Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme Le Flore a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la société anonyme d'économie mixte Event Made In France à lui verser la somme de 303 839,60 euros en exécution de leur contrat.
Par une ordonnance n° 2304137 du 28 juillet 2023, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 septembre 2023 et 12 novembre 2024,ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société Le Flore, représentée par Me Hordot, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 28 juillet 2023 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de condamner la société d'économie mixte locale Event Made In France à lui verser une somme de 303 839,60 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2019 et de la capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre à la charge de la société Event Made In France la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est compétente pour connaître du litige ; le contrat en cause est un contrat administratif dès lors, d'une part, que la société anonyme d'économie mixte Event Made In France doit être considérée comme assurant l'organisation, pour le compte de la commune de Barcarès, du festival " Electro Beach " et, d'autre part, que la relation qui lie la commune de Barcarès et la société Event Made In France relève bien d'une mission de service public ;
- elle est fondée à solliciter la condamnation de la société Event Made In France à lui verser la somme de 303 839,60 euros dès lors qu'elle a exécuté ses obligations contractuelles conformément aux stipulations du cahier des clauses particulières du marché et que ses prestations auraient dû lui être rémunérées au 30 septembre 2019 au plus tard.
Par deux mémoires en intervention, enregistrés les 3 février et 15 novembre 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société par actions simplifiée Brasserie Milles, représentée par Me Becquevort, conclut :
1°) à titre principal, au rejet de la requête et à la confirmation de l'ordonnance attaquée ;
2°) à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire de la société Le Flore et de la société Event Made in France à lui verser les sommes de 166 155,36 euros et de 33 231,07 euros ;
3°) à ce qu'il soit mis à la charge de ces dernières la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir et que la juridiction administrative est incompétente pour connaître du présent litige ; au fond, à titre subsidiaire, elle serait fondée à demander au juge administratif la condamnation des autres parties à lui payer les prestations qu'elle a exécutées au titre de son contrat signé avec la société Le Flore.
Par un mémoire, enregistré le 15 octobre 2024, Me Gascon, mandataire liquidateur de la société d'économie mixte locale Event Made in France, représentée par Me Ménage, demande à la cour de prendre acte de ce que cette société a été placée en liquidation judiciaire.
Elle s'en remet à la décision de la cour concernant la nature, administrative ou privée, de la convention en litige.
Par ordonnance du 14 octobre 2024, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 15 novembre 2024 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Faïck,
- les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Becquevort pour la société Brasseries Milles.
Considérant ce qui suit :
1. Par un acte d'engagement du 16 mai 2017, la société d'économie mixte locale Event Made In France a conclu avec la société Le Flore un marché ayant pour objet la " mise en place et gestion d'espaces de restauration et bars pour la vente de boissons et produits élaborés pour le festival de musiques électroniques " Electrobeach " d'une durée d'un an renouvelable deux fois. Le 26 mars 2020, la société Le Flore a saisi le tribunal administratif de Montpellier afin d'obtenir le paiement de la somme de 303 839,60 euros au titre du solde du marché. La société Le Flore relève appel de l'ordonnance rendue le 28 juillet 2023 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître sur le fondement des dispositions du 2° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
Sur l'intervention en défense de la société Brasserie Milles :
2. Il résulte de l'instruction que la société Brasserie Milles a, avec l'accord de la société d'économie mixte Event Made in France, conclu avec la société Le Flore un contrat par lequel cette dernière lui a sous-traité l'exécution de certaines des prestations prévues dans le marché en litige du 16 mai 2017. Estimant que ses prestations ne lui avaient pas été payées, la société Brasserie Mille a assigné les sociétés Le Flore et Event Made in France devant le tribunal de commerce de Perpignan, lequel a rejeté sa demande au motif qu'elle ne relevait pas de la compétence du juge judiciaire, puis formé appel contre ce jugement. Il résulte de l'instruction que l'instance est pendante devant la cour d'appel de Montpellier devant laquelle la société Brasserie Mille soutient que seul le juge judiciaire est compétent pour connaître du présent litige. Dans ces circonstances, l'intervention de la société Brasserie Milles, tendant à ce que la cour confirme l'ordonnance de première instance ayant jugé que le marché en litige n'avait fait naître que des rapports de droit privé dont il appartient au juge judiciaire seul de connaître, est recevable.
Sur le bien-fondé de l'ordonnance :
3. Sauf si la loi en dispose autrement, les contrats conclus entre personnes privées sont en principe des contrats de droit privé, hormis le cas où l'une des parties au contrat agit pour le compte d'une personne publique ou celui dans lequel ils constituent l'accessoire d'un contrat de droit public.
4. En l'espèce, ni le fait que le capital de la société d'économie mixte locale Event Made in France soit majoritairement détenu par la commune du Barcarès (Pyrénées-Orientales), ni sa domiciliation sur le territoire de cette commune et pas davantage le contrôle administratif auquel elle est soumise, en vertu notamment des articles L. 1524-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, ne peuvent suffire à faire regarder la société d'économie mixte Event Made In France comme ayant agi pour le compte de la commune du Barcarès lorsqu'elle organise, en concluant notamment avec des commerçants des contrats de prestations de services, le festival de musiques électroniques " Electrobeach ". De même, l'intérêt général attaché à l'organisation d'un tel festival, qui contribue certes au développement touristique local, ne suffit pas non plus à faire regarder la société d'économie mixte Event Made In France comme ayant agi pour le compte de la commune du Barcarès. La société requérante n'apporte à cet égard aucun élément de nature à établir que, dans le cadre de l'organisation et la gestion du festival, la société d'économie mixte Event Made In France n'accomplirait pas de façon autonome, sur les plans administratif et financier, les actes d'exploitation et d'administration nécessaires à la mission dont elle est investie.
5. Dans ces conditions, le marché en litige ne saurait être regardé comme ayant été conclu pour le compte d'une personne publique. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est pas allégué, que ce marché constituerait l'accessoire d'un contrat de droit public conclu par ailleurs. Il s'agit, dès lors, d'un contrat qui a été conclu entre deux personnes privées qui n'a pu faire naître, entre ces dernières, que des rapports de droit privé.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Le Flore n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Sur les frais liés au litige :
7. Les conclusions présentées par la société Le Flore, dont la requête est rejetée, tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Celles de la société Brasserie Milles, qui n'est pas partie, ne peuvent aussi que l'être.
DÉCIDE :
Article 1er : L'intervention de la société Brasserie Milles est admise.
Article 2 : La requête de la société Le Flore est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la société Brasserie Milles sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Le Flore, à Me Hélène Gascon et à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée MJ Synergie, représentants de la société anonyme d'économie mixte Event Made In France. Copie pour information en sera délivrée à la société par actions simplifiée Brasserie Milles.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. A...,
Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2024.
Le président-assesseur, Le président,
P. A... F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
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N° 23TL02367