Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2201934 du 1er juillet 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 juillet 2023, M. A..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 1er juillet 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de son conseil, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. A... soutient, en ce qui concerne la régularité du jugement attaqué, que :
- le jugement est insuffisamment motivé.
M. A... soutient, au fond, que :
- les décisions attaquées ont été prises par une autorité incompétente dès lors que la délégation de signature accordée à leur auteur, M. Laurent, secrétaire général de la préfecture de l'Hérault, est trop générale.
Sur le refus de titre de séjour :
- la décision contestée du 28 octobre 2021 est antérieure de deux jours à la fin de la validité de son visa de long séjour valant titre de séjour qui était valable du 30 octobre 2020 au 30 octobre 2021 ; elle a donc été rendue sur une procédure irrégulière dès lors que le préfet lui a été retiré son titre, sans l'avoir invité à présenter des observations dans le cadre d'une procédure contradictoire ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles L. 423-1 et L 423-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de français compte tenu des violences conjugales que son épouse lui faisait subir ; les premiers juges ont à tort écarté le moyen invoqué à cet égard, alors qu'il se prévalait d'une main courante, du dépôt d'une plainte, d'une ordonnance et d'un certificat médical ; il souffre d'un syndrome anxiodépressif majeur nécessitant un suivi psychiatrique.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 janvier 2025, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête de M. A...
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une décision du 23 juin 2023, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Toulouse a accordé à M. A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Par une ordonnance du 6 janvier 2025, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 10 février 2025 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bentolila, président-assesseur a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain né le 13 décembre 1967, a épousé dans son pays une ressortissante française. Il est entré en France le 3 décembre 2020 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour valant titre de séjour portant la mention " conjoint de français " dont la durée de validité expirait le 30 octobre 2021. M. A... a sollicité, le 23 septembre 2021, le renouvellement de son titre de séjour en qualité de " conjoint de français " ou au titre de la " vie privée et familiale ". M. A... a demandé devant le tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
2. M. A... relève appel du jugement n° 2201934 du 1er juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2021.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Pour écarter le moyen invoqué par M. A..., tiré de ce que l'arrêté du 28 octobre 2021 devait être regardé comme valant retrait de son visa de long séjour valant titre de séjour et être précédé ainsi d'une procédure contradictoire, les premiers juges ont retenu, au point 5 de leur décision, que cet arrêté procédait seulement au rejet de la demande de titre de séjour en qualité de " conjoint de français " et de " salarié " dont le préfet avait été saisi le 27 septembre 2021. Ce faisant, les premiers juges ont suffisamment motivé leur décision.
Sur la légalité des décisions en litige :
En ce qui concerne le moyen commun aux décisions en litige :
4. Par un arrêté n° 2021-I-809 du 19 juillet 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 106 du 19 juillet 2021, le préfet de l'Hérault a accordé à M. B... Laurent, sous-préfet, nommé secrétaire général de la préfecture de l'Hérault par décret du 27 mai 2020, une délégation à l'effet de signer " tous actes, arrêtés, décisions (...) relevant des attributions de l'État dans le département de l'Hérault (...), à l'exception, d'une part des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 relative à l'organisation générale de la nation en temps de guerre, d'autre part de la réquisition des comptables publics régie par le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique. / À ce titre, cette délégation comprend donc, notamment, la signature de tous les actes administratifs et correspondances relatifs au séjour et à la police des étrangers (...) ". Cette délégation de signature, qui, compte tenu des exceptions qu'elle prévoit, n'est pas d'une portée trop générale, habilitait ainsi M. Laurent à signer l'arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français en litige. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
5. En premier lieu, l'arrêté en litige du 28 octobre 2021 a été signé alors que le visa de long séjour, valant titre de séjour, dont M. A... était titulaire était encore valable jusqu'au 30 octobre 2021. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cet arrêté n'a été notifié à M. A... que le 3 novembre 2021, et n'est donc entré en vigueur qu'à cette dernière date, postérieure à celle de l'expiration du titre précédemment délivré. Dans ces conditions, l'arrêté du 28 octobre 2021 ne peut être regardé comme ayant prononcé un retrait du visa de long séjour valant titre de séjour dont bénéficiait M. A..., ce qui aurait imposé au préfet de mettre en œuvre une procédure contradictoire en invitant l'intéressé à présenter des observations préalables. Le moyen invoqué par M.A... doit donc être écarté.
6. En second lieu, aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; 3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". Aux termes de l'article L. 423-3 du même code : " Lorsque la rupture du lien conjugal ou la rupture de la vie commune est constatée au cours de la durée de validité de la carte de séjour prévue aux articles L. 423-1 ou L. 423-2, cette dernière peut être retirée. Le renouvellement de la carte est subordonné au maintien du lien conjugal et de la communauté de vie avec le conjoint qui doit avoir conservé la nationalité française ". Aux termes de l'article L. 423-5 du même code : " La rupture de la vie commune n'est pas opposable lorsqu'elle est imputable à des violences familiales ou conjugales. En cas de rupture de la vie commune imputable à des violences familiales ou conjugales subies après l'arrivée en France du conjoint étranger, mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer la carte de séjour prévue à l'article L. 423-1 sous réserve que les autres conditions de cet article soient remplies. ".
7. Les dispositions précitées ont créé un droit particulier au séjour au profit des personnes victimes de violences conjugales ayant conduit à la rupture de la vie commune avec leur conjoint de nationalité française. Dans ce cas, le renouvellement du titre de séjour n'est pas conditionné au maintien de la vie commune. Il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une telle demande, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, l'existence de violences conjugales ayant conduit à la rupture de la vie commune du demandeur avec son conjoint de nationalité française.
8. En l'espèce, pour établir la réalité des violences conjugales dont il aurait été victime de la part de sa conjointe, M. A... produit une déclaration de main-courante du 14 avril 2021 faisant état de violences et une plainte pour harcèlement déposée le 6 mai 2021 dans un commissariat de police de Montpellier. Toutefois, faute pour M. A... de produire d'autres éléments plus circonstanciés, tels que des témoignages de tiers qui accréditeraient les violences conjugales alléguées, ces dernières ne peuvent être regardées comme suffisamment établies. Elles ne le sont pas davantage par la seule mention figurant sur l'attestation du 6 avril 2022 d'un psychiatre selon laquelle M. A... " aurait subi des violences de la part de sa conjointe ".
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir, qu'en refusant le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de français, le préfet de l'Hérault aurait commis une erreur de fait et une erreur d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault
Délibéré après l'audience du 13 mai 2025, à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El-Gani Laclautre première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mai 2025.
Le président-assesseur,
P. Bentolila
Le président,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23TL01673 2