Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'enjoindre au syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable du plateau des Costes-Gazon et au syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala de déplacer la canalisation d'eau potable implantée sur son terrain à Les Costes Gazon (Aveyron) hors de l'emprise de sa propriété dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de cinq cents euros par jour de retard. Il a également demandé au tribunal administratif de condamner solidairement ces syndicats à lui verser une indemnité de 30 000 euros, assortie des intérêts de retard et de leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.
Par un jugement n° 2002748 du 8 mars 2023, le tribunal administratif de Toulouse a enjoint au syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala de procéder à la régularisation de l'emprise irrégulière sur la propriété de M. C... sur le fondement des article L. 152-1 et R. 152-1 du code rural et de la pêche maritime dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 mai 2023, M. C..., représenté par Me Vicquenault, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 8 mars 2023 en tant qu'il a rejeté sa demande de déplacement de la canalisation d'eau potable en litige, a enjoint au syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala de procéder à la régularisation de l'emprise irrégulière et a rejeté ses conclusions indemnitaires ;
2°) d'enjoindre au syndicat mixte des eaux de Lévézou Ségala de déplacer l'ouvrage litigieux hors de sa propriété dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cinq cents euros par jour de retard ;
3°) de condamner ce syndicat mixte à lui verser une indemnité de 30 000 euros en réparation du préjudice de jouissance que lui cause la présence de cette canalisation, et d'assortir cette somme des intérêts de retard et de leur capitalisation ;
4°) de mettre à la charge de ce syndicat mixte la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il ne peut être contesté qu'une canalisation d'eau potable traverse les parcelles cadastrées (AN0)A n° 46, 50 et 400(/ANO) lui appartenant ;
- cette canalisation, qui n'a pas fait l'objet d'une convention de servitude, est irrégulièrement implantée sur sa propriété ;
- la régularisation de cette emprise par la constitution d'une servitude de passage sur sa propriété, sur le fondement des articles L. 152-1 et R. 152-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, n'est pas possible dès lors que les parcelles cadastrées ..., concernées par le passage de la canalisation, sont assimilables à des jardins attenant aux habitations au sens de cet article ;
- les inconvénients qu'il supporte du fait de l'implantation sans titre de la canalisation d'eau sont importants dans la mesure où elle traverse son jardin, restreint les possibilités de culture de ses terrains à destination agricole et qu'il ne peut assainir et réhabiliter son bâtiment en raison de la présence de la canalisation ;
- en revanche, le déplacement de la canalisation ne présente pas de difficultés techniques sérieuses et le coût des travaux, estimé à 15 764,50 euros toutes taxes comprises selon le devis établi par la société Veolia à la demande du syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable des Costes-Gozon, est modeste ;
- il subit un préjudice de jouissance du fait de l'implantation irrégulière de cet ouvrage ; il n'a pu ni exploiter les terres traversées par la canalisation ni entreprendre les travaux de terrassements du talus nécessaires à l'assainissement du bâtiment.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2024, le syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala, représenté par Me Faure-Tronche, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelant la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- il entend procéder à la régularisation de l'emprise de la canalisation par le biais d'une convention et verser à M. C... une indemnité de 1 500 euros ;
- le déplacement de la canalisation d'eau présenterait, du fait des coûts de recherche de l'emplacement de la conduite et des travaux de voirie, une dépense disproportionnée ;
- l'appelant n'a subi aucun préjudice de jouissance puisque la réalité de la canalisation n'est pas établie et qu'il n'établit pas le lien de causalité entre cet ouvrage et son préjudice, les terrains supposément impactés par la présence de l'ouvrage, étant des landes non cultivées.
Par une ordonnance du 2 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 17 décembre 2024 à 12 heures.
Par un courrier du 5 février 2025, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'annuler l'article 1er du jugement attaqué en tant qu'il a enjoint au syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala de procéder à la régularisation de l'emprise irrégulière sur la propriété de M. C... dès lors qu'il ne résultait pas de l'instruction que le syndicat mixte ait sérieusement envisagé cette régularisation et qu'elle ait été susceptible d'aboutir (CE 28 février 2020,
M. et Mme B..., n° 425743 en B).
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Beltrami,
- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Vicquenault, représentant M. C... et celles de Me Faure-Tronche représentant le syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala.
Une note en délibéré a été présentée pour M. C... le 22 février 2025.
Considérant ce qui suit :
1. Par un acte notarié du 20 mars 2014, M. C... a acheté une propriété, constituée notamment des parcelles cadastrées section ..., comprenant des bâtiments d'habitation et d'exploitation ainsi que des parcelles de terres de différentes natures situées sur le territoire de la commune de Les Costes-Gozon (Aveyron). Il indique avoir découvert, après la signature de l'acte, alors qu'il procédait au débroussaillage de son terrain, un regard abritant une vanne sur une conduite d'adduction d'eau potable. Par un courrier du 22 janvier 2015, le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable du plateau des Costes-Gozon a fait connaître à M. C... son refus de prendre en charge les frais de déplacement de la canalisation présente sous son terrain. Ce refus a été confirmé par un deuxième courrier du 7 mars 2015, dans lequel le syndicat a précisé qu'il ne possédait aucun renseignement relatif à cette canalisation dans ses archives. Par un courrier du 29 mars 2016, M. C... a mis en demeure le syndicat de prendre en charge les frais de déplacement de l'ouvrage en dehors de sa propriété. Par une ordonnance n° 1700185 rendue le 21 avril 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. C... tendant à ce que soit ordonnée une expertise. Par deux courriers du 16 avril 2020, M. C... a mis en demeure le syndicat mixte des eaux du Lévézou Segala, qui a repris en 2019 la compétence en matière d'eau potable, et le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable du plateau des Costes-Gozon, de déplacer la canalisation située sous son terrain et a présenté une demande indemnitaire préalable en raison des préjudices qu'il estime subir du fait de la présence de cet ouvrage public. M. C... relève appel du jugement du 8 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions tendant au déplacement de la canalisation d'eau potable implantée sur son terrain hors de l'emprise de sa propriété et ses conclusions indemnitaires.
Sur les conclusions tendant au déplacement de la canalisation d'eau hors de la propriété de M. C... :
2. Lorsqu'il est saisi d'une demande tendant à ce que soit ordonnée la démolition d'un ouvrage public dont il est allégué qu'il est irrégulièrement implanté par un requérant qui estime subir un préjudice du fait de l'implantation de cet ouvrage et qui en a demandé sans succès la démolition à l'administration, il appartient au juge administratif, juge de plein contentieux, de déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si l'ouvrage est irrégulièrement implanté, puis, si tel est le cas, de rechercher, d'abord, si eu égard notamment à la nature de l'irrégularité, une régularisation appropriée est possible, puis, dans la négative, en tenant compte de l'écoulement du temps, de prendre en considération, d'une part les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence, notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part, les conséquences de la démolition pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.
3. Afin d'apprécier que la possibilité d'une régularisation appropriée de l'emprise est possible, le juge est tenu de vérifier que la régularisation était sérieusement envisagée et susceptible d'aboutir.
4. Il résulte de l'instruction, et en particulier du procès-verbal de constat d'huissier du 30 décembre 2016, qu'un regard de canalisation, constitué par une buse enfoncée dans le sol verticalement, est présent sur la parcelle cadastrée section A n° 50 appartenant à M. C..., et qu'au surplus, deux autres regards similaires sont situés sur les parcelles voisines cadastrées section ... appartenant à un autre propriétaire. De plus, si le syndicat intercommunal de l'eau du plateau des Costes-Gozon a indiqué, dans un courrier adressé à M. C... le 7 mars 2015, ne pas posséder dans ses archives de renseignements concernant la canalisation en litige, ni de convention de servitude matérialisant le tracé de cet ouvrage, ce syndicat n'a cependant pas nié la présence de cette conduite sous la propriété de M. C... puisqu'il a rappelé à ce dernier qu'il restait alors le maître d'œuvre de tous les travaux réalisés sur son réseau. Surtout, le syndicat intercommunal a joint à ce courrier un devis des travaux qu'il avait fait établir par la société Veolia le 8 décembre 2014 et qui avait pour objet " le déplacement du réseau d'eau potable de la propriété de M. C... sur le domaine public ". De plus, ce devis, qui ne fait pas état d'opérations de recherche de l'emplacement de la canalisation d'eau, montre que le tracé et la localisation de cet ouvrage sont parfaitement identifiés. Dès lors, la présence d'une canalisation d'eau potable sur la parcelle cadastrée A n° 50, appartenant à l'appelant, doit être regardée comme établie ce que, au demeurant, le syndicat mixte des eaux de Levezou-Ségala, compétent en matière de gestion du service de l'eau depuis le 1er décembre 2019, reconnaît désormais dans ses écritures d'appel.
5. Il est constant que l'implantation de cet ouvrage a été réalisée sans l'accord des précédents propriétaires de la parcelles cadastrée ... et de M. C.... En outre, il ne résulte pas de l'instruction qu'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique ait été mise en œuvre ou qu'une servitude pour l'établissement d'une canalisation d'eau potable ait été instituée dans les conditions prévues par les articles L. 152-1 et R. 152-1 à R. 152-15 du code rural et de la pêche maritime. Par suite, la canalisation implantée sur la propriété de M. C... constitue une emprise irrégulière.
En ce qui concerne la possibilité d'une régularisation :
6. Aux termes de l'article L. 152-1 du code rural et de la pêche maritime : " Il est institué au profit des collectivités publiques, des établissements publics (...) qui entreprennent des travaux d'établissement de canalisations d'eau potable ou d'évacuation d'eaux usées ou pluviales une servitude leur conférant le droit d'établir à demeure des canalisations souterraines dans les terrains privés non bâtis, excepté les cours et jardins attenant aux habitations. L'établissement de cette servitude ouvre droit à indemnité. Il fait l'objet d'une enquête publique réalisée selon les modalités prévues au livre Ier du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article afin notamment que les conditions d'exercice de la servitude soient rationnelles et les moins dommageables à l'utilisation présente et future des terrains. "
7. Aux termes de l'article R. 152-1 du code rural et de la pêche maritime : " Les personnes publiques définies au premier alinéa de l'article L. 152-1 (...) à qui les propriétaires intéressés n'ont pas donné les facilités nécessaires à l'établissement, au fonctionnement ou à l'entretien des canalisations souterraines d'eau potable ou d'évacuation d'eaux usées ou pluviales, peuvent obtenir l'établissement de la servitude prévue audit article, dans les conditions déterminées aux articles R. 152-2 à R. 152-15. " Aux termes de l'article R. 152-4 du même code : " La personne morale de droit public maître de l'ouvrage (...) qui sollicite le bénéfice de l'article L. 152-1, adresse à cet effet une demande au préfet. A cette demande sont annexés : 1° Une note donnant toutes précisions utiles sur l'objet des travaux et sur leur caractère technique ; 2° Le plan des ouvrages prévus ; 3° Le plan parcellaire des terrains sur lesquels l'établissement de la servitude est envisagé, avec l'indication du tracé des canalisations à établir, de la profondeur minimum à laquelle les canalisations seront posées, de la largeur des bandes prévues aux 1° et 2° de l'article R. 152-2 et de tous les autres éléments de la servitude. Ces éléments devront être arrêtés de manière que la canalisation soit établie de la façon la plus rationnelle et que la moindre atteinte possible soit portée aux conditions présentes et futures de l'exploitation des terrains ; 4° La liste par commune des propriétaires, (...). Lorsque les travaux ont pour objet l'établissement de canalisations souterraines d'adduction d'eau relevant du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, la demande est accompagnée, le cas échéant, de l'étude d'impact définie à l'article R. 122-5 du même code. " Aux termes de l'article R. 152-5 de ce code : " Après consultation des services intéressés et notamment du directeur départemental des territoires, le préfet prescrit, par arrêté, l'ouverture d'une enquête dans chacune des communes où sont situés les terrains devant être grevés de la servitude. (...) " Aux termes de l'article R. 152-7 de ce code : " Notification individuelle du dépôt du dossier est faite par le demandeur aux propriétaires intéressés, dans les formes et suivant les conditions prévues aux articles R. 131-6 et R. 131-7 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Cette notification comporte la mention du montant de l'indemnité proposée en réparation du préjudice causé par l'établissement de la servitude et par toutes les sujétions pouvant en découler. " Aux termes de l'article R. 152-10 de ce code : " Le préfet statue par arrêté sur l'établissement des servitudes. Dans l'arrêté, les propriétés sont désignées et l'identité des propriétaires est précisée conformément aux dispositions de l'article R. 132-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. (...) ". Aux termes de l'article R. 512-11 de ce code : " L'arrêté préfectoral est notifié au demandeur et affiché à la mairie de chaque commune intéressée. Il est également notifié à chaque propriétaire, à la diligence du demandeur, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Au cas où un propriétaire intéressé ne pourrait être atteint, la notification est faite au fermier, locataire, gardien ou régisseur de la propriété ou, à défaut, au maire de la commune où se trouve celle-ci. ". Enfin, aux termes de l'article R. 512-13 du code rural et de la pêche maritime : " Le montant des indemnités dues en raison de l'établissement de la servitude est fixé conformément aux dispositions en vigueur en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique ; il couvre le préjudice subi par la réduction permanente du droit des propriétaires des terrains grevés. "
8. Il résulte de ces dispositions que l'institution au profit d'une personne publique d'une servitude lui conférant le droit d'établir à demeure des canalisations souterraines d'eau potable dans les terrains privés non bâtis est subordonnée à la présentation d'une demande adressée par la personne publique au préfet qui doit être accompagnée des pièces et documents visés à l'article R. 152-4 et comportant notamment le tracé des canalisations. Le demandeur doit notifier le dépôt de son dossier aux propriétaires intéressés. A l'issue de la procédure, qui est soumise à une enquête publique préalable, le préfet peut prendre un arrêté instituant la servitude qui doit être notifié, à la diligence du demandeur, au propriétaire concerné. Ce propriétaire a droit à une indemnité dont le montant est fixé conformément aux dispositions applicables en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.
9. Si le syndicat intimé indique qu'il entend procéder à la régularisation de l'emprise de la canalisation implantée sur la parcelle de M. C... par le biais d'une convention, et en versant à ce dernier une indemnité de 1 500 euros, l'établissement d'une telle servitude conventionnelle, qui suppose un accord entre les parties, ne saurait être envisagé dès lors que M. C... maintient, depuis 2015, sa demande de déplacement de la canalisation d'eau potable qui traverse sa propriété.
10. De plus, il ne résulte pas de l'instruction que le syndicat intimé ait, que ce soit en première instance et en appel, effectivement envisagé d'accomplir les démarches nécessaires à la mise en œuvre de la procédure prévue à l'article L. 152-1 du code rural et de la pêche maritime qui suppose notamment d'adresser au préfet un dossier comportant les annexes visées à l'article R. 152-4, et, en particulier, le tracé de la canalisation alors qu'au demeurant, il soutient que l'identification du tracé des canalisations est techniquement " complexe ". Il résulte ainsi de l'instruction qu'à la date du présent arrêt, aucune régularisation de l'emprise, susceptible d'aboutir, n'était sérieusement envisagée par le syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala. Compte tenu de ces éléments, il y a lieu de constater qu'une régularisation appropriée de l'ouvrage n'est, en l'état de l'instruction, pas envisagée à la date du présent arrêt.
11. Il en résulte que c'est à tort que, à l'article 1er de son jugement, le tribunal administratif de Toulouse a enjoint au syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala de procéder à la régularisation de l'emprise irrégulière sur la propriété de M. C..., sur le fondement des articles L. 152-1 et R. 152-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, en fixant le montant de l'indemnité due au requérant conformément à l'article R. 152-13 du code rural et de la pêche maritime.
En ce qui concerne la balance des intérêts en présence :
12. Il résulte de l'instruction que la canalisation d'eau en litige fait partie du réseau d'eau potable géré initialement par le syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable du plateau des Costes-Gozon. Ainsi qu'il a été dit précédemment, la gestion de ce réseau a été transférée à compter du 1er décembre 2019 au syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala. Il ne résulte pas de l'instruction que cette canalisation d'eau serait hors d'usage et qu'elle ne concourrait pas à l'alimentation en eau potable des usagers du syndicat mixte.
13. L'appelant se plaint des inconvénients importants que la présence de cet ouvrage sur sa propriété lui occasionne. S'il soutient, tout d'abord, que cette emprise restreint les possibilités de culture de ses champs, il ne justifie toutefois ni de la destination agricole de la parcelle ...° 50, ni, alors qu'il demeure à Vitrolles (Bouches-du-Rhône), de sa qualité d'exploitant agricole ou d'un projet éventuel de mettre en exploitation, en fermage ou en métayage, ses terres. Par ailleurs, l'allégation selon laquelle la partie Sud du bâtiment situé sur sa parcelle supporterait des écoulements d'eau, provenant d'une butte dans laquelle passerait la canalisation en litige, n'est pas établie par les éléments versés à l'instance.
14. Dès lors, quand bien même il résulte du devis établi par la société Veolia, à la demande du syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable du plateau des Costes-Gozon, que les travaux de déplacement de la canalisation sont techniquement réalisables et d'un montant raisonnable de 15 764, 50 euros, toutes taxes comprises, eu égard à l'utilité publique de cet ouvrage pour l'alimentation en eau potable de la population des communes membres du syndicat, et à l'absence de démonstration des nuisances effectivement subies par M. C..., le déplacement de cet ouvrage public porterait une atteinte excessive à l'intérêt général.
15. Il en résulte que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, à l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande de déplacement de la canalisation d'eau irrégulièrement implantée sur sa propriété.
Sur les conclusions en injonction :
16. Il résulte de ce qu'il précède qu'il n'y pas lieu d'enjoindre au syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala de déplacer la canalisation d'eau irrégulièrement implantée sous la propriété de M. C.... Par suite, les conclusions en injonction présentées par M. C... doivent être rejetées.
Sur les conclusions indemnitaires :
17. Dans le cas d'une décision administrative portant atteinte à la propriété privée, le juge administratif est compétent pour connaître de conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de cette décision administrative, hormis le cas où elle aurait pour effet l'extinction du droit de propriété. Si la décision d'édifier un ouvrage public sur la parcelle appartenant à une personne privée porte atteinte au libre exercice de son droit de propriété par celle-ci, elle n'a toutefois pas pour effet l'extinction du droit de propriété sur cette parcelle. Par suite, la réparation des conséquences dommageables résultant de la décision d'édifier un ouvrage public sur une parcelle appartenant à une personne privée peut donner lieu à une indemnité réparant intégralement le préjudice résultant de l'occupation irrégulière de cette parcelle, pour peu que les préjudices invoqués soient établis, et tenant compte de l'intérêt général qui justifie le maintien de cet ouvrage.
18. Pour les motifs exposés au point 13, M. C... n'apporte pas la preuve des nuisances qu'il subirait du fait de l'implantation irrégulière de la canalisation d'eau sous sa propriété et qui seraient à l'origine d'un préjudice de jouissance. M. C... n'établit pas non plus que la présence souterraine de la canalisation l'empêcherait de réaliser des travaux de terrassement du talus présent sur sa propriété qui recouvrirait selon lui la canalisation et qui serait à l'origine, pour sa propriété, d'infiltrations et d'humidité dont la cause n'est pas démontrée. Il en résulte que, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, M. C..., faute pour lui d'établir la réalité des préjudices qu'il allègue, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme réclamée par M. C... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
20. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de
M. C..., le versement au syndicat intimé d'une somme sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE:
Article 1er : L'article 1er du jugement du 8 mars 2023 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de M. C... est rejeté.
Article 3 : Les conclusions du syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au syndicat mixte des eaux du Lévézou Ségala.
Délibéré après l'audience du 11 février 2025 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mars2025.
La rapporteure,
K. Beltrami
Le président,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne à la préfète de l'Aveyron, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01078