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13/02/2025 | FRANCE | N°23TL02047

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 13 février 2025, 23TL02047


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 septembre 2020 portant retrait de sa carte de résident de dix ans.



Par un jugement n° 2004588 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 8 août 2023, M. A..., représenté par Me Bautès, demande

à la cour :



1°) d'annuler ce jugement ;



2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 septembre 2020 ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 septembre 2020 portant retrait de sa carte de résident de dix ans.

Par un jugement n° 2004588 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 août 2023, M. A..., représenté par Me Bautès, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 septembre 2020 ;

3°) d'ordonner au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui restituer sa carte de résident dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir au besoin sous astreinte ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en prononçant le retrait de la carte de résident qui lui avait été délivrée, le préfet de l'Hérault a commis une erreur manifeste d'appréciation et a fait une inexacte application des articles L. 314-6 et R. 311-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en raison de l'ancienneté sa présence en France et alors qu'il pensait pouvoir employer régulièrement deux salariés étrangers, le retrait de sa carte de résident à la suite du contrôle de son activité revêt un caractère disproportionné alors qu'il n'a fait l'objet d'aucune condamnation pénale pour ces faits.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2024, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête d'appel de M. A... n'est fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Chabert, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité marocaine né en 1970, a obtenu à compter du 30 octobre 2003 une carte de résident de dix ans, laquelle a été renouvelée en dernier lieu jusqu'au 29 octobre 2023. Cette carte de résident lui a été retirée par un arrêté du préfet de l'Hérault du 10 septembre 2020 à la suite d'un contrôle de son activité effectué le 18 septembre 2019 par la police aux frontières et la mutualité sociale agricole constatant l'emploi par M. A... de deux salariés de nationalité marocaine non munis d'une autorisation de travail et en situation irrégulière en France. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 28 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. L'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige, dispose que : " La carte de résident peut être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, ayant occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 341-6 du code du travail. (...) ". Aux termes de l'article R. 311-15 du même code alors applicable : " I.- Le titre de séjour peut être retiré : / (...) 8° Si l'étranger, titulaire d'une carte de résident, a occupé un travailleur étranger en infraction avec les dispositions de l'article L. 5221-8 du code du travail ; (...) ". Cet article L. 5221-8 du code du travail prévoit que : " L'employeur s'assure auprès des administrations territorialement compétentes de l'existence du titre autorisant l'étranger à exercer une activité salariée en France, sauf si cet étranger est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi tenue par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1. ". Enfin, aux termes de l'article L. 8251-1 de ce code : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. / Il est également interdit à toute personne d'engager ou de conserver à son service un étranger dans une catégorie professionnelle, une profession ou une zone géographique autres que celles qui sont mentionnées, le cas échéant, sur le titre prévu au premier alinéa. ".

3. La mesure de retrait de la carte de résident, telle que prévue par les dispositions précitées de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, revêt le caractère d'une sanction dont la contestation conduit le juge à vérifier la proportionnalité à la gravité des faits reprochés.

4. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. A... a créé le 9 septembre 2019 une société dénommée Agri Pro 34 exerçant une activité de travaux agricoles pour la taille de vignes, le palissage et l'entretien d'espaces verts. Le 19 septembre suivant, après un signalement d'un entrepreneur employant deux ressortissants étrangers démunis d'autorisation de travail, des agents de la police aux frontières ont mené une opération de contrôle conjointement avec la Mutualité sociale agricole auprès de deux ouvriers agricoles en train de vendanger une vigne sur le territoire de la commune de Lauret (Hérault). A l'issue de ces opérations de contrôle, il a été constaté que deux salariés employés par M. A... n'étaient titulaires d'aucune autorisation de travail et séjournaient irrégulièrement en France. L'intéressé se trouvait ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 8° de l'article R. 311-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans lequel le préfet peut retirer la carte de résident sur le fondement de l'article L. 314-6 du même code.

5. D'autre part, si M. A... soutient en appel que le retrait de sa carte de résident revêt un caractère disproportionné au regard de l'ancienneté de sa présence en France et du caractère isolé du manquement qui lui est reproché, lequel n'a pas eu de suite sur un plan pénal, il se borne à indiquer qu'il s'était rapproché de son comptable pour savoir s'il était possible d'embaucher les deux personnes contrôlées en situation de travail et qu'il est de bonne foi dès lors qu'il a établi des bulletins de salaire pour ces employés. Toutefois, alors que le contrôle de l'activité de M. A... a eu lieu quelques jours seulement après la création de son entreprise agricole, la seule ancienneté de sa présence en France en situation régulière depuis le mois d'octobre 1998 ne suffit pas, en l'absence de toute autre précision ou justification relative à sa privée et familiale en France, à démontrer que le retrait de sa carte de résident présenterait en l'espèce un caractère disproportionné alors que l'arrêté en litige, par son article 2, lui délivre une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ". Dans ces conditions, le préfet de l'Hérault a pu légalement prononcer le retrait de la carte de résident de M. A... sur le fondement des dispositions citées au point 2 du présent arrêt.

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., n'implique aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction au besoin sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par l'appelant et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Bautès et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet d l'Hérault

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2025, où siégeaient :

- M. Chabert, président de chambre,

- M. Teulière, président assesseur,

- M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2025.

Le président-rapporteur,

D. Chabert

Le président-assesseur,

T. Teulière La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23TL02047


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL02047
Date de la décision : 13/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Denis Chabert
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : BAUTES GEORGIA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-13;23tl02047 ?
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