Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 9 août 2021 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de l'admettre exceptionnellement au séjour.
Par un jugement n° 2105696 du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er septembre et le 8 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Sadek, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 avril 2023 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler la décision du 9 août 2021 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a refusé de l'admettre exceptionnellement au séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " valable un an, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision préfectorale :
- est insuffisamment motivée ;
- méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- méconnaît les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et revêt un caractère discriminatoire dans la jouissance des droits consacrés par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article L. 421-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 22 mars 2024.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Chalbos a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 29 mai 1978, est entré une première fois en France à une date indéterminée, sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant ", valable du 3 octobre 2000 au 2 janvier 2001. Le 24 juillet 2020, il s'est marié avec une ressortissante marocaine titulaire d'une carte de résident. Le 12 octobre 2020, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale ainsi que de l'exercice d'une activité professionnelle non salariée. Par une décision du 9 août 2021, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de faire droit à sa demande. M. B... fait appel du jugement du 18 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation d'une telle décision.
2. En premier lieu, la décision litigieuse mentionne les conditions d'entrée et de séjour de M. B... en France ainsi que les éléments propres à sa situation personnelle sur lesquels elle se fonde. Il est d'ailleurs fait allusion à l'ensemble des attaches familiales dont l'appelant entend se prévaloir en France. Le préfet de la Haute-Garonne a par ailleurs indiqué précisément les motifs l'ayant conduit à refuser d'admettre M. B... au séjour au titre tant de sa vie privée et familiale que professionnelle, que ce soit de plein droit ou à titre exceptionnel, et cité les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il a été fait application. Elle est ainsi suffisamment motivée en droit et en fait, quand bien même elle ne vise pas expressément l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou encore l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision préfectorale du 9 août 2021 doit donc être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
4. M. B... se prévaut principalement de sa durée de présence sur le territoire français, de son mariage, célébré le 24 juillet 2020 à Toulouse, avec une compatriote titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 12 février 2028, et de la présence en France, à la date de la décision attaquée, de son premier fils, né le 3 octobre 2009 d'une précédente union, de son deuxième fils, né le 26 juillet 2020 de son union avec son épouse, ainsi que de l'état de grossesse de cette dernière. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la présence habituelle et régulière en France de M. B... n'est pas établie compte tenu notamment du fait qu'il n'a sollicité son admission au séjour pour la première fois depuis l'expiration, en janvier 2001, de son visa " étudiant ", qu'au mois d'octobre 2021, et de ce qu'il dispose vraisemblablement d'attaches en Espagne où il est titulaire, depuis 2010, d'un titre de séjour l'autorisant à travailler, valable jusqu'au 13 juillet 2025, et où il a effectué plusieurs aller-retours depuis sa première entrée en France. M. B... ne justifie d'aucun autre élément d'intégration particulière dans la société française qui ne serait pas postérieur à la décision attaquée. Par ailleurs, M. B... ne justifie pas que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer au Maroc, pays dont ils ont tous la nationalité. Eu égard au caractère récent de son mariage et de l'insuffisante justification de sa présence continue auprès des membres de sa famille et, partant, de l'intensité de ses liens avec ses enfants, a fortiori s'agissant de son aîné qui réside avec son ex-compagne et pour lequel il n'apporte aucun élément tendant à démontrer sa participation à l'entretien et à l'éducation, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'est pas davantage fondé, pour les mêmes motifs et en tout état de cause, à soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En troisième lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée, qui n'a au demeurant ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants de l'appelant de leur père, porterait atteinte à l'intérêt supérieur de ces derniers et méconnaîtrait, partant, les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
6. En quatrième lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., la décision attaquée n'a ni pour objet, ni pour effet, de priver ses enfants de leur droit de vivre auprès de leur père. Il ne résulte par ailleurs pas des termes de celle-ci qu'elle serait fondée sur le motif de la nationalité de ces derniers et revêtirait, dès lors, un caractère discriminatoire prohibé par les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Enfin, la circonstance que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile consacre, sous certaines conditions, un droit au séjour au titre de la vie privée et familiale pour les parents d'enfant français, ne saurait être assimilée à une discrimination illégale.
7. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité non salariée, économiquement viable et dont il tire des moyens d'existence suffisants, dans le respect de la législation en vigueur, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "entrepreneur/profession libérale" d'une durée maximale d'un an ". Aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ". Enfin, l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi stipule : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord (...) ".
8. Il résulte des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles sont applicables aux ressortissants marocains en vertu de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 dès lors qu'un tel accord ne traite ni des conditions d'entrée sur le territoire français des ressortissants marocains, ni du droit au séjour en qualité d'entrepreneur, que la délivrance du titre de séjour prévu par l'article L. 421-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue d'exercer une activité professionnelle non salariée est notamment subordonnée à la présentation, par le demandeur, du visa de long séjour prévu à l'article L. 412-1 du même code. Il s'ensuit que le préfet de la Haute-Garonne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, constater l'absence de visa de long séjour, que M. B... reconnaît ne pas détenir, pour estimer que ce dernier ne remplissait pas les conditions d'obtention de plein droit du titre sollicité et dont aucun motif exceptionnel ne justifiait qu'il en soit passé outre.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent donc également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Chalbos, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2024.
La rapporteure,
C. Chalbos
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL02227