Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser une somme globale de 165 135,519 euros au titre des préjudices qu'elle a subis à la suite de sa chute accidentelle survenue le 27 avril 2018 sur la voie publique.
La caisse primaire d'assurances maladie de l'Hérault a demandé au tribunal de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser une somme de 20 214,92 euros au titre des dépenses engagées pour les prestations dont a bénéficié Mme B..., assortie des intérêts de retard ainsi que l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Par un jugement n° 2103616 du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Montpellier a condamné Montpellier Méditerranée Métropole à verser, d'une part, à Mme B... la somme de 71 792,73 euros en réparation des préjudices subis et, d'autre part, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault la somme de 19 466,58 euros assortie des intérêts de retard à compter du jugement et l'indemnité forfaitaire de gestion pour un montant de 1 162 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 juin 2023, Montpellier Méditerranée Métropole, représentée par Me Audouin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 avril 2023 ;
2°) de rejeter la demande indemnitaire de Mme B... ;
3°) si sa responsabilité était engagée, de ramener le montant de l'indemnité à la somme de 35 857,84 euros ;
4°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la matérialité des faits n'est pas établie dès lors que la preuve des circonstances exactes de la chute de Mme B... n'est pas rapportée par cette dernière;
- le lien de causalité entre la chute de Mme B... et un défaut d'entretien normal de la voie publique n'est pas établi ; Mme B... souffre de maux qui sont sans lien avec l'accident qu'elle allègue ; son seul préjudice est le descellement de sa prothèse de la hanche gauche qui l'a conduite à subir une opération dont les suites ont été favorables ;
- le défaut d'entretien de la voie publique n'est pas établi ; le trou prétendument à l'origine de la chute de Mme B... correspond à un caniveau, extérieur au passage réservé aux piétons, et jouxtant le mur d'une propriété sur lequel avait été créée une entrée charretière pour permettre l'accès à cette propriété ; un espace, d'environ 1,5 mètre, destiné aux piétons sépare le caniveau de la circulation des véhicules ;
- l'imprudence fautive dont a fait preuve Mme B... est de nature à exonérer sa responsabilité ; le caniveau où l'accident se serait produit fait partie des obstacles qu'une personne normalement attentive peut aisément éviter ; elle avait connaissance des lieux et l'obstacle était parfaitement visible et évitable compte tenu de la largeur de la voie ;
- elle ne saurait être tenue d'indemniser les préjudices qui n'ont aucun lien avec la chute alléguée ;
- l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent de 25 %, du préjudice esthétique temporaire, du préjudice esthétique permanent, des souffrances endurées, doit être respectivement ramenée à la somme de 26 646 euros, de 1 000 euros, de 1 500 euros, de 3 500 euros ;
- le préjudice d'agrément de Mme B... n'est pas établi ;
- les dépenses de prothèses auditives sont sans lien avec la chute dès lors qu'il n'est pas établi qu'elles auraient été perdues lors de l'accident ;
- les frais divers dont le remboursement a été demandé par Mme B... ne sont pas justifiés ou ne sont pas en lien avec sa chute ;
- l'évaluation du montant de l'assistance d'une tierce personne est exagérée.
Par un mémoire, enregistré le 26 octobre 2023, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, représentée par Me Cauvin, demande à la cour :
1°) par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 avril 2023 en tant qu'il a condamné Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser la somme de 19 466,58 euros au lieu de la somme de 20 214,92 euros ;
2°) de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui rembourser la somme de 20 214,92 euros au titre des débours exposés, assortie des intérêts de retard et de la capitalisation de ces intérêts ;
3°) de mettre à la charge de cette métropole la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle détient une créance définitive au titre des débours s'élevant à la somme totale de 20 214,92 euros.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 9 novembre 2023 et le 16 mai 2024,
Mme B..., représentée par Me Beauvarlet, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à ce que la condamnation de Montpellier Méditerranée Métropole, en réparation de ses préjudices subis, soit portée à la somme de 165 006,07 euros au lieu de la somme de 71 792,73 euros ;
3°) et à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelante la somme de 3 600 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la responsabilité de Montpellier Méditerranée Métropole est engagée du fait du défaut d'entretien normal de la voie publique ;
- la matérialité de sa chute dans un trou sur la voirie situé en face du cabinet médical dont elle sortait, qui n'était pas signalé, est établi par les attestations qu'elle verse à l'instance ;
- le lien de causalité entre sa chute et l'ouvrage public est établi ; sa chute ne résulte pas d'un problème d'équilibre ou de déplacement résultant d'un état de santé dégradé ;
- la voie publique, qui comportait un trou d'environ un mètre de longueur et de largeur et une profondeur de soixante centimètres, se situait à l'intersection de deux voies dont l'une est délimitée par un mur ; elle n'était pas normalement entretenue dès lors que cette excavation, qui excédait par sa nature et son importance celles qu'un piéton normalement attentif peut s'attendre à rencontrer, n'était pas signalée ;
- elle n'a commis aucune faute d'imprudence de nature à exonérer partiellement ou totalement la métropole de sa responsabilité dès lors qu'elle n'avait pas une connaissance des lieux et de l'existence de l'excavation ; elle ne présentait aucun trouble de la marche qui aurait pu expliquer sa chute puisque sa prothèse de hanche lui assurait une mobilité normale ;
- elle peut prétendre au remboursement de ses dépenses de santé actuelles comprenant notamment le remplacement de ses prothèses auditives brisées lors de sa chute, de ses orthèses plantaires, de frais vestimentaires, des frais de copie de dossier médical, de frais de transport ;
- eu égard à l'importance de son préjudice, son état de santé a nécessité la mise en place d'une aide par tierce personne et d'une aide humaine de substitution pour la prise en charge de son mari atteint de la maladie de Parkinson ;
- son déficit fonctionnel temporaire doit être indemnisé sur la base de 28 euros par jour ;
- son préjudice esthétique temporaire évalué à 3 sur une échelle de 7, et les souffrances endurées évaluées à 3,5 sur une échelle de 7, doivent respectivement être indemnisés à hauteur de 2 500 euros et de 8 000 euros ;
- elle est en droit de prétendre au remboursement de ses dépenses de santé futures pour le remplacement régulier de ses semelles et chaussures orthopédiques ;
- elle subit un déficit fonctionnel permanent de l'ordre de 25 % pouvant être évalué à la somme de 35 000 euros ;
- son préjudice esthétique permanent, évalué à 2,5 sur une échelle de 7, et son préjudice d'agrément doivent être respectivement indemnisés à hauteur de 4 000 euros et de 8 000 euros ;
- après consolidation, elle aura besoin d'une assistance estimée à 3 heures par semaine et une aide humaine de substitution pour la prise en charge de son époux.
Par une ordonnance du 13 mai 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 mai 2024 à 12 heures.
Vu les autres pièces de ces deux dossiers.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Beltrami,
- et les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Beauvarlet, représentant Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Le 27 avril 2018, Mme B..., née le 19 février 1936, résidente de la commune de Cournonterral (Hérault), a chuté sur la voie publique de sa commune en sortant d'un cabinet médical. Par une lettre du 13 avril 2021, elle a demandé à Montpellier Méditerranée Métropole l'indemnisation de ses préjudices sur le fondement du défaut d'entretien de la voie publique. Sa demande ayant été rejetée, Mme B... a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande tendant à la condamnation de Montpellier Méditerranée Métropole à l'indemniser des préjudices que lui a causé son accident. Cette dernière relève appel du jugement du 20 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier l'a condamnée à verser à Mme B... la somme de 71 792,73 euros en réparation des préjudices subis. Par la voie de l'appel incident, Mme B... demande la réformation de ce jugement afin que la condamnation de Montpellier Méditerranée Métropole soit portée à la somme de 165 006,07 euros. Par la voie de l'appel incident, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault demande la réformation de ce jugement en tant qu'il a condamné Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser la somme de 19 466,58 euros au lieu de la somme de 20 214,92 euros au titre de ses débours.
Sur la responsabilité de Montpellier Méditerranée Métropole pour défaut d'entretien normal de la voie publique :
2. Il appartient à l'usager d'un ouvrage public qui demande réparation d'un préjudice qu'il estime imputable à cet ouvrage de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre le préjudice invoqué et l'ouvrage. Le maître de l'ouvrage ne peut être exonéré de l'obligation d'indemniser la victime qu'en rapportant, à son tour, la preuve soit que l'ouvrage était en état d'entretien normal, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.
3. Il appartient à la victime qui soutient avoir chuté sur cette voie, d'établir l'existence de l'obstacle incriminé et d'un lien de causalité direct et certain entre celui-ci et le dommage. A cet égard, la victime doit justifier, lorsqu'elles sont contestées, des circonstances dans lesquelles cet accident est survenu.
4. Les contenus concordants du compte rendu médical du 27 avril 2018 et des attestations produites par Mme B... permettent d'établir que cette dernière a été victime, le 27 avril 2018 peu après 15 heures, d'une chute devant le centre médical situé au 8, plan de la Croix, dans la commune de Cournonterral. Si aucun témoin n'a assisté à la chute de Mme B... au moment même où elle s'est produite, il résulte toutefois de l'instruction et, en particulier des témoignages circonstanciés, concordants et contemporains de l'accident que Mme C..., infirmière du centre médical, et M. A..., médecin généraliste, ont vu la victime dans un trou de la chaussée, situé à proximité du centre médical, dans lequel elle avait chuté après son rendez-vous. Les auteurs des attestations précisent avoir porté secours à Mme B... en descendant auprès d'elle pour la rassurer, en l'aidant à en sortir, en allant cherchant un fauteuil roulant et en l'y installant. Ces pièces permettent de déterminer avec la date, l'heure de l'accident et de localiser le lieu de celui-ci et, en particulier qu'il s'est produit à un endroit situé à proximité du centre médical où la voie comportait une excavation. Comme l'ont à juste titre relevé les premiers juges, la seule circonstance que le compte-rendu d'accueil aux urgences médicales mentionne une " chute mécanique de sa hauteur " et le fait qu'une lettre médicale adressée par le chirurgien de Mme B... à un confrère fasse état d'une " chute par maladresse ", ne suffit pas à remettre en cause la matérialité des circonstances dans lesquelles la chute de l'intéressée s'est produite. Au demeurant, rien ne permet de conclure que ces qualifications de la chute de Mme B... par le corps médical procèderaient de déclarations faites directement par l'intéressée ou par des témoins directs de l'accident. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient Montpellier Méditerranée Métropole, la victime établit de façon suffisamment certaine que l'excavation située sur la voie publique, à proximité du centre médical, est directement à l'origine de sa chute accidentelle.
5. Il résulte de l'instruction que l'excavation en litige, dont les dimensions d'un mètre de longueur et de largeur et d'une profondeur de soixante centimètres ne sont pas contestées, est située au pied d'un angle de mur, sur le trottoir longeant la voie et menant au centre médical de Cournonterral. Eu égard à son positionnement, cette excavation n'était pas particulièrement visible pour un usager empruntant le trottoir à la sortie du centre médical. La métropole appelante n'ignorait pas le danger qu'était susceptible de présenter pour la sécurité des usagers la présence d'une telle excavation et la nécessité d'y remédier puisque, ainsi qu'en atteste un échange de courriels en date du 8 février 2018, une grille avait été commandée par Montpellier Méditerranée Métropole et devait y être installée par la société Eiffage afin de sécuriser le cheminement piéton. Il résulte toutefois de l'instruction qu'à la date de la chute dont Mme B... a été victime, soit plus de deux mois après cet échange, cette installation n'avait toujours pas été réalisée. A cet égard, l'attestation du 17 mai 2018 d'un agent technique de la commune de Cournonterral a reconnu qu'au jour de la chute de Mme B..., le trou de caniveau n'était toujours pas protégé et que ce n'est que postérieurement, le 1er mai 2018, que les services de la métropole ont installé des barrières de protection, et le 4 mai 2018 que l'entreprise Eiffage a réalisé les travaux en installant des plaques de protection. Dès lors, quand bien même les usagers de la voie disposaient de plus d'un mètre pour circuler sur le trottoir menant au cabinet médical, l'excavation en litige, de dimension importante, située au pied d'un angle de mur qui était peu visible, notamment pour une personne sortant du cabinet médical, et qui ne faisait l'objet d'aucune mesure de signalisation et de protection, représentait un obstacle excédant celui auquel un usager de la voie publique peut normalement s'attendre à rencontrer.
6. Il s'évince de ce qui a été dit précédemment que Montpellier Méditerranée Métropole ne rapporte pas la preuve de l'entretien normal de la voie publique à l'origine de la chute accidentelle de Mme B....
7. Si, pour s'exonérer de sa responsabilité, la métropole appelante se prévaut de l'imprudence fautive de la victime, il ne résulte toutefois de l'instruction ni que Mme B... aurait eu une parfaite connaissance des lieux ni que l'excavation litigieuse devait être regardée comme un obstacle visible et prévisible pour un usager normalement attentif eu égard, ainsi qu'il a déjà été dit, à sa localisation au pied d'un mur formant un angle droit. Ainsi, l'accident est dû à l'absence de signalisation et de protection de l'obstacle et non au comportement imprudent de la victime. Dans ces conditions, les conséquences dommageables de cette chute accidentelle doivent être mises à la charge exclusive de Montpellier Méditerranée Métropole.
Sur le lien de causalité entre l'accident et les préjudices de la victime :
8. Il résulte de l'instruction et en particulier du rapport d'expertise que la chute de
Mme B... a été la cause d'une fracture au niveau de son fémur gauche ayant entraîné un descellement total de sa prothèse de la hanche gauche, posée en 2003, qui a nécessité une intervention chirurgicale, réalisée le 30 avril 2018, afin de procéder au changement de sa prothèse. Selon l'expert judiciaire, cette lésion a provoqué, à elle seule, de multiples préjudices subis par la victime dont l'état de santé est, toujours selon l'expert, imputable de façon directe et certaine à l'accident. Dès lors, la seule circonstance que l'expert a par ailleurs regardé comme n'étant pas imputables à la chute accidentelle du 27 avril 2018 les lésions rachidiennes et les douleurs aux genoux et aux chevilles dont souffre Mme B..., n'est pas de nature à écarter le lien de causalité existant entre sa chute et les autres préjudices subis par cette dernière.
Sur les préjudices :
En ce qui concerne les préjudices avant consolidation :
9. En premier lieu, s'agissant du déficit fonctionnel temporaire de la victime, il résulte du rapport d'expertise que Mme B... a subi 59 jours d'hospitalisation ayant entraîné un déficit fonctionnel temporaire total pendant cette période. Elle a, par ailleurs, souffert d'un déficit fonctionnel temporaire de 75 % du 27 avril au 28 avril 2018, soit 2 jours, puis de 50 % du 27 juin au 30 septembre 2018, soit 96 jours, et enfin de 25 % du 1er octobre 2018 au 7 janvier 2019, soit 99 jours. Sur la base d'un montant forfaitaire journalier de 13,5 euros, Mme B... est en droit d'être indemnisée, au titre de son déficit fonctionnel temporaire total, correspondant à 100 % du forfait, pour un montant de 796,50 euros, au titre de son déficit fonctionnel temporaire partiel, correspondant à 75 % du forfait, pour un montant de 20,25 euros, correspondant à 50 % du forfait pour un montant de 648 euros et correspondant à 25 % du forfait, pour un montant de 334,13 euros. Dès lors, il y a lieu d'allouer la somme totale de 1 798,88 euros au titre de l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire de Mme B.... Le jugement doit être réformé en ce qu'il a limité le montant de l'indemnisation de ce chef de préjudice à la somme de 1 784 euros.
10. En deuxième lieu, lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire permettant, dans les circonstances de l'espèce, le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat, sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime.
11. Il résulte du rapport d'expertise que l'état de santé de Mme B... a nécessité une aide par une tierce personne pour sa toilette, ses repas, ses courses et aide-ménagères à hauteur de deux heures par semaine pour la période de classe 3 où son déficit fonctionnel temporaire était de 50 %, du 27 juin au 30 septembre 2018, soit 96 jours et d'une aide non spécialisée d'une heure par jour pour la période de classe 2 où son déficit fonctionnel était de 25 % du 1er octobre 2018 au 7 janvier 2019, soit 99 jours. Il ne résulte pas de l'instruction, contrairement aux allégations de l'intimée, qu'une erreur matérielle aurait été commise par l'expert en ce qui concerne la fréquence de cette aide pour la période de classe 3. Compte tenu du salaire minimum interprofessionnel de croissance horaire brut au cours de cette période, augmenté des charges sociales, un taux moyen horaire de 13,50 euros pour une aide non spécialisée doit être retenu. Au regard de ces éléments, le montant des frais supportés par Mme B... pour l'assistance d'une tierce personne non spécialisée, avant consolidation, doivent être évalués non à 3 982,50 euros, comme l'a estimé le tribunal, mais à 2 632,50 euros.
12. En troisième lieu, l'aide humaine dont a besoin depuis 2018 l'époux de Mme B... qui souffre une polypathologie et d'une maladie neurodégénérative, n'est pas en lien direct avec la chute accidentelle de cette dernière. Dès lors, Montpellier Méditerranée Métropole est fondée à soutenir que Mme B... ne peut réclamer une indemnité au titre de l'assistance à son époux.
13. En quatrième lieu, les souffrances endurées par Mme B..., qui a notamment subi une intervention chirurgicale, des séances de rééducation prolongées avec déambulation au moyen de cannes et de béquilles et le port de semelles, ont été évaluées à 3,5 sur une échelle allant de 1 à 7 par l'expert. Dans les circonstances de l'espèce, c'est à bon droit que les premiers juges ont évalué, au point 10 de leur jugement, à 5 400 euros l'indemnisation des souffrances endurées par la victime.
15. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que Mme B... a subi un préjudice esthétique temporaire du 27 avril 2018 au 7 janvier 2019 en raison de sa déambulation au moyen de béquilles que l'expert évalue à 3 sur une échelle de 7. Compte tenu de ces circonstances, il y a lieu de confirmer, pour ce chef de préjudice, le jugement du tribunal qui a alloué à la victime la somme de 1 500 euros au titre de son préjudice esthétique temporaire.
16. En sixième lieu, ainsi que les premiers juges l'ont justement apprécié, Mme B... n'établit pas que sa chute lui aurait causé un préjudice de 500 euros du fait de la dégradation de ses vêtements. De plus, si elle réclame le remboursement des frais de copie de ses dossiers médicaux et des frais de déplacement afin de consulter son avocat ou de se rendre à l'examen d'expertise, ces frais, qui peuvent se rattacher à des dépens d'instance, sont sans lien direct avec le préjudice subi. Enfin, s'agissant du remboursement de frais de déplacements, l'intéressée ne peut prétendre à être indemnisée que des seuls déplacements en lien direct avec sa chute accidentelle à l'exception de ceux réalisés pour des consultations concernant ses douleurs à l'épaule gauche sans lien avec les lésions occasionnées par cette chute. Si, eu égard à l'historique des soins retracée par l'expertise médicale, Mme B... justifie s'être rendue aux consultations et examens médicaux répertoriés par cette expertise, elle n'établit cependant ni avoir utilisé son propre véhicule pour s'y rendre ni avoir effectivement financé ses frais ni que ces frais n'auraient pas été pris en charge partiellement par l'assurance maladie. Ainsi, la preuve de réalité de ces frais n'est pas rapportée. Dans ces conditions, Montpellier Méditerranée Métropole est fondée à soutenir que Mme B... n'est pas en droit d'être indemnisée au titre de ses frais divers avant consolidation. Le jugement doit être réformé en tant qu'il a mis la somme de 343 euros à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole pour ce chef de préjudice.
17. En septième lieu, ainsi que les premiers juges l'ont justement apprécié, s'agissant des dépenses de santé avant consolidation, Mme B... justifie d'un reste à charge de 66,14 euros pour l'achat d'orthèses plantaires, équipement médical nécessaire à son état de santé. En revanche, si elle sollicite le remboursement, à hauteur de 3 300 euros, de prothèses auditives qu'elle aurait perdues lors de l'accident, la seule attestation du prothésiste auditif du 13 novembre 2023 qui se borne à reprendre les dires de Mme B... sur les circonstances de la perte de son appareil, ne permet pas d'apporter la preuve du lien entre cette perte et sa chute du 27 avril 2018. Par ailleurs, elle n'établit ni cette perte, ni l'absence, le cas échéant, d'indemnisation alors même qu'elle disposait d'une garantie en cas de casse ou de perte. A cet égard, elle ne produit aucune facture pour le remplacement d'un appareil auditif, contemporaine ou postérieure à sa chute, faisant état d'un reste à charge. Enfin, si elle fait état d'un reste à charge sur une facture de 150 euros de réadaptation fonctionnelle, la quittance produite mentionne pourtant une part prise en charge par l'organisme de sécurité sociale de 103,96 euros, tandis qu'il n'est pas démontré qu'une part de la somme en litige n'aurait pas été acquittée par la mutuelle de Mme B.... Dans ces conditions, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a limité les frais de dépenses de santé avant consolidation à la somme de 66,14 euros.
En ce qui concerne les préjudices après consolidation intervenue le 8 janvier 2019 :
18. En premier lieu, le rapport d'expertise retient que Mme B... est atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 25 %. Compte tenu de l'âge de la victime à la date de consolidation fixée au 8 janvier 2019, les premiers juges ont fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en lui allouant la somme de 29 000 euros. Par suite, le jugement doit être confirmé pour ce chef de préjudice.
19. En deuxième lieu, il résulte du rapport d'expertise que l'état de santé de Mme B... nécessitera, sa vie durant, une aide par une tierce personne pour les courses et les tâches ménagères de 3 heures par semaine. Compte tenu du salaire minimum interprofessionnel de croissance horaire brut au cours de cette période, augmenté des charges sociales, un taux moyen horaire de 14 euros pour une aide non spécialisée doit être retenu. Par suite, il sera fait une juste appréciation des frais supportés pour l'assistance d'une tierce personne non spécialisée en les évaluant à la somme de 13 188 euros pour la période couvrant la date de la consolidation et celle du présent arrêt. Au regard de ces éléments, le jugement attaqué doit être réformé en tant qu'il a limité à 9 366 euros le montant mis à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole pour ce chef de préjudice. Par ailleurs, s'agissant des frais futurs de Mme B... au titre de l'assistance par tierce personne, sur une base de 156 heures annuelles et d'un taux moyen horaire de 14 euros, le montant annuel d'indemnisation s'établit à la somme de 2 184 euros. Il y a lieu de convertir ce montant annuel en un capital, comme la victime le demande, plutôt que de lui accorder une rente, en appliquant un barème de capitalisation de 5,349 correspondant à un âge de 89 ans chez une femme (Gazette du palais édition 2022 taux d'intérêt de -1%), soit le montant de 11 682,21euros qui peut être alloué à Mme B... au titre des frais d'assistance d'une tierce personne. Au regard de ces éléments, le jugement doit être réformé en ce qu'il a fixé à 12 889,97 euros le montant de la réparation due à Mme B....
20. En troisième lieu, le rapport d'expertise indique que l'état de santé de Mme B... limite ses activités de déplacements à pied dans le cadre de balades privées. Toutefois, elle ne justifie pas de la pratique régulière d'une telle activité à titre de loisirs avant la survenue de son accident. Par suite, Montpellier Méditerranée Métropole est fondée à soutenir que Mme B... n'est pas en droit d'être indemnisée au titre du préjudice d'agrément, et le jugement doit être réformé sur ce point.
21. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que Mme B... a subi un préjudice esthétique permanent du fait de la présence d'une cicatrice plus étendue que la cicatrice initiale de pose de prothèse, de la nécessité du port d'une canne de marche en permanence, d'une boiterie et d'une inégalité de longueur des membres inférieurs que l'expertise évalue à 2,5 sur une échelle de 7. Compte tenu de la durée de ce préjudice et de sa nature, il y a lieu de confirmer, pour ce chef de préjudice, le jugement des premiers juges qui ont alloué à la victime la somme 2 500 euros au titre de son préjudice esthétique permanent.
22. En dernier lieu, s'agissant des dépenses de santé postérieures à sa date de consolidation, il résulte de l'expertise que l'état de santé de Mme B... justifie l'achat de deux paires d'orthèses plantaires et de chaussures orthopédiques par an. Toutefois, elle ne justifie pas des dépenses médicales effectuées depuis la consolidation de son état de santé. Pour ses dépenses de santé futures, sur la base d'un coût de 66,14 euros pour une paire de semelles et de 100 euros pour une paire de chaussures, soit une dépense annuelle de 332,28 euros, il y a lieu de convertir ce montant annuel en un capital, comme la victime le demande, plutôt que de lui accorder une rente, en appliquant un barème de capitalisation de 5,349 correspondant à un âge de 89 ans chez une femme(Gazette du palais édition 2022 taux d'intérêt de -1%), soit le montant de 3 554,73 euros qui doit être alloué à Mme B... au titre de ses dépenses de santé capitalisées.
23. Il résulte de tout ce qui précède que Montpellier Méditerranée Métropole est seulement fondée à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à verser à Mme B... la somme de 71 792,73 euros au lieu de la somme de 71 322,46 euros.
24. Par voie de conséquence, l'appel incident de Mme B... tendant à ce que la condamnation de Montpellier Méditerranée Métropole, en réparation de ses préjudices subis, soit portée à la somme de 165 006,07 euros, doit être rejeté.
Sur l'appel incident de la caisse primaire d'assurances maladie :
25. En l'absence de toute contestation, il y a lieu de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à verser une somme de 19 296,25 euros au titre des dépenses engagées pour les soins de Mme B..., en lien direct avec son accident, et dont elle justifie. S'agissant, en revanche, des dépenses futures, la prise en charge d'une paire de semelles orthopédiques, au coût de 28,86 euros, à raison de deux fois par an, implique que la somme due à ce titre soit ramenée au montant de 308,74 euros, par application du prix de l'euro de rente viagère visé au point 19 du présent arrêt. Dès lors que la caisse primaire d'assurances maladie réclame seulement la somme de 20 214,92 euros, Montpellier Méditerranée Métropole doit être condamnée à verser à la caisse cette somme assortie des intérêts de retard à compter du jugement du 20 avril 2023 et de leur capitalisation à compter du 20 avril 2024, et à chaque échéance annuelle ultérieure.
Sur les frais d'expertise :
26. Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 080 euros toutes taxes comprises par ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Marseille du
2 février 2021, sont mis à la charge définitive de Montpellier Méditerranée Métropole, partie perdante à l'instance.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Montpellier Méditerranée Métropole sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, Mme B... n'étant pas la partie perdante à l'instance.
28. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole, le versement à Mme B..., d'une part, et à la caisse primaire d'assurance maladie, d'autre part, d'une somme de 1 500 euros chacune sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE:
Article 1er : L'indemnité au paiement de laquelle Montpellier Méditerranée Métropole est condamnée au bénéfice de Mme B... est ramenée à la somme de 71 322,46 euros.
Article 2 : L'appel incident de Mme B... est rejeté.
Article 3 : La somme au paiement de laquelle Montpellier Méditerranée est condamnée au bénéfice de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault est portée à 20 214,92 euros. Cette somme est assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2023 et de leur capitalisation à compter du 20 avril 2024, et à chaque échéance annuelle ultérieure.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 avril 2023 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme totale de 1 080 euros toutes taxes comprises sont mis à la charge définitive de Montpellier Méditerranée Métropole.
Article 6 : Montpellier Méditerranée Métropole versera à Mme B..., d'une part, et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, d'autre part, la somme de 1 500 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à la métropole Montpellier Méditerranée Métropole, à
Mme D... B... et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 4 mars 2025 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2025.
La rapporteure,
K. Beltrami
Le président,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01445