Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 24 juin 2021 par lequel la préfète du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2104888 du 16 juin 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 23 octobre 2023 et le 6 mars 2024, M. B..., représenté par Me Dujardin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 juin 2023 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 juin 2021 de la préfète du Tarn ;
3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;
- la préfète s'est estimée liée par l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- elle n'a pas été mise en mesure de vérifier la régularité de la composition de ce collège et son avis devra être communiqué pour s'assurer du caractère régulier de son contenu ;
- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché sur ce point d'une erreur de fait substantielle ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est privée de base légale ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2023, le préfet du Tarn conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B... n'est fondé.
Par une ordonnance du 6 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 mars 2024.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Lafon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité nord macédonienne, fait appel du jugement du 16 juin 2023 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 juin 2021 par lequel la préfète du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ".
3. Le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, dans un avis du 28 mai 2021, que si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et son état de santé lui permet de voyager sans risque à destination de son pays d'origine.
4. En premier lieu, la décision de refus de titre de séjour, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, notamment des éléments précis concernant la situation personnelle de M. B..., est suffisamment motivée.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 425-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. (...) Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'office ". Le préfet du Tarn a versé au dossier l'avis du 28 mai 2021 par lequel le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration s'est prononcé sur l'état de santé de M. B.... D'une part, il ressort des mentions de cet avis, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, qu'il a été rendu collégialement et que le médecin qui a établi le rapport médical relatif à l'intéressé n'a pas siégé au sein du collège. D'autre part, le moyen tiré de l'irrégularité formelle de cet avis n'est pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. Dans ces conditions, les moyens tirés du vice de procédure doivent être écartés.
6. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Tarn ne s'est pas livrée à un examen particulier de l'ensemble de la situation de M. B... avant de prendre la décision contestée ou qu'elle se serait estimée liée par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 28 mai 2021.
7. En quatrième lieu, afin de contester les mentions de cet avis, M. B..., qui a levé le secret médical, produit notamment des certificats médicaux qui établissent qu'il est suivi depuis le mois de juillet 2020 pour une affection psychiatrique sévère, nécessitant une prise en charge spécialisée et un traitement médicamenteux adapté. Toutefois, ces certificats, qui ne sont pas étayés s'agissant de la nature des conséquences susceptibles de survenir en cas de défaut de prise en charge médicale et qui reposent en partie sur les simples déclarations de l'intéressé, selon lesquelles son état serait consécutif au traumatisme subi lors d'un incendie domestique dont il aurait été victime en 2015 en Macédoine du Nord, sont insuffisants, alors d'ailleurs que certains sont largement postérieurs à l'arrêté attaqué, pour remettre en cause l'appréciation portée par le collège de médecins. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le défaut de prise en charge médicale risquait d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Enfin, l'appelant ne peut utilement se prévaloir de la circonstance qu'il ne pourrait effectivement bénéficier des soins dont il relève en Macédoine du Nord, dès lors que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur de fait substantielle doit être écarté.
8. En cinquième lieu, M. B..., qui est né le 5 juillet 1986, déclare être entré en France pour la dernière fois en octobre 2019. Il est célibataire et sans charge de famille et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où réside notamment un de ses frères. Enfin et en tout état de cause, il résulte de ce qui a été dit au point 7 qu'un défaut de prise en charge médicale de M. B... n'est pas de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ces conditions, les seules circonstances qu'il est pris en charge par sa mère, qui réside régulièrement en France, tout comme sa sœur et deux autres frères, sont insuffisantes pour admettre que la décision portant refus de titre de séjour a porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En dernier lieu, aucune des circonstances évoquées précédemment n'est de nature à faire regarder la décision attaquée comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen, dirigé contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.
11. En deuxième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. La motivation du refus de titre de séjour étant, ainsi qu'il a été dit au point 4, suffisante, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté.
12. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Tarn ne s'est pas livrée à un examen particulier de l'ensemble de la situation de M. B... avant de prendre la décision portant obligation de quitter le territoire français.
13. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". Compte tenu de ce qui a été dit au point 7 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait ces dispositions doit être écarté.
14. En cinquième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 9 du présent arrêt, le moyen selon lequel la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B... doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
15. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen, dirigé contre la décision fixant le pays de renvoi, tiré de l'illégalité, par voie d'exception, des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Tarn.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2025, où siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Fougères, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mars 2025.
Le rapporteur,
N. Lafon
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL02488