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10/06/2025 | FRANCE | N°23TL01048

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 10 juin 2025, 23TL01048


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

La société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le département des Pyrénées-Orientales à lui verser la somme totale de 2 020 387 euros hors taxes au titre du solde du marché du lot n° 2 " gros œuvre et charpente " de l'opération de construction et de rénovation du collège de Millas.

Par un jugement n° 1905583 du 9 mars 2023 , le tribunal administratif de Montpellier a condamné le département des P

yrénées-Orientales à verser à la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon la som...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le département des Pyrénées-Orientales à lui verser la somme totale de 2 020 387 euros hors taxes au titre du solde du marché du lot n° 2 " gros œuvre et charpente " de l'opération de construction et de rénovation du collège de Millas.

Par un jugement n° 1905583 du 9 mars 2023 , le tribunal administratif de Montpellier a condamné le département des Pyrénées-Orientales à verser à la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon la somme de 612 042,87 euros au titre des pénalités et la somme de 58 212 euros toutes taxes comprises au titre de la retenue restituée, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande, et à mis à sa charge les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 5 523,34 euros toutes taxes comprises.

Par une requête, enregistrée le 5 mai 2023, et un mémoire du 27 janvier 2025, la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon, représentée par Me Salesse, relève appel du jugement du 9 mars 2023, en ce qu'il ne fait pas droit à l'intégralité de ses conclusions et demande à la cour :

1°) de condamner le département des Pyrénées-Orientales à lui verser :

- la somme de 315 709, 36 euros toutes taxes comprises au titre du solde du marché, avec intérêts moratoires à compter du 17 janvier 2017 et ce après restitution des sommes indument retenues par le département à hauteur de 96 857,30 euros toutes taxes comprises ;

- la somme de 1 364 029,70 euros toutes taxes comprises au titre de l'incidence du retard dans la fourniture des plans d'exécution et de la rémunération des quantités supplémentaires réalisées, assortie des intérêts moratoires à compter du 17 janvier 2017 ;

2°) de mettre à la charge du département des Pyrénées-Orientales la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

La société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon soutient que :

Sur les conclusions tendant au paiement de travaux supplémentaires :

En ce qui concerne la quantité de béton mis en œuvre :

- en ce qui concerne la quantité de béton qu'elle a dû mettre en œuvre pour l'exécution du lot n°2 " gros œuvre - charpente " qui lui a été attribué, son offre a été présentée sur la base du dossier de consultation des entreprises, lequel comportait des plans incomplets, alors que les quantités qu'elle avait annoncées dans la décomposition du prix global et forfaitaire (DPGF) étaient, à 5 % près, exactes ; à la date de l'appel d'offres, les plans EXE n'avaient pas été fournis, contrairement à ce qu'imposait le marché de prestations intellectuelles ; les plans du dossier de consultation des entreprises divergeaient des plans EXE, ce qui a entraîné la réalisation de quantités supplémentaires de béton à hauteur de 511 013 euros hors taxes ;

- les cubatures des fondations et les moyens d'exécution devant être mis en œuvre ont été estimés sur la base du dossier de consultation des entreprises et de la décomposition du prix global et forfaitaire (DPGF), si bien que les plans EXE qui ont été fournis lors de l'exécution du chantier, et qui imposaient la mise en œuvre de quantités de béton supérieures à celles qui étaient prévues à l'origine, ont entraîné pour elles des difficultés et des retards dans l'exécution de ses prestations qui ne lui sont pas imputables, ; ainsi, la surface au sol des fondations représentée sur les plans de structure EXE est de 1 032 m2, alors qu'elle n'est que de 793 m2, sur les plans du DCE, ce qui représente un écart supérieur à 30 % en surface et de 40 % en volume, alors que l'écart est encore augmenté de 200 m3 du fait de la nécessité d'approfondir certaines assises de fondations pour tenir compte du conflit entre les descentes de charge ; la production tardive de documents a nécessité un travail en urgence, a perturbé la chaîne d'approvisionnement, et a parfois entraîné l'arrêt du chantier, du fait notamment de la nécessité de recourir à des engins adaptés à la masse de béton devant être coulée et enfin des surcoûts liés à la mise en œuvre des plans d'exécution ;

- contrairement à ce qu'impose l'article 28.2.3 du cahier des clauses administratives générales, le calendrier d'exécution ne lui a pas été notifié ; Eiffage a établi, le 7 mai 2014, un planning prenant en compte les décalages d'exécution du chantier de quatre semaines, qui étaient connus, et prévoyant la fin des travaux de gros œuvre le 19 décembre 2014 ; l'OPC a transmis un planning de remise des études et un planning d'exécution non renseignés ; Eiffage a établi, le 16 mai 2014, un planning de remise des plans EXE nécessaire au respect des plannings d'exécution, mais ce planning ne sera pas respecté par le maître d'œuvre et le maître d'ouvrage ; ce dernier a dès lors manqué à ses obligations de contrôle et de direction du chantier ; il ressort du compte-rendu de chantier n° 42 du 6 janvier 2015 que le gros œuvre était achevé sur certains bâtiments, mais interrompu pour d'autres en raison de l'absence de fourniture des plans EXE par le bureau d'études BET et par l'inertie des maîtres d'œuvre d'exécution ; les conséquences des retards sur l'exécution des travaux sur les différents bâtiments sont exposées ci-après :

- concernant le bâtiment G, le 9 juillet 2014, Eiffage a informé la maîtrise d'œuvre que son équipe était arrêtée en l'absence de réalisation par le titulaire du lot " Plomberie " des réseaux sous le dallage du bâtiment ; le coût journalier de cette interruption s'élève à 3 000 euros ; la durée d'interruption de ce chantier subie par Eiffage, a été de trois jours, du 8 au 10 juillet 2014 ; par ailleurs, Eiffage a dû interrompre ses travaux à compter du 23 juillet 2014, concernant les équipes " fondation " sur les bâtiments A et B, en raison de la réception tardive du plan d'armature et de l'absence de réception de certains plans, ce qui entraînera un arrêt de chantier de 7 jours sur le bâtiment A et de 10 jours sur le bâtiment B, soit un total de 17 jours ; Eiffage a dû également interrompre ses travaux à compter du 9 septembre 2014, concernant l'équipe " Elévation " pour le bâtiment B, en raison de la réception tardive du plan d'armature et de l'absence de réception de ces armatures, ce qui entraînera un arrêt de chantier de 6 jours ; les travaux d'Eiffage ont aussi été interrompus à compter du 12 septembre 2014, concernant l'équipe " Elévation " du bâtiment A, en raison de la réception tardive du plan d'armature, de l'absence de réception de ces armatures, du fait également qu'elle a constaté que les épaisseurs des murs avaient changé sur les plans d'exécution, sans qu'elle en ait été informée ; cette situation l'a contrainte à commander de nouveaux mannequins, ce qui entraînera un arrêt de chantier de 7 jours et une immobilisation de l'équipe d'élévation de 5 jours;

- l'équipe " Elévation R+ 1 " du bâtiment E " de la société Eiffage a dû interrompre ses prestations le 26 septembre 2014 en raison, là encore, de la réception tardive du plan d'armature, de l'absence de réception de ces armatures, ce qui entraînera un arrêt de chantier de 17 jours et un arrêt de l'équipe d'élévation de 11 jours ;

- Eiffage a aussi été arrêtée à compter du 12 novembre 2014, l'équipe " Libage " de la société Eiffage a dû interrompre ses prestations pour le bâtiment TC4 à compter du 12 novembre 2014, pour les mêmes raisons que précédemment exposées, ce qui entraînera un arrêt de chantier de 6 jours et un arrêt de l'équipe de 4 jours ;

- l'équipe Poteaux/Elévation du bâtiment F de la société Eiffage a interrompu ses prestations à compter du 28 octobre 2014, en raison de la réception tardive du plan d'armature, de l'absence de réception des plans d'exécution, puis de la réception de plans d'exécution incomplets, ce qui entraînera un arrêt du chantier de 73 jours calendaires et un arrêt de l'équipe d'élévation Bat F de 50 jours ;

- par ailleurs, en ce qui concerne le décalage des ouvrages de gros œuvre, pour ce qui est de la réalisation de la rampe et de la fondation et du dallage entre le bâtiment C et la chaufferie, ces travaux ont subi un décalage d'intervention de 256 jours et l'équipe a été arrêtée 17 jours ;

- pour ce qui est de la réalisation des dallages extérieurs, ces travaux ont subi un décalage d'intervention de 213 jours et l'équipe a été arrêtée 2 jours ;

- Eiffage a par ailleurs subi, pour les travaux de réalisation des passerelles du fait notamment de l'absence de remise des plans d'exécution, un décalage d'intervention de 198 jours ;

- pour ce qui est des travaux de réalisation de l'auvent de l'entrée du collège, du fait notamment de l'absence de remise des plans d'exécution, les travaux ont subi un décalage d'intervention de 194 jours ;

- Eiffage a par ailleurs subi un arrêt de chantier pour la production du mur de pierres, ce qui n'a permis la finition des ouvrages de parement en pierres qu'à compter du 15 juillet 2015 ;

- Eiffage a par ailleurs subi un allongement de chantier du fait de la mise en place de contreventements dans les poutres du gymnase, lesquels n'étaient pas prévus par le marché et ont été décidés en cours de chantier, par le maître d'ouvrage, le 18 juin 2015 ; les plans d'exécution ont été remis tardivement, alors qu'Eiffage a par ailleurs signalé à la maîtrise d'œuvre la présence de coffres placo à l'endroit où devaient être placées les platines de contreventement empêchant la réalisation des travaux ; le 12 octobre 2015 (devis 35) Eiffage a présenté l'incidence financière liée à ces retards et à ces prolongations de délai ; les conditions d'exécution du chantier ont donc été bouleversées du fait du maître d'œuvre et du manque de diligence du maître d'ouvrage qui n'est jamais intervenu pour imposer à la maîtrise d'œuvre le respect de ses obligations ;

- elle conteste les pénalités qui lui ont été appliquées à hauteur de la somme de 507 573,95 euros dès lors qu'elle ne pouvait réaliser ses prestations conformément au planning détaillé d'exécution, ses équipes ayant été régulièrement arrêtées, ce qui a entraîné une désorganisation du chantier et des retards ; les pénalités de 80 jours de retard dans la réalisation du chantier qui lui ont été appliquées ne reposent sur aucun calcul précis et ne font pas référence au planning ni aux tâches qui auraient été effectuées tardivement ; les retards, ainsi que l'indiquent les comptes-rendus de l'OPC, et comme il est mentionné dans le procès-verbal des opérations préalables à la réception, sont imputables au BET Bascou dans la fourniture des plans d'exécution, ainsi qu'à l'entreprise titulaire du lot n° 6 ; le maître d'ouvrage n'a pris aucune mesure concernant ces retards jusqu'à l'intervention du compte rendu n° 78 de l'OPC du mois de septembre 2015, qui a proposé l'application de pénalités sans que le détail de ces pénalités ne soit donné ; les retards de fourniture des plans d'exécution ont conduit à d'autres retards, notamment pour la pose des dernières charpentes qui a été repoussée au mois d'août 2015, alors que le délai contractuel d'exécution des travaux était fixé au 21 janvier 2015 ; aucune pénalité ne peut être mise à la charge de la société Eiffage qui a constamment alerté le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre des retards pris dans la communication des plans et des incidences financières de ces retards ; le retard qui aurait été pris par la société Eiffage pour mettre en place une grille de ventilation du transformateur TGBT ne saurait lui être reproché dès lors que ces travaux n'étaient pas prévus dans son marché ;

- à titre subsidiaire, en vertu du principe de loyauté des relations contractuelles, les pénalités mises à sa charge sont excessives et devront faire l'objet d'une modération de la part de la cour ;

-pour ce qui est des pénalités pour retard de transmission de documents, aucune explication n'a été donnée et c'est à bon droit que les premiers juges ont fait droit à sa demande sur ce point ;

-pour ce qui est des retenues qui lui ont été indument appliquées, en premier lieu concernant la réalisation d'une chape de ravoirage de 40 mm d'épaisseur, celle-ci a été faite conformément aux plans d'exécution, de même que les chapes du logement de fonction, du vestiaire du gymnase et du rez-de-chaussée du bâtiment ; dès lors la retenue de 103 156 euros hors taxes opérée par le département des Pyrénées-Orientales est injustifiée alors qu'en outre aucune somme ne pouvait être mise à sa charge au titre de ces travaux dès lors que la DPGF indique un prix zéro s'agissant de la chape ;

- pour ce qui est par ailleurs, de la réfaction opérée sur le mur de pierres, le jugement, qui a fait droit à sa demande sur ce point, devra être confirmé ;

- pour ce qui est des prestations qui lui ont été demandées, et qui ont été utiles à la collectivité : concernant les travaux exécutés sur ordre de service à prix provisoires sur des décisions du maître de l'ouvrage, elle a droit au paiement des sommes figurant dans ses devis, à hauteur des sommes respectives de 9 565, 38 euros hors taxes, de 3 8350 euros hors taxes, de 19 887, 21 euros hors taxes, de 10 947 euros hors taxes, et de 21 315, 82 euros hors taxes ;

- pour ce qui est des travaux supplémentaires sans ordre de service, concernant la mise en place d'un transformateur provisoire " tarif Vert ", le maître d'ouvrage y était tenu en application de la législation sur le travail ; elle a droit au paiement de ses travaux à hauteur de la somme de 16 650 euros hors taxes ;

-pour ce qui est de la prestation du bureau d'études pour la réalisation des plans d'exécution, Eiffage demande à être indemnisée de la somme de 13 746 euros hors taxes ;

- pour ce qui est des devis n°008, 12, 28, 30 et 33 : Eiffage demande le paiement des sommes y figurant qui correspondent à des prestations réalisées par elle-même pour des montants respectifs de 3 750 euros hors taxes, 4 764 euros hors taxes, 1 210 euros hors taxes, 4 935 euros hors taxes, et 500 euros hors taxes ;

- pour ce qui est de la réalisation d'une deuxième installation de chantier le 31 août 2015 lors de l'ouverture du collège, elle demande le paiement par le maître d'ouvrage de la somme de 9 250 euros hors taxes ;

-par ailleurs Eiffage demande le paiement de la somme de 21 050 euros hors taxes au titre de la mise en place d'un gardiennage supplémentaire, ainsi que celle de 10 995 euros hors taxes au titre de la mise en place d'une base de vie supplémentaire ;

- pour ce qui est de l'incidence financière liée au retard de transmission des plans d'exécution : concernant les ouvrages de gros œuvre, elle demande, en raison de l'arrêt de l' équipe " Dallage " du bâtiment G, la somme de 10 425 euros hors taxes, en raison de l'arrêt de l'équipe " Fondation " des bâtiments A et B la somme de 43 555 euros hors taxes, en raison de l'arrêt de l'équipe " Elévation" du bâtiment B, la somme de 16 993 euros hors taxes, en raison de l'arrêt de l'équipe " Elévation R+ 1 " la somme de 47 080 euros hors taxes, en raison de l'arrêt de l' équipe " Libage " du bâtiment TC 4 la somme de 18 674 euros hors taxes, en raison de l'arrêt de l'équipe " Poteaux/Elévation " du bâtiment F la somme de 121 396 euros hors taxes, en raison de l'arrêt de la réalisation de la rampe, de la fondation et du dallage entre le bâtiment C et la chaufferie, la somme de 29 931 euros hors taxes, et, concernant la réalisation des dallages extérieurs, la somme de 15 918 euros hors taxes ; elle demande, en ce qui concerne la réalisation des ouvrages de charpente métallique des passerelles la somme de 13 678 euros hors taxes, pour ce qui est de la réalisation de l'auvent d'entrée du collège, la somme de 13 401 euros hors taxes, pour ce qui est de la réalisation du mur de pierres, la somme de 19 490 euros hors taxes, et, pour ce qui est de la réalisation des contreventements, la somme de 14 575 euros hors taxes ;

- le maître d'ouvrage n'a pas respecté son obligation de loyauté contractuelle ; il a commis des fautes dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché vis-à-vis du maître d'œuvre, lequel n'a pas, de son côté, rempli sa mission de remise des plans d'exécution ; aucun retard n'a été reproché à cet égard à la société Eiffage dans les comptes-rendus d'OPC ; ce sont les retards du maître d'œuvre qui ont entrainé les retards d'exécution sur le chantier ; l'OPC ne lui a pas notifié de nouveaux délais d'exécution du marché ; l'application de pénalités n'est donc pas justifiée ;

- le solde du marché, qui s'élève à la somme de 315 709,36 euros toutes taxes comprises n'a toujours pas été réglé à la société Eiffage.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2024, et un mémoire du 28 avril 2025 non communiqué, le département des Pyrénées-Orientales, représenté par Me Mokhtar, conclut :

1°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement en ce qu'il a ordonné la restitution à la société Eiffage Construction Languedoc Roussillon de la somme de 612 042,87 euros au titre des pénalités et la somme de 58 212 euros toutes taxes comprises, au titre d'une retenue sur le prix du marché ;

2°) à l'annulation du jugement en ce qu'il a omis de fixer le solde du décompte général du marché ;

3°) au rejet de la requête d'appel de la société Eiffage Construction Languedoc Roussillon et à ce qu'il soit mis à la charge de celle-ci la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 code de justice administrative.

Le département des Pyrénées-Orientales soutient que :

-en ce qui concerne l'appel incident :

-en premier lieu, pour ce qui est de la somme de 48 510 euros hors taxes, soit 58 212 euros toutes taxes comprises, relative à la réfaction opérée par le département sur les travaux d'exécution du mur en pierres en façades Sud et Ouest, l'article 4.7.1.1.1 du CCTP, qui prévoyait la réalisation d'un " mur en pierre neuve ", prévoyait la soumission de l'entreprise à " toutes sujétions de pose ", ce qui incluait la réalisation d'un mur sans joints vides entre les pierres ; par ailleurs, les travaux non exécutés portent sur 225 m2, et non sur la totalité de la surface du mur, qui est de 731 m2 ; plusieurs pièces, notamment les courriers de la maîtrise d'œuvre adressés à la société Eiffage, établissent le caractère inesthétique du mur en pierres construit par Eiffage ;

-en deuxième lieu pour ce qui est des pénalités relatives aux retards de chantier, appliquées à hauteur de la somme de 507 573, 95 euros, et pour lesquelles les premiers juges ont accordé à la société Eiffage une restitution de 294 042,87 euros, il est établi que le compte rendu n° 78 du 16 septembre 2015 a informé la société Eiffage de l'application ultérieure de pénalités et l'a invitée à présenter ses observations préalables ; Eiffage n'a pas émis de réserves sur ce compte rendu n°78, lequel doit être considéré comme ayant été accepté ; les pénalités sont, par ailleurs, justifiées, concernant le bâtiment F, par le retard pris dans la réalisation du contreventement de la charpente bois et le bâtiment de la chape ; pour le bâtiment C, par le retard dans la pose de la grille en façade du local TGBT de la cuisine ; le jugement est par ailleurs erroné dès lors que les retards dans la réalisation de ces travaux est supérieur à celui de 38 jours retenu ;

-par ailleurs, pour ce qui est des pénalités de 318 000 euros afférentes au retard dans les transmissions de documents, dont les premiers juges ont accordé la restitution à la société Eiffage la charge de la preuve de ces transmissions appartient à cette dernière ; or elle n'apporte pas cette preuve, comme le montre le courrier du 21 janvier 2016 produit en appel et réitéré le 26 août 2016 ; par ailleurs, aucune modulation des pénalités n'est susceptible d'intervenir en l'espèce, compte-tenu de ce que les pénalités n'ont représenté que 23 % du montant du marché ;

- en troisième lieu, ce qui concerne le solde du marché, il appartenait aux premiers juges de fixer le solde du décompte général en tenant compte des réintégrations auxquelles ils ont procédé ; or le décompte général qui avait été notifié à Eiffage le 30 novembre 2016 comportait un solde négatif de 72 7571, 55 euros ; compte tenu de ce que les sommes retenues par le tribunal ne sont pas dues à Eiffage, la cour devra fixer le solde du marché au débit de cette société à hauteur de 727 571, 55 euros ;

- en ce qui concerne l'appel principal présenté par la société Eiffage :

- en qui concerne les demandes d'indemnisation au titre de travaux supplémentaires :

- s'agissant des travaux supplémentaires sur ordre de service à prix provisoires, la société Eiffage ne produit pas les ordres de service du maître d'ouvrage qui auraient ordonné la réalisation de travaux supplémentaires ni même les devis sur lesquels elle se fonde ;

- s'agissant des demandes de paiement de travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service, au titre desquels Eiffage demande la somme de 86 850 euros hors taxes, ces travaux, conformément à l'article 3.1 du CCAP, sont réputés être inclus dans le prix de l'offre ; dans le cadre d'un marché à forfait, comme celui conclu en l'espèce, le titulaire du marché ne peut prétendre obtenir une indemnisation supplémentaire ; en tout état de cause, la société Eiffage ne démontre pas que les travaux dont elle se prévaut ont été effectivement exécutés et qu'ils étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage ;

- en ce qui concerne la mise en place d'un transformateur provisoire " tarif Vert ", cette prestation relevait des obligations contractuelles d'Eiffage en vertu des articles 1-5-3-1 1 c) et 2-5-1 du CCTP ;

- pour ce qui est de la prestation du bureau d'études de réalisation des plans d'exécution, pour laquelle Eiffage demande à être indemnisée de la somme de 13 746 euros hors taxes, au motif que ces plans devaient être réalisés par la maîtrise d'œuvre, cette dernière ne produit aucun justificatif ;

- les devis n°008, 12, 28, 30 et 33 ne sont pas produits et Eiffage ne démontre pas que les prestations en question n'étaient pas déjà prévues par le marché ;

-pour ce qui est de la réalisation d'une deuxième installation de chantier le 31 août 2015, pour laquelle Eiffage demande le paiement par le maître d'ouvrage de la somme de 9 250 euros hors taxes, ainsi que la somme de 21 050 euros hors taxes au titre de la mise en place d'un gardiennage supplémentaire, ainsi que celle de 10 995 euros hors taxes au titre de la mise en place d'une base de vie supplémentaire, les sommes demandées, qui ne correspondent pas à des travaux supplémentaires ne sont, en tout état de cause, pas justifiées ;

-pour ce qui est des demandes de paiement de travaux supplémentaires au titre de la surconsommation de béton lors de la réalisation des fondations, à hauteur de la somme de 321272, 60 euros hors taxes, la société Eiffage, liée par son offre, ne peut prétendre à aucune indemnisation résultant d'un écart entre les quantités de béton estimées dans son offre et les quantités exécutées, conformément aux articles 1-1-1-1 2, 1-1-2, et 1-3-3-1 1, du CCTP ; en tout état de cause, il n'y a pas eu de surconsommation de béton du fait du maître d'ouvrage dès lors qu'il résulte notamment du rapport d'expertise que les plans joints au DCE avaient surévalué de 5 % la quantité de béton , ces plans prévoyant 2 471 m3 de béton contre 2 360 m3 seulement dans les plans d'exécution ; la société Eiffage ne justifie pas de la quantité de béton réellement mise en œuvre lors des travaux alors que la charge de la preuve lui incombe ; en tout état de cause, la mise en œuvre de quantités supplémentaires de béton résulterait d'une grave négligence de sa part n'ouvrant pas droit à rémunération ; la société Eiffage avait volontairement minoré, dans son offre, la quantité de béton devant être mise en œuvre, ainsi que l'a estimé le comité consultatif de règlement amiable des marchés publics dans son avis du 27 septembre 2019 ;

- les préjudices invoqués par Eiffage au titre d'un allongement de chantier ne sont pas justifiés, faute pour celle-ci de démontrer l'existence d'une faute du maître d'ouvrage ; par ailleurs les arrêts de chantier imputés à une absence de fourniture des plans dans les délais ne relèvent, en tout état de cause, que de la responsabilité de la maîtrise d'œuvre, et non du maître d'ouvrage ;

-en ce qui concerne les retenues qui ont été pratiquées par le département, à titre de moins-values sur des travaux qui devaient être réalisés par Eiffage : s'agissant de la chape de ravoirage de 40 mm d'épaisseur sur la dalle intérieure du collège, en rez-de-chaussée, en R+1, au niveau PDAEM, au niveau du logement de fonction en rez-de-chaussée et au niveau du vestiaire du gymnase, pour laquelle il a été mis à la charge de la société Eiffage de 103 156 euros hors taxes, cette dernière ne justifie pas avoir procédé à l'exécution complète de cette chape ; dans ces conditions, et dès lors que le fait qu'aucun prix spécifique n'a été fixé pour l'exécution de cette chape ne dispensait pas la société Eiffage de réaliser cette chape, les conclusions présentées par cette dernière doivent être rejetées.

Par une ordonnance du 24 mars 2025, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 29 avril 2025 à 12 h 00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 dans sa version modifiée par l'arrêté du 3 mars 2014 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bentolila, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique

- et les observations de Me Salesse pour la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon et de Me Dupey substituant Me Mokhtar pour le département des Pyrénées-Orientales.

Considérant ce qui suit :

1. Le département des Pyrénées-Orientales a entrepris la construction et la réhabilitation d'un collège à Millas et a délégué la maîtrise d'ouvrage de cette opération à la société anonyme d'économie mixte (SAEM) Roussillon Aménagement, devenue SPLA Pyrénées-Orientales Aménagement, la maîtrise d'œuvre ayant été confiée à un groupement composé d'architectes et de plusieurs bureaux d'études. Le marché était réparti en 27 lots, dont le lot n° 2 " gros œuvre - charpente métallique et bois " qui a été attribué à la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon par un acte d'engagement du 4 avril 2014 pour un montant de 3 690 000 euros hors taxes, modifié par une décision rectificative du maître d'ouvrage du 11 juin 2014 fixant le montant forfaitaire de la tranche ferme à 3 500 509,42 euros hors taxes et celui de la tranche conditionnelle à 189 490,58 euros hors taxes. Un ordre de service du 4 avril 2014, notifié le 11 avril suivant, a fixé à 18 mois la durée d'exécution des travaux. Les travaux ont démarré le 11 juin 2014 et ont fait l'objet d'une réception le 18 novembre 2015. Alors que le chantier était en cours, la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon, qui se heurtait à des difficultés d'exécution, a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande de désignation d'un expert, ce qui a été fait par une ordonnance du 24 septembre 2015. Cependant, par un courrier du 31 mai 2016, la société Eiffage a sollicité l'interruption des opérations d'expertise. L'expert a alors rendu son rapport en l'état le 24 juin 2016. La société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon a transmis au maître d'ouvrage et au maître d'œuvre un projet de décompte final d'un montant de 4 854 085,93 euros hors taxes, soit 5 824 903,12 euros toutes taxes comprises. Le 30 novembre 2016, le maître d'ouvrage, en retour, a transmis à la société Eiffage le décompte général de son marché faisant apparaître au débit de cette dernière une somme de 727 721,31 euros toutes taxes comprises.

2. Par un mémoire en réclamation du 16 janvier 2017, la société Eiffage a contesté ce décompte. Par une décision du 28 février 2017, le maître d'ouvrage a rejeté cette réclamation. La société Eiffage a demandé au tribunal administratif de Montpellier la condamnation du département des Pyrénées-Orientales à lui verser la somme totale de 2 020 387 euros hors taxes au titre du solde du marché.

3. Par un jugement n° 1905583 du 9 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a condamné le département des Pyrénées-Orientales à restituer à la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon la somme de 612 042,87 euros correspondant à des pénalités, la somme de 58 212 euros, toutes taxes comprises, au titre d'une retenue indument pratiquée, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par le même jugement, le tribunal a mis les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 5 523,34 euros toutes taxes comprises, à la charge définitive de la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon.

4. La société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon relève appel de ce jugement du 9 mars 2023 en tant qu'il ne fait pas droit à l'intégralité de ses conclusions. Le département des Pyrénées-Orientales, par la voie de l'appel incident, conclut à l'annulation du jugement en tant qu'il l'a condamné à restituer à la société Eiffage Construction Languedoc Roussillon les sommes précitées de 612 042,87 euros et 58 212 euros, d'annuler le jugement en tant qu'il a omis de fixer le solde définitif du décompte général du marché, et de rejeter les conclusions de la société Eiffage Construction Languedoc Roussillon.

Sur les pénalités de retard :

En ce qui concerne les retards liés à l'exécution des travaux :

5. Aux termes des stipulations de l'article 7.3.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " (...) l'entrepreneur subira en cas de retard dans l'exécution des prestations et travaux, les pénalités journalières suivantes (...) : / (...) Travaux (...) Pour chacun des 10 premiers jours de retard / (...) 1/500 du marché HT avec un minimum de 800 € / (...) Pour chaque jour de retard ultérieur / (...) 1/1000 du marché HT avec un minimum de 500 € (...) / Ces dispositions s'appliquent aux délais intermédiaires définis dans le calendrier d'exécution. ".

6. Le tribunal administratif de Montpellier, au point 17 de son jugement, a rejeté les conclusions d'Eiffage tendant à la restitution des pénalités de retards qui lui ont été appliquées en raison d'un retard global d'exécution des travaux, lesquels ont été réceptionnés le 18 novembre 2015 avec 38 jours de retard. Il résulte de l'instruction que le délai d'exécution du marché était de 18 mois à compter du 11 avril 2014, les prestations devant être achevées au 10 octobre 2015, et les premiers juges ont considéré, par application des stipulations précitées de l'article 7.3.1 du cahier des clauses administratives particulières, que les pénalités infligées à Eiffage à hauteur de la somme de 213 531,08 euros étaient justifiées. En revanche, le tribunal a fait droit à la demande de la société Eiffage de restitution des pénalités intermédiaires de 80 jours qui lui ont été appliquées à hauteur d'une somme de 294 042,87 euros.

7. La société Eiffage conteste le jugement en tant qu'il rejette ses conclusions relatives aux pénalités de retard dans l'exécution des travaux à hauteur de la somme de 213 531,08 euros, représentant les 38 jours de retard constatés à la réception des travaux. Le département présente un appel incident contre le jugement en ce qu'il fait droit aux conclusions de la société Eiffage, à hauteur de la somme totale de 294 042,87 euros.

En ce qui concerne l'appel principal présenté par la société Eiffage :

8. En premier lieu, contrairement à ce que fait valoir la société appelante, le décompte général du 30 novembre 2016 établi par le département des Pyrénées-Orientales détaille le calcul des pénalités correspondant à un retard de 38 jours de retard constaté à la date de réception des travaux, soit la somme de 213 531,08 euros, laquelle résulte de l'application du mode de calcul prévu par les stipulations précitées de l'article 7.3.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché.

9. En deuxième lieu, la circonstance selon laquelle la société Eiffage n'aurait été informée de ses retards que par un compte rendu n° 78 établi par le maître d'œuvre le 16 septembre 2015 seulement, est à elle seule sans incidence sur la réalité même des retards constatés et sur la possibilité de les sanctionner par voie de pénalités.

10. En troisième lieu, la société Eiffage fait valoir que ses équipes de chantier ont été contraintes, les 8 et 24 juillet, 9, 12 et 26 septembre, 28 octobre, 12 novembre de l'année 2014 d'interrompre leurs travaux au niveau des bâtiments A, B, E, G, et TC 4 du fait de circonstances extérieures indépendantes de sa volonté. La société Eiffage évalue les retards pris dans l'exécution des travaux dont elle avait la charge, sans faute de sa part, à un total de 123 jours.

11. Il résulte tout d'abord de l'instruction que la société Eiffage justifie par deux courriels adressés le 9 juillet 2014 à la maîtrise d'œuvre, un courriel adressé le même jour par les maîtres d'œuvre à la société Cegelec demandant à cette dernière la réalisation de travaux sur les réseaux, et enfin par un courriel de cette société s'engageant à exécuter ces travaux, que l'interruption de chantier, survenue le 8 juillet 2014 au niveau du bâtiment G, a eu pour cause le retard de réalisation, par ce titulaire du lot " Plomberie ", des réseaux sous le dallage du bâtiment. Dans ces conditions, et alors qu'au surplus la date à laquelle la société Cegelec aurait terminé ses travaux n'est pas connue, la société Eiffage est fondée à soutenir qu'elle n'est pas responsable de l'interruption du chantier survenu trois jours durant, entre le 8 et le 10 juillet 2014.

12. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que la société Eiffage, pour ce qui des interruptions subies par son équipe " Fondation " intervenant sur les bâtiments A et B, a adressé à la maîtrise d'œuvre des courriels les 24 juillet, 1er août et 6 août 2014 expliquant les retards pris par l'absence de réception du plan d'armature nécessaire à leur exécution. Il résulte de l'instruction que le retard subi à ce titre par la société Eiffage a été de sept jours sur le bâtiment A et de dix jours sur le bâtiment B, soit dix-sept jours au total. Compte tenu de la teneur de ces courriels, et faute de contestation en défense, la société Eiffage est fondée à soutenir que ses équipes " Fondation " intervenues sur les bâtiments A et B ne sont pas responsables de l'interruption du chantier pendant dix-sept jours.

13. Il résulte également de l'instruction que l'équipe " Elévation " de la société Eiffage a subi une interruption de chantier au niveau du bâtiment B qui s'explique, selon le courriel qu'elle a adressé le 9 septembre 2014 à la maîtrise d'œuvre, par l'absence de réception des armatures. A cet égard, le compte-rendu du maître d'œuvre chargé de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination du chantier (OPC) n° 26 du 9 septembre 2014 fait état, concernant les travaux d'élévation du rez-de-chaussée du bâtiment B, d'un retard d'exécution et d'un début de réception des armatures prévu seulement le 15 septembre 2014. En outre, le document établi par la société Eiffage, dans la perspective de la réunion de chantier du 16 septembre 2014, indique que son équipe " Elévation " reprendrait ses travaux dès réception des armatures, lesquelles ont été livrées le 15 septembre 2014. Au regard de l'ensemble de ces éléments, la société Eiffage est fondée à soutenir que ses équipes ne sont pas responsables de l'interruption de chantier à hauteur de six jours.

14. Il résulte par ailleurs de l'instruction que la société Eiffage justifie, concernant l'équipe " Elévation " du bâtiment A, avoir adressé à la maîtrise d'œuvre un courriel du 12 septembre 2014 faisant état du retard dans l'exécution des travaux, lesquels devaient commencer le 12 septembre 2014, en raison de l'absence de réception du plan d'armature. Dans ce courriel, la société Eiffage précise, en outre, que les épaisseurs des murs portées sur les plans d'exécution avaient été modifiées sans qu'elle en ait été informée au préalable, ce qui l'a conduite à commander de nouveaux mannequins. Par ailleurs, le document établi par la société Eiffage, relatif à l'ordre du jour de la réunion de chantier du 16 septembre 2014, fait état de l'arrêt de son l'équipe " Elévation " intervenant sur le bâtiment A et de ce que les travaux reprendraient dès réception des armatures, lesquelles ont été reçues, selon la société et sans contestation en défense, le 22 septembre 2014 seulement. Il résulte de l'instruction que la société Eiffage en a informé la maîtrise d'œuvre par un courriel du 22 septembre 2014. Au regard de ces éléments concordants, la société Eiffage est fondée à soutenir, sans contestation à cet égard en défense, que le chantier de son équipe " Elévation " sur le bâtiment A a été, sans faute de sa part, interrompu pendant sept jours.

15. Il résulte également de l'instruction que la société Eiffage justifie, concernant l'équipe " Elévation R+ 1 " du bâtiment E, avoir adressé à la maîtrise d'œuvre un courriel le 21 octobre 2014 faisant état de la reprise, le 13 octobre 2014, des travaux sur le bâtiment E R + 1, et d'un retard de onze jours dans l'exécution des travaux des voiles du bâtiment E R + 1. La société Eiffage a ensuite informé la maîtrise d'œuvre, par un courriel du 21 octobre 2014, de la reprise des travaux. Ces courriels, qui sont contemporains des périodes d'interruption, sont de nature à établir que les retards correspondants ne sont pas imputables à la société Eiffage. Dans ces conditions, la société Eiffage est fondée à soutenir, sans contestation à cet égard en défense, que le chantier de son équipe " Elévation R+ 1 " du bâtiment E a été, sans faute de sa part, interrompu pendant dix-sept jours.

16. Il résulte encore de l'instruction que la société Eiffage justifie, concernant son équipe " Libage " du bâtiment TC4, de la transmission à la maîtrise d'œuvre d'un courriel du 12 novembre 2014 faisant état d'une interruption du chantier causée par la réception tardive d'un plan d'armature. Le 24 novembre 2014, elle a transmis au maître d'œuvre un nouveau courriel indiquant que les travaux avaient repris le 18 novembre 2014. Dans ces conditions, la société Eiffage est fondée à soutenir, sans contestation à cet égard en défense, que le chantier de son équipe " Elévation R+ 1 " du bâtiment E a été, sans faute de sa part, interrompu pendant six jours. Il résulte par ailleurs de l'instruction que la société Eiffage, concernant son équipe Poteaux/Elévation du bâtiment F, justifie de la transmission à la maîtrise d'œuvre d'un courriel du 21 novembre 2014 faisant état de ce que le chantier, démarré le 24 octobre 2014, était interrompu depuis le 28 octobre 2014 en raison de l'absence de réception d'un plan d'armature. Un document établi par la société Eiffage, relatif à l'ordre du jour de la réunion de chantier du 25 novembre 2014, confirme cette interruption, tandis que cette société a adressé à la maîtrise d'œuvre un autre courriel du 27 novembre 2014 faisant état de l'absence de livraison de différents matériaux, dont notamment des poteaux, nécessaires à l'exécution de ses prestations. La société Eiffage produit encore les bons de livraison des poteaux, datés du 5 janvier 2015, et indique avoir repris l'exécution du chantier le 8 janvier 2015 par la pose des poteaux de chantier. Elle précise toutefois, en se prévalant du document relatif à l'ordre du jour de la réunion de chantier du 2 février 2015, avoir été contrainte d'interrompre à nouveau ses travaux pendant une période de 73 jours du fait de la réception de plans d'exécution incomplets. Au regard de ces éléments précis et concordants, et faute de contestation en défense, il y a lieu d'admettre que, pour l'exécution des travaux relatifs aux " Poteaux/Elévation " du bâtiment F, la société Eiffage a subi un retard d'exécution dont elle n'est pas responsable de 73 jours calendaires.

17. En ce qui concerne la réalisation de la " rampe /fondation et dallage entre le bâtiment C et la chaufferie ", les documents produits par la société Eiffage n'établissent pas que, comme elle l'allègue, les travaux correspondants auraient subi un décalage d'intervention de 256 jours entre le 30 septembre 2014 et le 16 juin 2015, et que son équipe aurait été arrêtée pour des circonstances extérieures à sa volonté pendant 17 jours calendaires.

18. Par ailleurs, en ce qui concerne la réalisation des dallages extérieurs, si la société Eiffage soutient avoir subi un décalage d'intervention de 213 jours entre le 19 décembre 2014 et le 22 juillet 2015, et que son équipe aurait été arrêtée deux jours calendaires, elle ne justifie pas, par les documents qu'elle produit, que les retards allégués auraient pour cause des circonstances extérieures à son intervention.

19. En ce qui concerne la réalisation des passerelles, si la société Eiffage soutient avoir subi un décalage d'intervention de 198 jours, entre le 21 janvier 2014 et le 7 août 2015, elle ne justifie pas, par les documents qu'elle produit, que les retards en cause trouveraient leur origine dans des circonstances extérieures à son intervention.

20. En ce qui concerne la réalisation de l'auvent de l'entrée du collège, faute pour la société Eiffage de produire le moindre élément justificatif à l'appui de ses allégations relatives notamment au retard qu'elle aurait subi dans la réception des plans d'exécution, elle ne justifie pas que le décalage d'intervention que ces travaux ont connu entre le 21 janvier 2014 et le 3 août 2015, soit 194 jours, ne lui est pas imputable.

21. Le document produit par la société Eiffage ne permet pas de retenir que le retard qui lui a été reproché dans la réalisation du mur en pierres ne lui serait pas imputable. Dans ces conditions, les conclusions présentées par Eiffage sur ce point doivent être rejetées.

22. La société Eiffage ne justifie pas de ce que, s'agissant de la réalisation des travaux relatifs au contreventement, les plans d'exécution lui auraient été remis tardivement ni qu'elle aurait par ailleurs signalé à la maîtrise d'œuvre la présence de coffres placo à l'endroit où devaient être placées les platines de contreventement, lesquelles auraient empêché la réalisation des travaux prévus dans les délais contractuels. Les retards ici reprochés à la société Eiffage doivent donc être regardés comme établis.

23. Il résulte des points 11 à 16 du présent arrêt que la société Eiffage est seulement fondée à soutenir qu'elle a subi, sans faute de sa part, des retards dans l'exécution des travaux dont elle avait la charge qui s'élèvent à 129 jours.

24. Ainsi qu'il a été dit, le département des Pyrénées-Orientales n'apporte aucun élément permettant d'estimer que ces retards seraient dus à une faute contractuelle de la société Eiffage.

25. La société Eiffage est donc fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à être déchargée des pénalités mises à sa charge par le département à raison du retard de 38 jours retenu par le maître d'ouvrage, et qu'elle conteste, à la date de réception du chantier. Il en résulte que la société Eiffage est fondée à demander à être déchargée de la somme de 213 531,08 euros correspondant au retard précité, laquelle résulte de l'application, non contestée par les parties, du mode de calcul prévu par l'article 7.3.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché. Quant à la circonstance, invoquée en défense, selon laquelle la société Eiffage n'a pas émis de réserves sur le compte- rendu de chantier n° 78 du 16 septembre 2015, elle n'est pas, par elle-même, de nature à faire regarder cette société comme ayant accepté le paiement des pénalités en litige.

En ce qui concerne l'appel incident présenté par le département des Pyrénées-Orientales :

S'agissant des pénalités intermédiaires :

26. Le département, par la voie de l'appel incident, demande l'annulation du jugement en ce qu'il accorde à la société Eiffage la restitution des pénalités intermédiaires mises à sa charge à hauteur de la somme de 294 042,87 euros. Toutefois, à l'appui de sa contestation, le département se réfère à quelques comptes-rendus de chantier n° 79 à 82 des 30 septembre, 7 et 14 octobre 2015 faisant état d'un retard concernant le contreventement de la charpente bois pour le bâtiment F, ainsi que pour la pose de la grille en façade du local TGBT, pour en conclure " qu'il est totalement invraisemblable que seuls 38 jours de retard dans l'exécution des travaux soient retenus ". Ce faisant, le département des Pyrénées-Orientales ne conteste pas utilement les motifs du jugement attaqué relevant que les comptes-rendus précités ne permettaient ni de quantifier ni de calculer les retards litigieux. Ainsi, faute pour le département d'établir que la société Eiffage serait responsable du retard litigieux par référence notamment à un calendrier d'exécution, son appel incident sur ce point doit être rejeté.

S'agissant des pénalités pour remise tardive de documents :

27. Pour faire droit aux conclusions de la société Eiffage tendant à la restitution de la somme de 318 000 euros représentant une pénalité pour remise tardive de documents relatifs à des sous-détails de prix, le tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur l'absence de production, par le département, d'un courrier du maître d'ouvrage du 21 janvier 2016 qui aurait demandé à la société de produire les documents en cause. En appel, ce document est versé au dossier par le département des Pyrénées-Orientales.

28. Le département se prévaut de l'article 3-2 du cahier des clauses administratives particulières du marché aux termes duquel : " Nature du prix : Les ouvrages ou prestations faisant l'objet du marché seront réglés, comme précisé à l'acte d'engagement, suivant la nature du marché par des prix forfaitaires dont le libellé est détaillé à l'état des prix forfaitaires. / Sauf si ces documents sont demandés à la remise des offres, l'entrepreneur fournira dans les 20 jours à compter de la date de la demande du maître d'œuvre un sous-détail de chacun des prix du bordereau des prix unitaires ou une décomposition de chacun des prix de l'état des prix forfaitaires désignés par le maître d'œuvre conformément aux dispositions de l'article 10.3.4 du CCAG travaux. ". Ces stipulations permettent donc au maître d'ouvrage de demander au titulaire du marché la production de sous-détails de prix unitaires.

29. Si la société Eiffage a transmis au département des Pyrénées-Orientales, lors de la présentation de son offre, la décomposition du prix global et forfaitaire (DPGF) de son marché, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait donné suite au courrier précité du 21 janvier 2016 par lequel le maître d'ouvrage lui a demandé la transmission des sous-détails de prix. Dans ces conditions, le département était en droit d'appliquer à la société Eiffage des pénalités pour retard dans la transmission de documents dans les conditions prévues par l'article 7.3.5 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché et aux termes duquel : " En cas de retard dans la transmission de documents demandés par la MOE, le CSPS ou le CT, le maître d'ouvrage pourra appliquer une pénalité de retard égale à 150 euros hors taxes par jour calendaire de retard ". Le département était donc en droit d'appliquer à la société Eiffage des pénalités pour non-fourniture des sous-détails de prix pour un montant total de 318 000 euros (212 jours x 150 euros x 10 sous-détails de prix non fournis), dont les modalités de calcul ne sont pas contestées par la société Eiffage. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a déchargé la société Eiffage de la somme précitée.

30. Il résulte de ce qui précède, que le département des Pyrénées-Orientales est fondé à demander, par la voie de l'appel incident, la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la société Eiffage tendant à la restitution de la somme de 318 000 euros afférente aux pénalités pour remise tardive de documents.

En ce qui concerne la demande de la société Eiffage de modulation de la pénalité de retards :

31. Il est loisible au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens, de modérer ou d'augmenter les pénalités de retard résultant du contrat, par application des principes dont s'inspire l'article 1152 du code civil, si ces pénalités atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire eu égard au montant du marché.

32. Rapportées au montant du marché, qui s'élève à 3 500 509,42 euros hors taxes pour la tranche ferme, et à 189 490,58 euros hors taxes pour la tranche conditionnelle, les pénalités de 318 000 euros restant à la charge de la société Eiffage ne présentent pas un caractère manifestement excessif. Dès lors, les conclusions à fins de modération présentées par la société Eiffage doivent être rejetées.

Sur les travaux supplémentaires :

En ce qui concerne la quantité de béton mis en œuvre :

33. La société Eiffage demande la condamnation du département des Pyrénées-Orientales à lui verser la somme de 511 013 euros hors taxes au titre de la consommation supplémentaire de béton entraînée, selon elle, par les différences constatées entre les quantités de béton prévues par le document de consultation des entreprises et celles mentionnées dans les plans d'exécution qui lui ont été remis. Il résulte toutefois de l'instruction que les quantités de béton prévues pour la tranche ferme dans le document de consultation des entreprises résultaient du total entre les quantités prévues par les articles 4.3.1 et suivants de ce document pour les tranches ferme et optionnelle, soit 2 471 m3, tandis que la quantité de béton mentionnée dans les plans EXE s'élevait à 2 360 m3. Comme l'ont relevé les premiers juges à la suite des conclusions du rapport d'expertise, elles-mêmes reprises d'ailleurs par le comité consultatif de règlement amiable des marchés publics dans son avis du 27 septembre 2019, les écarts ainsi relevés sont peu importants et, selon les termes mêmes de l'expert, " normaux dans le cadre de l'évaluation du projet ", et donc pas de nature à influer sur les délais d'exécution des travaux. Enfin, il est constant que, dans un premier temps, la société Eiffage a indiqué dans la décomposition de son prix global et forfaitaire qu'elle mettrait en œuvre 1 474 m3 de béton, sous-évaluant ainsi la quantité nécessaire, comme la maîtrise d'œuvre lui en a fait alors la remarque, puis, dans un second temps, utilisé un volume de 2 300 m3 proche de celui prévu dans les documents précités. Dans ces conditions, la société Eiffage n'est pas fondée à demander la condamnation du département des Pyrénées-Orientales à lui verser une somme de 511 013 euros hors taxes au titre des volumes supplémentaires de béton qu'elle aurait été contrainte de mobiliser.

En ce qui concerne les travaux supplémentaires réalisés sur ordre de service provisoire :

34. La société Eiffage, pas plus en appel qu'en première instance, ne produit les décisions n° 5 à 9 du maître d'ouvrage qu'elle évoque, sans même citer leurs dates, qui lui auraient demandé d'exécuter certains travaux ni même les devis qu'elle soutient avoir adressés à ce dernier pour des montants respectifs totaux hors taxes de 37 868, 6 euros, 38 350 euros, 19 887,21 euros, 10 947 euros, et 21 315, 82 euros. La société Eiffage n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions sur ce point.

En ce qui concerne les travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service :

35. Le caractère global et forfaitaire du prix du marché ne fait pas obstacle à ce que l'entreprise cocontractante sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

S'agissant de la mise en place d'un transformateur provisoire " tarif Vert " :

36. La société Eiffage fait valoir qu'elle a installé un transformateur provisoire et demande qu'une somme de 16 650 euros hors taxes soit mise à la charge du département des Pyrénées-Orientales en règlement de cette prestation. Toutefois, comme l'ont relevé les premiers juges, l'article 2.5.1 du cahier des clauses techniques particulières du lot n° 2, attribué à la société, prévoyait expressément l'obligation pour le titulaire d'inclure dans son offre les branchements, et notamment un branchement électrique provisoire, ainsi que la mise en place d'une armoire de type " forain ". Dans ces conditions, cette prestation, dont le montant n'est en tout état de cause pas justifié au dossier, était nécessairement incluse dans l'offre de la société Eiffage et ne correspondait donc pas à des travaux supplémentaires. Les conclusions présentées sur ce point par la société Eiffage doivent, dès lors, être rejetées.

S'agissant de la prestation de bureau d'études pour la réalisation des plans d'exécution :

37. Pas plus en appel qu'en première instance la société Eiffage ne justifie avoir supporté le coût de réalisation des plans d'exécution pour les armatures de plancher qu'elle affirme avoir commandés en raison de la défaillance, qu'elle allègue, de la maîtrise d'œuvre. Dans ces conditions, les conclusions de la société Eiffage tendant à la condamnation du département des Pyrénées-Orientales à lui verser, à ce titre, la somme de 13 746 euros hors taxes doivent être rejetées.

S'agissant des devis n° 8, 12, 28, 30 et 33 :

38. Si la société Eiffage, persiste à demander la condamnation du département des Pyrénées-Orientales à lui verser les sommes de 3 750 euros hors taxes, 4 764 euros hors taxes, 1 210 euros hors taxes, 4 935 euros hors taxes, et 500 euros hors taxes, au titre de travaux qu'elle aurait réalisés, elle ne produit pas plus en appel qu'en première instance les devis correspondants, et ne justifie en outre ni de la réalisation de ces travaux ni de leur caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.

S'agissant des autres frais :

39. Faute pour la société Eiffage d'établir la réalité des frais qu'elle aurait engagés, ses conclusions tendant à la condamnation du département des Pyrénées-Orientales à lui verser la somme de 9 250 euros hors taxes au titre d'une deuxième installation de chantier, la somme de 21 050 euros hors taxes au titre de frais de gardiennage et celle de 10 095 euros hors taxes au titre de l'installation d'une base de vie supplémentaire, doivent être rejetées.

Sur les préjudices liés à l'allongement du chantier du fait de retards de transmission de plans d'exécution :

40. La société Eiffage demande diverses sommes représentant les conséquences financières qu'elle aurait assumées en raison des retards de transmission des plans d'exécution ayant provoqué l'interruption des travaux effectués par ses équipes " Dallage ", " Fondation", " Elévation", " Elévation R+ 1 ", " Libage " et " Poteaux/Elévation " du bâtiment F et l'interruption de travaux portant sur les rampes, la fondation et le dallage entre le bâtiment C et la chaufferie, les dallages extérieurs, les ouvrages de charpente métallique, les passerelles, l'auvent d'entrée du collège, le mur de pierres et les contreventements. Toutefois, faute pour la société Eiffage de produire des éléments permettant de justifier le montant des préjudices invoqués à ce titre, ses conclusions doivent être rejetées.

Sur les retenues pour moins-values et réfections :

En ce qui concerne l'appel principal présenté par la société Eiffage :

41. L'article 4.6.6.1 du cahier des clauses techniques particulières stipulait que la société Eiffage devrait réaliser une chape de ravoirage de 40 mm d'épaisseur sur la dalle intérieure du collège en rez-de-chaussée, en R+1, au niveau PDAEM, au niveau du logement de fonction et du vestiaire du gymnase. En appel, la société Eiffage ne conteste pas ne pas avoir réalisé la totalité de cette chape. Dès lors que cet ouvrage a été prévu au marché, conclu à prix forfaitaire, la seule circonstance que son prix n'ait pas été spécifié ne dispensait pas la société de sa réalisation. Les conclusions par lesquelles la société Eiffage conteste la retenue de 103 156 euros hors taxes effectuée par le département des Pyrénées-Orientales, et dont le montant n'est pas lui-même contesté, doivent ainsi être rejetées.

En ce qui concerne l'appel incident présenté par le département des Pyrénées-Orientales :

42. Le département forme un appel incident contre le jugement en tant qu'il accorde à la société Eiffage la restitution de la somme de 48 510 euros hors taxes, soit 58 212 euros toutes taxes comprises, correspondant à la retenue pratiquée en raison des caractéristiques observées des joints du mur en pierre réalisé en façades Sud et Ouest. Si le département se prévaut des stipulations de l'article 4.7.1.1.1 du cahier des clauses techniques particulières selon lesquelles le mur en pierre devrait être réalisé en " pierre neuve " et soumis à des " sujétions de pose ", il ne résulte pas de l'instruction que la société Eiffage était contractuellement tenue de réaliser ce mur avec des joints vides entre les pierres. Dans ces conditions, l'absence de pose de joints vides entre les pierres ne peut être regardée comme une défaillance d'exécution alors qu'au surplus le caractère " inesthétique " de cet ouvrage ne résulte pas de l'instruction. L'appel incident présenté sur ce point par le département des Pyrénées-Orientales doit donc être rejeté.

43. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que la société Eiffage est fondée à demander la réformation du jugement du 9 mars 2023 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à être déchargée à hauteur de la somme de 213 531,08 euros au titre des pénalités de retard mises à sa charge par le département à raison d'un retard de 38 jours à la réception du chantier, d'autre part, que le département des Pyrénées-Orientales est fondé à demander la réformation de ce même jugement en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la société tendant à la restitution de la somme de 318 000 euros relative aux pénalités pour remise tardive de documents, et, enfin, que le surplus des conclusions des parties doit être rejeté.

Sur le solde du marché :

44. Il résulte de l'instruction que la société Eiffage a, le 6 décembre 2016, reçu notification du décompte général la rendant débitrice d'une somme de 727 721,31 euros toutes taxes comprises, laquelle inclut notamment les pénalités de 318 000 euros que le département des Pyrénées-Orientales était en droit d'appliquer ainsi qu'il a été dit au point 29 et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal. Par ailleurs, le département est fondé à soutenir que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les droits et obligations de la société Eiffage doivent être appréciés à partir du solde du décompte du marché tel qu'il vient d'être rappelé.

45. Il résulte du point 25 du présent arrêt que la société Eiffage a droit à la restitution de la somme de 213 531,08 euros et des points 26 et 42 que le département des Pyrénées-Orientales n'est pas fondé à demander la réformation du jugement en tant qu'il a déchargé cette société des sommes respectives de 294 042,87 euros et 58 212 euros toutes taxes comprises, lesquelles doivent être inscrites au crédit de cette dernière.

46. Il résulte de ce qui précède que le solde définitif du marché doit être fixé à la somme de 161 935,36 euros toutes taxes comprises au débit de la société Eiffage.

Sur les frais d'expertise :

47. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. L'Etat peut être condamné aux dépens ".

48. Les frais et honoraires d'expertise ont été liquidés et taxés à la somme de 5 523,34 euros, toutes taxes comprises, par ordonnance de la présidente du tribunal administratif du 27 juillet 2016. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a mis ces frais à la charge définitive de la société Eiffage Construction.

Sur les frais liés au litige :

49. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au bénéfice de l'une ou l'autre des parties.

DÉCIDE :

Article 1er : Le solde du marché de travaux est fixé à la somme de 161 935,36 euros toutes taxes comprises à inscrire au débit de la société Eiffage.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 9 mars 2023 est réformé en ce qu'il est contraire à ce qui précède.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eiffage Construction Languedoc-Roussillon et au département des Pyrénées-Orientales.

Copie en sera adressée à M. A..., expert.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2025 à laquelle siégeaient :

M. Faïck président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juin 2025.

Le rapporteur,

P. Bentolila

Le président,

F. Faïck

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°23TL01048 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01048
Date de la décision : 10/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. Faïck
Rapporteur ?: M. Pierre Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : D'AVOCATS SALESSE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-10;23tl01048 ?
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