Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2023 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par une ordonnance n° 2400009 du 4 janvier 2024, le vice-président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande comme irrecevable en raison de son caractère tardif.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2024, M. B..., représenté par Me Brivet-Galaup, doit être regardé comme demandant à la cour d'annuler cette ordonnance.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande comme irrecevable pour tardiveté dès lors que l'arrêté du préfet de l'Hérault du 5 décembre 2023 lui a été notifié le 27 décembre 2023 et non le 15 décembre 2023 et qu'il a saisi le tribunal administratif le 2 janvier 2024 ;
- l'avis de réception postal du pli de notification de l'arrêté attaqué mentionne qu'il a été présenté le 15 décembre 2023 dans un centre d'hébergement des demandeurs d'asile où il ne résidait plus, et il n'a informé que le 27 décembre de son existence, jour où il s'est rendu à la poste afin de récupérer ce pli ; si son recours est considéré comme tardif, ces circonstances ont revêtu un caractère insurmontable et un cas de force majeure.
Le préfet des Pyrénées-Orientales a été mis en demeure le 7 mai 2024 de produire des observations en défense dans un délai d'un mois.
Un mémoire, présenté par M. B..., représenté par Me Brivet-Galaup, a été enregistré le 28 janvier 2025, postérieurement à la clôture de l'instruction intervenue trois jours francs avant l'audience en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chabert, président.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant iranien, né 8 septembre 1987, déclare être entré sur le territoire français le 24 septembre 2018. Par un arrêté du 5 décembre 2023, le préfet des Pyrénées-Orientales l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par la présente requête, M. B... relève appel de l'ordonnance du 4 janvier 2024 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté pour irrecevabilité manifeste en raison de son caractère tardif sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. L'article R. 612-6 du code de justice administrative dispose que : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ". Malgré une mise en demeure qui lui a été adressée par la cour le 7 mai 2024, le préfet des Pyrénées-Orientales n'a produit aucune observation avant la clôture de l'instruction. Il est donc réputé avoir acquiescé aux faits exposés dans la requête. Il appartient cependant au juge de vérifier que ces faits ne sont pas contredits par l'instruction et qu'aucune règle d'ordre public ne s'oppose à ce qu'il soit donné satisfaction au requérant. En outre, l'acquiescement aux faits est par lui-même sans conséquence sur leur qualification juridique au regard des textes sur lesquels l'administration s'est fondée ou dont le requérant revendique l'application.
3. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° (...) ". Aux termes de l'article L. 614-5 du même code : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 est assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quinze jours suivant la notification de la décision. (...) ".
4. Aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative alors en vigueur : " (...) Conformément aux dispositions de l'article L. 614-5 du même code, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application des 1°, 2° ou 4° de l'article L. 611-1 du même code, fait courir un délai de quinze jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour notifiées simultanément. (...) ". Aux termes du II de l'article R. 776-5 du même code : " (...) les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation ".
5. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'étranger, informé par la notification de la décision l'obligeant à quitter le territoire français de la possibilité de la contester dans un délai de quinze jours devant le tribunal administratif, peut, dès la saisine de ce tribunal par une requête susceptible d'être motivée même après l'expiration du délai de recours, demander à son président le concours d'un interprète et que lui soit désigné d'office un avocat. Ce délai de quinze jours n'est susceptible d'aucune prorogation.
6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. B... a fait l'objet d'une mesure d'éloignement par un arrêté du 5 décembre 2023 du préfet des Pyrénées-Orientales, qui a été pris sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 7 mars 2019 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 octobre 2020, que sa demande de réexamen a été rejetée pour irrecevabilité, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décision du 17 février 2021 que par la Cour nationale du droit d'asile le 18 octobre 2022, et qu'il ne bénéficiait plus du droit à se maintenir sur le territoire français.
7. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier, en particulier de l'historique de l'objet recommandé 1A 207 999 2515 5 produit pour la première fois en appel, correspondant au pli recommandé adressé à l'appelant par les services du préfet des Pyrénées-Orientales, que cet arrêté, qui comporte la mention des voies et délais de recours, lui a été présenté le 15 décembre 2023 à l'adresse suivante " Chez CADA ACAL 1 rue Francis Souvent 66000 Perpignan ". Il ressort de ce même document qu'après avoir été mis en instance le même jour et tenu à disposition du guichet du bureau de poste " Perpignan Moulin AV " à compter du lendemain, ce pli a été distribué avec capture de signature le 27 décembre 2023. M. B... a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande d'annulation de cet arrêté qui a été enregistrée le 2 janvier 2024, soit, en application des dispositions précitées, avant l'expiration du délai de recours contentieux. Il est donc fondé à soutenir que sa requête n'étant pas tardive, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit, pour ce motif, être annulée.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté comme irrecevable en raison de son caractère tardif sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 5 décembre 2023. Il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Montpellier pour qu'il statue sur la demande de M. B....
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 2400009 du 4 janvier 2024 du vice-président du tribunal administratif de Montpellier est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Montpellier pour qu'il soit statué sur la demande de M. B....
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Brivet-Galaup et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 30 janvier 2025, où siégeaient :
- M. Chabert, président de chambre,
- M. Teulière, président assesseur,
- M. Jazeron, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2025.
Le président-rapporteur,
D. Chabert
Le président-assesseur,
T. Teulière La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24TL00199