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11/03/2025 | FRANCE | N°23TL01083

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 11 mars 2025, 23TL01083


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite de Montpellier Méditerranée Métropole du 15 février 2021 rejetant sa demande de lui attribuer le bénéfice de l'indemnité de fonction cotée à 6.1, d'enjoindre à Montpellier Méditerranée Métropole de fixer la cotation de son indemnité de fonction à 6.1 dans un délai de quinze jours, de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser rétroactivement le montant d

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite de Montpellier Méditerranée Métropole du 15 février 2021 rejetant sa demande de lui attribuer le bénéfice de l'indemnité de fonction cotée à 6.1, d'enjoindre à Montpellier Méditerranée Métropole de fixer la cotation de son indemnité de fonction à 6.1 dans un délai de quinze jours, de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser rétroactivement le montant de la part de l'indemnité de fonction dont il a été irrégulièrement privé avec cotisations afférentes ou à réparer le préjudice financier découlant de la privation injustifiée de la part de l'indemnité de fonction à laquelle il pouvait prétendre, soit la somme de 1 417 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2020, de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi et de mettre à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°2101722 du 10 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mai 2023, M. A... B..., représenté par Me Pion Riccio, demande à la cour :

1°) d'annuler partiellement ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 10 mars 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 15 février 2021 par laquelle sa demande adressée au président de Montpellier Méditerranée Métropole le 14 octobre 2020 tendant à ce que lui attribuée sans délai et avec effet rétroactif au 1er octobre 2018 une cotation de 6.1 de son poste, a été implicitement rejetée ;

3°) de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser la somme totale de 6 390 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;

4°) de mettre à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du 15 février 2021 étaient tardives après avoir retenu que cette décision était purement confirmative ; son courriel du 27 mai 2019 n'était pas adressé au président de Montpellier Méditerranée Métropole mais à la directrice des parcours professionnels et des compétences, qui ne dispose pas d'une délégation de compétence pour se prononcer sur l'attribution des indemnités de fonction ; l'absence de réponse à ce courriel ne saurait donc être qualifiée de décision implicite de rejet de nature à faire courir le délai de recours contentieux ; il en va de même s'agissant de sa demande adressée au directeur du pôle des ressources humaines et des relations sociales, qui n'est pas compétent pour se prononcer sur le régime indemnitaire des agents de la métropole ; le comportement adopté à son égard par l'administration l'a induit en erreur concernant son droit au recours ; à titre subsidiaire, son courrier adressé au président de la métropole le 14 octobre 2020 aurait dû être qualifié de recours gracieux contre la décision implicite de rejet de sa demande du 9 mars 2020 ; en application de l'article 7 de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, la décision implicite de rejet de sa demande adressée au directeur du pôle des ressources humaines et des relations sociales le 9 mars 2020 et réceptionnée le 10 mars 2020 a été implicitement rejetée le 21 août 2020, de sorte que son recours gracieux formé le 14 octobre 2020 n'était pas tardif ;

- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en rejetant sa demande indemnitaire, dès lors qu'il remplit les conditions justifiant que la cotation de 6.1 soit appliquée à son poste ; il ressort des annexes aux délibérations du conseil communautaire de la communauté d'agglomération de Montpellier des 20 décembre 2011 et 8 octobre 2012 que la cotation 6.1 peut être appliquée aux rédacteurs principaux de deuxième classe ; cette cotation de 6.1 lui a été attribuée à compter d'avril 2022 sans que sa situation administrative n'évolue, ce qui démontre que cette cotation aurait dû lui être appliquée auparavant ;

- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en ne retenant pas qu'il subissait une situation de discrimination ; les missions qui lui sont confiées sont identiques à celles des autres agents occupant le même poste de contrôleur de gestion externe, qui se voient appliquer une cotation de 6.1 pour la détermination de leur régime indemnitaire ;

- la décision implicite de rejet de sa demande tendant à l'attribution de la cotation 6.1 méconnaît les délibérations du conseil communautaire de la communauté d'agglomération de Montpellier des 20 décembre 2011 et 8 octobre 2012, en vertu desquelles les agents ayant le grade de rédacteur principal de deuxième classe peuvent bénéficier de la cotation 6.1 pour la détermination de leur indemnité de fonction ; cette cotation de 6.1 lui est d'ailleurs appliquée depuis avril 2022 ; il occupe un poste correspondant au grade d'attaché territorial, de catégorie A, et les missions qui lui sont confiées sont identiques à celles des autres contrôleurs de gestion de son service ;

- cette décision est discriminatoire ;

- il a subi un préjudice financier du fait de la privation de la cotation de 6.1 de son poste ; s'étant vu appliquer une cotation de 5.1, il a subi un préjudice financier de 35 euros par mois du 1er octobre 2018 au 30 mai 2021, puis de 27 euros par mois du 1er juin au 31 mars 2022, soit un montant total de 1 390 euros ;

- il a également subi un préjudice moral résultant d'un sentiment d'abandon et d'isolement vis-à-vis de sa hiérarchie ; l'illégalité commise par l'administration est à l'origine d'insomnies récurrentes depuis deux ans, d'une perte de temps consacré à la recherche et à la rédaction de courriers et courriels pour faire valoir ses droits, d'un mal-être au travail, d'une fatigue quotidienne, de son échec aux championnats du monde des 24 heures en octobre 2019, de difficultés à s'entraîner correctement au quotidien pour préparer ces championnats, de la dégradation de son état de santé compte tenu de sa blessure en octobre 2021 et des démarches engagées pour changer d'employeur ; il évalue ce préjudice moral à 5 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2024, Montpellier Méditerranée Métropole, représentée par le cabinet Hortus Avocats, agissant par Me Merland, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du 15 février 2021 étaient tardives et donc irrecevables ; les trois demandes successives de M. B... tendant à l'attribution de la cotation 6.1 du poste qu'il occupe ont été adressées à trois destinataires relevant de Montpellier Méditerranée Métropole ; le contenu de ces trois demandes formées les 27 mai 2019, 9 mars 2020 et 14 octobre 2020 étant identique, en l'absence de changement de circonstances de fait et de droit, la décision implicite de rejet du 15 février 2021 était purement confirmative des précédentes décisions implicites de rejet de ses demandes ; le courrier du 14 octobre 2020 ne saurait être regardé comme un recours gracieux ;

- les conclusions indemnitaires de l'appelant sont irrecevables dès lors qu'elles ont la même portée que l'annulation de la décision du 27 juillet 2019 portant refus d'attribution de la cotation 6.1 et de la décision initiale d'attribution de la cotation intervenue lors de la mutualisation des services le 1er octobre 2018, qui sont purement pécuniaires et que M. B... n'a pas contestées dans le délai de recours contentieux ;

- les annexes aux délibérations des 20 décembre 2011 et 8 octobre 2012 par lesquelles le conseil communautaire a redéfini le régime indemnitaire au sein de la métropole ne sont qu'indicatives concernant le niveau de cotation des postes ; M. B... n'avait aucun droit à se voir attribuer une cotation de 6.1, de sorte qu'elle n'a commis aucune faute en ne lui attribuant pas cette cotation ;

- M. B... n'est pas fondé à se prévaloir d'une rupture d'égalité ; la cotation 5.1 lui ayant été appliquée est adaptée à son poste et à ses missions ; s'il se prévaut de ce que la cotation 6.1 est appliquée aux autres contrôleurs de gestion externe, ils n'exercent pas les mêmes missions ; ces agents contractuels relèvent par référence au cadre d'emplois des attachés territoriaux de la catégorie A, alors que M. B... est rédacteur territorial et relève donc de la catégorie B ;

- M. B... n'a subi aucune discrimination ;

- il n'établit ni la réalité, ni le montant des préjudices dont il demande réparation.

Par une ordonnance du 25 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 7 janvier 2025 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hélène Bentolila, conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me Roumestan, du cabinet Hortus Avocats, représentant Montpellier Méditerranée Métropole.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été recruté le 2 mars 2009 par la communauté d'agglomération de Montpellier. Il a été promu le 1er juin 2018 au grade de rédacteur principal de deuxième classe et, faisant suite à une mutualisation des services, il a, à compter du 1er octobre 2018, occupé le poste de contrôleur de gestion externe au sein de la direction mutualisée du contrôle de gestion externe de Montpellier Méditerranée Métropole (Hérault). Par une délibération du 8 octobre 2012, le conseil de communauté de Montpellier agglomération, à laquelle a succédé Montpellier Méditerranée Métropole, a instauré un nouveau régime indemnitaire applicable à ses agents, comprenant notamment une part liée aux fonctions, calculée sur la base d'un système de cotation des postes, et une part liée aux résultats et à la valeur professionnelle. A compter du 1er octobre 2018, M. B... s'est vu appliquer une cotation de 5.1 au titre de la part liée aux fonctions. Par un courriel adressé à la directrice des parcours professionnels et des compétences le 27 mai 2019 et par un courrier du 9 mars 2020 adressé au directeur du pôle ressources humaines et relations sociales, il a sollicité l'attribution sans délai et avec effet rétroactif au 1er octobre 2018 de la cotation 6.1 de son poste. Puis, par un courrier adressé au président de Montpellier Méditerranée Métropole, le 14 octobre 2020, dont il a été accusé réception par un courrier du 30 novembre 2020, reçu par M. B... le 15 décembre 2020, l'intéressé a demandé l'attribution sans délai et avec effet rétroactif au 1er octobre 2018 de la cotation 6.1 de son poste. Cette demande a été implicitement rejetée. Enfin, par un courrier du 1er avril 2021, M. B... a adressé une demande indemnitaire préalable à Montpellier Méditerranée Métropole tendant à la réparation des préjudices subis du fait de la privation du bénéfice de la cotation 6.1, laquelle a également été implicitement rejetée. Par un jugement du 10 mars 2023, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née le 15 février 2021 et à la condamnation de Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser la somme totale de 6 417 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'absence d'affectation à son poste de la cotation 6.1.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Dès lors, les moyens tirés des erreurs d'appréciation qu'auraient commises les premiers juges, qui se rapportent au bien-fondé du jugement et non à sa régularité, ne peuvent être utilement invoqués par M. B....

3. En second lieu, l'appelant soutient que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que ses conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née le 15 février 2021 étaient tardives et donc irrecevables.

4. Aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours. / La date du dépôt de la demande à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête. / Le délai prévu au premier alinéa n'est pas applicable à la contestation des mesures prises pour l'exécution d'un contrat ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

5. Aux termes de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les dispositions de la présente sous-section ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents ". Cette sous-section comprend l'article L. 112-3, aux termes duquel : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception (...) ", ainsi que l'article L. 112-6, aux termes duquel : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation. / Le défaut de délivrance d'un accusé de réception n'emporte pas l'inopposabilité des délais de recours à l'encontre de l'auteur de la demande lorsqu'une décision expresse lui a été régulièrement notifiée avant l'expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite ". Aux termes de l'article L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Par dérogation à l'article L. 231-1, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet : / (...) 5° Dans les relations entre l'administration et ses agents "

6. Il résulte des dispositions précitées qu'en cas de naissance d'une décision implicite de rejet du fait du silence gardé par l'administration pendant la période de deux mois suivant la réception d'une demande, le délai de deux mois pour se pourvoir contre une telle décision implicite court dès sa naissance à l'encontre d'un agent public, alors même que l'administration n'a pas accusé réception de la demande de cet agent, les dispositions des articles L. 112-3 et L. 112-6 du code des relations entre le public et l'administration n'étant pas applicables aux agents publics. Ce n'est qu'au cas où, dans le délai de deux mois ainsi décompté, l'auteur de la demande adressée à l'administration reçoit notification d'une décision expresse de rejet qu'il dispose alors, à compter de cette notification, d'un nouveau délai pour se pourvoir.

7. Par ailleurs, une deuxième décision dont l'objet est le même que la première revêt un caractère confirmatif, dès lors que ne s'est produit entre temps aucun changement dans les circonstances de droit ou de fait de nature à emporter des conséquences sur l'appréciation des droits ou prétentions en litige.

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a sollicité l'attribution de la cotation 6.1 de son poste sans délai, avec effet rétroactif à compter du 1er octobre 2018, pour la première fois par un courriel adressé à la directrice des parcours professionnels et des compétences de Montpellier Méditerranée Métropole le 27 mai 2019. Eu égard à ce qui a été énoncé aux points 4 à 6 du présent arrêt, une décision implicite de rejet de cette demande est née deux mois après la réception de cette demande, le 27 juillet 2019, et il est constant que M. B... n'a pas contesté cette décision implicite dans le délai de recours contentieux de deux mois, qui expirait le 28 septembre 2019, de sorte que cette décision implicite du 27 juillet 2019 est devenue définitive. Si M. B... a ensuite formé deux demandes les 9 mars 2020 et 14 octobre 2020, tendant également à l'attribution de la cotation de 6.1 de son poste sans délai et avec effet rétroactif au 1er octobre 2018, en l'absence de changement de circonstances de fait ou de droit, les décisions implicites de rejet de ces demandes, identiques à la première, constituent des décisions purement confirmatives de la décision implicite de rejet du 27 juillet 2019. A cet égard, la circonstance que les demandes de M. B... ont été adressées, pour la première à la directrice des parcours professionnels et des compétences, pour la deuxième au directeur du pôle ressources humaines et relations sociales et pour la dernière au président de Montpellier Méditerranée Métropole ne saurait constituer un changement de circonstances de fait ou de droit, contrairement à ce que soutient l'intéressé. Enfin, si M. B... soutient avoir été induit en erreur par Montpellier Méditerranée Métropole concernant l'exercice de son droit au recours en indiquant avoir été reçu à plusieurs reprises par sa hiérarchie pour évoquer la question de la cotation de son poste, les échanges de courriels auxquels il se réfère, débutant en novembre 2020, sont au demeurant postérieurs à l'expiration du délai de recours contentieux contre la décision du 27 juillet 2019, qui est intervenue le 28 septembre 2019. Dès lors, les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande formée le 14 octobre 2020 sont tardives, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par Montpellier Méditerranée Métropole :

9. L'expiration du délai permettant d'introduire un recours en annulation contre une décision expresse dont l'objet est purement pécuniaire fait obstacle à ce que soient présentées des conclusions indemnitaires ayant la même portée.

10. Si Montpellier Méditerranée Métropole fait valoir que les conclusions indemnitaires de M. B... sont irrecevables dès lors qu'elles ont la même portée que celles tendant à l'annulation des décisions implicites de rejet de ses trois demandes formées les 27 mai 2019, 9 mars 2020 et 14 octobre 2020 tendant à ce que son poste soit affecté d'une cotation de 6.1, ainsi qu'il a été dit, ces trois demandes ont été implicitement rejetées et n'ont fait l'objet d'aucune décision expresse. En outre, si Montpellier Méditerranée Métropole fait valoir qu'à l'occasion d'une mutualisation des services, le poste occupé par M. B... a été qualifié à compter du 1er octobre 2018 de contrôleur de gestion externe au sein de la direction mutualisée du contrôle de gestion externe et qu'à ce moment-là, une cotation a été attribuée à son poste et que son nouveau régime indemnitaire a fait l'objet d'une décision expresse, il n'apporte aucun commencement de preuve quant à l'existence d'une telle décision expresse et à sa notification à M. B.... Dès lors, en l'absence de toute décision expresse à objet purement pécuniaire, la fin de non-recevoir tirée de l'exception de recours parallèle opposée par Montpellier Méditerranée Métropole doit être écartée.

En ce qui concerne la responsabilité :

11. Il résulte de l'instruction que, par une délibération du 8 octobre 2012, le conseil de communauté de Montpellier agglomération, à laquelle a succédé Montpellier Méditerranée Métropole, a instauré un nouveau régime indemnitaire applicable à ses agents, comprenant notamment une part liée aux fonctions, calculée sur la base d'un système de cotation des postes, et une part liée aux résultats et à la valeur professionnelle. Selon cette délibération, concernant la part liée aux fonctions, les critères de détermination de la cotation des postes tiennent compte " du niveau de responsabilité, d'expertise et de sujétions particulières qui caractérisent chaque poste de travail ". Le tableau figurant dans cette délibération, faisant apparaître des cotations allant de 1.1 à 8.2, mentionne notamment que " l'encadrement intermédiaire/pilotage de missions " relève d'une cotation comprise entre 5.1 et 5.3 et que " l'encadrement de service/pilotage de projet transversal " relève d'une cotation de 6.1 ou 6.2. Cette délibération prévoit enfin qu'" un tableau détaillé des niveaux de cotation des postes (...) sera diffusé par note de service après avis du comité technique paritaire en date du 1er octobre 2012 ". Il résulte également de " l'annexe indicative n°1 cotation des postes " que les emplois de chargés de projets stratégiques transversaux, confiées aux agents de catégories " A/B+ " relèvent d'une cotation 6.1. Par ailleurs, il est constant que les agents contractuels occupant, tout comme M. B..., le poste de contrôleur de gestion externe au sein du même service, se voient attribuer une cotation de leur poste de travail de 6.1, contrairement à M. B..., qui s'est vu attribuer une cotation de 5.1 du 1er octobre 2018 au 30 avril 2022. Si à ce titre, Montpellier Méditerranée Métropole fait valoir que ces agents n'exercent pas les mêmes missions que celles de M. B..., elle n'apporte aucune précision au soutien de ses allégations, alors que l'appréciation portée le 24 janvier 2020 par la supérieure hiérarchique de M. B... dans son compte-rendu d'évaluation professionnelle mentionne au contraire que " la fiche de poste des contrôleurs de gestion externe est identique pour chacun. Pour autant, la cotation du poste de Mr B... n'a pas suivi l'évolution de celle de ses autres collaborateurs ". Par suite, et dès lors que le système de cotation des postes pour la détermination de la part liée aux fonctions instaurée par la délibération précitée n'est corrélée ni au grade de l'agent occupant le poste concerné, ni à sa manière de servir, mais seulement à ses fonctions, en attribuant au poste occupé par M. B... une cotation de 5.1 et non une cotation de 6.1, Montpellier Méditerranée Métropole a commis une illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité.

En ce qui concerne les préjudices :

12. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'à compter du 1er octobre 2018, M. B..., rédacteur principal de deuxième classe, s'est vu attribuer une part liée aux fonctions sur la base de la cotation 5.1, pour un montant mensuel de 435 euros. Il résulte également de l'instruction qu'il aurait perçu la somme mensuelle de 470 euros si son poste s'était vu appliquer la cotation régulière de 6.1, soit une différence mensuelle de 35 euros. De plus, M. B... soutient, sans être contredit par Montpellier Méditerranée Métropole qu'à compter du 1er juin 2021, il a perçu la somme mensuelle de 431 euros et qu'il aurait perçu celle de 458 euros si la cotation 6.1 avait été appliquée. Dans ces conditions, et dès lors que Montpellier Méditerranée Métropole ne conteste pas la circonstance selon laquelle ce n'est qu'à compter du 1er mai 2022 que M. B... s'est finalement vu appliquer une cotation de 6.1, il y a lieu de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser la somme de 1 390 euros qu'il sollicite en réparation de son préjudice matériel.

13. En second lieu, M. B... soutient avoir subi un préjudice moral du fait de l'illégale cotation de son poste entre le 1er octobre 2018 et le 1er mai 2022. S'il soutient avoir souffert d'insomnies durant deux ans et qu'il impute notamment son échec aux championnats du monde des 24 heures en octobre 2019 aux nombreuses démarches infructueuses tendant à la révision de son régime indemnitaire, il n'apporte aucun élément de nature à établir le lien de causalité entre ce préjudice et la faute commise par Montpellier Méditerranée Métropole, de sorte que ses conclusions tendant à la réparation de ce préjudice doivent être rejetées.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande indemnitaire tendant à la réparation du préjudice financier résultant de l'absence d'attribution de la cotation 6.1.

Sur les frais liés au litige :

15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole la somme de 1 500 euros à verser à M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Montpellier Méditerranée Métropole demande sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier n°2101722 du 10 mars 2023 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande indemnitaire de M. B... en réparation de son préjudice financier.

Article 2 : Montpellier Méditerranée Métropole est condamnée à verser la somme de 1 390 euros à M. B....

Article 3 : Montpellier Méditerranée Métropole versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par Montpellier Méditerranée Métropole au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à Montpellier Méditerranée Métropole.

Délibéré après l'audience du 18 février 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure,

Mme Bentolila, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mars 2025.

La rapporteure,

H. Bentolila

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°23TL01083


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01083
Date de la décision : 11/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Helene Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : PION RICCIO

Origine de la décision
Date de l'import : 14/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-11;23tl01083 ?
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