Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2300891 du 25 janvier 2024, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 février 2024 et 28 mars 2025, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Chambaret, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 25 janvier 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 8 septembre 2022 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne les moyens communs aux décisions attaquées :
- les décisions attaquées ont été prises en méconnaissance de son droit d'être entendu.
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- la décision est entachée d'un vice de procédure dès lors que le requérant ne s'est pas vu communiquer la notice explicative l'informant de la procédure à suivre prévue par l'article 1er de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;
- la décision est insuffisamment motivée en droit comme en fait ;
- la décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation dès lors, premièrement, qu'en ce qui concerne sa demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " il fait état de ce que son admission est justifiée par des considérations humanitaires, deuxièmement, qu'en ce qui concerne sa demande de titre de séjour portant la mention " étudiant " le préfet n'a pas pris en compte les conditions dans lesquelles se déroulent ses études et les résultats qu'il a obtenus.
- elle méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 mars 2025, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mars 2025.
Par une ordonnance du 4 mars 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er avril 2025 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 relatif au séjour et à l'emploi ;
- l'accord franco-marocain du 10 novembre 1983 relatif à la circulation des personnes ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Faïck, président-rapporteur
- et les observations de Me Chambaret, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 7 mai 2003, entré en France le 10 février 2020, relève appel du jugement du 25 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 septembre 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi.
Sur les moyens communs aux décisions attaquées :
2. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient donc aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause. En outre, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision.
3. Si le requérant invoque l'atteinte à son droit à être entendu garanti par les principes généraux du droit de l'Union Européenne, il ne pouvait, en raison même de l'accomplissement de sa démarche tendant au bénéfice d'un titre de séjour, ignorer qu'il pouvait se voir opposer un refus qui serait suivi d'une obligation de quitter le territoire français. Il lui appartenait ainsi, à l'occasion du dépôt et de l'instruction de sa demande, de produire tous éléments utiles permettant à l'administration de se prononcer en connaissance de cause. M. B... n'établit ni même n'allègue avoir été empêché de faire valoir ses observations ou sollicité, en vain, un entretien avec les services préfectoraux. Par ailleurs, le droit d'être entendu n'implique pas l'obligation, pour le préfet, d'entendre l'étranger spécifiquement au sujet de l'obligation de quitter le territoire français qu'il envisage de prendre après s'être prononcé sur le droit au séjour à l'issue d'une procédure ayant respecté son droit d'être entendu. Par suite, le moyen ainsi soulevé doit être écarté.
Sur le refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, à l'appui de ses moyens tirés de ce que le préfet n'a pas motivé sa décision et s'est abstenu de procéder à un examen particulier de sa situation médicale, M. B... ne se prévaut, devant la cour, d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant les premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué.
5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'arrêté en litige, que le préfet de la Haute-Garonne a suffisamment pris en compte la situation personnelle de M. B... en tant que celui-ci demandait un titre de séjour portant la mention " étudiant ". Il a précisé, dans les motifs de sa décision, que M. B... ne détenait pas de visa de long séjour et que sa situation ne justifiait pas qu'il soit, à titre dérogatoire, faute de nécessité particulière liée au déroulement de ses études, dispensé du respect de cette condition. Ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... doit être écarté.
6. En troisième lieu, l'article 1er de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévoit que " le préfet du lieu où l'étranger a sa résidence habituelle lui remet un dossier comprenant une notice explicative l'informant de la procédure à suivre et un certificat médical vierge, dont le modèle type figure à l'annexe A ".
7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait reçu la notice explicative prévue par les dispositions précitées. Toutefois, il n'est pas établi que la méconnaissance de cette formalité aurait privé M. B... d'une garantie ou qu'elle aurait eu une influence sur l'avis rendu par le collège de médecins et, par suite, sur le sens de la décision contestée. Dans ces conditions, le vice tiré de l'irrégularité de la procédure suivie n'est pas susceptible d'entraîner l'annulation de la décision attaquée.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. (...). / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ". Par ailleurs, en vertu des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une obligation de quitter le territoire français ne peut être légalement prise à l'encontre d'un étranger dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. (...) ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical (...) un collège de médecins (...) émet un avis (...) précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. (...) L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".
9. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
10. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis rendu le 1er août 2022 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé au Maroc, ce dernier peut y bénéficier d'un traitement approprié. M. B..., atteint d'achondroplasie et de troubles de l'apprentissage, ne produit pas au dossier d'éléments permettant d'estimer qu'il ne pourrait effectivement accéder, dans son pays d'origine, aux soins médicaux que requiert son état de santé. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prononçant à son encontre un refus de titre de séjour et une obligation de quitter le territoire. Pour les mêmes motifs, il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. B... avant de prendre les décisions attaquées.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie pour information en sera délivrée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2025 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2025.
Le président-assesseur,
P. Bentolila
Le président-rapporteur,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 24TL00503 2