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21/01/2025 | FRANCE | N°24TL00563

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 21 janvier 2025, 24TL00563


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation personnelle dans le délai de quinze jours suivant la notification

du jugement, sous astreinte de cent euros par jour de retard, de lui délivrer, dans l'at...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'annuler l'arrêté du 1er décembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation personnelle dans le délai de quinze jours suivant la notification du jugement, sous astreinte de cent euros par jour de retard, de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ou, dans l'hypothèse où l'aide juridictionnelle lui serait refusée, la somme de 1 500 euros sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°2307710 du 9 février 2024, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a, après avoir admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, annulé l'arrêté du 1er décembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a prononcé à l'encontre de M. A... une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de procéder au réexamen de la situation de ce dernier dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement, en le munissant, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour, mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à verser au conseil de M. A..., sous réserve d'une admission définitive à l'aide juridictionnelle et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et une pièce complémentaire, enregistrées le 1er mars et le 3 septembre 2024, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement rendu le 9 février 2024.

Il soutient que :

- son appel, introduit dans le délai de recours, est recevable ;

- c'est à tort que le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a retenu la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en effet, M. A..., qui n'a pas contesté le refus de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " opposé sur ce fondement, ne séjourne pas habituellement sur le territoire et ne démontre pas qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié de ses affections au Nigéria ;

- aucun autre moyen d'annulation ne peut être retenu, l'arrêté du 1er décembre 2023 étant parfaitement fondé.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 et 17 mai, le 9 octobre et le 11 novembre 2024, M. D... A..., représenté par Me Naciri, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) de rejeter le recours du préfet de la Haute-Garonne ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi sur l'aide juridique ou, dans l'hypothèse où l'aide juridictionnelle lui serait refusée, la somme de 1 500 euros sur le seul fondement de l'article L761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;

- c'est à bon droit que le magistrat désigné a retenu la méconnaissance des dispositions du 9° de l 'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français est, en outre, insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît également les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard d'une absence d'accessibilité du traitement dans son pays d'origine ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- compte tenu de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale ;

- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par une ordonnance du 12 novembre 2024, la date de clôture d'instruction a été fixée au 29 novembre 2024.

Par une décision du 17 mai 2024, M. A... a bénéficié du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant nigérian, déclare être entré sur le territoire français, le 5 février 2023. Le 10 février 2023, il a sollicité son admission au bénéfice de l'asile et sa demande a été rejetée, le 15 juin 2023, par l'office français de protection des réfugiés et apatrides, décision confirmée, le 7 novembre 2023, par la cour nationale du droit d'asile. Le 20 juin 2023, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui lui a été refusée le 10 novembre suivant. Par un arrêté du 1er décembre 2023, le préfet de la Haute-Garonne a retiré l'attestation de demandeur d'asile que M. A... détenait, a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le préfet de la Haute-Garonne relève appel du jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse, rendu le 9 février 2024, annulant son arrêté du 1er décembre 2023 portant obligation de quitter le territoire français pour M. A... dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi et lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de ce dernier dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente de lui délivrer, une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à son conseil, ou, dans le cas où l'aide juridictionnelle ne serait pas accordée à l'intéressé, à lui verser directement.

Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président (...) ". M. A... ayant bénéficié du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale, par une décision du 17 mai 2024, postérieure à l'enregistrement du recours présenté par le préfet de la Haute-Garonne, ses conclusions tendant à ce qu'il soit admis provisoirement à cette aide sont devenues sans objet.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse :

3. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...). ". Lorsqu'elle envisage de prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger en situation irrégulière, l'autorité préfectorale n'est tenue de recueillir préalablement l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration que si elle dispose d'éléments d'information suffisamment précis permettant d'établir que l'intéressé, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une telle mesure d'éloignement.

4. Pour annuler l'obligation de quitter le territoire français prononcée, le 1er décembre 2023, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur le circonstance que le préfet de la Haute-Garonne, qui n'établissait pas avoir rejeté, le 10 novembre 2023, la demande de titre de séjour présentée par M. A... en raison de son état de santé, et ne produisait pas l'avis du collège de médecins cité au point précédent, disposait au jour de l'édiction de l'arrêté attaqué d'informations suffisamment précises et circonstanciées permettant d'établir que M. A... présentait un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie des étrangers ne pouvant faire l'objet d'une mesure d'éloignement et a donc, en prononçant une telle mesure, méconnu les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction citée au point précédent.

5. Dans son avis du 4 octobre 2023, versé au dossier par l'appelant, le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que, si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine et peut également voyager sans risque vers ce pays.

6. M. A..., qui a accepté de lever le secret médical, souffre de diabète de type 2 sans complication et d'hypertension artérielle résistante. Le préfet de la Haute-Garonne invoque la disponibilité et l'accessibilité au Nigéria du traitement médical et du suivi que nécessitent ces affections.

7. Il ressort des pièces du dossier que les affections dont M. A... est atteint nécessitent l'administration de médicaments comprenant de la metformine, de la dulaglutide (trulicity), du coveram, de l'Esidrex et de l'atorvatastine, ainsi qu'un suivi régulier en endocrinologie et la réalisation d'examens biologiques de type HbA1c. D'une part, les certificats médicaux, rédigés les 23 mars et 30 novembre 2023, ne retiennent pas l'indisponibilité des médicaments et du suivi médical dans le pays dont il a la nationalité. D'autre part, la liste des médicaments essentiels au Nigéria, dressée en 2020, ne permet pas de démontrer que des médicaments équivalents ou de la même classe thérapeutique à son traitement actuel n'y seraient pas disponibles, étant précisé qu'un traitement approprié n'est pas nécessairement un traitement identique à celui dont il bénéficie en France. A cet égard, l'antidiabétique oral " Metformine ", qui lui a été prescrit, est délivré au Nigéria, selon la fiche issue de la base données " Medical country of origin information report " (MedCoi), en avril 2022, et les examens biologiques de suivi diabétique de type HbA1c peuvent également y être pratiqués. De la même façon, une substance générique du coveram, médicament administré dans le cadre de son hypertension, est présente sur la liste des médicaments essentiels au Nigéria invoquée par l'intimé. Si ce dernier invoque également l'indisponibilité du trulicity ou dulaglutide, il ne conteste pas utilement le caractère substituable de cette substance active par le semaglutide et le liraglutide, qui appartiennent à la même classe pharmacologique que ce dernier et figurent sur cette même liste. Enfin, si M. A... soutient qu'il n'y aurait pas un accès effectif à son traitement en raison de son coût trop élevé et de restrictions dans les zones rurales, les éléments généraux qu'il produit relatifs notamment au caractère sous-optimal du ratio médecins/patients dans le pays et aux disparités de coût entre le secteur public et le secteur privé ne suffisent pas à démontrer qu'il ne pourrait financer ses soins en cas de retour au Nigéria, où résident son épouse et ses enfants majeurs, et alors qu'il ressort des certificats médicaux produits que son état de santé est compatible avec une activité professionnelle. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que M. A... pouvait bénéficier d'un traitement et d'un suivi endocrinologique appropriés dans le pays dont il a la nationalité.

8. Il résulte de ce qui vient d'être exposé que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté en litige, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A..., en première instance et en appel, au soutien de sa demande d'annulation de l'arrêté du 1er décembre 2023.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les autres moyens soulevés par l'intimé :

S'agissant des moyens communs à l'ensemble des décisions de l'arrêté attaqué :

10. D'une part, par un arrêté n° 31-2023-3-13-00006 du 13 mars 2023, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le 15 mars suivant, le préfet de la Haute-Garonne a donné délégation à Mme C... B..., directrice des migrations et de l'intégration de la préfecture, à l'effet de signer notamment les décisions contestées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit être écarté.

11. D'autre part, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...) ". Selon l'article L. 612-12 du même code : " La décision portant obligation de quitter le territoire français mentionne le pays, fixé en application de l'article L. 721-3, à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ".

12. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier les 3° et 4° de l'article L. 611-1 de ce code et mentionne notamment que la demande d'asile de M. A..., enregistrée le 10 février 2023, a été rejetée, le 15 juin 2023, par l'office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée, le 7 novembre 2023, par la cour nationale du droit d'asile. Il précise, en outre, que M. A... a sollicité son admission au séjour en raison de son état de santé et se l'est vu refuser le 10 novembre 2023. Par ailleurs, la décision fixant le pays de renvoi mentionne les articles L. 721-3 à L. 721-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise la nationalité de l'intéressé et la circonstance que ce dernier n'établit pas qu'il serait exposé en cas d'éloignement vers son pays d'origine à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ces conditions, l'arrêté comporte l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Cette motivation révèle également que le préfet de la Haute-Garonne a procédé à un examen particulier de la situation de M. A.... Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la mesure d'éloignement et de la décision fixant le pays de renvoi, ainsi que celui tiré du défaut d'examen particulier de la situation de l'intimé doivent être écartés.

S'agissant de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

13. En premier lieu, l'article R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

14. Ainsi qu'il a été dit au point 5, le préfet de la Haute-Garonne a saisi pour avis le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui a émis un avis le 4 octobre 2023. Par suite, le moyen tiré de ce que, faute de saisine de ce collège, l'obligation de quitter le territoire français serait entachée d'un vice de procédure doit être écarté.

15. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° (...) ".

16. M. A... s'est vu refuser définitivement le bénéfice de l'asile par une décision de la cour nationale du droit d'asile lue en audience publique le 7 novembre 2023. En vertu des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 citées au point précédent, M. A... ne bénéficiait donc plus du droit de se maintenir sur le territoire français à partir de cette date. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 7, l'intimé n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement approprié à ses affections. Ainsi, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour, alors que M. A..., selon ses propres déclarations, est récemment arrivée en France et qu'il se borne à alléguer avoir vécu pendant vingt années en Grèce et serait donc isolé au Nigéria, le préfet de l'Hérault n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français.

S'agissant de la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

17. D'une part, il résulte de ce qui précède que les moyens de légalité dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français ne sont pas fondés. Pa suite l'exception tirée de l'illégalité de cette décision soulevée à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi ne peut être accueillie.

18. D'autre part, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

19. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que M. A... n'établit pas que son renvoi au Nigéria aurait des conséquences irréversibles sur son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées doit être écarté.

20. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 1er décembre 2023 prononçant à l'encontre de M. A... une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à destination du pays dont il a la nationalité, lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de ce dernier dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et, dans l'attente de lui délivrer, une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à son conseil, ou, dans le cas où l'aide juridictionnelle ne serait pas accordée à l'intéressé, à lui verser directement.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative comme celles de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, dans la présente instance, la somme que sollicite M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Les articles 2, 3 et 4 du jugement n°2307710 du 9 février 2024 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse sont annulés.

Article 3 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse et ses conclusions présentées en appel en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de la Haute-Garonne, au ministre de l'intérieur, à M. D... A... et à Me Naciri.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 janvier 2025.

La rapporteure,

D. Teuly-Desportes

La présidente,

A. Geslan-DemaretLa greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°24TL00563 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24TL00563
Date de la décision : 21/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Delphine Teuly-Desportes
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : NACIRI

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-21;24tl00563 ?
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