Vu la procédure suivante :
Par un arrêt avant-dire-droit du 21 mars 2024, la cour administrative d'appel de Toulouse, statuant sur la requête présentée par M. A... B... à l'encontre du jugement du tribunal administratif de Nîmes n° 2200957 du 6 décembre 2022, après avoir écarté les autres moyens soulevés par l'intéressé contre l'arrêté du 30 septembre 2021 par lequel le maire de Nîmes a accordé un permis de construire à la société en nom collectif Vinci Immobilier Méditerranée et contre la décision implicite portant rejet du recours gracieux introduit par M. B... contre ledit arrêté, a sursis à statuer sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, pendant une durée de trois mois, pour permettre la régularisation des vices entachant ce permis de construire, tenant à la méconnaissance des prescriptions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes relatives à la hauteur maximale des constructions et à l'évacuation des eaux pluviales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2024, la société Vinci Immobilier Méditerranée, représentée par Me Boillot, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à l'application des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et, en tout état de cause, à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les deux vices relevés par la cour dans son arrêt avant-dire-droit au regard des prescriptions du plan local d'urbanisme ont été régularisés par le permis de construire modificatif accordé par le maire de Nîmes le 18 juin 2024.
Par un mémoire, enregistré le 9 septembre 2024, M. B..., représenté par la SCP VPNG, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Nîmes du 30 septembre 2021 et la décision implicite portant rejet de son recours gracieux présenté contre cet arrêté ;
3°) d'annuler l'arrêté du 18 juin 2024 par lequel le maire de Nîmes a accordé un permis de construire modificatif à la société Vinci Immobilier Méditerranée ;
4°) de désigner un expert écologue ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Nîmes et de la société Vinci Immobilier Méditerranée le versement d'une somme de 3 000 euros chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le dossier de demande de permis de construire modificatif est insuffisant pour vérifier le respect de la règle relative à la hauteur maximale prévue à l'article V UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes ;
- le projet autorisé par le permis modificatif dépasse la hauteur maximale autorisée par l'article V UB 10 de ce règlement, laquelle doit se calculer depuis le niveau du sol naturel jusqu'au sommet de l'acrotère ;
- le permis de construire modificatif ne régularise pas l'illégalité du projet au regard de l'article 9.2.1.2 du préambule du règlement du plan local d'urbanisme concernant la capacité de stockage des bassins de rétention des eaux pluviales ;
- le permis modificatif ne régularise pas non plus les autres vices du projet tels que soulevés dans ses écritures précédentes auxquelles il renvoie.
Par une ordonnance du 6 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,
- les observations de Me Souici, représentant l'appelant,
- les observations de Me Merland, représentant la commune de Nîmes,
- et les observations de Me Boillot, représentant la société intimée.
Considérant ce qui suit :
1. Par son arrêt avant-dire-droit rendu le 21 mars 2024, la cour, après avoir écarté les autres moyens soulevés par M. B... à l'encontre de l'arrêté du 30 septembre 2021 par lequel le maire de Nîmes (Gard) a accordé un permis de construire à la société Vinci Immobilier Méditerranée pour la réalisation d'un immeuble de quarante-trois logements et de la décision implicite rejetant le recours gracieux introduit par M. B... contre ledit arrêté, a sursis à statuer sur la légalité de cet arrêté et de cette décision, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, pendant une durée de trois mois, pour permettre la régularisation des vices relevés par cet arrêt, tenant à la méconnaissance des prescriptions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes relatives, d'une part, à la hauteur maximale des constructions et, d'autre part, à l'évacuation des eaux pluviales. La société Vinci Immobilier Méditerranée a présenté, le 10 avril 2024, une demande de permis de construire modificatif visant à remédier à ces vices. Par un arrêté du 18 juin 2024, le maire de Nîmes lui a accordé le permis de construire modificatif ainsi sollicité. Dans le dernier état de ses écritures, M. B... demande également l'annulation de ce permis modificatif du 18 juin 2024.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la règle de hauteur maximale :
2. L'article R. 431-10 du code de l'urbanisme dispose que : " Le projet architectural comprend également : / (...) / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / (...) ". La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporte pas l'ensemble des documents exigés par le code de l'urbanisme ou que les documents produits soient insuffisants, imprécis ou inexacts, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire que dans le cas où ces omissions, inexactitudes ou insuffisances ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
3. L'article V UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes, applicable en zone V UB dans laquelle se situe le terrain d'assiette du projet de construction en litige, mentionne que : " Hauteur des constructions : / Pour l'ensemble de la zone V UB à l'exception des secteurs V UBa, V UBb et V UBc : / La hauteur maximale des constructions doit être égale, à l'égout des couvertures, à : / - 12 m (douze mètres) soit R + 3 maximum avec obligation du dernier niveau en retrait de 3 m (trois mètres) sur les façades des parcelles situées en bordure des voies de largeur supérieure à 6 m (six mètres) ; / - 9 m (neuf mètres) soit R + 2 maximum sur les parcelles situées en bordure des voies de largeur égale ou inférieure à 6 m (six mètres). / (...) / Règles particulières pour l'ensemble de la zone V UB : / (...) / 3) Pour l'ensemble des hauteurs : / - Parkings semi-enterrés, compris dans le volume de la construction, il sera admis une tolérance supplémentaire au maximum égale à la hauteur du sous-sol située au-dessus du terrain naturel. / Cette tolérance ne pourra excéder 1,50 m (un mètre cinquante). / Pour être considéré comme parking semi-enterré, le plancher fini du niveau semi-enterré devra se situer à au moins 1 m (un mètre) sous le niveau du terrain naturel. / (...) ". L'article 6.2 du préambule du même règlement, relatif aux règles en matière de hauteur, précise que : " (...) / 2) Pour toutes les constructions : / Sauf mention spécifique à la zone, les hauteurs maximales définies aux articles 10 des différents chapitres du présent règlement correspondent aux distances comprises entre le terrain naturel et l'égout de la toiture à l'aplomb du bâtiment. Le toit, les ouvrages techniques, les cheminées et autres superstructures en étant exclus. ".
4. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, si la société Vinci Immobilier Méditerranée a produit deux plans de coupe à l'appui de sa demande de permis de construire modificatif, les plans en cause se bornent à indiquer les cotes du terrain naturel aux extrémités de la parcelle et, pour l'un d'entre eux, à représenter une ligne droite ne correspondant pas au profil réel du sol naturel avant travaux, ce qui n'était suffisant ni pour apprécier la modification du terrain induite par le projet, ni pour vérifier le respect de la règle de hauteur maximale prévue par le règlement du plan local d'urbanisme. Il ressort toutefois de ces mêmes pièces que le dossier présenté par la société pétitionnaire contenait également en annexe de la notice hydraulique et de l'étude géotechnique un plan topographique précis de la parcelle indiquant les cotes du terrain naturel en de nombreux points, lequel permettait de compenser l'imprécision des plans de coupe pour apprécier en connaissance de cause la hauteur de l'immeuble. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande de permis de construire modificatif doit être écarté.
5. D'autre part, il ressort de la superposition des plans du projet en litige et du plan topographique de la parcelle que le parc de stationnement prévu sous le bâtiment possède un plancher bas situé en tous points à au moins 1 mètre sous le niveau du terrain naturel, ce qui permet de le regarder comme un parking semi-enterré au sens et pour l'application du point 3) précité de l'article V UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme. En prenant en compte le plancher du rez-de-chaussée de l'immeuble, lequel se situe à la cote 67,20 mètres du nivellement général de la France (NGF), pour mesurer la hauteur du sous-sol située au-dessus du terrain naturel ainsi que le prévoit la formule de calcul mentionnée audit point 3), le bâtiment projeté peut dès lors bénéficier d'une " tolérance supplémentaire " lui permettant d'atteindre la cote maximale de 79,20 mètres NGF mesurée au sommet de l'acrotère. Il ressort de l'ensemble des pièces jointes à la demande de permis modificatif que la société intimée a réduit la hauteur de l'acrotère du niveau R + 3 de l'immeuble par rapport au permis initial de telle sorte que le bâtiment culmine désormais à la cote de 79,15 mètres NGF, respectant ainsi la règle de hauteur maximale résultant de l'application des prescriptions précitées du plan local d'urbanisme. Si le requérant relève l'existence d'une piscine située sur la bordure ouest de la parcelle, il ressort, en tout état de cause, des plans versés au dossier que l'immeuble ne sera pas lui-même implanté sur l'emprise de la piscine et que seuls certains balcons surplomberont légèrement ladite emprise, mais uniquement jusqu'au niveau R + 2. Par conséquent, le permis modificatif du 18 juin 2024 a régularisé l'illégalité entachant l'autorisation initiale s'agissant de la hauteur du bâtiment.
En ce qui concerne l'évacuation des eaux pluviales :
6. Selon l'article 9.2.1.2 du préambule du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes relatif aux projets imperméabilisant le sol : " Modalités de réalisation des ouvrages de compensation de l'imperméabilisation : / Dimensionnement du dispositif de rétention : / 1) Pour ne pas aggraver le ruissellement, un système de compensation doit être réalisé pour chaque projet. / 2) La capacité de stockage pour compenser l'imperméabilisation sera égale à 100 litres par m² de surface imperméabilisée dès lors que le réseau pluvial aval est en capacité de transiter jusqu'au cadereau, aérien ou enterré. Dans le cas contraire, le volume de compensation pourra être augmenté. / La surface imperméabilisée prise en compte dans le calcul du volume de rétention à mettre en œuvre correspond à la somme de toutes les surfaces imperméabilisées de la parcelle : bâtiment, terrasse, abri de jardin, annexes, parking, voies d'accès. / (...) / Débit de fuite de l'ouvrage de rétention : / Le débit de fuite de l'ouvrage de rétention sera de préférence infiltré dans la parcelle. En cas d'impossibilité avérée d'infiltration sur la parcelle, il pourra être évacué vers le domaine public, réseau pluvial ou caniveau en l'absence d'une canalisation ou d'une impossibilité technique de raccordement. / (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que la société pétitionnaire a annexé à sa demande de permis de construire modificatif une notice hydraulique complémentaire apportant des précisions sur les modalités de gestion des eaux pluviales dans le cadre du projet et modifiant les deux notices précédentes jointes au permis initial. La nouvelle notice ainsi présentée confirme que l'opération prévoit la réalisation d'un système de rétention sur la toiture terrasse présentant un volume de stockage de 64 m3 et deux bassins de rétention au sol correspondant à un volume de stockage de 82 m3, soit une capacité totale de 146 m3, inchangée par rapport au projet initial. La même notice rappelle que les bassins de rétention se vidangeront par infiltration dans le sol de la parcelle et précise que le débit de fuite du système de rétention en toiture sera acheminé vers les bassins de rétention et non plus vers le réseau public comme il avait été initialement prévu. Elle mentionne enfin que ce ne serait qu'en cas d'événement d'occurrence exceptionnelle que les systèmes de rétention ainsi prévus seraient susceptibles de rejeter un surplus d'eau vers le réseau public via un ouvrage de surverse. Les précisions ainsi apportées assurent la régularisation de l'illégalité entachant le permis initial sur ce point, telle qu'elle avait été relevée par la cour dans son arrêt avant-dire-droit, ce que M. B... ne conteste au demeurant pas. L'intéressé ne peut par ailleurs utilement réitérer son argumentation initiale relative à l'insuffisance du volume de stockage des eaux pluviales, dès lors que le permis modificatif n'entraîne aucune évolution du projet à cet égard et que la cour a d'ailleurs déjà jugé au point 13 de l'arrêt avant-dire-droit que le volume de stockage prévu par la société pétitionnaire était conforme au ratio applicable.
En ce qui concerne les autres moyens invoqués :
8. Le requérant ne peut utilement soutenir que le permis modificatif du 18 juin 2024 ne régulariserait pas les vices entachant le projet au regard des autres moyens soulevés dans ses productions antérieures à l'intervention de l'arrêt avant-dire-droit, dès lors que tous ces autres moyens ont déjà été écartés par la cour dans ledit arrêt. Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin de désigner un expert écologue, les moyens en cause ne peuvent qu'être écartés.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du permis de construire du 30 septembre 2021 et de la décision implicite rejetant son recours gracieux présenté contre ce permis. Il en résulte également que l'intéressé n'est pas fondé à demander l'annulation du permis de construire modificatif du 18 juin 2024.
Sur les frais liés au litige :
10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties à l'instance la charge des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. En conséquence, les conclusions présentées tant par le requérant que par la commune et la société intimée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Nîmes et par la société Vinci Immobilier Méditerranée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Nîmes et à la société en nom collectif Vinci Immobilier Méditerranée.
Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Teulière, président assesseur,
M. Jazeron, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2024.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
D. Chabert
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet du Gard, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23TL00318