelle des Architectes Français une somme de 750 euros au titre de l'article L761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la COMMUNE D'ARNOUVILLE LES GONESSE, du SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'AMENAGEMENT HYDRAULIQUE DES VALLEES DU CROULT ET DU PETIT ROSNE et de la Mutuelle des Architectes Français est rejeté.

NOS02VE00542... 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 02VE00542
Date de la décision : 04/11/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: M. Gildas DACRE-WRIGHT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : GENTILHOMME

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2004-11-04;02ve00542 ?
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