La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/2024 | FRANCE | N°22TL21622

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 22 octobre 2024, 22TL21622


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Sous le n° 2002196, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté, non daté, par lequel la rectrice de l'académie de Montpellier l'a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire à compter de sa notification, d'enjoindre à la rectrice de l'académie de Montpellier de la réintégrer dans ses fonctions, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10

000 euros en réparation de son préjudice moral et de mettre à la charge de l'Etat la somm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Sous le n° 2002196, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté, non daté, par lequel la rectrice de l'académie de Montpellier l'a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire à compter de sa notification, d'enjoindre à la rectrice de l'académie de Montpellier de la réintégrer dans ses fonctions, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sous le n° 2200121, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 18 novembre 2021 par laquelle la rectrice de l'académie de Montpellier a prolongé la mesure de suspension de fonctions à titre conservatoire dont elle faisait l'objet, d'enjoindre à la rectrice de l'académie de Montpellier de la réintégrer dans ses fonctions, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2002196, 2200121 du 24 mai 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire en production de pièces et deux mémoires, enregistrés les 20 juillet 2022, 8 décembre 2022, 28 août 2023 et 22 avril 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme A... B..., représentée par Me Barnier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 24 mai 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté non daté par lequel la rectrice de l'académie de Montpellier l'a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire à compter de sa notification et la décision du 18 novembre 2021 par laquelle la rectrice de l'académie de Montpellier a prolongé cette mesure de suspension de fonctions ;

3°) d'enjoindre à la rectrice de l'académie de Montpellier de la réintégrer dans ses fonctions d'enseignante et de directrice du collège de Sainte Marie de Meyrueis, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 18 226,73 euros en réparation des préjudices matériel et moral qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité des décisions dont elle demande l'annulation ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté par lequel la rectrice de l'académie de Montpellier l'a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire n'est pas daté ;

- il lui a été notifié sur son lieu de travail et non à son domicile ;

- il ne précise pas si la mesure de suspension concerne ses fonctions d'enseignante ou de directrice d'établissement ;

- il méconnaît l'article R. 914-104 du code de l'éducation dès lors que la faute lui étant reprochée ne présente pas un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité ; la gravité de la faute lui étant reprochée repose uniquement sur sa mise en examen pour avoir, entre le 25 et le 29 avril 2019, omis d'informer les autorités judiciaires ou administratives de l'agression sexuelle subie par un élève mineur du collège dans lequel elle exerce ses fonctions, dont elle avait connaissance ; aucune faute ne saurait lui être reprochée dès lors qu'elle n'était pas présente dans l'établissement lorsque l'agression sexuelle a eu lieu dans la nuit du 24 au 25 avril 2019 et que son adjoint, qui la suppléait durant son absence, ne l'en a informée que le samedi 27 avril 2019 en fin de matinée ; dans l'après-midi du 27 avril 2019, elle avait prévu d'aider son adjoint pour rédiger un signalement mais les services de gendarmerie étant intervenus en début d'après-midi et les premières auditions ayant eu lieu après le dépôt d'une plainte pénale par les parents de la victime, elle n'a pas pensé devoir procéder à ce signalement ; elle a répondu aux demandes de la gendarmerie ; elle a été relaxée par un arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 8 septembre 2022 ; l'arrêté la suspendant de ses fonctions à titre conservatoire ne répond à aucun motif de protection de la victime ou du service, dès lors qu'il est intervenu un an après l'agression sexuelle et que pendant cette année, elle a continué d'exercer ses fonctions d'enseignante et de directrice de l'établissement ; à supposer qu'une faute puisse lui être reprochée, celle-ci est sans lien avec ses fonctions d'enseignante dès lors que ce n'est pas dans le cadre de ces fonctions qu'elle aurait omis de dénoncer l'agression sexuelle ayant eu lieu dans la nuit du 24 au 25 avril 2019 ; hormis son adjoint, ses collègues enseignants, qui avaient également connaissance de ces faits, n'ont d'ailleurs pas fait l'objet d'aucune mesure de suspension de fonctions ;

- la suspension de fonctions dont elle fait l'objet est disproportionnée, compte tenu de sa durée ; elle s'apparente à une mesure disciplinaire ;

- la décision du 18 novembre 2021 prolongeant cette mesure de suspension est illégale, dès lors que son adjoint, qui a tout comme elle été condamné par le tribunal judiciaire de Mende le 1er juillet 2021, a contrairement à elle pu reprendre ses fonctions au sein de cet établissement ;

- les décisions litigieuses lui ont causé un préjudice moral, dont elle demande réparation à hauteur de 10 000 euros ;

- ces décisions sont également à l'origine d'un préjudice financier d'un montant de 8 226,73 euros correspondant à la diminution de son traitement sur l'année 2022.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 14 juin et 18 décembre 2023, la rectrice de la région académique Occitanie, rectrice de l'académie de Montpellier, conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- la circonstance que l'arrêté de suspension de fonctions ne soit pas daté est sans incidence sur sa légalité ;

- le fait que cet arrêté ait été notifié à l'appelante sur son lieu de travail plutôt qu'à son domicile est sans incidence sur sa légalité ;

- cet arrêté portait nécessairement sur les fonctions d'enseignante de Mme B..., l'intéressée exerçant ses fonctions de cheffe d'établissement au titre d'un contrat de droit privé la liant à l'organisme de gestion des écoles catholiques Sainte Marie de Meyrueis ;

- Mme B... ayant été placée en garde à vue puis mise en examen le 11 juin 2020 pour des faits de non dénonciation de mauvais traitements, d'agressions ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur, à savoir en l'espèce un élève du collège dans lequel elle exerçait ses fonctions âgé de 11 ans, la faute lui étant reprochée présentait au jour de l'arrêté la suspendant de ses fonctions un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité, de nature à justifier sa suspension de ses fonctions à titre conservatoire ; le caractère vraisemblable de ces faits ainsi que leur gravité ont été confirmés par la condamnation de Mme B... à une peine d'emprisonnement de trois mois avec sursis, prononcée par le tribunal judiciaire de Mende le 1er juillet 2021 ; si l'intéressée a ensuite été relaxée par la cour d'appel de Nîmes, le 8 septembre 2022, cet élément est postérieur aux décisions attaquées et il a été mis fin à la suspension de fonctions de l'intéressée au 1er septembre 2022, soit avant la relaxe ;

- contrairement à ce que soutient l'appelante, il existe un lien entre les faits lui étant reprochés et ses fonctions d'enseignante, dès lors que du seul fait de ses fonctions d'enseignante, elle était soumise à l'obligation d'information prévue par l'article 434-3 du code pénal et à celle de signaler les faits en application de l'article 60 du code de procédure pénale ;

- l'article R. 914-104 du code de l'éducation ne fixe aucune durée maximale de suspension de fonctions à titre conservatoire lorsque l'agent fait l'objet de poursuites pénales ; dès lors que Mme B... a interjeté appel du jugement du tribunal judiciaire de Nîmes le 7 juillet 2021, ce jugement n'était pas définitif lorsque la décision du 18 novembre 2021 prolongeant sa suspension de fonctions a été édictée ; l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes ayant relaxé Mme B... n'est intervenu que le 8 septembre 2022 et sa suspension de fonctions avait pris fin auparavant, le 31 août 2022 ;

- le directeur adjoint de l'établissement a pu reprendre l'exercice de ses fonctions avant Mme B... car contrairement à elle, il n'a pas fait appel du jugement du tribunal judiciaire de Mende l'ayant reconnu coupable et condamné, de sorte que ce jugement était devenu définitif le concernant ;

- la décision du 18 novembre 2021 ayant prolongé la suspension de fonctions de l'appelante n'a pas méconnu le principe de présomption d'innocence dès lors qu'en vertu de l'article R. 914-104 du code de l'éducation, la situation du maître contractuel faisant l'objet de poursuites pénales n'est réglée qu'après que la décision rendue par le juge pénal est devenue définitive ;

- la circonstance que les décisions litigieuses aient moralement affecté l'appelante est sans incidence sur leur légalité ;

- les conclusions indemnitaires de Mme B... doivent être rejetées dès lors que l'Etat n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité et que son préjudice n'est pas établi ; si l'appelante se prévaut d'un préjudice résultant de sa mutation et de son déménagement, elle seule est à l'origine de sa demande de mutation.

Par une ordonnance du 3 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 3 mai 2024 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hélène Bentolila, conseillère,

- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., maîtresse contractuelle de l'enseignement privé, exerçait ses fonctions au sein du collège privé sous contrat ... (Lozère), dont elle assurait également la direction depuis 2005. Le 11 juin 2020, elle a été mise en examen pour des faits de non-dénonciation de mauvais traitements, d'agressions ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur à raison de faits d'agression sexuelle commis dans la nuit du 24 au 25 avril 2019 par des élèves de l'internat sur un autre élève alors âgé de 11 ans. En raison de cette mise en examen, par un arrêté non daté, la rectrice de l'académie de Montpellier l'a suspendue de ses fonctions à titre conservatoire. Par un jugement du 1er juillet 2021, la chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Mende a notamment reconnu Mme B... coupable des faits de non dénonciation de mauvais traitements, privations, agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur de 15 ans commis du 25 au 29 avril 2019 et l'a condamnée à une peine d'emprisonnement délictuel de 3 mois. Mme B... a interjeté appel de ce jugement pénal le 7 juillet 2021. Par une décision du 18 novembre 2021, la rectrice de l'académie de Montpellier a prolongé la mesure de suspension de fonctions dont elle faisait l'objet au motif que les poursuites pénales engagées à son encontre n'avaient pas fait l'objet d'une décision pénale devenue définitive. Mme B... relève appel du jugement du 24 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses deux demandes tendant à l'annulation de l'arrêté la suspendant de ses fonctions et de la décision du 18 novembre 2021 prolongeant cette mesure, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, la circonstance que l'arrêté par lequel la rectrice de l'académie de Montpellier a suspendu Mme B... de ses fonctions ne comporte pas de date est sans incidence sur sa légalité.

3. En deuxième lieu, si l'appelante soutient que cet arrêté portant suspension de fonctions lui a été irrégulièrement notifié sur son lieu de travail, plutôt qu'à son domicile, les conditions de notification d'un acte administratif étant sans incidence sur sa légalité, ce moyen doit également être écarté comme inopérant.

4. En troisième lieu, dès lors que l'arrêté de la rectrice d'académie portant suspension de fonctions à titre conservatoire de Mme B... vise uniquement ses fonctions d'enseignante de physique chimie au sein du collège ... et que l'intéressée n'exerçait les fonctions de cheffe d'établissement qu'en vertu d'un contrat privé la liant à l'organisation de gestion des écoles catholiques de Sainte-Marie, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que cet arrêté serait illégal en ne précisant pas si la mesure de suspension de fonctions porte sur ses fonctions d'enseignante ou de cheffe d'établissement.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 914-104 du code de l'éducation : " En cas de faute grave commise par un maître contractuel ou agréé, soit pour un manquement à ses obligations professionnelles, soit pour une infraction de droit commun, son auteur peut être immédiatement suspendu, sur proposition du chef d'établissement, par l'autorité académique. / (...) / L'autorité académique statue sur la situation du maître contractuel ou agréé suspendu dans un délai de quatre mois à compter du jour où la décision de suspension a pris effet. Lorsque aucune décision n'est intervenue à l'expiration de ce délai, l'intéressé reçoit à nouveau l'intégralité de sa rémunération, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales. / (...) / Toutefois, lorsque le maître contractuel ou agréé est l'objet de poursuites pénales, sa situation n'est réglée qu'après que la décision rendue par la juridiction saisie est devenue définitive. ".

6. La suspension d'un maître contractuel en application des dispositions précitées est une mesure à caractère provisoire et conservatoire, prise dans l'intérêt du service. Elle est uniquement destinée à l'écarter temporairement du service, en attendant qu'il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation. Elle peut être prononcée lorsque les faits imputés à l'intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité. Eu égard à la nature de l'acte de suspension et à la nécessité d'apprécier, à la date à laquelle cet acte a été pris, la condition de légalité tenant au caractère vraisemblable des faits, il appartient au juge de l'excès de pouvoir de statuer au vu des informations dont disposait effectivement l'autorité administrative au jour de sa décision.

7. En l'espèce, pour prononcer la mesure de suspension de fonctions litigieuse, dont il n'est pas contesté qu'elle a pris effet à compter de sa notification, le 8 juillet 2020, la rectrice s'est fondée sur la circonstance selon laquelle Mme B... avait été mise en examen quelques jours plus tôt, le 11 juin 2020, pour ne pas avoir dénoncé l'agression sexuelle commise dans la nuit du 24 au 25 avril 2019 au sein du collège ... par des élèves de l'internat sur un autre élève alors âgé de 11 ans. Compte tenu de cette mise en examen et de la nature de l'infraction concernée, contrairement à ce que soutient l'appelante, ces faits présentaient un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité de nature à justifier qu'elle soit suspendue de ses fonctions d'enseignante. De plus, au jour de la décision ayant prolongé cette mesure de suspension à titre conservatoire, l'intéressée avait été condamnée par un jugement du tribunal judiciaire de Mende du 1er juillet 2021 à trois mois d'emprisonnement à raison des mêmes faits, de sorte qu'ils présentaient toujours un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité de nature à justifier le maintien de cette mesure. A cet égard, l'appelante ne peut utilement se prévaloir de ce que ces faits ne pouvaient être regardés comme fautifs dès lors notamment qu'elle a été relaxée par un arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 8 septembre 2022, cette circonstance, postérieure aux décisions litigieuses, étant sans incidence sur leur légalité. En outre, si Mme B... soutient que les faits sont intervenus en avril 2019, soit plus d'un an avant qu'elle ne soit suspendue de ses fonctions et que durant cette année elle a exercé normalement ses fonctions, de sorte que son maintien dans ses fonctions ne présentait pas d'inconvénients suffisants pour l'établissement, ainsi qu'il a été dit, la mesure de suspension litigieuse a été prononcée à la suite de sa mise en examen intervenue quelques jours auparavant et avait pour objet de préserver, dans l'intérêt de l'ensemble des élèves et des enseignants, le bon déroulement du service. Enfin, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que les faits lui étant imputés se rapportent à ses fonctions de directrice du collège et non à celles d'enseignante, dès lors qu'elle exerce ses fonctions d'enseignante dans l'établissement où se sont produits les faits qu'il lui est reproché d'avoir omis de dénoncer. Dans ces conditions, la rectrice d'académie n'a pas méconnu les dispositions précitées en suspendant Mme B... de ses fonctions d'enseignante et en prolongeant cette mesure de suspension.

8. En cinquième lieu, si Mme B... soutient que la mesure de suspension résultant des décisions litigieuses est disproportionnée compte tenu de sa durée qui l'apparente à une mesure disciplinaire et que cette mesure ne présente pas un caractère provisoire, il résulte toutefois des dispositions précitées de l'article R. 914-104 du code de l'éducation que lorsqu'un maître contractuel ou agréé fait l'objet de poursuites pénales, sa situation n'est réglée qu'après que la décision rendue par la juridiction pénale saisie est devenue définitive. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a été mise en examen le 11 juin 2020 et condamnée par un jugement de la chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Mende du 1er juillet 2021. Elle a fait appel de ce jugement le 7 juillet 2021 et la cour d'appel de Nîmes, qui a prononcé sa relaxe, a rendu son arrêt le 8 septembre 2022. Dès lors, au jour des décisions portant suspension de fonctions et prolongation de cette suspension, Mme B... faisait l'objet de poursuites pénales n'ayant pas donné lieu à un jugement devenu définitif, de sorte que la durée de cette mesure de suspension ne saurait être regardée comme disproportionnée.

9. En dernier lieu, l'appelante, qui soutient que son collègue occupant les fonctions de professeur et de directeur adjoint du collège, qui a également été condamné par le tribunal judiciaire de Mende le 1er juillet 2021, a réintégré ses fonctions avant elle, doit être regardé comme soutenant que la décision du 18 novembre 2021 ayant prolongé sa suspension de fonctions méconnaît le principe d'égalité de traitement entre les agents publics. Toutefois, il est constant que contrairement à Mme B..., cet agent n'a pas interjeté appel du jugement du tribunal judiciaire, de sorte que le concernant, ce jugement était devenu définitif et il pouvait ainsi légalement être rétabli dans ses fonctions. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement doit être écarté.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

10. Il résulte de ce qui précède qu'en prenant les décisions contestées, la rectrice de l'académie de Montpellier n'a commis aucune illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Dès lors, les conclusions indemnitaires de Mme B... doivent être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

11. Les conclusions à fin d'annulation de Mme B... étant rejetées, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte doivent également l'être.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

En ce qui concerne les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la ministre de l'éducation nationale.

Copie en sera adressée à la rectrice de la région académique Occitanie, rectrice de l'académie de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,

Mme Bentolila, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 octobre 2024.

La rapporteure,

H. Bentolila

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22TL21622


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21622
Date de la décision : 22/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Enseignement et recherche - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement - Établissements d'enseignement privés - Personnel.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Suspension.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Helene Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : BARNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-22;22tl21622 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award