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23/01/2025 | FRANCE | N°23TL02547

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 1ère chambre, 23 janvier 2025, 23TL02547


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.



Par un jugement n° 2303584 du 2 octobre 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.



Pro

cédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2023, M. C..., représenté par la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2303584 du 2 octobre 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2023, M. C..., représenté par la société civile professionnelle Reche-Guille Meghabbar, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 octobre 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de ce que l'arrêté ne comporte pas sa signature et ne lui a pas été remis avec l'assistance d'un interprète ;

- le tribunal a retenu un moyen d'office sans l'avoir invité à présenter ses observations ;

L'arrêté attaqué :

- est entaché d'une erreur de fait substantielle quant à sa nationalité ;

- est entaché d'un vice de procédure, faute de saisine préalable de la commission du titre de séjour ;

- est entaché d'un vice de procédure, faute de saisine du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- ne comporte pas sa signature et ne lui a pas été remis avec l'assistance d'un interprète ;

- est entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- méconnaît l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- est illégal dès lors qu'il remplit toutes les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour pluriannuel en qualité de parent d'enfant français et est à ce titre protégé contre l'éloignement ; son droit au séjour ne peut lui être retiré du fait que ses enfants français ont atteint la majorité ;

- est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- est entaché d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation dès lors qu'il ne constitue pas une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française.

Par ordonnance du 1er août 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 6 septembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Chalbos a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant bosnien né le 5 mai 1983, réside régulièrement en France depuis le 6 mai 2004, sous couvert de titres de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Le 27 septembre 2021, il a sollicité le renouvellement de son droit au séjour. Par un arrêté du 5 juin 2023, le préfet de l'Aude a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et lui a interdit le retour sur le même territoire pour une durée de deux ans. M. C... demande à la cour d'annuler le jugement du 2 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un tel arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article L. 423-9 du même code : " L'accès de l'enfant français à la majorité ne fait pas obstacle au renouvellement de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7 ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour (...) ".

4. Enfin, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance (...) ".

5. Si le préfet n'est tenu de saisir la commission que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les textes visés au point précédent auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent, la circonstance que la présence de l'étranger constituerait une menace à l'ordre public ne le dispense pas de son obligation de saisine de la commission. Il en va, en particulier, ainsi du cas de l'étranger qui sollicite le renouvellement d'une carte de séjour pluriannuelle obtenue sur le fondement des dispositions des articles L. 423-7 et L. 433-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui continue de remplir les conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire dont il était précédemment titulaire et pour lequel l'autorité administrative envisage de refuser de renouveler son titre de séjour en lui opposant la réserve liée à l'ordre public prévue à l'article L. 412-5 précité.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a bénéficié de plusieurs cartes de séjour pluriannuelles obtenues en sa qualité de parent d'enfant français, dont la dernière était valable du 10 avril 2019 au 9 avril 2021. Sa fille B..., née le 10 février 2004 et titulaire de la nationalité française, est devenue majeure le 10 février 2022, soit postérieurement à l'expiration du dernier titre de séjour de l'appelant et elle était encore mineure lorsque ce dernier en a sollicité le renouvellement le 27 septembre 2021. En application des dispositions citées au point 2, M. C..., qui soutient sans être contredit que sa fille est encore étudiante et à sa charge financière, et alors qu'il ne ressort pas des termes de l'arrêté attaqué que le préfet de l'Aude aurait entendu lui opposer l'absence de contribution effective à son éducation et à son entretien, remplissait donc les conditions de délivrance du titre de parent d'enfant français. Si une telle circonstance ne faisait pas obstacle à ce que le préfet de l'Aude refusât de faire droit à sa demande de renouvellement de titre de séjour en se fondant sur la circonstance que son comportement constituerait une menace à l'ordre public, il était néanmoins tenu, en application des dispositions précitées, de saisir pour avis la commission du titre de séjour, préalablement à l'intervention de la décision portant refus de séjour et des décisions qui lui sont accessoires. Par conséquent, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour est fondé et doit être accueilli.

7. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête et notamment ceux relatifs à la régularité du jugement attaqué, à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et lui a interdit le retour sur le même territoire pour une durée de deux ans.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique seulement que le préfet de l'Aude procède au réexamen de la demande de titre de séjour de M. C.... Il y a lieu de lui enjoindre à y procéder dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'État la somme demandée par M. C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2303584 du 2 octobre 2023 du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du 5 juin 2023 du préfet de l'Aude sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Aude de réexaminer la demande de M. C... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Lafon, président-assesseur,

Mme Chalbos, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2025.

La rapporteure,

C. Chalbos

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23TL02547


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL02547
Date de la décision : 23/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: Mme Camille Chalbos
Rapporteur public ?: Mme Restino
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS TARLIER - RECHE - GUILLE MEGHABBAR

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-23;23tl02547 ?
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