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26/09/2024 | FRANCE | N°23TL02515

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 1ère chambre, 26 septembre 2024, 23TL02515


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an.



Par un jugement n° 2206597 du 16 février 2023, le tribun

al administratif de Montpellier a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2206597 du 16 février 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire et des pièces, enregistrés le 26 octobre 2023 et les 10 avril et 5 juin 2024, Mme B..., représentée par Me Ruffel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 février 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- la décision en litige est entachée d'un vice de procédure ;

- elle méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'une erreur de droit et méconnaît les articles L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2024, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une décision du 20 septembre 2023, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Toulouse a accordé à Mme B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Après avoir entendu le rapport de M. Rey-Bèthbéder au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante géorgienne, née le 6 août 1981, déclare être entrée en France le 26 juillet 2017. Elle a sollicité, le 28 juillet 2022, la délivrance d'un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 7 septembre 2022, le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination de cette mesure et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an. Mme B... relève appel du jugement 16 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Pour l'application de ces stipulations et dispositions, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

3. Mme B... se prévaut de sa présence, ainsi que celle de son époux, sur le territoire français depuis plus de cinq ans, et de la scolarisation de leurs deux enfants, nés les 20 mars 2009 et 23 octobre 2011. Toutefois, l'arrêté contesté n'a ni pour objet ni pour effet de séparer l'appelante de ses enfants ni de son époux dès lors que ce dernier, également ressortissant géorgien, est aussi en situation irrégulière et fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise le 5 octobre 2022. La seule circonstance que celui-ci ait pu être amené à subir une opération chirurgicale le 17 mai 2022 ne saurait démontrer l'existence d'un intérêt privé ou familial pour Mme B... sur le territoire, alors même qu'elle n'établit pas l'impossibilité pour son époux de bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine. Par ailleurs, le suivi de cours de français dispensés dans le cadre de la Cité éducative Béziers-Centre et le contrat à durée indéterminée à temps partiel conclu par l'appelante le 20 février 2024, soit postérieurement à la date de la décision attaquée, ne sont pas de nature à démontrer une intégration sociale et professionnelle particulière. Enfin, Mme B... n'établit pas être dépourvue d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine où elle a vécu la majorité de sa vie et où rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue de nouveau. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; (...) ".

5. Il résulte de ce qui précède que Mme B... ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par conséquent, le préfet de l'Hérault n'était pas tenu de saisir préalablement la commission du titre de séjour avant de statuer sur la demande de l'intéressée. Le moyen tiré d'un vice de procédure tenant à un défaut de saisine de cette commission doit par suite être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs, mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

7. La décision en litige n'implique, par elle-même, aucune séparation entre l'appelante et ses enfants, et la cellule familiale pourra se reconstituer en Géorgie, pays dont les membres de la famille de Mme B... ont la nationalité et dans lequel l'appelante ne fait pas valoir qu'il existe un obstacle quant à la poursuite de la scolarité de ses enfants. Dès lors, le préfet de l'Hérault n'a pas méconnu par la décision attaquée les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.

8. En quatrième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

9. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment, tant s'agissant de la situation personnelle et familiale de l'appelante que de ses projets professionnels, qu'elle ne peut, ainsi que l'ont jugé les premiers juges, être regardée comme justifiant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à faire regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans qu'elle puisse utilement se prévaloir des critères de régularisation prévus par la circulaire du 28 novembre 2012 dès lors que cette circulaire se borne à énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de régularisation des étrangers.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative édicte une interdiction de retour. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ".

11. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... s'est maintenue de manière irrégulière sur le territoire français en dépit d'une précédente obligation de quitter le territoire français du 8 octobre 2018 qu'elle ne démontre pas avoir exécuté. Cette première obligation de quitter le territoire n'ayant pas cessé de produire des effets juridiques en l'absence d'exécution, c'est à bon droit que le préfet a édicté une interdiction de retour sur le territoire français sur le fondement de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

12. En dernier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

13. Si Mme B... soutient vivre sur le territoire français depuis plus de cinq années, elle s'y est maintenue irrégulièrement en dépit du rejet de sa demande d'asile et d'une précédente obligation de quitter le territoire français, qu'elle n'a pas exécutée. Par ailleurs, elle ne justifie d'aucune circonstance humanitaire ni d'avoir, à la date de cette décision, établi en France le centre de ses intérêts privés, et ne se prévaut d'aucune perspective d'intégration sur le territoire. Dès lors, le préfet de l'Hérault n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard de l'article L. 612-10 précité en fixant à un an la durée d'interdiction de retour sur le territoire français. Le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de Mme B... doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 7 septembre 2022. Ses conclusions à fins d'annulation doivent être rejetées et, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles relatives à l'application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, où siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Lafon, président-assesseur,

Mme Fougères, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2024.

Le président rapporteur,

É. Rey-Bèthbéder

Le président-assesseur,

N. Lafon

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

N° 23TL02515 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL02515
Date de la décision : 26/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: M. Eric Rey-Bèthbéder
Rapporteur public ?: Mme Restino
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-26;23tl02515 ?
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