Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté 11 mars 2022 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2202244 du 6 juin 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 décembre 2023, Mme B..., représentée par Me Dujardin, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 6 juin 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral en litige du 11 mars 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; à défaut d'enjoindre au préfet de procéder à un nouvel examen de sa demande dans les mêmes conditions de délai ; dans tous les cas, d'enjoindre au préfet de lui délivrer, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient, en ce qui concerne le refus de titre de séjour, que :
- il est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il n'est pas justifié que l'avis du 2 novembre 2021 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) aurait été régulièrement émis conformément aux dispositions précitées des articles R. 425-11, R. 425-12 et R. 425-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Elle soutient, en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français, que :
- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- elle méconnaît l'article L. 611-3-9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Elle soutient, en qui concerne la décision fixant le pays de renvoi, que :
- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2024, le préfet du Tarn conclut au rejet de la requête.
Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.
Par une décision du 12 janvier 2024, la bureau l'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande présentée par Mme B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Faïck a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante camerounaise née en 1968, est entrée en France en août 2014 avant de bénéficier, à compter du 28 janvier 2016, d'une carte de séjour temporaire pour raison de santé, renouvelée en dernier lieu le 14 octobre 2020. Mme B... a, le 1er septembre 2021, demandé au préfet du Tarn de lui renouveler son titre de séjour. Par un arrêté du 11 mars 2022, le préfet a rejeté cette demande, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de la désignation du pays de renvoi. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 11 mars 2022. Elle relève appel du jugement rendu le 6 juin 2023 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, en se bornant à alléguer qu'il n'est pas justifié que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), rendu le 2 novembre 2021, aurait été émis conformément aux dispositions des articles R. 425-11, R. 425-12 et R. 425-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme B... n'apporte aucun élément nouveau permettant de critiquer utilement la réponse apportée à ce moyen par le tribunal administratif de Toulouse. Il y a lieu, par suite, d'écarter ce moyen par adoption des motifs du jugement contesté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".
4. La partie qui justifie d'un avis du collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ainsi que l'accès effectif à celui-ci. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... souffre d'un diabète de type 2 et d'hypertension artérielle. Le préfet du Tarn a estimé, sur le fondement de l'avis du collège de médecins de l'OFII, que si l'état de santé de Mme B... nécessitait une prise en charge médicale dont l'absence pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, cette dernière pouvait néanmoins bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Cameroun, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce pays. Pour contester cette appréciation, Mme B... produit deux certificats médicaux établis par un praticien au centre hospitalier d'Albi les 7 avril 2022 et le 7 juillet 2023, ce dernier étant postérieur de plus d'un an à la décision attaquée, selon lesquels son traitement médical comprend plusieurs médicaments ainsi qu'une prise en charge diabétologique, cardiologique, néphrologique et ophtalmologique dont l'accès n'est pas garanti au Cameroun. Toutefois, eu égard aux termes dans lesquels ils sont rédigés, ces certificats médicaux ne permettent pas d'estimer que Mme B... ne pourrait bénéficier d'un suivi médical adéquat dans son pays d'origine. Quant au rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) sur l'accès à des soins de santé au Cameroun, dont se prévaut l'appelante, il date de février 2019 et ne permet pas d'établir, eu égard à sa relative ancienneté, l'absence d'accès effectif à un traitement dans le pays d'origine. A l'inverse, il ressort de la note établie le 26 janvier 2022 par le médecin coordonnateur de l'OFII et l'un des médecins signataires de l'avis émis par cette instance que " l'état de santé de Mme B... connaît une stabilisation effective et durable, sans complication ou évènements aigus ... depuis au moins 2019 ... Ses pathologies relèvent en routine d'un omnipraticien en France comme au Cameroun... ". Cette note précise que " les traitements et examens (biologiques notamment) nécessaires au suivi des pathologies présentées sont disponibles dans le pays d'origine et relèvent le plus souvent de services publics. ". Quant à la disponibilité des spécialités médicamenteuses, la note indique que " si certaines spécialités ne sont pas disponibles en tant que telles (ex : Janumet), elles peuvent être substituées par d'autres disponibles dans le pays... ". Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... ne pourrait accéder, y compris pour des raisons financières, aux soins que requiert son état de santé. Les moyens tirés d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que la présence de Mme B... sur le territoire français depuis 2014 a été rendue possible par les divers titres de séjour qui lui ont été délivrés pour raison de santé. Par eux-mêmes, ces titres de séjour ne lui donnaient pas vocation à résider durablement en France. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... aurait noué en France des liens privés ou familiaux revêtant un caractère intense, ancien et stable alors qu'elle n'est au contraire pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident deux de ses trois enfants et où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-six ans, soit la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, le préfet du Tarn n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet du Tarn n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour. Et pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, les moyens tirés de ce que la mesure d'éloignement méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3-9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste doivent être écartés.
Sur le pays de renvoi :
8. Il résulte de ce qui précède que la décision fixant le pays de destination n'est pas dépourvue de base légale dès lors que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par ailleurs, pour les mêmes motifs que précédemment exposés, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale doit également être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en litige. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie pour information en sera délivrée au préfet du Tarn.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 janvier 2025.
L'assesseur,
P. Bentolila
Le président-rapporteur,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°23TL02930 2