Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... F... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 août 2023 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2305373 du 12 décembre 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 janvier et 11 juillet 2024, Mme F... épouse D..., représentée par Me Ruffel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 décembre 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2023 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " visiteur " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 10 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- elle méconnaît l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les articles L. 425-9 et L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi : elle est entachée d'incompétence de son signataire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2024, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient, en se référant à ses écritures de première instance, que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 18 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 décembre 2024, à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme El Gani-Laclautre ;
- les observations de Me Ruffel, représentant Mme F... épouse D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme F... épouse D..., ressortissante marocaine née le 24 août 1972, est entrée en France le 10 juin 2019, sous couvert d'un visa de court séjour délivré par les autorités consulaires françaises, valable du 24 août 2018 au 23 août 2022, accompagnée de son fils mineur B.... Le 10 mars 2020, l'intéressée a présenté une demande de titre de séjour en raison de l'état de santé de son fils mineur. Par une décision du 28 juillet 2020, le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. À la suite du recours gracieux formé par Mme F... épouse D..., le préfet de l'Hérault a abrogé cette décision le 25 mars 2021 et lui a délivré une autorisation provisoire de séjour de manière exceptionnelle, valable jusqu'au 11 juillet 2021, afin de tenir compte de la scolarisation de son enfant. Le 9 juillet 2021, Mme F... épouse D... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " visiteur " et, à titre subsidiaire, son admission exceptionnelle au séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un jugement du 9 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 5 août 2021 par laquelle le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour pour défaut d'examen et enjoint à cette autorité de réexaminer sa situation. Le 28 mars 2023, Mme F... épouse D... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en qualité d'accompagnante d'un enfant mineur malade et, subsidiairement, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " visiteur ". Par un arrêté du 17 août 2023, le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme F... épouse D... relève appel du jugement du 12 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources, dont le montant doit être au moins égal au salaire minimum de croissance net annuel, indépendamment de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale et de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " d'une durée d'un an. / Il doit en outre justifier de la possession d'une assurance maladie couvrant la durée de son séjour et prendre l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle (...) ". Aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " (...) la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ". Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et des demandeurs d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France ou du livre II, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois doit être titulaire de l'un des documents de séjour suivants : / 1° Un visa de long séjour ; / 2° Un visa de long séjour conférant à son titulaire, en application du second alinéa de l'article L. 312-2, les droits attachés à une carte de séjour temporaire ou à la carte de séjour pluriannuelle prévue aux articles L. 421-9 à L. 421-11 ou L. 421-13 à L. 421-24, ou aux articles L. 421-26 et L. 421-28 lorsque le séjour envisagé sur ce fondement est d'une durée inférieure ou égale à un an ; (...) ".
3. En vertu de ces dispositions, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire est en principe, sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par la loi, subordonnée à la production par l'étranger d'un visa d'une durée supérieure à trois mois. Il en va différemment pour l'étranger déjà admis à séjourner en France et qui sollicite le renouvellement, même sur un autre fondement, de la carte de séjour temporaire dont il est titulaire. Lorsqu'un étranger présente, après l'expiration du délai de renouvellement du titre qu'il détenait précédemment, une nouvelle demande de titre de séjour, cette demande de titre doit être regardée comme une première demande à laquelle la condition de la détention d'un visa de long séjour peut être opposée. Par ailleurs, il résulte de ces mêmes dispositions que le droit d'un ressortissant étranger de séjourner en France en qualité de " visiteur " est encore subordonné, notamment, à la condition qu'il dispose d'une assurance maladie couvrant la durée de son séjour.
4. Pour refuser à Mme F... épouse D... la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " visiteur ", le préfet de l'Hérault s'est fondé, ainsi qu'il pouvait le faire et sans qu'il apparaisse qu'il se soit cru lié à tort par ces éléments, sur la triple circonstance selon laquelle, d'une part, l'intéressée ne disposait pas des ressources requises équivalent au salaire minimum de croissance net annuel soit 16 596 euros en 2023, le compte bancaire ouvert dans les livres de la Banque Populaire du Maroc au nom de son époux présentant un solde créditeur de 158 784 dirhams marocains soit 14 925 au 31 janvier 2023, d'autre part, elle ne disposait pas d'un visa de long séjour et, enfin, elle ne justifiait pas posséder une assurance maladie couvrant la durée de son séjour. Il ressort des pièces du dossier que Mme F... épouse D... est entrée sur le territoire français sous couvert d'un visa de court séjour, lequel ne lui permettait donc pas de séjourner pour une durée supérieure à trois mois. Si l'intéressée se prévaut de la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour postérieurement à son entrée en France, une telle autorisation, au surplus délivrée de manière exceptionnelle, n'emporte pas des effets équivalents à ceux d'un visa de long séjour ou d'un titre de séjour. Par ailleurs, s'il ressort des pièces du dossier que Mme F... épouse D... a obtenu le bénéfice de l'aide médicale d'État pour ses frais de santé et ceux de son enfant sur la période comprise entre le 22 novembre 2022 et le 21 novembre 2023, une telle aide ne peut tenir lieu d'assurance maladie destinée à couvrir ses dépenses médicales pour la durée de son séjour au sens des dispositions précitées de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Dès lors que, indépendamment des ressources dont disposait Mme F... épouse D... à la date de l'arrêté en litige, l'autorité préfectorale pouvait, pour les seuls motifs tirés de l'absence de souscription d'une assurance maladie et de l'absence de visa de long séjour valablement lui refuser la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " visiteur ", elle n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée (...) ".
7. L'article L. 425-10 du même code dispose que : " Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues à l'article L. 425-9, ou l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / Cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. / Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. / Elle est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues à l'article L. 425-9 ".
8. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.
9. Pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié au sens de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès, et non de rechercher si les soins dans le pays d'origine sont équivalents à ceux offerts en France ou en Europe.
10. Par son avis du 9 août 2023, dont l'autorité préfectorale pouvait s'approprier les termes sans s'estimer en situation de compétence liée, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que l'état de santé de l'enfant B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque dans son pays d'origine. Pour remettre en cause cet avis, l'appelante verse au dossier les éléments médicaux qui permettent à la cour d'apprécier la situation de son fils, sans qu'il soit besoin de demander l'entier dossier médical au vu duquel s'est prononcé ce collège.
11. Il ressort des pièces du dossier sur lequel l'appelante a accepté de lever le secret médical, que l'enfant B... présente une maladie génétique dénommée syndrome de Schaaf-Yang, se traduisant par un retard modéré à sévère des acquisitions associé à des troubles psychomoteurs, pour laquelle il bénéficie d'une prise en charge multidisciplinaire en France associant des séances de rééducation par kinésithérapie, des séances d'orthophonie, des soins orthopédiques, un suivi orthodontique ainsi que des séances de psychomotricité. Il ressort également des pièces du dossier que cet enfant, après avoir bénéficié d'une scolarité en unité localisée pour l'inclusion scolaire (classe ULIS), a bénéficié d'une orientation au sein d'un institut médico-éducatif au cours de l'année 2023. Alors que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de l'enfant B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, Mme F... épouse D... ne démontre pas, ainsi que cela lui incombe, les conséquences susceptibles d'être attachées à l'absence de continuité dans cette prise en charge médicale et notamment, l'engagement à court terme du pronostic vital de son enfant. Dans ces conditions, dès lors qu'il n'est produit aucun élément précis et circonstancié sur ce point et qu'il n'est, en tout état de cause, pas établi que l'enfant B... ne pourrait effectivement bénéficier, au Maroc, d'un suivi médical adapté, sans qu'il soit exigé qu'il soit équivalent en tous points à celui dont il bénéfice en France, le préfet de l'Hérault n'a pas fait une inexacte application des dispositions des articles L. 425-9 et L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme F... épouse D... en qualité de parent étranger accompagnant un mineur étranger malade.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
13. Mme F... épouse D... se prévaut de son intégration socio-professionnelle en France et des nombreux soutiens dont elle bénéficie en produisant de plusieurs attestations de témoins ainsi qu'une pétition lancée en sa faveur et celle de son enfant. Elle se prévaut, en outre, de la présence de ses parents et de plusieurs de ses frères et sœurs en France. Toutefois, par ces éléments, Mme F..., dont l'époux réside au Maroc, ne démontre pas l'ancienneté, l'intensité et la stabilité des liens privés et familiaux qu'elle a développés en France où elle vit de manière précaire et isolée au regard de ceux conservés dans son pays d'origine qu'elle a quitté à l'âge de 47 ans, dans lequel vit son conjoint, également de nationalité marocaine, qui occupe un emploi de médecin ainsi que sa belle-fille , de sorte qu'il n'existe aucun obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue au Maroc. Par suite, en refusant à Mme F... épouse D..., qui dispose de solides attaches familiales dans son pays d'origine, la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de l'Hérault n'a pas porté au droit de l'appelante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
14. En quatrième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3- 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 11 et 13.
15. En cinquième et dernier lieu, le moyen tiré de ce que l'autorité préfectorale a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle de l'appelante doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 11 et 13.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
16. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la méconnaissance de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'emporte la décision en litige sur la situation personnelle de l'appelante doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 11 et 13.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
17. En application de l'article L. 612-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision mentionnant le pays, fixé en application de l'article L. 721-3 du même code, à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office constitue une décision distincte pouvant assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français.
18. L'arrêté en litige a été signé par M. C... E..., sous-préfet de l'arrondissement de Béziers. Si, aux termes de l'arrêté n° 2023.05/DRCL.0183 du 9 mai 2023, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 67 du 11 mai 2023, le préfet de l'Hérault lui a délégué sa signature à l'effet de signer les décisions prises, dans les limites de son arrondissement, en matière de refus d'admission au séjour et d'obligation de quitter le territoire français, il était en revanche incompétent, compte tenu de la formulation de cette délégation de signature, pour édicter la décision fixant le pays à destination duquel Mme F... épouse D... est susceptible d'être éloignée. Par suite, cette décision est entachée d'incompétence de son signataire et doit, dès lors, être annulée.
19. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... épouse D... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du préfet de l'Hérault du 17 août 2023.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
20. Eu égard au motif d'annulation retenu par le présent arrêt et seul susceptible de l'être, il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de l'Hérault de procéder au réexamen de la situation de Mme F... épouse D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
21. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État, partie perdante, une somme de 1 200 euros à verser à Mme F... épouse D... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE:
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 12 décembre 2023, en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du préfet de l'l'Hérault du 17 août 2023, et cette décision, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de procéder au réexamen de la situation de Mme F... épouse D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera à Mme F... épouse D... une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme F... épouse D... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... F... épouse D... et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 4 mars 2025, à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2025.
La rapporteure,
N. El Gani-LaclautreLe président,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24TL00156