Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures :
Mme F... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté n° 2023-31-338 du 29 mars 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
M. G... D... a également demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté n° 2023-31-337 du 29 mars 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement nos 2302145, 2302146 rendu le 4 juillet 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse, après avoir joint les deux demandes, a annulé les deux arrêtés du 29 mars 2023 du préfet de la Haute-Garonne et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2023, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler le jugement du 4 juillet 2023.
Il soutient que :
- il n'existe pas d'obstacle à l'éloignement de M. D... au sens des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la présence de Mme A... en France ne se justifie donc pas.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2024, Mme F... A... et M. G... D..., représentés par Me Cohen, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à leur conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils font valoir que :
- les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés ;
- les décisions en litige sont insuffisamment motivées ;
- la décision obligeant M. D... à quitter le territoire français est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision du préfet de la Haute-Garonne du 21 septembre 2022 lui refusant l'admission au séjour ;
- la mesure d'éloignement édictée à l'encontre de M. D... méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leur situation personnelle et de leurs conséquences sur cette situation ;
- les décisions fixant le pays de renvoi sont privées de base légale en conséquence de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français ;
- les mêmes décisions méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elles méconnaissent également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant compte tenu des traumatismes vécus par leur fils dans leur pays d'origine.
Par une ordonnance en date du 9 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 avril 2024.
Par décisions du 15 mars 2024, Mme A... et M. D... ont obtenu le maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Chabert, président, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... et Mme A..., son épouse, ressortissants géorgiens nés respectivement les 28 août 1973 et 29 août 1984, seraient entrés séparément en France le 11 décembre 2021 puis le 13 mars 2022. M. D... a formé une demande d'asile le 27 décembre 2021, rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 19 avril 2022 et par la Cour nationale du droit d'asile le 11 novembre 2022 et a également sollicité son admission au séjour en raison de son état de santé le 24 mai 2022 refusée par décision du 21 septembre 2022 du préfet de la Haute-Garonne. Mme A... a sollicité le bénéfice de l'asile le 22 mars 2022, demande également rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 29 décembre 2022. Par deux arrêtés pris le 29 mars 2023, le préfet de la Haute-Garonne a obligé les intéressés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement rendu le 4 juillet 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse, après avoir joint les deux demandes introduites par M. D... et Mme A... contre ces arrêtés, a annulé lesdits arrêtés, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et a rejeté le surplus des conclusions. Par sa requête, le préfet de la Haute-Garonne fait appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les moyens d'annulation retenus par le premier juge :
2. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code, dans sa version alors applicable : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ".
3. Pour annuler l'arrêté n° 23-31-337 du 29 mars 2023 pris à l'encontre de M. D..., le premier juge a considéré que l'intéressé entrait dans le champ d'application des étrangers protégés contre une mesure d'éloignement au sens des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu de l'indisponibilité de son traitement dans son pays d'origine.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui a levé le secret médical, souffre notamment de diabète de type 2 évoluant dans un contexte à risque cardiovasculaire dû à une coronaropathie précoce familiale, associé à de l'hypertension artérielle, une obésité morbide, un syndrome d'apnée du sommeil ainsi que des problèmes articulaires nécessitant un traitement médicamenteux et un suivi médical. Le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé dans son avis du 11 août 2022, sur lequel s'est fondé le préfet de la Haute-Garonne, que si l'état de santé de M. D... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, ce dernier peut effectivement y bénéficier d'un traitement approprié.
5. Pour remettre en cause cette appréciation, M. D... se prévaut de plusieurs certificats médicaux détaillant ses pathologies et les modalités de son suivi médical en France. Ces pièces mentionnent notamment un traitement en date du 12 décembre 2022 par Metformine et Xultophy, ainsi qu'un courrier du laboratoire Novo Nordisk précisant la non-commercialisation de ce dernier médicament en Géorgie. Toutefois, ces éléments, postérieurs à la date de l'avis rendu, n'indiquent pas que cette forme d'insuline serait indispensable, ni que l'intéressé ne pourrait bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement antidiabétique équivalent qui lui permettrait d'équilibrer son diabète. Par ailleurs, s'agissant de son traitement médicamenteux, il ressort du profil établi par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2016, concernant la prise en charge du diabète en Géorgie et produit par le préfet à l'appui de sa requête d'appel, que la Metformine prescrite à M. D... y est disponible ainsi que l'insuline. Si ce profil de l'OMS ne fait pas état de la Xultophy, il ne comporte pas la liste des médicaments disponibles dans ce pays et il ne ressort d'aucune autre pièce du dossier qu'une molécule équivalente ne serait pas disponible en Géorgie, alors qu'il ressort des pièces médicales versées au dossier que, de décembre 2021 au mois de juillet 2022, l'intéressé était également traité par Trulicity, associant d'analogue du GLP1 et d'une insuline lente. Si M. D... fait valoir que le Xultophy est nécessaire compte tenu des moindres effets indésirables au niveau cardiovasculaire en comparaison au Trulicity, ces allégations ne sont assorties d'aucune pièce médicale attestant de la nécessité de prescrire seulement ce médicament commercialisé par le laboratoire Novo Nordisk. Dans ces conditions, alors que M. D... n'établit pas que son état de santé se serait aggravé depuis l'avis du collège des médecins du 11 août 2022 ni que son traitement aurait été modifié, les éléments produits ne suffisent pas à établir, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays d'origine, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Par suite, le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 29 mars 2023 portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. D... au motif de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a annulé l'arrêté du même jour pris à l'encontre de Mme A... après avoir relevé une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que cet arrêté aurait nécessairement pour effet de la séparer de son conjoint.
6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. D... et Mme A... devant le tribunal administratif de Toulouse et devant la cour administrative d'appel.
Sur les autres moyens soulevés par M. D... et Mme A... :
En ce qui concerne les moyens communs à l'ensemble des décisions :
7. En premier lieu, Mme E... B..., directrice des migrations et de l'intégration de la préfecture de la Haute-Garonne et signataire de l'arrêté contesté, a bénéficié, par un arrêté du 13 mars 2023 régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture n° 31-2023-099 le 15 mars 2023, d'une délégation de signature à l'effet de signer les décisions relatives à la police des étrangers, notamment en matière de mesures d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés en litige doit être écarté.
8. En second lieu, les décisions en litige mentionnent, de façon suffisamment circonstanciée pour permettre à M. D... et Mme A... de les discuter, les motifs de droit et les circonstances de fait qui en constituent le fondement. Les arrêtés visent les textes dont ils font application et notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, le 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'arrêté du 29 mars 2023 pris à l'encontre de M. D... vise également le 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ils rappellent également les conditions d'entrée et de séjour des intéressés sur le territoire français et les éléments de leurs situations personnelles et familiales. Ils précisent notamment que M. D... et Mme A... ont sollicité l'asile, que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté leur demande et que la Cour nationale du droit d'asile a confirmé ce rejet concernant la demande de M. D..., qu'ils ne bénéficient plus du droit de se maintenir sur le territoire français et n'établissent pas être exposés à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Géorgie. Le préfet indique également de la demande d'admission au séjour présentée par M. D... au titre de son état de santé a été rejetée par une décision du 21 septembre 2022. Ainsi, le préfet a mentionné les considérations de fait sur lesquelles il s'est fondé pour prendre les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par conséquent, ces décisions sont suffisamment motivées.
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés points 2 à 5 du présent arrêt, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par le préfet au regard des dispositions de l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; / 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; (...) ".
11. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne a prononcé à l'encontre de M. D... une obligation de quitter le territoire français en se fondant sur le 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 11 novembre 2022. Il ressort des termes de l'arrêté en litige que cette dernière a également été prise sur le fondement du 3° de l'article L. 611-1 du même code. Si l'intéressé excipe de l'illégalité de la décision du 21 septembre 2022 portant refus de séjour à l'appui de sa demande d'annulation de la mesure d'éloignement, cette dernière décision est devenue définitive, le recours contentieux formé par l'intéressé le 4 avril 2023 ayant été rejeté par un jugement définitif n° 2301832 du 29 mars 2024 du tribunal administratif de Toulouse. Compte tenu de l'absence d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, M. D... n'est pas fondé à demander, par voie de conséquence, l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
13. Il ressort des pièces du dossier que le séjour en France de M. D... et son épouse est récent à la date de l'arrêté en litige et que ces derniers ne possèdent pas de titre de séjour après le rejet de leur demande d'asile. Par ailleurs, alors même que M. D... a bénéficié d'une prise en charge médicale, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'une prise en charge médicale appropriée dans son pays d'origine ainsi qu'il a été exposé aux points 2 à 5 ci-dessus. Par ailleurs, alors qu'ils ont chacun vécu la majorité de leur vie dans leur pays d'origine, ils n'établissent pas y être dépourvus d'attaches. Dans ces conditions, et dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existerait un obstacle à la reconstitution en Géorgie de la cellule familiale constituée de M. D... et Mme A... et de leurs trois enfants, les décisions portant obligation de quitter le territoire français ne peuvent être regardées comme portant une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale au regard des buts poursuivis. Par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
14. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés au point précédent, les décisions du préfet obligeant M. D... et Mme A... à quitter le territoire français ne peuvent être regardées comme étant entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leur situation.
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :
15. En premier lieu, il résulte de ce qui a été exposé précédemment que l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français n'est pas établie. Dès lors, M. D... et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions fixant le pays de destination seraient privées de base légale.
16. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". L'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".
17. Les intimés soutiennent qu'ils encourent des risques de traitements inhumains en cas de retour en Géorgie du fait que M. D... est membre actif du Mouvement national uni, qu'il a été victime d'agressions et qu'avec son épouse et ses enfants ils ont fait l'objet de menaces alors que le frère de cette dernière a été assassiné par un policier en 2010. Toutefois, ils n'apportent, dans la présente instance, aucune preuve de la réalité des risques auxquels ils seraient personnellement et directement exposés en cas de retour dans ce pays, alors par ailleurs que leurs demandes d'asile ont été rejetées. Il résulte par ailleurs de ce qui a été indiqué précédemment que M. D... pourra bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée à son état de santé dans son pays d'origine. Dès lors, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu les stipulations et les dispositions mentionnées au point précédent.
18. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
19. Les décisions contestées n'ont pas pour effet de séparer M. D... et Mme A... de leurs enfants qui ont vocation à accompagner leurs parents en Géorgie. Si les requérants font valoir que leur fils C... né en 2007 y a vécu de nombreux traumatismes, les deux seuls certificats médicaux versés par les intimés, établis postérieurement aux décisions attaquées, ne permettent pas de tenir pour établies leurs affirmations quant à des risques pour sa santé encourus en Géorgie. Par suite, les décisions contestées ne peuvent être regardées comme portant atteinte à l'intérêt supérieur des enfants des intimés. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
20. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a annulé les arrêtés du 29 mars 2023 portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination à l'encontre de M. D... et Mme A.... Il en résulte que c'est également à tort que le tribunal a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Sur les frais liés au litige :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse du 4 juillet 2023 sont annulés.
Article 2 : Les demandes présentées par M. D... et Mme A... devant le tribunal administratif de Toulouse et leurs conclusions présentées en appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. G... D..., à Mme F... A... et à Me Cohen.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 30 janvier 2025, où siégeaient :
- M. Chabert, président de chambre,
- M. Teulière, président assesseur,
- M. Jazeron, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2025.
Le président-rapporteur,
D. Chabert
Le président-assesseur,
T. Teulière La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01904