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20/03/2025 | FRANCE | N°23TL00082

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 20 mars 2025, 23TL00082


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... D... C... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté en date du 5 janvier 2022 par lequel la préfète du Tarn lui a refusé l'octroi d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.



Par un jugement n° 2201123 du 15 décembre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a notamment, par son article 2, annulé la

décision portant refus de titre de séjour contenue dans l'arrêté de la préfète du Tarn du 5 janvier 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... C... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté en date du 5 janvier 2022 par lequel la préfète du Tarn lui a refusé l'octroi d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2201123 du 15 décembre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a notamment, par son article 2, annulé la décision portant refus de titre de séjour contenue dans l'arrêté de la préfète du Tarn du 5 janvier 2022.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 janvier 2023, le préfet du Tarn demande à la cour d'annuler le jugement du 15 décembre 2022 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a annulé sa décision du 5 janvier 2022 portant refus de séjour.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreurs de fait et le tribunal a également fait une interprétation inexacte du droit applicable et une interprétation manifestement erronée des documents qui lui ont été soumis ;

- le seul fait pour l'employeur de justifier d'une difficulté à recruter ne constitue pas un motif exceptionnel justifiant une admission exceptionnelle au séjour au titre des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; c'est donc à tort que le tribunal a considéré que les difficultés de recrutement de l'employeur constituaient un motif exceptionnel au sens de ces dispositions et il a méconnu ces dispositions en retenant une erreur d'appréciation au regard principalement des difficultés de recrutement justifiées de l'employeur ;

- l'intéressé, célibataire, sans enfant, ne justifie ni d'une antériorité de séjour significative, ni a fortiori d'une antériorité d'emploi et n'a pas de qualification particulière ;

- l'autorisation de travail pour un étranger résidant hors de France a été délivrée à M. C... A... afin qu'il puisse s'en prévaloir auprès d'un poste consulaire en vue de la délivrance d'un visa de long séjour ; en l'espèce, aucun motif pertinent ne justifiait de déroger à la procédure ordinaire d'introduction par le travail, qui a été détournée par l'employeur et à l'exigence d'un visa de long séjour ;

- les autres moyens invoqués à l'encontre de la décision de refus de séjour ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 2 octobre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Teulière, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant brésilien, né le 1er mars 1999, est entré en France au plus tard au cours du mois de juin 2021, de manière régulière, sous couvert de son passeport brésilien en cours de validité et d'un titre de résident portugais valable jusqu'au 24 août 2023. Il a sollicité, le 28 octobre 2021, son admission au séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 5 janvier 2022, la préfète du Tarn lui a notamment refusé la délivrance d'un titre de séjour. Par un jugement du 15 décembre 2022, dont l'autorité préfectorale relève appel, le tribunal administratif de Toulouse a notamment annulé cette décision.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En vertu des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ".

3. Lorsque le préfet examine d'office si un étranger peut prétendre à la régularisation de sa situation au titre du travail sur le fondement des dispositions précitées, il lui appartient de vérifier s'il est fait état de " motifs exceptionnels " de nature à permettre la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans ce cas, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. C... A... s'est prévalu, au soutien de sa demande d'admission au séjour en qualité de salarié, d'une part, d'une autorisation de travail délivrée par les services compétents le 9 juin 2021 à la suite d'une demande présentée la veille par la société Roussaly sise à Lacaune (Tarn) et, d'autre part, d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu le 22 juin 2021 avec cette société pour un poste d'ouvrier de découpe de viande. Il ressort des termes de l'arrêté en litige que la préfète a examiné d'office si l'intéressé pouvait prétendre à une admission exceptionnelle au séjour au titre des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle a estimé, à ce titre, que ne pouvaient être regardés comme des motifs exceptionnels de nature à permettre l'admission exceptionnelle au séjour de M. C... A... la détention d'un contrat de travail à durée indéterminée et la présence en France de sa mère et de son beau-père, employés par la même société. Il ressort, toutefois, des pièces du dossier et n'est pas davantage contesté en appel, que la société Roussaly se trouvait confrontée à de sérieuses difficultés de recrutement en raison de l'isolement de sa zone géographique d'implantation et du manque d'attractivité du secteur d'activité dans lequel elle opère. A cet égard, il apparaît, compte tenu de la célérité avec laquelle les autorités compétentes ont accordé l'autorisation de travail sollicitée par l'employeur, que cette difficulté était bien connue et identifiée par elles. Dans une attestation versée aux débats de première instance, la directrice des ressources humaines de l'entreprise a d'ailleurs confirmé la difficulté récurrente à recruter du personnel dans ce secteur de montagne et, tout particulièrement, dans les métiers de découpe et de désossage de la viande de porc. Dans les circonstances particulières de l'espèce, le requérant doit être regardé comme justifiant d'un motif exceptionnel au regard des caractéristiques de l'emploi auquel il postulait dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement. Dès lors et en considération, au surplus, de ses conditions d'entrée et de séjour et des liens familiaux importants dont dispose M. C... A... en France dès lors notamment que sa mère et son beau-père, employés dans la même entreprise, y résident régulièrement, la préfète du Tarn a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation en refusant de procéder à la régularisation de sa situation au titre du travail et, par suite, de l'admettre exceptionnellement au séjour.

5. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Tarn n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision de refus de séjour contenue dans son arrêté du 5 janvier 2022.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du préfet du Tarn est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au préfet du Tarn, à M. B... D... C... A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 6 mars 2025, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président de chambre,

M. Teulière, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 mars 2025.

Le rapporteur,

T. Teulière

Le président,

D. ChabertLa greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23TL00082


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00082
Date de la décision : 20/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Thierry Teulière
Rapporteur public ?: M. Diard
Avocat(s) : MAINIER-SCHALL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-20;23tl00082 ?
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