Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2021 par lequel le maire de Blauzac a refusé le permis de construire sollicité par M. B... le 7 septembre 2020 en vue de " la régularisation d'une extension de 36 m2 attenante à une maison d'habitation existante " sur les parcelles cadastrées section ... au lieu-dit " Mas de Terre Rouge ".
Par un jugement n° 2101000 du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. B... et Mme C... et a mis à leur charge une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 juin 2023, M. B... et Mme C..., représentés par Me Audouin, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 18 avril 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Blauzac du 26 janvier 2021 ;
3°) d'enjoindre au maire de Blauzac de leur délivrer un certificat de permis de construire tacite ou un permis de construire ou de réexaminer la demande de permis dans le délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Blauzac une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le tribunal administratif de Nîmes a dénaturé les faits de l'espèce en considérant que la demande de permis de construire ne tendait à régulariser que les travaux d'extension de la maison d'habitation, alors que ladite demande visait à régulariser l'ensemble des travaux réalisés précédemment sur la propriété sans permis de construire ; il en est résulté, de la part des premiers juges, une appréciation erronée des faits et une inexacte application de la règle de droit ;
- ils étaient bénéficiaires d'un permis de construire tacite dès lors que la demande de pièces manquantes datée du 2 octobre 2020 n'a pas été reçue dans le délai d'un mois et que les informations réclamées dans cette demande étaient, en outre, déjà présentes dans le dossier, de sorte que ladite demande n'a pas interrompu le délai d'instruction ; il suit de là que l'arrêté de refus en litige doit s'analyser comme portant retrait de ce permis tacite ; le retrait ainsi opéré est irrégulier faute d'avoir été précédé de la procédure contradictoire obligatoire à cet effet ;
- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction en ce qu'il considère que l'arrêté litigieux est suffisamment motivé tout en reconnaissant le caractère " obscur " de l'un des motifs invoqués par le maire, tiré de ce que le projet ne visait pas à rendre plus conforme l'ensemble du bâtiment, mais aggravait au contraire l'illégalité existante au regard des règles en vigueur ;
- l'arrêté contesté s'inscrit dans le contexte particulier de rancœurs locales et peut être regardé comme procédant d'un détournement de pouvoir de la part de la commune ;
- le maire a estimé à tort que le projet méconnaissait l'article A 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, s'agissant de la surface de plancher maximale prévue pour les extensions de l'existant, alors que l'ensemble des constructions situées sur le terrain étaient physiquement existantes à la date d'approbation de ce dernier plan, y compris les deux annexes mentionnées dans l'arrêté ; les premiers juges ont ajouté une condition au texte en exigeant que lesdites constructions aient également une existence légale pour être prises en compte ;
- le maire a opposé à tort les principes issus de la jurisprudence dite " Thalamy " dès lors que la demande de permis de régularisation ne portait pas que sur les travaux d'extension de la maison, mais sur l'ensemble des travaux réalisés irrégulièrement sur la propriété ; la commune pouvait, en outre, légalement régulariser l'ensemble des travaux en litige au regard des intérêts publics et privés en présence et compte tenu de la prescription de l'action pénale et civile ;
- le maire a considéré à tort que le projet méconnaissait l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme alors que le terrain n'est exposé qu'à un aléa inondation résiduel et que le projet n'augmente pas le nombre d'habitants ; il ne pouvait, par ailleurs, pas légalement se fonder sur le règlement du plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant aval du Gardon dès lors, d'une part, que ledit plan n'a pas de portée rétroactive, d'autre part, que ses prescriptions relatives à l'extension des logements existants en zone R-NU sont contradictoires avec celles du plan local d'urbanisme et, enfin, que le classement de la propriété en zone R-NU est illégal au regard des articles L. 562-1 et R. 562-3 du code de l'environnement car il ne correspond pas à la réalité du terrain, lequel est déjà urbanisé et devait donc être classé en zone constructible.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2023, la commune de Blauzac, représentée par la SELARL Territoires avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge solidaire de M. B... et Mme C... une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 4 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,
- et les observations de Me Chatron, représentant la commune intimée.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... et Mme C... ont acquis, par acte notarié du 3 février 2016, une propriété constituée d'une maison d'habitation en rez-de-chaussée et de plusieurs annexes, sur les parcelles cadastrées section (ANO)..., situées au lieu-dit " ... ", sur le territoire de la commune de Blauzac (Gard). Le maire de cette commune a dressé un procès-verbal d'infraction à la législation d'urbanisme à l'encontre des intéressés, le 7 juin 2016, après avoir constaté la réalisation d'une extension de la maison, d'une surface évaluée à environ 28 m2, sans obtention préalable d'un permis de construire et en méconnaissance du règlement du plan local d'urbanisme de la commune. Dans le cadre du litige initié par le maire devant le juge judiciaire sur la base de ce constat, un expert mandaté par la cour d'appel de Nîmes a confirmé, le 29 août 2019, qu'une extension de la maison, d'une emprise au sol de 36,68 m2, avait été réalisée à l'angle sud-est de cette dernière, postérieurement à l'acquisition de la propriété par M. B... et Mme C.... Le 7 septembre 2020, M. B... a déposé une demande de permis de construire en mairie de Blauzac pour " la régularisation d'une extension de 36 m2 attenante à une maison d'habitation existante " sur les parcelles susmentionnées. Par un arrêté pris le 26 janvier 2021, le maire de Blauzac a refusé de lui accorder ce permis. Par la présente requête, M. B... et Mme C... relèvent appel du jugement du 18 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande en annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Les appelants soutiennent que le jugement attaqué est entaché d'une dénaturation des faits de l'espèce, d'une appréciation erronée de ces mêmes faits, d'une inexacte application de la règle de droit et d'une contradiction de motifs. De tels moyens relèvent toutefois de l'office du juge de cassation et non de celui du juge d'appel, auquel il revient de se prononcer directement sur la légalité de l'arrêté de refus de permis de construire pris par le maire de Blauzac.
En ce qui concerne l'existence d'un permis de construire tacite :
3. L'article R. 423-19 du code de l'urbanisme, relatif à l'instruction des demandes de permis de construire, dispose que : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. ". Selon l'article R. 423-22 de ce code : " Pour l'application de la présente section, le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur (...) la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41. ". L'article R. 423-23 du même code précise que : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / (...) / b) Deux mois pour les demandes de permis de démolir et pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle (...) ou ses annexes ; / (...) ". Selon l'article R. 423-38 dudit code : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur (...) une lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...), indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes. ". Selon l'article R. 423-39 du même code : " L'envoi prévu à l'article R. 423-38 précise : / (...) / c) Que le délai d'instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie. ". L'article R. 423-41 de ce code prévoit que : " Une demande de production de pièce manquante notifiée après la fin du délai d'un mois prévu à l'article R. 423-38 ou ne portant pas sur l'une des pièces énumérées par le présent code n'a pas pour effet de modifier les délais d'instruction définis aux articles R. 423-23 à R. 423-37-1 et notifiés dans les conditions prévues par les articles R. 423-42 à R. 423-49. ". Selon l'article R. 423-47 dudit code : " Lorsque les courriers sont adressés au demandeur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, l'intéressé est réputé en avoir reçu notification à la date de première présentation du courrier. ". Enfin, aux termes de l'article R. 424-1 de ce code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : / (...) / b) Permis de construire, permis d'aménager ou permis de démolir tacite. / (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que, par une lettre du 2 octobre 2020, le maire de Blauzac a invité M. B... à compléter son dossier de demande de permis de construire en indiquant les références des parcelles cadastrales dans le formulaire de demande et en produisant l'attestation de conformité du système d'assainissement non collectif. D'une part, la commune a produit à l'instance l'avis de réception de cette lettre dont il ressort qu'elle a été présentée à l'adresse des requérants le 5 octobre 2020, soit avant l'expiration du délai d'un mois prévu par l'article R. 423-22 du code de l'urbanisme, lequel arrivait à son terme le 7 octobre 2020. D'autre part, il résulte de l'article R. 423-41 du même code qu'une demande de pièces manquantes portant sur les pièces pouvant être exigées en application du livre IV de ce code fait obstacle à la naissance d'un permis tacite à l'expiration du délai d'instruction. En l'espèce, la demande de pièces établie par le maire portait sur des éléments exigés respectivement par le c) de l'article R. 431-5 et le d) de l'article R. 431-16 dudit code. Par suite et alors même que ces éléments n'auraient pas été utiles au cas présent, la lettre susmentionnée du 2 octobre 2020 a valablement interrompu le délai d'instruction de la demande de permis de construire, lequel a couru, pour une période de deux mois, à compter de la réception des pièces le 18 décembre 2020 et n'était ainsi pas expiré lors de l'édiction de l'arrêté litigieux le 26 janvier 2021. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de la naissance d'un permis de construire tacite et l'arrêté contesté ne peut donc s'analyser comme procédant au retrait d'un tel acte. Il s'ensuit que l'intervention de cet arrêté n'avait pas être précédée de la procédure contradictoire préalable prescrite par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.
En ce qui concerne les motifs de refus opposés par la commune :
5. Il ressort des termes de l'arrêté en litige que, pour refuser le permis de construire sollicité par M. B..., le maire de Blauzac a considéré, d'une part, que les travaux sur lesquels portait la demande de permis n'étaient pas autorisés par l'article A 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, d'autre part, que la demande de permis en cause ne portait pas sur l'ensemble des travaux irrégulièrement réalisés sur la construction ni ne visait à rendre cette dernière plus conforme aux règles d'urbanisme en vigueur et, enfin, que le projet présenté méconnaissait tant l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme que les prescriptions du plan de prévention des risques naturels d'inondation du bassin versant aval du Gardon.
6. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou la décision d'opposition à déclaration préalable ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. / Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables : / (...) / 5° Lorsque la construction a été réalisée sans qu'aucun permis de construire n'ait été obtenu alors que celui-ci était requis ; / (...) ". Lorsqu'une construction a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de présenter une demande d'autorisation portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé. Il en va ainsi même dans l'hypothèse où les éléments de construction résultant de ces nouveaux travaux ne prennent pas directement appui sur une partie de l'édifice réalisée sans autorisation.
7. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles de M. B... et Mme C... supportaient, lorsqu'ils les ont acquises, une maison d'habitation et trois bâtiments annexes au nombre desquels un garage. Il en ressort également et il n'est au demeurant pas contesté que la maison est issue de la modification d'un ancien mazet qui a fait l'objet de plusieurs extensions présentant une emprise au sol supérieure à 20 m2 chacune, réalisées sans permis de construire par les précédents propriétaires de ce bien. Le maire de Blauzac a relevé dans l'arrêté litigieux que la demande de permis de construire de M. B... ne portait pas sur l'ensemble des travaux irréguliers réalisés antérieurement sans autorisation sur la construction en cause. Si les requérants soutiennent que ladite demande visait au contraire à régulariser la totalité des travaux exécutés précédemment sans permis, une telle allégation se trouve contredite non seulement par les termes mêmes du formulaire rempli par le pétitionnaire, lequel décrit la demande comme ne portant que sur " la régularisation d'une extension de 36 m2 attenante à une maison d'habitation existante ", mais également par les mentions figurant sur la notice architecturale et les plans de masse et de façades annexés à cette même demande, lesquelles confirment que le permis n'a été sollicité que pour régulariser les travaux d'extension les plus récents, tels qu'ils avaient été constatés dans le procès-verbal d'infraction du 7 juin 2016 visé au point 1 du présent arrêt. Il en résulte que c'est à bon droit que le maire a opposé à M. B... la circonstance que la demande de permis ne portait pas sur les extensions antérieures de la maison réalisées sans permis de construire.
8. En deuxième lieu, selon l'article A 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Blauzac approuvé le 1er février 2012 et modifié le 5 décembre 2017, applicable à la zone agricole A et, en particulier, au secteur As dans lequel se situe le terrain d'assiette des travaux litigieux : " Occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières : / Sont autorisés sous conditions, en dehors de la zone inondable : / (...) / Dans les secteurs As, Ap et Asp : / (...) / - L'extension (en contiguïté) des constructions d'habitation existantes à la date d'approbation du PLU d'au moins 70 m2 de surface de plancher, dans la limite de 30 % de la surface de plancher existante et de 200 m2 de surface de plancher totale après extension ; cette possibilité ne s'applique pas aux bâtiments repérés en raison de leur intérêt architectural ou patrimonial et pouvant faire l'objet d'un changement de destination ; / (...) ".
9. Il résulte des termes mêmes de l'article A 2 du règlement du plan local d'urbanisme précité que la limite de 30 % de la surface de plancher existante qu'il prévoit pour les extensions susceptibles d'être autorisées en secteur As doit être calculée sur la base de la seule surface de plancher de la construction à usage d'habitation existante, sans prendre en compte la surface de plancher des bâtiments annexes à cette construction. Il s'ensuit que les requérants ne peuvent, en toute hypothèse, pas valablement se prévaloir, pour justifier du respect du seuil de 30 % ainsi imposé, de la surface de plancher de deux bâtiments annexes implantés sur leurs parcelles. Dès lors que la surface de plancher de la maison d'habitation existante s'élève à seulement 80 m2 selon les indications de la notice produite avec la demande de permis et alors, au surplus, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 du présent arrêt qu'une partie de cette surface n'a pas été régulièrement autorisée, l'extension en litige, représentant une surface de plancher de 36 m2, ne respecte pas la limite de 30 % prescrite par le plan local d'urbanisme. Par voie de conséquence, le maire de Blauzac a pu légalement refuser le permis de construire sollicité par l'appelant en se fondant sur ce que les travaux méconnaissaient l'article A 2 du règlement de ce plan.
10. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / (...) ".
11. Selon l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Il appartient à l'autorité administrative compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte de la probabilité de réalisation de ces risques ainsi que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.
12. Selon l'article 1er du règlement du plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant aval du Gardon approuvé par le préfet du Gard le 16 septembre 2016, applicable à la zone " non urbaine inondable par aléa résiduel " dite " R-NU " au sein de laquelle se situe l'extension de l'habitation en litige : " Sont interdits, à l'exception des travaux, constructions, aménagements, ouvrages ou installations qui font l'objet de prescriptions obligatoires dans l'article 2 suivant : / 1) les constructions nouvelles, à l'exception de celles citées à l'article suivant, et notamment : / (...) / 1c) l'extension de l'emprise au sol supérieure à 20 m2 supplémentaires des locaux d'habitation existants, à l'exception de celles citées à l'article suivant ; / (...) ". L'article 2 du même règlement dispose que : " Sont admis sous conditions dans la zone R-NU : / Article 2-1 : Constructions nouvelles : / (...) / c) l'extension de l'emprise au sol des locaux de logement existants est admise dans la limite de 20 m2 supplémentaires, sous réserve que la surface du plancher aménagé soit calée à la cote TN + 30 cm. Dans le cas de locaux de logement existants disposant d'un étage accessible, l'extension pourra être autorisée au niveau du plancher existant (...), dans la limite de 20 m2 d'emprise au sol. / (...) ".
13. D'une part, les prescriptions du plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant aval du Gardon approuvé le 16 septembre 2016 sont opposables à la demande de permis de construire présentée par M. B... le 7 septembre 2020, alors même que celle-ci tend à la régularisation de travaux réalisés avant l'entrée en vigueur de ce plan. Le plan de prévention des risques peut, en outre, légalement prescrire, au regard de l'objectif de sécurité publique qu'il poursuit, des règles de constructibilité plus strictes que celles prévues par le plan local d'urbanisme d'une commune comprise dans son périmètre, si bien que les appelants ne peuvent utilement invoquer le caractère " contradictoire " de ces deux documents s'agissant de la surface maximale des extensions des habitations existantes. Le classement des parcelles des requérants en zone " non urbaine " par le plan de prévention des risques ne procède, par ailleurs, pas d'une appréciation manifestement erronée, dès lors que ces parcelles sont situées dans un vaste secteur naturel à l'écart de la partie urbanisée de la commune, ne comportant aucun autre bâtiment que ceux des intéressés. Par conséquent, les appelants n'établissent pas l'illégalité des prescriptions du plan de prévention des risques sur lesquelles le maire a fondé son refus.
14. D'autre part, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la demande de permis litigieuse porte sur la régularisation de l'extension d'une maison d'habitation représentant une surface de plancher supplémentaire de 36 m2 et, partant, une emprise au sol supplémentaire nécessairement supérieure à ce chiffre, laquelle a été évaluée à 36,68 m2 par l'expert judiciaire mandaté par la cour d'appel de Nîmes ainsi qu'il a été rappelé au point 1. L'extension en litige présente ainsi une emprise au sol excédant la limite maximale de 20 m2 prévue par les articles précités du règlement du plan de prévention des risques d'inondation en zone " R-NU " et c'est, par suite, à juste titre que le maire a considéré que les travaux faisant l'objet de la demande de permis méconnaissaient les prescriptions de ce plan. Enfin, pour les mêmes motifs, le maire n'a pas fait une inexacte application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en retenant que ces travaux étaient de nature à porter atteinte à la sécurité publique au sens de cet article.
15. En quatrième lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le refus de permis litigieux aurait été motivé par l'existence de rancœurs locales liées aux conditions d'achat de la propriété par les appelants. Le détournement de pouvoir allégué n'est ainsi pas établi.
16. Lorsque le juge d'appel estime qu'un des motifs du refus en litige est fondé et que l'administration aurait pris la même décision si elle avait retenu ce seul motif, il peut rejeter les conclusions tendant à l'annulation de cette décision et rejeter la demande portée devant lui sans être tenu de se prononcer sur les moyens ne se rapportant pas à la légalité de ce motif de refus. En l'espèce, si l'arrêté de refus de permis est également fondé sur ce que les travaux en litige ne viseraient pas à rendre le bâtiment plus conforme aux règles d'urbanisme, il résulte de l'instruction que le maire aurait pris la même décision de refus s'il avait uniquement retenu les motifs tenant à ce que, d'une part, la demande de permis ne portait pas sur l'ensemble des travaux irrégulièrement réalisés, d'autre part, les travaux en cause n'étaient pas conformes à l'article A 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune et, enfin, lesdits travaux méconnaissaient l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et les articles 1er et 2 du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation du bassin versant aval du Gardon, lesquels motifs suffisaient à justifier un tel refus ainsi qu'il a été exposé aux points précédents.
17. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 janvier 2021.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
18. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par les requérants et n'implique, par suite, aucune mesure d'exécution particulière au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par les intéressés aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de la commune de Blauzac, laquelle n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque à verser aux appelants au titre des frais exposés par ces derniers et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge solidaire de M. B... et Mme C... une somme de 1 500 euros à verser à la commune intimée en application de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... et Mme C... est rejetée.
Article 2 : M. B... et Mme C... verseront solidairement une somme de 1 500 euros à la commune de Blauzac au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., Mme A... C... et à la commune de Blauzac.
Délibéré après l'audience du 7 juillet 2025, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Teulière, président assesseur,
M. Jazeron, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juillet 2025.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
D. Chabert
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet du Gard, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23TL01405