Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, d'annuler la décision du 3 février 2021 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours contre la décision du 19 octobre 2020 de la ministre des armées rejetant sa demande de pension militaire d'invalidité, de lui accorder un droit à pension militaire d'invalidité à compter de sa demande, présentée, le 18 avril 2018 et selon un taux d'invalidité de 10% relatif aux acouphènes bilatéraux dont il est atteint et, à titre subsidiaire, d'ordonner, avant-dire droit une expertise médicale.
Par un jugement n° 2101760 du 24 février 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée, le 17 avril 2023, M. C... B..., représenté par Me Tandonnet, de la société civile professionnelle d'avocats Tandonnet - Lipsos Lafaurie, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement rendu le 24 février 2023 ;
2°) de dire et juger qu'il a droit à une pension militaire d'invalidité à compter de sa demande, présentée, le 18 avril 2018 selon un taux d'invalidité de 10% relatif aux acouphènes bilatéraux dont il est atteint ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner, avant-dire droit une expertise médicale ;
4°) de statuer sur les dépens.
Il soutient que :
- sa demande, à l'instar de celle de première instance, ne porte que sur l'infirmité liée aux acouphènes bilatéraux ;
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif de Montpellier, l'expert médical a retenu une imputabilité au service des acouphènes bilatéraux au regard de l'accident qu'il a subi le 16 novembre 1981 ;
- si la cour ne s'estimait pas suffisamment informée, il conviendrait d'ordonner un supplément d'expertise.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;
- le droit à pension ne peut qu'être dénié dès lors que M. B... n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'imputabilité au service des acouphènes bilatéraux dont il souffre.
Par une ordonnance du 10 septembre 2024, la date de clôture d'instruction a été fixée au 10 octobre 2024.
Par une décision du 8 janvier 2024, le président de la cour a annulé la décision du 6 décembre 2023, rejetant la demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par M. B..., et lui a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Delphine Teuly-Desportes, présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.
1. M. B..., engagé dans l'infanterie depuis le 1er janvier 1969 et ayant obtenu, en dernier lieu, le grade de capitaine, a été victime le 6 novembre 1981 d'un accident de service, alors qu'il manipulait deux pétards figuratifs d'artillerie qui n'avaient pas explosé et a subi des blessures aux mains et aux jambes. Le 30 novembre 1995, il a été radié des contrôles de l'armée. Le 18 avril 2018, M. B... a sollicité le versement d'une pension militaire d'invalidité pour une hypoacousie de perception bilatérale et des acouphènes bilatéraux en lien, selon lui, avec l'accident de 1981. Par une décision du 19 octobre 2020, la ministre des armées a rejeté sa demande au motif que les deux infirmités n'étaient pas imputables au service et que le taux d'invalidité résultant de la première infirmité était inférieur à 10%. Par une décision du 3 février 2021, la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours. M. B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier, rendu le 24 février 2023, rejetant sa demande d'annulation de cette décision, ainsi que celle tenant à l'ouverture d'un droit à pension.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pensions militaires d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer sur les droits de l'intéressé en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction, et aussi, le cas échéant, d'apprécier, s'il est saisi de moyens en ce sens ou au vu de moyens d'ordre public, la régularité de la décision en litige.
3. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2017 : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'évènements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; " et aux termes de l'article L. 121-2 du même code dans sa rédaction applicable pour la période du 1er janvier au 15 juillet 2018 : " Lorsque la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes mentionnées à l'article L. 121-1 ne peut être apportée, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée : a) Soit avant la date du renvoi du militaire dans ses foyers ; b) Soit, s'il a participé à une des opérations extérieures mentionnées à l'article L. 4123-4 du code de la défense, avant la date de son retour sur son lieu d'affectation habituelle (...). La présomption définie au présent article s'applique exclusivement, soit aux services accomplis en temps de guerre, au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre ou en opération extérieure, soit au service accompli par les militaires pendant la durée légale du service national, les constatations étant faites dans les délais prévus aux précédents alinéas. Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. ". Aux termes de l'article L. 121-5 de ce code : " La pension est concédée : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; ".
4. Il résulte de ces dispositions que lorsque la présomption légale d'imputabilité ne peut être invoquée, l'intéressé doit apporter la preuve de l'existence d'une relation directe et certaine entre l'infirmité et un fait précis ou des circonstances particulières de service. Cette relation de causalité est requise aussi bien en cas d'infirmité trouvant sa cause exclusive dans le service qu'en cas d'aggravation par le service d'une infirmité préexistante ou concomitante au service.
5. En application de ces dispositions, il appartient à M. B..., qui s'est prévalu à l'appui de sa demande de pension militaire d'invalidité présentée le 18 avril 2018, soit près de vingt-six ans après sa radiation des contrôles de l'armée, d'acouphènes bilatéraux qui auraient été causés par l'accident de service dont il a été victime au camp militaire de Caylus (Tarn-et-Garonne), le 6 novembre 1981, et à l'occasion duquel seules des plaies ouvertes et des hématomes sur les membres inférieurs et la main gauche ont été constatés, de démontrer que la survenance de ces infirmités présente un lien de causalité directe et certaine avec le service.
6. M. B... souffre d'acouphènes bilatéraux, ainsi que cela a été relevé dans l'expertise médicale réalisée, le 16 février 2016, par un médecin mandaté par l'administration et retenant un taux d'invalidité de 10%. Sa première demande de pension, présentée le 14 avril 2014, au titre de cette infirmité, qui présentait un caractère non permanent, a été rejetée, le 20 septembre 2016. Dans le cadre de sa nouvelle demande de pension, présentée le 18 avril 2018, il a été relevé dans l'expertise médicale réalisée par le docteur A..., à la demande de la sous-direction des pensions du ministère des armées, le 16 janvier 2020, que M. B... est atteint d'acouphènes bilatéraux nocturnes et dans les moments de calme, d'intensité variable, et qui seraient en lien direct avec l'accident de service, le 6 novembre 1981, à l'occasion duquel il a été blessé par les projectiles de plastique et de carton de deux pétards figuratifs d'artifice. Toutefois, si cet expert a retenu un lien de causalité direct entre cette explosion et les acouphènes bilatéraux désormais permanents, c'est sur le seul fondement des déclarations de M. B..., qui a indiqué avoir subi un blast auriculaire, lors de cet accident de service, alors même que ni le registre ni le livret médical de l'intéressé n'en font état, aucun trouble auditif de ce type n'ayant été signalé, auprès de sa hiérarchie ou des services médicaux, dans les suites de ce traumatisme sonore. La simple circonstance alléguée par le docteur A..., dont les conclusions ont, au demeurant, été infirmées, par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité, le 5 mars 2020, que ce traumatisme sonore ait pu être négligé lors de son hospitalisation ne saurait suffire à établir un tel lien de causalité direct et certain dès lors qu'il résulte de l'instruction qu'aucune anomalie n'a été détectée, dans le cadre du bilan oto-rhino-laryngologique, réalisé le 13 septembre 1990, soit neuf ans après l'accident de service, au centre de Montlouis (Pyrénées-Orientales), dans le cadre de la candidature de l'intéressé en qualité d'observateur pour l'Organisation des Nations Unies. Dans ces conditions, le lien entre les acouphènes bilatéraux permanents dont souffre M. B... et l'accident de service du 6 novembre 1981 n'est pas établi et ne saurait, en tout état de cause, être démontré par des rapports d'expertise médicale, versés aux débats, qui concernent d'autres militaires.
7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande d'annulation de la décision du 3 février 2021 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté sa demande tendant à l'attribution d'une pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmité.
Sur les frais liés au litige :
8. En l'absence, dans la présente instance, de dépens au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, la demande de remboursement présentée à ce titre par M. B... ne peut qu'être rejetée.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Me Tandonnet et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure,
Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 janvier 2025.
La rapporteure,
D. Teuly-Desportes
La présidente,
A. Geslan-Demaret La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°23TL00884 2