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12/11/2024 | FRANCE | N°23TL00937

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 12 novembre 2024, 23TL00937


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 21 février 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verse

r à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 21 février 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n°2202216 du 13 juillet 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 avril et 29 septembre 2023, M. B... A..., représenté par Me Mazas, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 13 juillet 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 février 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou, à titre subsidiaire, de procéder aux réexamen de sa situation dans un délai de trente jours et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux est entaché d'une erreur de fait en ne prenant pas en compte son expérience professionnelle sur poste d'une durée de trois mois ; il a également été omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur de fait quant aux qualifications dont il dispose ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il a considéré que la rupture de son précédent contrat de travail était un moyen autonome, alors que cette circonstance était invoquée uniquement au soutien de son moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences des décisions litigieuses sur sa situation personnelle ;

- le jugement est insuffisamment motivé dans sa réponse au moyen tiré de l'inapplicabilité du 5° de l'article R. 5221-20 du code du travail ;

- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées dès lors qu'elles visent une version de l'article R. 5221-20 du code du travail qui n'était plus en vigueur, cet article ayant été modifié dans le fond et dans la forme, et qu'elles ne mentionnent pas son licenciement consécutif à l'arrêté du 30 septembre 2019 portant refus de renouvellement de son titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, qui était illégal ;

- elles sont entachées d'un vice de procédure dès lors que l'avis défavorable émis par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi sur la demande d'autorisation de travail est irrégulier ; si le poste proposé de vendeur en boulangerie-viennoiserie n'impose aucun diplôme, il justifie d'une expérience professionnelle sur ce poste depuis le 27 octobre 2021 ; il justifie également de plusieurs compétences visées par la fiche de poste et d'une importante expérience dans le domaine de la vente dans son pays d'origine ;

- elles sont entachées d'erreurs de fait en ce qu'il justifie de trois mois d'expérience professionnelle, qu'il dispose de plusieurs compétences mentionnées dans sa fiche de poste et que la société qui l'emploie souhaite le faire évoluer au regard de son diplôme ;

- elles sont entachées d'une erreur d'appréciation dans l'application de l'article 2 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 ;

- elles sont entachées d'erreur de droit, les dispositions du 5° de l'article R. 5221-20 du code du travail n'étant pas applicables à sa situation ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elles emportent sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 août 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la circulation et le séjour des personnes ;

- l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hélène Bentolila, conseillère,

- et les observations de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 16 septembre 1992 à Kedougou (Sénégal), est entré en France le 18 octobre 2016 muni d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour valant titre de séjour mention " étudiant " valable du 15 octobre 2016 au 15 octobre 2017. Le 30 novembre 2017, il s'est vu délivrer une carte de séjour portant la mention " étudiant " valable du 16 octobre 2017 au 15 octobre 2018, laquelle a été renouvelée jusqu'au 30 juin 2019. Le 5 février 2019, il a sollicité un changement de statut pour un obtenir un titre de séjour mention " salarié " en produisant un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société Cristal-Net Montpellier en qualité d'agent qualifié de service. Par un arrêté du 30 septembre 2019, le préfet de l'Hérault a refusé de faire droit à cette demande et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français. Cet arrêté a été annulé par un arrêt n°20MA02444 du 14 décembre 2021 de la cour administrative d'appel de Marseille, qui a également enjoint au préfet de l'Hérault de réexaminer la situation de M. A.... Dans le cadre de ce réexamen, M. A... s'est prévalu d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société Saint Jean le 27 octobre 2021 pour un emploi de vendeur et par un arrêté du 21 février 2022, le préfet de l'Hérault a de nouveau refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... relève appel du jugement du 13 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments exposés par les parties, a écarté, avec une motivation suffisante, au point 6 du jugement attaqué le moyen invoqué par M. A... tiré de l'inapplicabilité à sa situation des dispositions du 5° de l'article R. 5221-20 du code du travail, après avoir notamment relevé que l'intéressé avait séjourné en France en qualité d'étudiant avant de solliciter un changement de statut pour obtenir un titre de séjour " salarié ", de sorte que l'autorité administrative était fondée à faire application de ces dispositions.

3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient M. A..., les premiers juges n'ont pas omis de statuer sur le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux était entaché d'une erreur de fait en retenant que le poste envisagé n'était pas en adéquation avec ses qualifications, dès lors qu'après l'avoir à juste titre requalifié en moyen tiré de l'erreur d'appréciation au regard des articles L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et R. 5221-20 du code du travail, ils y ont répondu de façon motivée au point 6 du jugement. Par ailleurs, M. A... soutient que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de l'erreur de fait dont était entaché l'arrêté litigieux en ce qu'il ne prenait pas en compte son expérience professionnelle d'une durée de trois mois sur le poste pour lequel une autorisation de travail avait été demandée. Toutefois, cette circonstance ne relevait en réalité pas d'une erreur de fait mais d'un argument au soutien de son moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par l'autorité administrative dans l'appréciation de l'adéquation du poste envisagé avec ses diplômes et son expérience professionnelle. Dès lors que les premiers juges ont répondu de façon motivée à ce moyen au point 6 du jugement attaqué, le jugement attaqué n'est pas non plus entaché d'une omission à statuer sur ce point.

4. En troisième lieu, M. A... soutient que le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont considéré à tort que la rupture de son précédent contrat de travail était un moyen autonome et l'ont écarté comme inopérant, alors qu'il s'agissait simplement d'un argument au soutien de son moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle. Toutefois, il ressort des motifs mêmes du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments soulevés par M. A..., ont répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des décisions litigieuses sur sa situation personnelle au point 9 du jugement. Dès lors, ce moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit également être écarté.

5. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularités.

Sur le bien-fondé du jugement :

6. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise les textes dont le préfet a entendu faire application, en particulier l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que le code du travail. S'il est vrai qu'il cite les dispositions de l'article R. 5221-20 du code du travail dans une version qui n'était plus en vigueur depuis le 1er mai 2021, cette circonstance ne saurait suffire à faire regarder cet arrêté comme n'étant pas motivé en droit, le préfet ayant par ailleurs notamment visé l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. De plus, il mentionne les éléments de fait relatifs à la situation personnelle de M. A..., notamment la date et les conditions de son entrée en France, les précédents titres de séjour lui ayant été délivrés en qualité d'étudiant, sa demande de changement de statut d'étudiant à salarié, l'arrêté du 30 septembre 2019 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ainsi que son annulation par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 14 décembre 2021, qui a également enjoint au préfet de réexaminer sa situation, le contrat de travail à durée indéterminée conclu le 27 octobre 2021 avec la société Saint Jean pour un poste de vendeur et la rémunération brute mensuelle prévue par ce contrat, l'avis défavorable émis par la plateforme de main d'œuvre étrangère, le courrier de son conseil en date du 4 février 2022, l'absence d'adéquation entre l'emploi et sa qualification, ses diplômes et son expérience, sa relation avec une ressortissante malienne titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " étudiant ", avec qui il a eu un enfant né à Montpellier le 13 août 2020, qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 24 ans et où réside son père, que la cellule familiale pourra se reconstruire hors du territoire, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'il n'est pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant, tel que protégé par l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et qu'il n'allègue pas encourir des risques pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine, au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ces conditions, et alors que le préfet n'était pas tenu de faire état de manière exhaustive de la situation personnelle et administrative de M. A..., notamment de son licenciement par la société Cristal-Net Montpellier, intervenu à la suite du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire qui ont été annulés par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 14 décembre 2021, l'arrêté litigieux comporte l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement, de sorte que le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté comme manquant en fait.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 110-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le présent code régit, sous réserve du droit de l'Union européenne et des conventions internationales, l'entrée, le séjour et l'éloignement des étrangers en France ainsi que l'exercice du droit d'asile. ". Aux termes du sous-paragraphe 321 de l'article 3 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, modifié par l'avenant signé le 25 février 2008 : " (...) La carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", d'une durée de douze mois renouvelable, ou celle portant la mention " travailleur temporaire " sont délivrées, sans que soit prise en compte la situation de l'emploi, au ressortissant sénégalais titulaire d'un contrat de travail visé par l'Autorité française compétente, pour exercer une activité salariée dans l'un des métiers énumérés à l'annexe IV (...) ". L'annexe IV à cet accord mentionne notamment l'emploi de " vendeur en produits frais (commerce de détail) ".

8. Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. / (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ". De plus, aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige : " L'autorisation de travail est accordée lorsque la demande remplit les conditions suivantes : / (...) / 5° Lorsque l'étranger est titulaire d'une carte de séjour portant les mentions "étudiant" ou "étudiant-programme de mobilité" prévue à l'article L. 422-1, L. 422-2, L. 422-5, L. 422-26 et L. 433-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il a achevé son cursus en France ou lorsqu'il est titulaire de la carte de séjour portant la mention "recherche d'emploi ou création d'entreprise" prévue à l'article L. 422-14 du même code, l'emploi proposé est en adéquation avec les diplômes et l'expérience acquise en France ou à l'étranger. ".

9. Il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que, pour examiner une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " présentée par un ressortissant sénégalais, il incombe à l'administration compétente d'apprécier si l'intéressé remplit les conditions lui permettant de se voir délivrer une autorisation de travail, telles qu'énumérées à l'article R. 5221-20 du code du travail, à l'exception de celle tenant à la situation de l'emploi, prévue au 1° de cet article dans le cas où le métier envisagé correspond à l'un de ceux énumérés dans la liste figurant à l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais modifié du 23 septembre 2006.

10. Il ressort des pièces du dossier que le 30 novembre 2017, M. A... s'est vu délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant ", valable du 16 octobre 2017 au 15 octobre 2018, qui a été renouvelé jusqu'au 30 juin 2019. Le 5 février 2019, il a sollicité un changement de statut pour un obtenir un titre de séjour " salarié " et par un arrêté du 30 septembre 2019, le préfet de l'Hérault a notamment refusé de faire droit à cette demande. Cet arrêté ayant été annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n°20MA02444 du 14 décembre 2021, qui a également enjoint au préfet de l'Hérault de réexaminer la situation de M. A..., c'est dans le cadre de ce réexamen, qui concernait toujours un changement de statut d'étudiant à salarié, que l'administration a à bon droit fait application des dispositions du 5° de l'article R. 5221-20 du code du travail en appréciant si l'emploi proposé était en adéquation avec les diplômes et l'expérience de M. A.... Dès lors, l'appelant n'est pas fondé à soutenir qu'en faisant application de ces dispositions, le préfet de l'Hérault aurait entaché la décision portant refus de titre de séjour litigieuse d'une erreur de droit.

11. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'emploi de vendeur en boulangerie-pâtisserie, pour lequel M. A... bénéficie d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société Saint Jean le 27 octobre 2021, relève de la catégorie des emplois de " vendeur en produits frais (commerce de détail) " figurant à l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, de sorte que la situation de l'emploi ne pouvait lui être opposée, ce qu'a d'ailleurs indiqué le préfet dans l'arrêté litigieux. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu'à la fin de l'année universitaire 2013-2014, M. A... a obtenu au Sénégal un diplôme de " Bachelor in business administration ", option " opérations et logistique " délivré par l'institut africain de management, qui correspond à un diplôme de niveau " bac +3 ". Depuis son entrée sur le territoire français dans le but d'y poursuivre ses études, M. A... a suivi deux années d'enseignement pour obtenir un diplôme de manager d'unité opérationnelle délivré par le Collège de Paris le 12 novembre 2018, correspondant à un titre de niveau I en France et de niveau 7 dans l'Union européenne. Au cours de ces deux années, il a suivi des enseignements de management, de gestion, d'entreprenariat, de ressources humaines, de droit, de langue étrangère et de négociation commerciale. L'année suivante, M. A... a obtenu un diplôme universitaire intitulé " L'Europe économique et sociale " délivré par la faculté d'économie de Montpellier comprenant un enseignement en anglais dédié à la concurrence dans l'Union européenne et un enseignement en espagnol consacré aux aides communautaires aux entreprises. Par ailleurs, la fiche de poste produite par M. A... pour son emploi de vendeur en boulangerie-pâtisserie mentionne notamment que " le rôle d'un vendeur est d'accueillir, de proposer et de vendre les produits de la boulangerie ". Dès lors, et bien que l'intéressé ait occupé cet emploi durant trois mois avant l'arrêté attaqué, c'est à bon droit que le préfet s'est fondé sur l'avis émis par la plateforme inter-régionale de main d'œuvre étrangère sur la demande d'autorisation de travail de la société Saint Jean selon lequel ce poste ne serait pas en adéquation avec l'expérience et les diplômes de M. A.... Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux serait entaché d'un vice de procédure du fait de l'irrégularité de cet avis. De la même manière, il n'est fondé à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'une erreur de fait en qu'il justifierait de trois d'expérience sur son poste.

12. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... a vécu en France à compter du 18 octobre 2016 sous couvert d'un titre de séjour étudiant, ne lui donnant pas vocation à rester sur le territoire national. S'il se prévaut de sa relation avec une ressortissante malienne avec laquelle il a eu un enfant né en France le 13 août 2020, il est toutefois constant qu'elle possède un titre de séjour en qualité d'étudiante, ne lui donnant pas vocation à demeurer sur le territoire français. Par ailleurs, son mariage avec cette ressortissante malienne et la scolarisation de son enfant sont postérieurs aux décisions litigieuses et par conséquent sans incidence sur leur légalité. Enfin, M. A... se prévaut de la circonstance selon laquelle il a été licencié de son précédent emploi d'agent qualifié de service dans la filière exploitation en raison du refus de titre de séjour du préfet de l'Hérault en date du 30 septembre 2019, qui était illégal et a été annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 14 décembre 2021 et qu'à la suite de ce licenciement, il s'est trouvé en situation de surendettement. Toutefois, le licenciement de ce poste, assimilable à celui d'agent d'entretien et d'assainissement selon les affirmations-mêmes de M. A... devant la cour administrative d'appel de Marseille, pour regrettable qu'il soit, n'est davantage de nature à caractériser une erreur manifeste d'appréciation du préfet de l'Hérault quant aux conséquences des décisions litigieuses sur la situation personnelle de M. A..., de sorte que ce moyen doit également être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 21 février 2022. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles relatives aux frais liés au litige doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Mazas et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,

Mme Bentolila, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 novembre 2024.

La rapporteure,

H. Bentolila

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°23TL00937


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00937
Date de la décision : 12/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Helene Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : CABINET D'AVOCAT MAZAS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-12;23tl00937 ?
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