Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association Cinéplan a demandé au tribunal administratif de Montpellier à titre principal, de condamner l'établissement public industriel et commercial du Domaine d'O à lui verser la somme de 25 811 euros au titre de l'indemnisation du manque à gagner résultant de son éviction irrégulière du lot n°1 du marché public de projection de films attribué à la société Decipro pour le festival " La Métropole fait son Cinéma ", et à titre subsidiaire, de condamner le Domaine d'O à lui verser la même somme de 25 811 euros au titre de l'indemnisation du manque à gagner résultant du maintien irrégulier de l'exécution du lot n°1 du marché public de projection de films.
Par un jugement n° 2202838 du 12 octobre 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 11 décembre 2023, 13 décembre 2023, et 11 octobre 2024, l'association Cinéplan, représentée par Me Zurbach, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 12 octobre 2023 ;
2°) de condamner l'établissement public le Domaine d'O à lui verser la somme de 25 811 euros au titre de l'indemnisation du manque à gagner résultant de son éviction irrégulière du lot n°1 du marché public de projection de films, attribué à la société Decipro pour le festival " La Métropole fait son Cinéma ", assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception par le Domaine d'O de sa demande indemnitaire préalable ;
3°) de mettre à la charge du Domaine d'O une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, en ce qui concerne la régularité du jugement attaqué, que :
- les premiers juges ont omis de se prononcer sur son moyen tiré de la violation du principe de transparence de la procédure de passation du marché, eu égard à l'absence totale de rapport d'analyse des offres ;
- ils ont également omis de se prononcer sur son moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidats du fait de l'application différenciée, entre les deux entités admises à présenter une offre, du sous-critère relatif aux moyens humains ;
Elle soutient, au fond, que :
- les premiers juges ont commis une erreur de fait en estimant qu'il n'était pas établi que les écrans proposés par l'association Cinéplan, dans son offre, étaient plus grands que ceux de la société Decipro, alors qu'ils ont par ailleurs reconnu que le plus grand des écrans proposés par Cinéplan, d'une taille de 13 x 6 mètres, était d'un format supérieur au plus grand des écrans de Decipro, d'une taille de 12 x 5 mètres ; cette erreur de fait était d'autant plus déterminante que l'immense majorité des manifestations prévues, au nombre de trente-deux, devaient se dérouler sur un seul site avec un seul écran, seules deux manifestations étant prévues sur deux sites distincts avec des projections concomitantes ; par ailleurs, le second écran de Cinéplan mesure non 10 x 5 mètres comme l'affirme le Domaine d'O, mais 12 x 5 mètres ;
- le tribunal n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations par lesquelles il a reconnu que le Domaine d'O avait dénaturé le contenu de son offre en sa défaveur, tout comme le contenu de l'offre de Decripro avait aussi été dénaturé, cette fois-ci en la faveur de celle-ci, pour estimer en définitive qu'aucune faute n'avait été commise dans l'attribution du marché ; le raisonnement suivi par le tribunal est erroné dès lors que la reconnaissance de la dénaturation des offres devait conduire nécessairement à la reconnaissance d'une faute de nature à ouvrir droit à indemnisation au profit de Cinéplan, la notion de dénaturation des offres étant distincte de celle de l'erreur manifeste d'appréciation dans le classement des offres ;
- le tribunal a par ailleurs excédé ses pouvoirs en substituant son appréciation à celle du pouvoir adjudicateur alors que la jurisprudence impose au juge administratif d'exercer un contrôle restreint sur l'appréciation portée sur les offres des candidats par le pouvoir adjudicateur, les premiers juges s'étant à cet égard fondés par exemple sur le fait que Decipro s'était engagé à tester le matériel, alors que le courrier du 29 juillet 2021 du Domaine d'O n'évoquait pas ce point ;
- le point 10 du jugement retient l'existence d'une " erreur " alors que devait être recherchée l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- à cet égard, le domaine d'O a dénaturé en sa défaveur l'offre de Cinéplan méconnaissant le principe d'égalité, en faisant une application différenciée du sous-critère " équipe ", en prenant en compte le personnel d'astreinte pour Decipro, et non pour Cinéplan , en attribuant une note supérieure de quatre points à Decipro par rapport à Cinéplan, qui proposait pourtant un nombre équivalent d'intervenants avec un niveau d'expérience en moyenne supérieur et s'agissant en outre de son propre personnel ;
- pour ce qui est du sous-critère relatif aux moyens matériels, si Cinéplan et Decipro disposaient du même nombre de projecteurs et de véhicules, Cinéplan disposait de projecteurs plus récents, d'une meilleure luminosité, d'un écran plus grand, et d'écrans gonflables plus sécurisés ;
- pour ce qui est du sous-critère relatif aux moyens mobilisables en cas de pannes, Decipro ne pouvait avoir une note supérieure alors que les garanties proposées entre Cinéplan et Decipro étaient identiques ;
- dès lors qu'elle avait des chances sérieuses de remporter le marché, elle est en droit de demander une indemnisation à hauteur de 25 811 euros pour le préjudice que lui cause son éviction irrégulière ; cette somme a été calculée par son expert-comptable sur la base du prix du marché figurant dans l'acte d'engagement, soit 43 200 euros hors taxes ; elle correspond à une marge de 58 %.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2024, et un mémoire non communiqué du 15 novembre 2024, l'établissement public le Domaine d'O, représenté par Me Moreau, conclut :
1°) au rejet de la requête de l'association Cinéplan ;
2°) à ce qu'il soit mis à la charge de l'association Cinéplan une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- en ce qui concerne la régularité du jugement, les premiers juges n'ont pas omis de de se prononcer sur les moyens tirés de la violation du principe d'égalité de traitement des candidats et du principe de transparence de la procédure de passation dès lors que ces principes étaient invoqués devant eux à titre d'arguments et non de véritables moyens ; la référence aux principes précités était invoquée dans le cadre du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le Domaine d'O dans l'analyse des offres des candidats ;
- en ce qui concerne le bien-fondé du jugement, si, pour une seule manifestation, l' écran de Cinéplan, d'une taille de 13 x 6 mètres, était plus grand que l'écran de Decipro, d'une taille de 12, 25 x 5, 30 mètres, il n'en demeure pas moins que pour une seconde manifestation concomitante, Decipro disposait d'un second écran d'une taille de 12, 25 x 5, 30 mètres, et Cinéplan seulement d'un écran d'une taille de 10 x 5 mètres ; c'est donc sans erreur de fait que le tribunal a estimé, de façon globale, qu'il ne pouvait être considéré que les écrans de Cinéplan étaient plus grands que ceux de Decipro ;
- l'erreur de droit invoquée quant au fait que les premiers juges n'auraient pas tiré de conclusions quant aux constatations qu'ils ont opérées relatives à la dénaturation des offres doit être écartée dès lors, d'une part, que le tribunal administratif n'a pas été saisi d'un tel moyen et d'autre part que la dénaturation de l'offre n'est pas fautive, en l'absence d'erreur manifeste d'appréciation commise ;
- en ce qui concerne les critiques relatives à l'office du juge, le tribunal devait, pour apprécier l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation commise dans l'attribution du marché à Decipro, se fonder sur l'ensemble des pièces du dossier et pas seulement sur le courrier du 29 juillet 2021 du Domaine d'O adressé à Cinéplan ; les premiers juges ont bien vérifié l'absence d'erreur manifeste d'appréciation commise dans l'attribution des notes ;
- en ce qui concerne le critère relatif au personnel, la société Decipro emploie douze personnes, sous forme de trois équipes de trois personnes composées d'un technicien opérateur cinéma et de deux techniciens cinéma, mais également une équipe d'astreinte de trois personnes, et tous les professionnels affectés à l'opération sont des techniciens de cinéma qualifiés et des opérateurs projectionnistes bénéficiant de plus de dix ans d'expérience ; la circonstance que Decipro aurait eu recours à des salariés intermittents est sans incidence ; l'équipe d'astreinte prévue par Decipro, est tout autant mobilisable que les autres équipes ; en attribuant une note supérieure de quatre points à Decipro, qui emploie douze techniciens, contre six pour Cinéplan, sur le sous-critère relatif aux moyens humains, le Domaine d'O n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- pour ce qui est des écrans, compte tenu de l'équivalence de façon globale des tailles des écrans de Decipro et Cinéplan, la circonstance que l'un des écrans de Cinéplan est plus grand que le plus grand écran de Decipro n'est pas de nature à révéler une erreur manifeste d'appréciation dans l'attribution, sur ce sous-critère, d'une note identique pour les deux candidats ;
- pour ce qui est des projecteurs, l'offre de Cinéplan mentionne deux projecteurs numériques Christie 2215 alors que la société Decipro dispose de quatre projecteurs ; en tout état de cause, aucune erreur manifeste d'appréciation ne peut être retenue dès lors que Cinéplan et Decipro ont obtenu la même note sur le critère du matériel employé ;
- quant à la qualité du système de projection, il n'était pas au nombre des critères de sélection des offres ; en tout état de cause, les matériels de Cinéplan et Decipro, présentent seulement un écart de 3 000 lumens et peuvent ainsi être considérés comme identiques ;
- pour ce qui est du sous-critère relatif à la mobilisation de moyens en cas de pannes, la note de 10 attribuée à Decipro, contre 6 attribuée à Cinéplan, est justifiée dès lors que l'offre de Decipro prévoit qu'en cas d'indisponibilité d'un membre de l'équipe, le remplacement serait immédiatement assuré par un des techniciens d'astreinte, que le matériel de secours serait immédiatement utilisé, et qu'en cas de panne importante, son stock de pièces de rechange permettrait à ses techniciens de remettre en état le matériel dans un délai de 24 heures, à défaut de quoi un matériel de remplacement équivalent serait acheminé et installé depuis ses locaux de Montpellier par le technicien d'astreinte ; les notes attribuées sont justifiées dès lors que l'association Cinéplan, à la différence de la société Decipro, ne prévoit pas l'entretien du matériel ; l'offre de Cinéplan n'est donc pas équivalente à celle de Decipro pour les pannes et remplacements ;
- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où sa responsabilité serait engagée, la somme qu'elle devrait verser correspondrait uniquement à la marge nette qu'aurait perçue l'association Cinéplan en cas d'attribution du marché, soit en l'espèce, la somme de 25 811 euros, correspondant à un taux de marge de 58%.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la commande publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Bardoux substituant Me Zurbach pour la société Cinéplan et de Me Lancray pour l'établissement le Domaine d'O.
Considérant ce qui suit :
1. L'établissement public industriel et commercial le Domaine d'O a organisé, le 15 juin 2021, une procédure adaptée ouverte en vue de sélectionner un opérateur pour des prestations de projection de films en plein air du 1er au 31 août 2021. Le lot n° 1 du marché à attribuer correspondait aux projections à assurer dans le cadre du festival " La Métropole fait son Cinéma ". L'association Cinéplan et la société Decipro, dont les candidatures ont été acceptées, ont présenté chacune une offre. Après analyse de ces deux offres, l'établissement le Domaine d'O a retenu celle de la société Decipro. L'association Cinéplan en a été informée par un courrier du Domaine d'O du 13 juillet 2021.
2. L'association Cinéplan relève appel du jugement du 12 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Domaine d'O à l'indemniser, à hauteur de 25 811 euros, du manque à gagner subi du fait de son éviction, selon elle irrégulière, du marché.
Sur la régularité du jugement :
3. En premier lieu, il ne ressort pas de ses écritures de première instance que l'association Cinéplan ait entendu soulever un moyen tiré de ce que le principe de transparence aurait été méconnu au cours de la sélection des offres. Au contraire, il ressort de ses écritures devant le tribunal que l'association a entendu contester le choix, selon elle entaché d'erreur manifeste, de l'attributaire. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché à ce titre d'une insuffisance de motivation pour défaut de réponse à un moyen.
4. En second lieu, l'association appelante soutient que les premiers juges ont également omis de se prononcer sur son moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement des candidats du fait de l'application différenciée entre les deux concurrents, lors de l'analyse de leurs offres, du sous-critère relatif aux moyens humains. Il ressort de ses écritures de première instance que l'association Cinéplan a certes fait référence à une rupture d'égalité entre les candidats, révélée selon elle par le fait que le Domaine d'O avait omis de prendre en compte, dans l'appréciation du critère relatif aux moyens humains mobilisables, deux personnes qu'elle entendait employer. Toutefois, les écritures de l'association Cinéplan devant les premiers juges font apparaître que la référence au principe d'égalité était invoquée à l'appui de son moyen tiré de l'erreur manifeste commise par le domaine d'O dans l'appréciation des offres. Les premiers juges ont répondu à ce moyen de façon circonstanciée au point 8 du jugement et n'ont pas entaché leur décision d'irrégularité.
5. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'irrégularité du jugement doivent être écartés.
Sur le bien-fondé des conclusions présentées par l'association Cinéplan :
6. Lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce dernier, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le marché. Dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité. Dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre. Il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché. Dans un tel cas, l'entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner lequel doit être déterminé en prenant en compte le bénéfice net avant impôt qu'aurait procuré ce marché à l'entreprise, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre qui n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique.
7. Il résulte de l'instruction, que le règlement de la consultation prévoyait que la sélection des candidatures, et le jugement des offres, s'opéreraient au regard de deux critères, le prix et la valeur technique, respectivement pondérés à hauteur de 45 % et 55 %. Le second critère relatif à la valeur technique était décomposé ainsi : qualité des moyens matériels affectés à la manifestation à hauteur de 25 %, composition et la qualification des équipes affectées à la manifestation à hauteur de 10 %, dispositions d'organisation prévues pour assurer le bon déroulement du marché à hauteur de 10 %, dispositions prévues en cas de panne ou de nécessité de remplacement inopiné du personnel à hauteur de 10 %.
8. Comme l'indique le rapport d'analyse des offres, l'association appelante, classée en seconde position, et la société Decipro, attributaire du marché, ont obtenu toutes deux la note de 45 pour le prix. Pour ce qui est de la valeur technique, il résulte de l'instruction que la société Decipro a obtenu la note de 53/55 contre 47/55 pour l'association Cinéplan. La note obtenue par la société Decipro sur ce second critère se décompose ainsi : 8 pour l'organisation, 10 pour la composition et la qualification des équipes, 25 pour les moyens matériels et 10 pour les dispositions prévues en cas de panne ou d'absence. Quant à l'association Cinéplan, sa note de 47/55 se décompose ainsi : 10 pour l'organisation, 6 pour la composition et la qualification des équipes, 25 pour les moyens matériels et 6 pour les dispositions prévues en cas de panne ou d'absence. La société Decipro a ainsi obtenu, tous critères confondus, une note totale de 98/100 contre 92/100 pour l'association Cinéplan.
9. Aux termes de l'article L. 3 du code de la commande publique " Les acheteurs et les autorités concédantes respectent le principe d'égalité de traitement des candidats à l'attribution d'un contrat de la commande publique. Ils mettent en œuvre les principes de liberté d'accès et de transparence des procédures, dans les conditions définies dans le présent code (...) ".
10. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment des mémoires techniques des candidats traitant de la " composition et qualification des équipes affectées à la manifestation " que la société Decipro proposait le recours à douze techniciens ayant dix ans d'expérience, contre six techniciens ayant cinq ans d'expérience pour Cinéplan, ainsi que la possibilité de mobiliser deux personnes supplémentaires en cas de nécessité de remplacement. Le domaine d'O n'a pas dénaturé les offres de la société Decipro et de l'association Cinéplan en fondant son appréciation sur les éléments mentionnés dans leurs mémoires techniques respectifs. La circonstance selon laquelle la société Decipro prévoyait le recours à des intermittents du spectacle était par elle-même sans incidence sur la valeur de son offre dès lors que le nombre de personnels employés ne dépend pas nécessairement du nombre de salariés, s'agissant en particulier d'une manifestation culturelle limitée dans le temps. Il ne résulte pas des autres éléments de l'instruction qu'en attribuant une note égale à six à l'association Cinéplan et de dix à la société Decipro pour la composition et la qualification des équipes, le Domaine d'O aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.
11. En deuxième lieu, en ce qui concerne la notation du sous-critère relatif à la " qualité des moyens matériels affectés à la manifestation ", il est constant que l'association Cinéplan et la société Decipro ont obtenu la même note de 25. Il résulte de l'instruction, et notamment des mémoires techniques présentés par les deux concurrents, que la taille des dix écrans proposés par la société Decipro variait entre 9,70 x 4,10 mètres et 12,25 x 5,30 mètres, tandis que la taille des cinq écrans proposés par l'association Cinéplan variait entre 8 x 3, 5 mètres et 13 x 6 mètres. Alors même que l'association Cinéplan proposait un écran plus grand, cette circonstance ne suffit pas à entacher la notation d'erreur manifeste d'appréciation. A cet égard, il résulte de l'instruction que, considérés globalement, les écrans proposés par les deux candidats étaient à peu près équivalents en termes de dimensions. De plus, la qualité des moyens techniques du matériel proposé ne saurait se réduire à la taille des écrans. A cet égard, l'association Cinéplan fait cependant valoir que les matériels qu'elle proposait étaient d'une qualité technique supérieure à celle de son concurrent alors que le règlement de la consultation précisait bien que le critère de la valeur technique incluait la qualité des moyens matériels affectés à la manifestation. L'association Cinéplan soutient, sans être sérieusement contredite en défense, que ses projecteurs numériques Christie 2215 garantissaient une image plus lumineuse pour des projections en plein air que ceux proposés par la société Decipro. Toutefois, à lui seul, cet élément ne suffit pas à entacher d'erreur manifeste la notation effectuée dès lors que la société Decipro disposait par ailleurs d'un matériel supérieur en nombre à celui proposé par l'association Cinéplan, matériel dont il n'est en outre pas établi au dossier qu'il aurait été nettement inférieur en termes de qualité d'images. Dans ces conditions, l'attribution au titre du sous-critère relatif à la " qualité des moyens matériels affectés à la manifestation " de la même note de 25 à la société Decipro et à l'association Cinéplan, ne se trouve pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
12. En troisième et dernier lieu, il résulte de l'instruction que l'association Cinéplan a obtenu la note de 6, et la société Decipro la note de 10, pour le sous-critère relatif aux " dispositions prévues en cas de panne ou de nécessité de remplacement inopiné du personnel ". Il résulte de l'instruction que la société Decipro a prévu, dans son rapport technique présenté au soutien de son offre, un entretien régulier de son matériel, qu'en cas d'indisponibilité d'un membre de l'équipe, le remplacement serait immédiatement assuré par un technicien d'astreinte et que le matériel de secours serait immédiatement utilisé. Elle a aussi assuré qu'en cas de panne importante, son stock de pièces de rechange lui permettrait de remettre en état le matériel dans un délai de 24 heures, sous réserve de disponibilité des pièces, à défaut de quoi un matériel de remplacement équivalent serait acheminé et installé par le technicien d'astreinte. Alors que le règlement de la consultation exigeait de présenter les " dispositions prévues en cas de panne ou de nécessité de remplacement inopiné du personnel ", et que le cahier des clauses techniques particulières imposait de présenter les moyens permettant d'assurer la continuité des prestations, l'association Cinéplan, dans son mémoire technique, n'a pas présenté de dispositif spécifique à mettre en place en cas de problèmes techniques, et a seulement indiqué les noms de deux " personnes mobilisables en cas de remplacement nécessaire " et " pour les projections, chaque équipement est en double et permet d'être remplacé à tout moment (délai de changement d'équipement en cas de panne 15 minutes) ". Dans ces conditions, le Domaine d'O pouvait estimer que l'offre de l'association Cinéplan était moins détaillée sur ce point que celle de son concurrent et lui attribuer une note de 6, contre 10 à la société Decipro, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation.
13. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Cineplan n'est pas fondée à se plaindre du rejet de sa demande par le jugement du 12 octobre 2023 du tribunal administratif de Montpellier.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme, réclamée par l'association Cinéplan au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, soit mise à la charge du Domaine d'O, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, en revanche, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en mettant à la charge de l'association Cinéplan une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'établissement public le Domaine d'O et non compris dans les dépens.
DÉCIDE
Article 1er : La requête de l'association Cinéplan est rejetée.
Article 2 : L'association Cinéplan versera à l'établissement public le Domaine d'O une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Cinéplan et à l'établissement public industriel et commercial le Domaine d'O.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2024.
Le rapporteur,
P. Bentolila
Le président,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°23TL02895 2