Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... et Mme E... A... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 18 septembre 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a déclaré cessibles des parcelles en vue du projet d'aménagement des routes départementales n°115 et 618 entre le Boulou et Céret, subsidiairement, d'abroger l'arrêté du 28 juillet 2011 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a déclaré ce projet d'utilité publique et mis en compatibilité les plans d'occupations des sols valant plans locaux d'urbanisme des communes de Saint-Jean-Pla-de-Corts et Céret, ainsi que l'arrêté du 26 janvier 2016 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a prorogé la durée de validité de l'arrêté du 28 juillet 2011, et d'annuler, par voie de conséquence, l'arrêté du 18 septembre 2020, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2100225 du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes et a mis à leur charge la somme globale de 1 500 euros à verser au département des Pyrénées-Orientales au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, un mémoire et un mémoire en production de pièce, enregistrés le 18 juin 2023, le 26 août 2024 et le 2 septembre 2024, M. B... C... et Mme E... A..., représentés par Me Balaguer, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 avril 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 septembre 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a déclaré cessibles des parcelles en vue du projet d'aménagement des routes départementales n°115 et 618 entre Le Boulou et Céret, ensemble la décision par laquelle cette même autorité a implicitement rejeté leur recours gracieux formé contre cet arrêté ;
3°) de mettre solidairement à la charge de l'Etat et du département des Pyrénées-Orientales une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement n'est pas suffisamment motivé, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, à propos du coût du projet, et en ce qu'il n'aborde ni l'atonie de la croissance démographique en Vallespir depuis la fin des années 2000, ni les critères posés par le schéma de cohérence territoriale Littoral Sud aux fins de préservations des mas d'intérêt patrimonial, dont le mas ..., ni les inconvénients d'ordres sociaux qui sont attachés à la procédure d'expropriation ;
- les premiers juges ont, à tort écarté le moyen tiré de ce que le projet présente davantage d'inconvénients que d'avantages ;
- le tribunal a, à tort, rejeté comme irrecevables les conclusions subsidiaires tendant à l'abrogation de l'arrêté portant déclaration d'utilité publique ;
- l'étude d'impact est incomplète et ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 122-3 I et II du code de l'environnement
- l'avis du commissaire enquêteur n'est pas correctement motivé et ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 11-10 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- une nouvelle enquête publique s'imposait, compte tenu de la modification du projet postérieurement à la déclaration d'utilité publique ;
- le projet n'est pas d'utilité publique, dès lors qu'il ne poursuit pas un but d'intérêt général, et qu'il présente plus d'inconvénients que d'avantages ;
- la déclaration d'utilité publique est contraire aux dispositions du II de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme issu de la loi Montagne ;
- l'enquête publique devait être conduite par une commission d'enquête assistée d'un expert ; elle a été conduite par un commissaire-enquêteur ne présentant pas les garanties d'impartialité et d'indépendances requises, en méconnaissance des articles L. 123-6 et R. 123-9 du code de l'environnement ;
- l'enquête publique aurait dû être organisée sur un territoire plus vaste, la procédure a été menée en méconnaissance des articles R. 123-13 4°, R. 123-14 R. 123-7 du code de l'environnement ;
- l'enquête publique n'a pas été organisée de manière à ce que la participation du public soit la plus grande possible, en méconnaissance de l'article R. 123-16 du code de l'environnement ;
- le dossier soumis à enquête publique était incomplet et ne satisfaisait pas aux prescriptions de l'article R. 123-6 du code de l'environnement ;
- le commissaire enquêteur n'a pas transmis le dossier requis dans le délai d'un mois à compter de la fin de l'enquête publique au préfet, en méconnaissance de l'article R. 123-22 du code de l'environnement ;
- une nouvelle enquête publique aurait dû être organisée dès lors que les travaux n'ont pas été entrepris dans le délai requis, en application des articles L. 123-17 et R. 123-24 du code de l'environnement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense enregistrés le 9 février 2024 et le 5 novembre 2024, le département des Pyrénées-Orientales, représenté par Centaure avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. C... et Mme A... une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 6 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 6 décembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Virginie Dumez-Fauchille, première conseillère,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,
- et les observations de Me Maillard, substituant Me Balaguer, représentant M. C... et Mme A..., et de Me Lacoeuilhe, représentant le département des Pyrénées-Orientales.
Une note en délibéré, présentée pour M. C... et Mme A..., a été enregistrée le 11 mars 2025.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 28 juillet 2011, le préfet des Pyrénées-Orientales a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement des routes départementales n° 115 et n° 618 entre Le Boulou et Céret, emportant mise en compatibilité des plans d'occupation des sols valant plans locaux d'urbanisme des communes de Saint-Jean-Pla-de-Corts et Céret. Par arrêté du 26 janvier 2016, cette même autorité a prorogé la durée de validité de l'arrêté du 28 juillet 2011. Par un arrêté du 18 novembre 2020, le préfet a déclaré cessibles, au bénéfice du département des Pyrénées-Orientales, les parcelles de terrain nécessaires à ce projet d'aménagement routier. Par jugement du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande d'annulation de l'arrêté du 18 novembre 2020 et la demande subsidiaire d'abrogation des arrêtés du 28 juillet 2011 et du 26 janvier 2016. M. C... et Mme A... relèvent appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".
3. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Montpellier a expressément répondu aux moyens contenus dans les écritures des requérants. En particulier, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les requérants, n'a pas omis de répondre au moyen tiré des inconvénients excessifs de l'opération par rapport à ses avantages.
4. Il résulte de la teneur des écritures de M. C... et Mme A... que ces derniers ont demandé, en première instance, à titre principal, l'annulation de l'arrêté de cessibilité du 28 septembre 2020 et à titre subsidiaire, l'abrogation de l'arrêté du 28 juillet 2011, ensemble l'arrêté du 26 janvier 2016, portant respectivement déclaration d'utilité publique et prorogation de cette déclaration et l'annulation par voie de conséquence de l'arrêté de cessibilité du 28 septembre 2020. Les premiers juges n'étaient donc ainsi pas saisis d'une demande d'annulation des arrêtés du 28 juillet 2011 et du 26 janvier 2016 à titre principal, ni d'ailleurs d'une demande d'annulation d'un refus d'abroger ces mêmes arrêtés. Dès lors, le jugement, en tant qu'il rejette comme irrecevables les conclusions subsidiaires tendant à ce que le tribunal prononce l'abrogation de cet arrêté au motif d'une illégalité résultant d'un changement de circonstances de droit ou de fait postérieur à son édiction et l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêté de cessibilité du 18 novembre 2020, n'est pas entaché d'irrégularité.
5. En dernier lieu, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur qu'auraient commise les premiers juges en écartant le moyen tiré de ce que le projet présente davantage d'inconvénients que d'avantages, qui se rapporte au bien-fondé du jugement et non à sa régularité, ne peut être utilement invoqué.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'arrêté du 28 juillet 2011 portant déclaration d'utilité publique :
6. L'arrêté de cessibilité, l'acte déclaratif d'utilité publique sur le fondement duquel il a été pris et la ou les prorogations dont cet acte a éventuellement fait l'objet constituent les éléments d'une même opération complexe. Dès lors, à l'appui de conclusions dirigées contre l'arrêté de cessibilité, un requérant peut utilement se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la déclaration d'utilité publique ou de l'acte la prorogeant, y compris des vices de forme et de procédure dont ils seraient entachés, quand bien même le requérant aurait vu son recours en excès de pouvoir contre la déclaration d'utilité publique ou l'acte la prorogeant, être rejeté.
7. En premier lieu, aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I.- Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : (...) 3° Le plan général des travaux ; (...) 6° L'étude d'impact définie à l'article R. 122-3 du code de l'environnement, lorsque les ouvrages ou travaux n'en sont pas dispensés ou, s'il y a lieu, la notice exigée en vertu de l'article R. 122-9 du même code ; (...). ". Aux termes de l'article R. 122-3 du code de l'environnement, dans sa version applicable au présent litige : " I. - Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. II. - L'étude d'impact présente successivement : 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés qui font l'objet d'une description, le projet présenté a été retenu ; 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ; 5° Une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement mentionnant les difficultés éventuelles de nature technique ou scientifique rencontrées pour établir cette évaluation ; 6° Pour les infrastructures de transport, l'étude d'impact comprend en outre une analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité ainsi qu'une évaluation des consommations énergétiques résultant de l'exploitation du projet, notamment du fait des déplacements qu'elle entraîne ou permet d'éviter.(...) ".
8. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
9. Tout d'abord, l'étude d'impact contenue dans le dossier d'enquête publique analyse les effets de l'opération sur le château d'Aubiry, inscrit au titre des monuments historiques. Il ressort des pièces du dossier que le mas ..., propriété de l'appelante ne fait l'objet d'aucune protection au titre des moments historiques ou des sites patrimoniaux remarquables, ni au titre du document d'urbanisme, les appelants ne pouvant se fonder à cet égard sur ce que le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale Littoral Sud fixe comme objectif l'identification dans les plans locaux d'urbanisme les " mas d'intérêt patrimonial ponctuant les espaces boisés " en l'absence d'identification de ce mas par le plan local d'urbanisme de la commune de Céret. La seule circonstance que cette bâtisse présente un style traditionnel par sa structure en pierre et sa couverture en tuiles, et ait un passé historique particulier par les personnes qu'elle a hébergées, ne justifiait pas qu'elle fasse l'objet d'une analyse particulière dans l'étude d'impact, au titre de l'analyse des effets de l'opération sur le patrimoine culturel, l'étude mentionnant au demeurant, par ailleurs, la présence de mas isolés dans la zone concernée.
10. Ensuite, l'étude d'impact comprend une analyse comparative de différentes variantes du projet d'aménagement des routes départementales RD n°115 et 618, et mentionne que le tracé alors envisagé par le maître d'ouvrage, lequel " s'écarte autant que possible du bâti existant ", dont le mas dont Mme A... est propriétaire, n'affecte qu'un cabanon. Les appelants ne peuvent utilement invoquer une modification du tracé de l'aménagement routier projeté à l'issue de l'enquête publique, qui affecte désormais ce mas, pour soutenir que l'étude d'impact serait insuffisante quant aux nuisances auxquelles seront exposés les occupants concernés. L'étude d'impact fait par ailleurs état des nuisances sonores du projet, ainsi que de la présence de poussière au cours des travaux, et analyse l'impact sur le paysage, et les mesures prises pour limiter l'impact visuel, par des alignements d'arbres, le maintien d'une ambiance boisée, ou par l'encaissement du profil de la route, et ce en particulier au voisinage des zones habitées. Si l'étude d'impact n'évoque pas les effets sur le voisinage d'éventuelles vibrations, une telle omission n'a pas pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ni n'a été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative, l'existence de tels effets n'étant pas établie. Alors par ailleurs que les appelants ne peuvent utilement invoquer l'insuffisance des mesures compensatrices prévues au soutien de leur moyen relatif à l'incomplétude de l'étude d'impact, cette dernière n'est pas insuffisante au regard de l'analyse des effets sur la commodité du voisinage.
11. Par ailleurs, l'étude d'impact aborde la sécurité des riverains et des usagers, en tenant compte d'une hypothèse de croissance de trafic de 1% par an, concluant à " un plus indéniable " pour la sécurité des riverains de Saint-Jean-Pla-de-Corts, du fait de la baisse du trafic sur la route départementale n°115 traversant le village et du désengorgement de cet axe entre Céret et Le Boulou. Alors que l'étude d'impact mentionne en outre les statistiques d'accidents également sur la route départementale n°618, dont le nombre est considéré comme " relativement faible ", et que le projet prévoit la création de giratoires, facteurs de modération de la vitesse des usagers, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que l'absence d'évocation d'une dangerosité accrue de cet axe caractériserait une insuffisance de l'étude d'impact quant aux conséquences du projet sur la sécurité des déplacements.
12. En outre, si, comme le soulignent les appelants, l'étude d'impact mentionne l'existence d'une zone Natura 2000 et de deux inventaires de zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) dans la zone d'étude, " Les Aspres " et " Le Vallespir ", elle ne fait pas état de l'inventaire ZNIEFF de type I " Vallée du Tech de Céret à Ortaffa " et de l'inventaire ZNIEFF de type II " Rivière Le Tech ", dont la publication était contemporaine de l'élaboration de l'étude d'impact, comme l'a relevé la Mission régionale de l'autorité environnementale dans son avis du 26 juillet 2010, laquelle souligne cependant le caractère complet de l'analyse de l'état initial du site et de son environnement. Toutefois, cette seule circonstance du défaut de mention de ces récents inventaires ZNIEFF ne traduit pas une insuffisance de l'étude d'impact, alors par ailleurs que cette dernière analyse et inventorie la faune et la flore relevées sur le site, dont la faune avicole et la faune aquatique vivant dans la rivière du Tech. En outre, si l'étude d'impact mentionne que les investigations réalisées pour les habitats " Natura 2000 " en juillet 2007 ont montré que l'émyde lépreuse n'était pas présente dans le secteur d'étude, elle fait également état de ce que cette espèce est très fortement potentielle sur la zone d'étude, et n'est donc pas contredite par la mention dans l'inventaire ZNIEFF d'une observation d'un spécimen de l'espèce en 2008. Par ailleurs, l'étude d'impact analyse les effets du projet tant à l'égard des chiroptères, de la faune aquatique, qu'à l'égard de la faune avicole, en particulier les oiseaux ripisylves, dont la présence est détaillée dans l'analyse de l'état initial du site, et mentionne sur ce point les impacts du projet sur les habitats et déplacements des chiroptères, la dégradation de ripisylves et d'espaces boisés et les mesures réductrices envisagées.
13. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les appelants, l'étude d'impact comporte une étude paysagère, détaillant l'aménagement paysager de la voie en vue de son intégration, tandis que les dispositions rappelées au point 7 n'impliquent pas que soit chiffrée dans l'étude d'impact la quantité d'eau rendue nécessaire par la réalisation du projet. Quant aux effets de la phase de chantier du projet, l'étude indique que la phase de travaux entraînera une altération du paysage pour les riverains et agriculteurs, et souligne le caractère provisoire de ces effets et la prise des mesures nécessaires pour y remédier en fin de travaux, les appelants ne démontrant pas à cet égard en quoi l'étude serait insuffisante sur ce point. Par suite, ces derniers ne sont pas fondés à soutenir que l'étude d'impact ne satisferait pas aux prescriptions, rappelées au point 7, de l'article R. 122-3 du code de l'environnement.
14. En deuxième lieu, M. C... et Mme A..., qui soulèvent l'incomplétude du dossier soumis à enquête publique compte tenu de l'absence du plan général des travaux, en méconnaissance de l'article R. 123-6 du code de l'environnement, doivent être regardés comme soulevant la méconnaissance des dispositions rappelées au point 7 de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Il ressort du rapport du commissaire-enquêteur que ce dernier, détaillant le contenu du dossier, a précisé qu'il contenait 5 pièces dont " la pièce D : plan général des travaux ", et fait état de ce que toutes ces pièces ont été contrôlées et paraphées par lui dans chaque mairie concernée préalablement à l'ouverture de l'enquête publique. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier d'enquête publique ne comportait pas de plan général des travaux.
15. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 123-4 du code de l'environnement, dans sa version applicable : " (...) L'enquête mentionnée à l'article L. 123-1 est conduite, selon la nature et l'importance des opérations, par un commissaire enquêteur ou une commission d'enquête désignés par le président du tribunal administratif ou le membre du tribunal délégué par lui à cette fin. (...) ". Aux termes de l'article R. 11-14-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, alors en vigueur : " Le préfet saisit, en vue de la désignation d'un commissaire enquêteur ou d'une commission d'enquête, le président du tribunal administratif dans le ressort duquel doit être réalisée l'opération ou la plus grande partie de l'opération soumise à enquête et lui adresse à cette fin une demande précisant l'objet de l'enquête ainsi que la période d'enquête retenue. ".
16. M. C... et Mme A..., qui soulèvent la méconnaissance de l'article L. 123-4 du code de l'environnement en ce que le choix de nommer un commissaire-enquêteur et non une commission d'enquête au regard de la nature et l'importance du projet, doivent être regardés comme soulevant la méconnaissance de l'article R. 11-14-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique alors en vigueur. Par arrêté du 29 juillet 2010, le préfet des Pyrénées-Orientales a prescrit l'ouverture des enquêtes publiques conjointes portant sur l'utilité publique des travaux relatifs au projet d'aménagements des routes départementales RD 115 et RD 618 sur le territoire des communes de Vivès, Saint-Jean-Pla-de-Corts et Céret et portant mise en compatibilité des documents d'urbanisme de ces deux dernières communes. Eu égard à la nature et à l'importance de l'opération en cause, le préfet des Pyrénées-Orientales a pu décider, sans entacher d'irrégularité l'enquête publique, de confier la conduite de cette enquête à un commissaire-enquêteur et non à une commission d'enquête.
17. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 123-6 du code de l'environnement, dans sa version applicable au présent litige : " Ne peuvent être désignées comme commissaires enquêteurs ou comme membres de la commission d'enquête les personnes intéressées à l'opération à titre personnel ou en raison de leurs fonctions, notamment au sein de la collectivité, de l'organisme ou du service qui assure la maîtrise d'ouvrage, la maîtrise d'œuvre ou le contrôle de l'opération soumise à enquête. Aux termes de l'article R. 123-9 du code de l'environnement, dans sa version applicable au présent litige : " Ne peuvent être désignées pour exercer les fonctions de commissaire enquêteur les personnes intéressées à l'opération soit à titre personnel, soit en raison des fonctions qu'elles exercent ou ont exercées depuis moins de cinq ans, notamment au sein de la collectivité, de l'organisme ou du service qui assure la maîtrise d'ouvrage, la maîtrise d'œuvre ou le contrôle de l'opération soumise à enquête, ou au sein des associations concernées par cette opération. ". Aux termes de l'article R. 11-14-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Ne peuvent être désignées pour exercer les fonctions de commissaire enquêteur les personnes intéressées à l'opération soit à titre personnel, soit en raison des fonctions qu'elles exercent ou ont exercées depuis moins de cinq ans. ".
18. M. C... et Mme A..., qui soulèvent la méconnaissance des articles L. 123-6 et R. 123-9 du code de l'environnement, tenant à la partialité du commissaire-enquêteur, doivent être regardés comme soulevant la méconnaissance de l'article R. 11-14-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique alors en vigueur. La circonstance que le commissaire-enquêteur, M. D..., attaché territorial du service urbanisme et environnement à la retraite, était membre du conseil municipal de la commune de Canet-en-Roussillon et occupait à une époque contemporaine de l'enquête publique les fonctions d'adjoint aux travaux et à l'urbanisme ne suffit pas à elle seule à démontrer le manque d'indépendance ou d'impartialité de l'intéressé, quand bien même le département est institutionnellement voire financièrement lié aux communes de son ressort et alors qu'il n'est ni établi ni même allégué qu'il aurait un intérêt personnel dans cette affaire. Par suite, M. C... et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que l'enquête publique a été conduite par un commissaire-enquêteur ne présentant pas les garanties d'impartialité et d'indépendance requises par les dispositions rappelées au point précédent.
19. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 123-13 du code de l'environnement dans sa version applicable au présent litige : " Le préfet, après consultation du commissaire enquêteur ou du président de la commission d'enquête, précise par arrêté : (...) 4° Les lieux, jours et heures où le commissaire enquêteur ou un membre de la commission d'enquête se tiendra à la disposition du public pour recevoir ses observations ; ( ...). ". Aux termes de l'article R. 123-14 du même code, dans sa version applicable au présent litige : " Quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et durant toute la durée de celle-ci, cet avis est publié par voie d'affiches et, éventuellement, par tous autres procédés, dans chacune des communes désignées par le préfet. Cette désignation porte au minimum sur toutes les communes sur le territoire desquelles l'opération doit avoir lieu. (...) ". Aux termes de l'article R. 11-14-7 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et durant toute la durée de celle-ci, cet avis est publié par voie d'affiches et, éventuellement, par tous autres procédés, dans chacune des communes désignées par le préfet ; cette désignation porte au minimum sur toutes les communes sur le territoire desquelles l'opération doit avoir lieu.".
20. M. C... et Mme A..., qui soulèvent la méconnaissance de l'article R. 123-14 du code de l'environnement tenant à ce que, compte tenu de l'ampleur du projet, il aurait dû être procédé à une enquête publique au-delà des seules communes territorialement concernées par l'emprise du projet, doivent être regardés comme soulevant la méconnaissance de l'article R. 11-14-7 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique alors en vigueur. Il ressort des pièces du dossier que l'emprise du tracé de l'aménagement routier projeté concerne les territoires des communes de Céret, Saint-Jean-Pla-de-Corts et Vivès. Par arrêté du 29 juillet 2010, le préfet des Pyrénées-Orientales a prescrit l'ouverture de l'enquête publique et désigné ces trois communes en application de l'article R. 11-14-7 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Dès lors que ces dispositions n'imposent pas la désignation de communes autres que celles sur le territoire desquelles l'opération doit avoir lieu, M. C... et Mme A... ne peuvent utilement invoquer le rayonnement intercommunal du projet et ses conséquences sur la desserte et le développement de communes voisines.
21. En sixième lieu, aux termes de l'article R. 123-16 du code de l'environnement dans sa version applicable au présent litige : " Les jours et heures où le public pourra consulter le dossier et présenter ses observations sont fixés de manière à permettre la participation de la plus grande partie de la population, compte tenu notamment de ses horaires normaux de travail ; ils comprennent au minimum les jours et heures habituels d'ouverture au public de chacun des lieux où est déposé le dossier ; ils peuvent en outre comprendre plusieurs demi-journées prises parmi les samedis, dimanches et jours fériés. ". Aux termes de l'article R. 11-14-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Le préfet, après consultation du commissaire enquêteur ou du président de la commission d'enquête, précise par arrêté: (...) 3° Les lieux, jours et heures où le public pourra consulter le dossier d'enquête et présenter ses observations sur le registre ouvert à cet effet ; ces jours comprennent au minimum les jours habituels d'ouverture au public du lieu de dépôt du dossier et peuvent en outre comprendre plusieurs demi-journées prises parmi les samedis, dimanches et jours fériés ; (...) 5° Les lieux, jours et heures où le commissaire enquêteur ou un membre de la commission d'enquête se tiendra à la disposition du public pour recevoir ses observations ; (...). ".
22. Si M. C... et Mme A... invoquent la méconnaissance de l'article L. 123-16 du code de l'environnement, elles sont inapplicables au présent litige, seule la méconnaissance de l'article R.11-14-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique pouvant être invoquée. D'une part, ces dispositions rappelées au point précédent n'imposent pas que les jours et horaires de consultation comprennent des heures en soirée ou des demi-journées prises parmi les samedis, dimanches et jours fériés mais ouvrent seulement à l'autorité chargée de l'organisation de l'enquête la faculté de le prévoir. D'autre part, d'après le rapport du commissaire-enquêteur, un total de 34 personnes se sont rendues aux permanences tenues, respectivement à Céret lundi 20 septembre 2010 de 9h à 12h, à Vivès jeudi 7 octobre 2010 de 9h à 12h30 et à Saint-Jean-Pla-de-Corts mardi 12 octobre de 14h à 17h, tandis que 260 personnes ont signé les registres d'enquête publique et 203 observations ont été enregistrées par le commissaire enquêteur, formulées verbalement, par inscription au registre ou par courrier. Compte tenu de cette participation, d'ailleurs qualifiée de " relativement importante compte tenu de la nature de l'opération " par le commissaire-enquêteur, il n'est pas établi que des personnes intéressées aient été empêchées de participer à l'enquête publique du fait de la correspondance, invoquée par les appelants, des heures de consultation des registres avec les horaires normaux de travail. Par suite, le moyen tiré de ce que les modalités d'organisation de l'enquête publique n'ont pas permis au public de participer dans les meilleures conditions possibles doit être écarté.
23. En septième lieu, aux termes de l'article R. 123-22 du code de l'environnement : " (...) Le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête transmet au préfet le dossier de l'enquête avec le rapport et les conclusions motivées dans un délai d'un mois à compter de la date de clôture de l'enquête. ". Aux termes de l'article R. 11-14-14 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " (...) Le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête transmet, dans le délai d'un mois à compter de la date de clôture de l'enquête, le dossier avec les conclusions soit au préfet si l'enquête a pour siège la préfecture, soit au sous-préfet dans les autres cas. Le dossier est alors transmis, le cas échéant, par le sous-préfet au préfet avec son avis. (...) ".
24. M. C... et Mme A..., qui soulèvent la méconnaissance du délai d'un mois prescrit par les dispositions de l'article R. 123-22 du code de l'environnement pour la transmission par le commissaire-enquêteur de son rapport et de ses conclusions motivées au préfet, suivant la date de clôture de l'enquête, doivent être regardés comme soulevant la méconnaissance de l'article R. 11-14-14 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
25. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé l'intéressé d'une garantie.
26. Si, comme le soutiennent les appelants, le commissaire-enquêteur a transmis son rapport et ses conclusions motivées au préfet des Pyrénées-Orientales le 22 février 2011, au-delà du délai d'un mois suivant la date de clôture de l'enquête publique le 22 octobre 2010, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette circonstance ait été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'elle ait privé les intéressés d'une garantie.
27. En huitième lieu, aux termes de l'article R. 11-10 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, alors en vigueur : " Le commissaire enquêteur ou la commission examine les observations consignées ou annexées aux registres et entend toutes personnes qu'il paraît utile de consulter ainsi que l'expropriant s'il le demande. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête rédige des conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à l'opération. ". En application de ces dispositions, le commissaire enquêteur, sans être tenu de répondre à chacune des observations recueillies, doit indiquer au moins sommairement et en livrant un avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de son avis.
28. Il ressort des pièces du dossier que le commissaire-enquêteur a émis un avis favorable assorti de réserves, tenant notamment à une modification du tracé, au remplacement de la double deux voies par une route de une fois deux voies, et à la réalisation dans le secteur des Aspres d'un inventaire naturaliste suffisamment tôt avant la phase de travaux. A l'issue de son rapport, le commissaire-enquêteur se positionne en faveur d'une modification du projet en vue d'un aménagement routier à deux fois une voie, limité à 90 km/h au lieu de de 2x2 voies à 110km/h. Puis il fait état des gains pour la collectivité de la réalisation du projet, ainsi que des gains pour le cadre de vie du fait de cette modification du projet. Il cite en outre les inconvénients tenant au changement de l'environnement et du cadre de vie pour certains résidents à proximité du futur ouvrage, à l'expropriation de propriétés privées, à la réduction ou la déstructuration de certaines exploitations agricoles et à la durée des travaux, sur plusieurs années. En conclusion, le commissaire-enquêteur souligne notamment l'amélioration des conditions de circulation, notamment en traversée de Saint-Jean-Pla-de-Corts et de Céret, l'amélioration des échanges entre les zones commerciales du secteur et les zones urbaines de Céret et Saint-Jean-Pla-de-Corts, le caractère réduit des inconvénients du projet par rapport aux avantages. Dès lors, et alors par ailleurs que ne peut être utilement soulevée la sous-estimation, alléguée par les appelants, des atteintes à la biodiversité et au paysage, le commissaire-enquêteur a émis son avis personnel et indiqué les raisons déterminant le sens de cet avis. Par suite, le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé de l'avis du commissaire-enquêteur doit être écarté.
29. En neuvième lieu, il appartient au juge administratif, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente.
30. Il ressort des pièces du dossier que le département des Pyrénées-Orientales poursuit, par le projet d'aménagement des routes départementales n°115 et 618, les objectifs d'amélioration de l'accessibilité au Vallespir, par une réduction des temps de parcours du Vallespir vers les accès à l'autoroute A 9 et à la plaine du Roussillon, et par une desserte efficace des agglomérations, tout en valorisant les activités économiques, d'amélioration des conditions de circulation et de sécurité sur un axe très fréquenté, en rétablissant la sécurité des différents usagers et en réduisant les ralentissements et bouchons, fréquents en période estivale, et d'amélioration du cadre de vie dans les agglomérations par la diminution du trafic routier en agglomération, ce qui doit avoir pour effet des réduire les nuisances qui lui sont liées, tenant au bruit, à la qualité de l'air, aux vibrations. D'après l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête publique, bien qu'elle ne présente pas de saturation en dehors de la période estivale, la route départementale en son état initial présente un trafic dense quelle que soit la période de la journée, dont une part de poids lourds élevée, en particulier entre Saint-Jean-Pla-de-Corts et Le Boulou. A la date de l'arrêté portant déclaration d'utilité publique, la population de la communauté de communes du Vallespir présentait une croissance annuelle moyenne de 1%, constatée entre 1999 et 2010, justifiant la prise en compte anticipée d'une augmentation corrélative à venir du trafic, les appelants ne pouvant à cet égard utilement invoquer une variation négative de la population à compter de 2015, date postérieure à l'arrêté litigieux. Il ressort des pièces du dossier que l'aménagement routier projeté, qui contourne le village de Saint-Jean-Pla-de-Corts, est à même de réduire les temps de trajet en voiture, depuis Céret, Vivès et les autres communes du Vallespir, vers l'autoroute A 9 et la plaine du Roussillon. En outre, l'amélioration du cadre de vie des riverains, en particulier de Saint-Jean-Pla-de-Corts, des conditions de sécurité découlent notamment de ce que le trafic de transit n'aura plus vocation à traverser l'agglomération, tandis que l'accès des secours en cas d'incident s'en trouvera facilité. Compte tenu des avantages que présente le projet par rapport aux objectifs ainsi poursuivis, l'aménagement routier faisant l'objet de la déclaration d'utilité publique en cause répond à une finalité d'intérêt général.
31. Il n'est pas établi, ni même d'ailleurs allégué que le département des Pyrénées-Orientales était en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation.
32. Il ressort des pièces du dossier que le projet emporte une consommation d'espace d'environ 12,2 hectares, qui correspondent à l'emprise de l'aménagement routier, lequel ne se confond pas avec la surface totale des parcelles traversées et devant faire l'objet d'une expropriation. L'espace devant être consommé compte, notamment, 3,2 hectares de milieux boisés, 3,2 hectares de milieux agricoles exploités, 3,5 hectares de friches et 1,8 hectare de milieux anthropisés. Concernant les espaces agricoles, il ressort de l'étude d'impact, qui cite sur ce point une étude de la chambre d'agriculture des Pyrénées-Orientales, que, dans sa partie nord, le projet traverse un territoire mité par les friches et quelques exploitations au sud du château d'Aubiry, et que, dans sa partie sud, il présente un faible impact agricole au nord du Tech, du fait du faible nombre d'exploitations touchées, et une incidence moyenne au sud du Tech, le tracé passant en limite de l'espace exploité. Si les impacts tiennent à l'emprise du tracé, au sectionnement d'exploitations et de parcelles agricoles, les mesures compensatoires prévues doivent permettre notamment le rétablissement des accès, la réalisation de dalots pour rétablir l'écoulement des eaux, et la facilitation des transactions foncières. S'agissant des milieux boisés et naturels, le projet, par son emprise implique certes la destruction de zones boisées, notamment en ripisylve, et le franchissement de la rivière du Tech par un ouvrage d'art. A cet égard, l'étude d'impact souligne la " bonne transparence " de l'ouvrage, en l'absence de pile dans le chenal et de remblai dans le lit mineur, concluant à une faible atteinte à la fonctionnalité écologique du milieu concerné, et décrit les mesures prévues, pour limiter le dérangement des espèces et l'atteinte aux milieux naturels, tenant à la période choisie pour la réalisation des travaux, à la réhabilitation des surfaces utilisées en phase de chantier, de manière à limiter l'impact à la seule emprise de la plate-forme, au rétablissement d'une continuité de végétation pour reconstituer les corridors de déplacement des chiroptères, à l'aménagement de passages pour la faune, à la protection des milieux aquatiques, ce qui est de nature à limiter les effets négatifs sur les milieux naturels à la seule emprise de la plateforme, et à réduire les effets sur les espèces, à un niveau modéré, sinon faible. Ensuite, le projet prévoit des dispositifs des eaux de collecte de la plateforme de sorte qu'en dépit de l'imperméabilisation générée par l'ouvrage, l'aggravation du risque d'inondation n'est pas démontrée. Par ailleurs, si l'ouvrage est susceptible d'induire un trafic routier, source de pollution ambiante, il permet un éloignement du trafic de transit par rapport aux zones les plus densément habitées, gage d'assainissement de l'air ambiant pour les agglomérations concernées, tandis que les requérants ne peuvent utilement invoquer la contribution du projet aux épisodes de sécheresse que connaît le département depuis 2021, soit dix ans après la déclaration d'utilité publique litigieuse. Enfin, si cinquante propriétaires sont concernés par les mesures d'expropriation nécessaires à la réalisation du projet, ce dernier ne nécessite l'expropriation que d'un nombre restreint de parcelles bâties, dont deux supportent des propriétés habitées, tandis qu'il n'est pas démontré que le coût du projet est excessif au regard de l'intérêt qu'il présente. Par suite, eu égard à sa finalité d'intérêt général, mentionnée au point 30, les inconvénients du projet ne présentent pas un caractère excessif de nature à le priver de son caractère d'utilité publique.
33. En dixième lieu, aux termes de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme, alors en vigueur, dans sa version applicable : " (...) II. ' Les documents et décisions relatifs à l'occupation des sols comportent les dispositions propres à préserver les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard. (...). ".
34. Sans préjudice des autres règles relatives à la protection des espaces montagnards, ces dispositions prévoient que dans les espaces, milieux et paysages caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard, les documents et décisions relatifs à l'occupation des sols doivent être compatibles avec les exigences de préservation de ces espaces. Pour satisfaire à cette exigence de compatibilité, ces documents et décisions doivent comporter des dispositions de nature à concilier l'occupation du sol projetée et les aménagements s'y rapportant avec l'exigence de préservation de l'environnement montagnard prévue par la loi.
35. Tout d'abord, le projet prévoit une intégration paysagère de l'aménagement routier, par la présence d'alignements d'arbres, un profil encaissé, un positionnement en pied de côteaux dans sa partie nord en vue de préserver le paysage, tandis qu'il n'est pas porté atteinte au patrimoine culturel par la destruction du mas ..., comme cela résulte de ce qui a été dit au point 9, ni du seul fait de la proximité du château d'Aubiry. Par ailleurs, si la réalisation du projet porte atteinte à des boisements notamment des ripisylves, et aux espèces qu'ils abritent, elle s'accompagne de mesures d'évitement, de réduction et de compensation. Eu égard par ailleurs à la teneur des effets du projet sur l'espace agricole, détaillés au point 32, l'incompatibilité avec les exigences de préservation des espaces montagnards concernés n'est pas démontrée. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté du 28 juillet 2011 méconnaît l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme.
36. En dernier lieu, M. C... et Mme A... ne peuvent utilement soutenir qu'une nouvelle enquête publique devait être organisée dès lors que les travaux n'ont pas été entrepris dans le délai requis, en application des articles L. 123-17 et R. 123-24 du code de l'environnement, dès lors que l'arrêté en cause relève du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique lequel ne renvoie pas au code de l'environnement s'agissant des modalités de prorogation.
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'arrêté du 26 janvier 2016 portant prorogation de la déclaration d'utilité publique :
37. Aux termes de l'article L. 121-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Un acte pris dans la même forme peut proroger une fois les effets de la déclaration d'utilité publique pour une durée au plus égale à la durée initialement fixée, lorsque celle-ci n'est pas supérieure à cinq ans. Cette prorogation peut être accordée sans nouvelle enquête préalable, en l'absence de circonstances nouvelles. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité compétente peut proroger les effets d'un acte déclaratif d'utilité publique, sauf si l'opération n'est plus susceptible d'être légalement réalisée en raison de l'évolution du droit applicable ou s'il apparaît que le projet a perdu son caractère d'utilité publique par suite d'un changement des circonstances de fait. Cette prorogation peut être décidée sans procéder à une nouvelle enquête publique, alors même que le contexte dans lequel s'inscrit l'opération aurait connu des évolutions significatives, sauf si les caractéristiques du projet sont substantiellement modifiées. A cet égard, une augmentation de son coût dans des proportions de nature à en affecter l'économie générale doit être regardée comme une modification substantielle.
38. Il est constant que le projet faisant l'objet de l'arrêté de prorogation a été modifié par rapport à la déclaration d'utilité publique initiale, par l'ajout d'une voie dédiée à la circulation des cyclistes. Les appelants ne sont pas fondés à soutenir qu'a été ajouté un tronçon, coupant la parcelle cadastrée section AT n°136 à Céret dès lors qu'il ressort du dossier de déclaration d'utilité publique, notamment d'une carte détaillant le tracé de la voie, que ce tronçon était déjà prévu. Il n'est en outre pas démontré que le coût du projet ait, à la date de l'arrêté de prorogation, augmenté dans des proportions de nature à en affecter l'économie générale. Compte tenu de la modification apportée à l'occasion de la prorogation de la déclaration d'utilité publique en cause, mentionnée ci-dessus, et sans que puissent être utilement invoquées les modifications apportées antérieurement à l'arrêté de déclaration d'utilité publique initial, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que les caractéristiques du projet auraient été substantiellement modifiées. Par suite, le moyen tiré de ce qu'une nouvelle enquête publique aurait dû être organisée préalablement à l'édiction de l'arrêté de prorogation du 26 janvier 2016 doit être écarté.
39. Par suite, M. C... et Mme A... ne sont pas fondés à exciper, à l'encontre de l'arrêté de cessibilité du 18 novembre 2020, de l'illégalité des arrêtés du préfet des Pyrénées-Orientales du 28 juillet 2011 et du 26 janvier 2016.
40. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes.
Sur les frais exposés à l'occasion du litige :
41. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et du département des Pyrénées-Orientales, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, la somme demandée par M. C... et Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. C... et Mme A... la somme demandée par le département des Pyrénées-Orientales en application de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le département des Pyrénées-Orientales sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Mme E... A..., au ministre de l'intérieur et au département des Pyrénées-Orientales.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Teuly-Desportes, présidente assesseure,
Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2025.
La rapporteure,
V. Dumez-Fauchille
La présidente,
A. Geslan-DemaretLa greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°23TL01416