Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée Immofaq a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la restitution d'une créance fiscale d'un montant de 96 831 euros née du report en arrière de son déficit de l'exercice clos le 31 décembre 2013.
Par un jugement n° 2003894 du 7 novembre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 janvier et 22 septembre 2023, la société Immofaq, représentée par Me Bernard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 novembre 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de prononcer la restitution d'une créance fiscale d'un montant de 96 831 euros née du report en arrière de son déficit de l'exercice clos le 31 décembre 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dispositions de l'article 220 quinquies lui ouvrent droit au report en arrière de son bénéfice de l'exercice clos en 2013, au cours duquel elle n'a pas changé ni cessé son activité, le refus de l'administration ajoute une condition non prévue par le texte ;
- son changement de dénomination et d'objet social n'équivalent pas à un changement de personnalité morale, son numéro d'identification au répertoire des entreprises n'ayant pas été modifié ;
- le refus de l'administration méconnaît le paragraphe 30 de la doctrine administrative référencée BOI-IS-DEF-20-10 publiée le 12 septembre 2012 ;
- l'administration ne peut, au stade de la procédure juridictionnelle et en dehors de toute procédure de rectification contradictoire, remettre en cause le bien-fondé de sa créance ;
- son déficit de l'exercice clos en 2013 ayant été contrôlé à l'occasion d'une vérification de comptabilité, la demande de justification de sa créance au stade de la procédure juridictionnelle s'assimile à une nouvelle vérification de comptabilité contraire à l'article L. 51 du livre des procédures fiscales.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 mai et 18 octobre 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le montant de la créance susceptible d'être restitué à la société Immofaq se limite à 87 025 euros, une partie ayant été affectée au paiement de l'impôt sur les sociétés des exercices clos en 2016, 2017 et 2018 ;
- les moyens soulevés par la société Immofaq ne sont pas fondés ;
- à titre subsidiaire, l'existence et le montant du déficit dont la société sollicite le report en arrière n'ayant pas été justifiés, sa demande est en tout état de cause infondée.
Une ordonnance du 20 juin 2024 a prononcé la clôture de l'instruction à la même date en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Chalbos,
- les conclusions de Mme Restino, rapporteure publique,
- et les observations de Me Bernard, représentant la société Immofaq.
Une note en délibéré, présentée pour la société Immofaq, a été enregistrée le 31 octobre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. La société Immofaq, soumise à l'impôt sur les sociétés, a déclaré, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2013, un déficit de 311 458 euros. À cette occasion, elle a opté, en application de l'article 220 quinquies du code général des impôts, pour le report en arrière d'un tel déficit et son imputation sur le bénéfice réalisé au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2012, générant ainsi une créance sur le Trésor. Le 24 octobre 2019, elle a sollicité la restitution de cette créance, à hauteur de 96 831 euros. Par une décision du 6 juillet 2020, l'administration fiscale a refusé de faire droit à sa demande. La société fait appel du jugement du 7 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la restitution de la créance qu'elle estime détenir sur le Trésor.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 220 quinquies du code général des impôts : " I. Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa du I de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'exercice précédent (...). / II. L'option visée au I est exercée au titre de l'exercice au cours duquel le déficit est constaté et dans les mêmes délais que ceux prévus pour le dépôt de la déclaration de résultats de cet exercice. Elle ne peut pas être exercée au titre d'un exercice au cours duquel intervient une cession ou une cessation totale d'entreprise, une fusion de sociétés ou une opération assimilée, ou un jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société (...) ". Aux termes du 5 de l'article 221 du même code : " a) Le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société emporte cessation d'entreprise (...) ". Il résulte de la combinaison des dispositions précitées du I de l'article 220 quinquies et de l'article 221 du code général des impôts que l'exercice par une société du droit au report de déficit en arrière est subordonné, notamment, à la condition qu'elle n'ait pas subi, dans son activité réelle, de transformations telles qu'elle ne serait plus, en réalité, la même.
3. Il est constant que la société appelante, créée en 2002 sous son ancienne dénomination FMP Bat, a exercé, au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2012, une activité de fabrication, achat, vente, import-export de matériel, accessoires et outillage pour travaux de second œuvre dans le bâtiment, puis, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2013, une activité de marchand de biens et de conseil et d'assistance aux entreprises dans le domaine de l'immobilier. Le changement d'activité de la société s'est traduit par la cession de son fonds de commerce, le 29 novembre 2012, ainsi que par la modification de sa dénomination, de son siège social et de son objet social, décidée en assemblée générale extraordinaire des associés le 14 décembre 2012 et mise à jour au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales le 15 février 2013. Un tel changement traduit une transformation de son activité réelle telle qu'elle fait obstacle à ce que la société appelante puisse être regardée comme étant, avant et après cette transformation, la même entreprise au sens du I de l'article 220 quinquies précité, quand bien même son numéro d'identification au répertoire des entreprises est resté le même. La circonstance que la cession de son activité ne correspondrait pas au cas envisagé au II de l'article 220 quinquies n'est pas de nature, eu égard notamment à l'intention du législateur, à savoir le rétablissement rapide du résultat des entreprises déficitaires et la poursuite de leur activité, à écarter la condition rappelée au point précédent et tenant à l'identité de l'entreprise générant le déficit et le bénéfice sur lequel est imputé le premier. Il s'ensuit que c'est à bon droit que l'administration a considéré que la société Immofaq ne remplissait pas une telle condition, et lui a refusé, pour ce motif, le remboursement de la créance née d'un report en arrière du déficit de l'exercice clos le 31 décembre 2013.
4. En second lieu, la société appelante ne peut, en tout état de cause, pas utilement se prévaloir des énonciations, relatives à la situation d'une société cessionnaire, du paragraphe 30 de la doctrine administrative référencée BOI-IS-DEF-20-10 publiée le 12 septembre 2012, lesquelles ne contiennent pas d'interprétation différente de la loi fiscale et dans les prévisions desquelles elle n'entre pas.
5. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, la société Immofaq n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Immofaq est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Immofaq et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Occitanie.
Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Chalbos, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2024.
La rapporteure,
C. Chalbos
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL00012