Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 3 novembre 2021 par laquelle la Commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a rejeté son recours préalable obligatoire concernant le refus d'extension de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée lui permettant d'exercer l'activité d'agent cynophile. Il a également demandé au tribunal administratif d'annuler la décision du 20 septembre 2022 par laquelle le directeur du Conseil national des activités privées de sécurité a refusé le renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité privée.
Par un jugement n° 2200004, 2205818 du 7 juin 2023, le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions précitées des 3 novembre 2021 et 20 septembre 2022 du directeur du Conseil national des activités privées de sécurité, et a enjoint à ce dernier, sous réserve d'un changement de circonstances de droit ou de fait, de renouveler la carte professionnelle d'agent de sécurité privée de M. D..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2023, le Conseil national des activités privées de sécurité, représenté par Me Claisse, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 juin 2023 ;
2°) de rejeter les demandes de M. D... tendant à l'annulation des décisions du
3 novembre 2021 et du 20 novembre 2022 ;
3°) de mettre à la charge de M. D... le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
- il n'est pas établi que la minute du jugement soit revêtue des signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
En ce qui concerne le bien-fondé de ce jugement :
- la décision du 20 septembre 2022 est signée par M. C... B..., délégué territorial de la délégation Sud-Ouest qui a reçu, par la décision du 9 septembre 2022 portant délégation de signature, délégation pour signer au nom du Conseil national des activités privées de sécurité les actes relatifs à l'instruction des demandes de cartes professionnelles et autres autorisations prévues au livre VI du code de la sécurité intérieure ;
- le comportement de M. D... est incompatible avec l'exercice de la profession envisagée d'agent cynophile compte tenu, d'une part, de sa qualité d'auteur des faits de violences avec incapacité n'excédant pas huit jours en présence d'un mineur sur sa compagne commis le 4 mai 2020, et, d'autre part, pour des faits de détention sans déclaration d'arme et munitions de catégorie C constatés le 15 mai 2020 pour lesquels il a été condamné le
9 juillet 2020 par le tribunal correctionnel de Toulouse à une peine de huit mois d'emprisonnement assorti d'un sursis probatoire de deux ans ;
- la gravité particulière des faits de violences commis sur sa concubine est d'autant plus accentuée que l'intéressé s'était précédemment vu délivrer une carte professionnelle et avait connaissance des règles strictes encadrant l'exercice de l'activité d'agent de sécurité privée ;
- dans l'appréciation du comportement de M. D..., il ne doit être pris en compte ni le caractère isolé des faits délictueux, ni la non-inscription de ces faits au bulletin n° 2 du casier judiciaire, ni la circonstance qu'au cours des emplois précédemment occupés, ce dernier ait donné entièrement satisfaction.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2023, M. D..., représenté par Me Thalamas, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce qu'il soit mis à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable dès lors que la qualité à agir de l'appelant n'est pas justifiée ;
- le jugement attaqué qui respecte les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, est régulier ;
- la décision du 20 septembre 2022, qui méconnaît les dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, est entachée d'irrégularité dès lors que cette décision ne comporte ni les nom et prénom, ni la délégation territoriale dont relève son signataire, qui ne peut ainsi être identifié avec précision ; ce vice, qui présente un caractère substantiel, méconnaît une garantie ;
- les décisions en litige sont entachées d'une erreur d'appréciation ; les faits de violences conjugales commis le 4 mai 2020 présentent un caractère isolé et s'inscrivent dans un contexte particulier de séparation conjugale ; de plus, ces faits n'ont pas été inscrits au bulletin
n° 2 de son casier judiciaire ; dans le cadre professionnel, il ne peut lui être reproché aucun antécédent ou signalement.
Par une ordonnance du 25 mars 2025, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 10 avril 2025 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Beltrami, première conseillère,
- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique
- et les observations de Me Mireté substituant Me Claisse pour le Conseil national des activités privées de sécurité et celles de Me Thalamas, représentant M. D...
Considérant ce qui suit :
1. M. D... était titulaire d'une carte professionnelle l'autorisant à exercer les activités d'agent cynophile de sécurité privée avec un chien identifié sous le numéro 250269602641127, valable jusqu'au 26 septembre 2022. Le 15 février 2021, il a sollicité l'extension de sa carte professionnelle pour y ajouter un nouveau chien, identifié sous le numéro 250268731591472, auprès de la commission locale d'agrément et de contrôle Sud-Ouest du Conseil national des activités privées de sécurité. Par une décision du 7 juin 2021, la commission locale d'agrément et de contrôle Sud-Ouest a rejeté sa demande. Par un courrier du 28 juillet 2021, M. D... a formé un recours administratif préalable obligatoire contre cette décision devant la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité qui a été rejeté par une décision du 3 novembre 2021. Par ailleurs, le 3 juillet 2022, M. D... a sollicité le renouvellement de sa carte professionnelle. Sa demande a été rejetée par une décision du 20 septembre 2022 de la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité. Le Conseil national des activités privées de sécurité relève appel du jugement du 7 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 3 novembre 2021 de la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité et la décision du 20 septembre 2022 du directeur de cet organisme.
Sur la fin de non-recevoir opposée en défense
2. D'une part, aux termes de l'article R. 632-3 du code de la sécurité intérieure : " Le conseil d'administration (...) règle par ses délibérations les affaires de l'établissement, notamment sur les matières suivantes : (...) 10° Les actions en justice (...). Le conseil d'administration peut déléguer au directeur du Conseil national des activités privées de sécurité certaines des attributions prévues aux 8°, 9° et 10° lorsque le montant financier engagé se situe en dessous d'un seuil qu'il détermine. (...) ". Aux termes de l'article R. 632-13 du même code : " Le directeur assure, conformément aux orientations définies par le conseil d'administration, la direction et la gestion du Conseil national des activités privées de sécurité. A ce titre : (...) 10° Il représente l'établissement en justice et dans les actes de la vie civile. ". Il résulte de ces dispositions combinées que pour représenter en justice le Conseil national des activités privées de sécurité, le directeur doit bénéficier d'une délégation accordée par une délibération du conseil d'administration de cet établissement.
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 612-1 du code de justice administrative : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / (...) La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article R. 611-7 ".
4. Une irrecevabilité tirée du défaut de mandat de représentation de la personne morale ayant introduit la requête n'est plus régularisable après la clôture de l'instruction si rien ne faisait obstacle à ce qu'elle le soit avant cette clôture.
5. Selon l'article R. 611-1 du code de justice administrative, la requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties dans des conditions définies, notamment, par l'article R. 611-3 de ce code. Aux termes de cet article : " Les décisions prises pour l'instruction des affaires sont notifiées aux parties (...). La notification peut être effectuée au moyen de lettres simples. / Toutefois, il est procédé aux notifications de la requête, des demandes de régularisation, des mises en demeure, des ordonnances de clôture, des décisions de recourir à l'une des mesures d'instruction prévues aux articles R. 621-1 à R. 626-3 ainsi qu'à l'information prévue à l'article R. 611-7 au moyen de lettres remises contre signature ou de tout autre dispositif permettant d'attester la date de réception (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge administratif d'inviter l'auteur d'une requête entachée d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte en cours d'instance à la régulariser et qu'il doit être procédé à cette invitation par lettre remise contre signature ou par tout autre dispositif permettant d'attester la date de réception. La communication au requérant par lettre simple d'un mémoire en défense soulevant une fin de non-recevoir ne saurait, en principe, dispenser le juge administratif de respecter l'obligation ainsi prévue, à moins qu'il ne soit établi que le mémoire en défense a été reçu par l'intéressé.
6. Il ressort des pièces de la procédure d'appel que dans son mémoire en défense du
15 novembre 2023, M. D... a opposé à la requête d'appel une fin de non-recevoir tirée de ce que le Conseil national des activités privées de sécurité n'indiquait pas la qualité de la personne le représentant en justice et ne justifiait pas de la qualité à agir en justice de ce dernier. Alors qu'il ressort des pièces de la procédure, enregistrées dans l'application informatique dédiée, que le Conseil national des activités privées de sécurité a effectivement réceptionné le 17 novembre 2023 le mémoire en défense de M. D..., il ne justifie pas avoir régularisé sa requête en produisant la délibération de son conseil d'administration autorisant son directeur à représenter l'établissement alors qu'au surplus, la requête est seulement signée par l'avocat sans que n'y soit mentionné que le Conseil national des activités privées de sécurité est représenté par son directeur. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée en défense doit être accueillie.
7. Il en résulte que la requête d'appel présentée par le Conseil national des activités de sécurité privée doit être rejetée comme irrecevable.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions du Conseil national des activités privées de sécurité,
M. D... n'étant pas la partie perdante dans la présente instance.
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité une somme de 1 500 euros sur le fondement de ces dispositions.
DÉCIDE:
Article 1er : La requête du Conseil national des activités privées de sécurité est rejetée.
Article 2 : Le Conseil national des activités privées de sécurité versera à M. D... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Conseil national des activités privées de sécurité et à M. A... D....
Délibéré après l'audience du 24 juin 2025 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président de chambre,
M. Bentolila, président assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2025.
La rapporteure,
K. Beltrami
Le président,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01595