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06/05/2025 | FRANCE | N°23TL01743

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 06 mai 2025, 23TL01743


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2021 par lequel le maire de Mazan a prononcé à son encontre un blâme et de mettre à la charge de la commune de Mazan la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 2104322 du 29 juin 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une ordonnance du 20 juillet 2023, la présidente de la cour admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2021 par lequel le maire de Mazan a prononcé à son encontre un blâme et de mettre à la charge de la commune de Mazan la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2104322 du 29 juin 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance du 20 juillet 2023, la présidente de la cour administrative de Marseille a transmis à la cour administrative d'appel de Toulouse le dossier de la requête de Mme A....

Par une requête enregistrée le 20 juillet 2023, Mme B... A..., représentée par Me Knoepfli, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nîmes du 29 juin 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2021 par lequel le maire de Mazan a prononcé à son encontre un blâme ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mazan une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas motivé sa décision et n'a pas répondu à ses développements ;

- il a fondé sa décision sur un raisonnement erroné ;

- la sanction est fondée sur des faits inexistants ou inexacts, faisant référence à un rapport confus n'expliquant pas l'ordre qui n'aurait pas été effectué ;

- l'ordre qui lui a été donné était confus, relatif à une réglementation inintelligible et susceptible de caractériser une violation de la loi ;

- la sanction n'est pas justifiée et est disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2024, la commune de Mazan, représentée par Me Petit, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 4 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 4 octobre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de la route ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Virginie Dumez-Fauchille, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Teyssier, représentant la commune de Mazan.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 26 octobre 2021, le maire de Mazan (Vaucluse) a sanctionné Mme A..., brigadier-chef principal, d'un blâme. Par jugement du 29 juin 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de Mme A... tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme A... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. La magistrate désignée a, dans le jugement litigieux, considéré que l'ordre donné à Mme A... n'était pas manifestement illégal, tout en relevant le caractère confus des panneaux de signalisation au droit du chemin de Picuey, ce qui ne caractérise pas une insuffisance de motivation du jugement.

4. En deuxième lieu, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur de raisonnement qu'aurait commise la magistrate désignée, qui se rapporte au bien-fondé du jugement et non à sa régularité, ne peut être utilement invoqué.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. Aux termes de l'article 28 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires alors en vigueur : " Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. ". Aux termes de l'article 29 de la même loi : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : l'avertissement ; le blâme ; (...) / Parmi les sanctions du premier groupe, seuls le blâme et l'exclusion temporaire de fonctions sont inscrits au dossier du fonctionnaire. Ils sont effacés automatiquement au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période ; (...). ".

6. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

7. L'arrêté du 26 octobre 2021 par lequel le maire de Mazan a sanctionné Mme A... d'un blâme se fonde sur ce que cette dernière a refusé d'exécuter un ordre reçu de l'autorité hiérarchique, visant notamment l'application d'un arrêté municipal du 16 avril 2021.

8. En premier lieu, par arrêté du 18 février 2020, le maire de Mazan a instauré une zone de rencontre affectée à la circulation de tous les usagers sur le chemin du Picuey, dans laquelle, notamment, la vitesse des véhicules autorisés est limitée à 20km/h, les piétons bénéficient de la priorité sur les véhicules et l'arrêt et le stationnement des véhicules sont interdits, et, par arrêté du 16 avril 2021, cette même autorité a interdit, sur le chemin de Picuey, la circulation de tous véhicules à moteurs, exception faite des riverains et des véhicules de secours et de service. Ces arrêtés ont été matérialisés par un panneau de zone de rencontre et par un panneau d'interdiction de circulation des véhicules terrestres accompagnés des panonceaux " sauf riverains " et " sauf service ". Il ressort des pièces du dossier, en particulier du courriel adressé le 4 août 2021 aux services de police rurale, que l'élu en charge de la sécurité, évoquant la signalisation interdisant aux véhicules à moteur de circuler dans le chemin sauf riverains, a demandé d'effectuer de nombreux stationnements dans le chemin de Picuey afin de faire respecter le code de la route, et que Mme A... a refusé d'exécuter cette tâche, comme le rapporte l'élu dans son rapport dressé le 16 août 2020 et comme l'admet l'intéressée dans ses écritures. Dès lors la matérialité des faits sur lesquels l'arrêté litigieux se fonde est établie.

9. En second lieu, aux termes de l'article 21 du code de procédure pénale : " Sont agents de police judiciaire adjoints : (...) 2° Les agents de police municipale ; (...). ". Aux termes de l'article R. 130-2 du code de la route : " Les agents de police judiciaire adjoints mentionnés au 2° de l'article 21 du code de procédure pénale peuvent constater par procès-verbal, lorsqu'elles sont commises à l'intérieur du territoire communal : 1° Sur les voies autres que les autoroutes, les contraventions aux articles R. 644-2 et R. 653-1 du code pénal commises à l'occasion de la conduite d'un véhicule ainsi que les contraventions aux dispositions du présent code à l'exception de celles prévues aux articles R. 121-1 à R. 121-5, R. 221-18, R. 222-2, R. 234-1, R. 314-2, R. 411-32, R. 419-1, R. 412-51, R. 412-52 et R. 413-15 ; (...). ". Aux termes de l'article R. 411-17 du même code : " Le fait, pour tout conducteur, de ne pas respecter l'interdiction permanente d'accès de certaines routes à certaines catégories de véhicules, prise par l'autorité investie du pouvoir de police en application des articles L. 411-1 à L. 411-5-1 pour prévenir un danger pour les usagers de la voie, est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions que les agents de police municipale sont compétents pour constater les infractions à la réglementation établie par les panneaux de signalisation sur une voie communale. En outre, contrairement à ce que soutient Mme A..., la circonstance que le chemin de Picuey soit réglementé à la fois comme une zone de rencontre et comme une voie interdite aux véhicules terrestres à moteur sauf riverains et service implique le respect des deux corps de règles en cause, dont l'incompatibilité n'est d'ailleurs pas établie, et ne faisait pas obstacle à ce que des stationnements soient effectués au droit de ce chemin afin de vérifier le respect de la réglementation en cause. Dès lors, l'appelante n'est pas fondée à invoquer l'illégalité manifeste de l'ordre donné, ni son caractère confus, ni encore l'impossibilité de son exécution. Eu égard à la faute commise, constituée par le refus d'obéissance hiérarchique de Mme A..., la sanction d'un blâme, sanction du premier groupe, n'est pas disproportionnée. Par suite, le maire de Mazan n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées des articles 28 et 29 de la loi du 13 juillet 1983 et de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984.

11. Il résulte de toute ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur les frais exposés à l'occasion du litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Mazan, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 000 euros à verser à la commune de Mazan sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera à la commune de Mazan une somme de 1 000 (mille) euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Mazan.

Délibéré après l'audience du 8 avril 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Teuly-Desportes, présidente assesseure,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2025.

La rapporteure,

V. Dumez-Fauchille

La présidente,

A. Geslan-DemaretLa greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N°23TL01743


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01743
Date de la décision : 06/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Virginie Dumez-Fauchille
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : KNOEPFLI

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-06;23tl01743 ?
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