Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 23 mars 2023 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2302102 du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2023, M. B..., représenté par Me Hennani, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 mars 2023 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dès la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ou, à défaut d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle, à lui verser sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Le jugement attaqué :
- est insuffisamment motivé en tant qu'il écarte l'ancienneté de sa présence régulière en France ;
La décision portant refus de séjour :
- est insuffisamment motivée ;
- est entachée d'une erreur de fait en tant qu'elle retient à tort qu'il est entré sur le territoire allemand en juin 2022 ;
- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle, au regard en particulier de son ancienneté de présence en France et de son intégration professionnelle ;
- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
La décision portant obligation de quitter le territoire français :
- est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- est entachée d'erreur de droit, le préfet de l'Hérault s'étant cru à tort lié par le refus de séjour ;
- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 et de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 22 mars 2024.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Chalbos a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant camerounais né le 6 septembre 1991, a bénéficié d'un titre de séjour portant la mention " salarié " entre le 4 novembre 2015 et le 3 novembre 2016. Le 21 novembre 2022, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 23 mars 2023, le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... demande à la cour d'annuler le jugement du 27 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation d'un tel arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte du point 4 du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de faire expressément allusion à l'ensemble des pièces produites par le requérant, ont suffisamment motivé leur appréciation portée sur la durée de présence en France dont M. B... entendait se prévaloir à l'appui de son moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de la décision portant refus de séjour. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué du fait de son insuffisante motivation doit donc être écarté comme manquant en fait.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
3. En premier lieu, la décision attaquée comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement et est par suite suffisamment motivée.
4. En deuxième lieu, l'erreur de fait commise par le préfet de l'Hérault, qui a mentionné dans son arrêté que le passeport du requérant était revêtu d'un tampon d'entrée à Vienne-Schwechat en Allemagne alors qu'il s'agissait de l'aéroport de Vienne en Autriche, résulte d'une simple erreur de plume non substantielle, sans incidence sur le sens de la décision litigieuse. Elle n'est, dès lors, pas susceptible d'entraîner son annulation.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger (...) qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...). / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".
6. M. B... se prévaut principalement de sa durée de présence en France, qui constituerait le centre de ses attaches personnelles depuis 2015. Il ressort ainsi des pièces du dossier que M. B... a disposé d'un titre de séjour valable entre le 4 novembre 2015 et le 3 novembre 2016 au titre du travail, ayant été recruté en tant que footballeur professionnel par une équipe française, et qu'il a été locataire de plusieurs logements, qu'il a occupés pour certains avec son ex-épouse et leurs trois filles. Il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment des propres déclarations de M. B... à l'appui de sa demande de titre de séjour, que sa présence en France au titre des années 2016 et 2019 était intermittente, M. B... poursuivant sa carrière de footballeur professionnel en Allemagne, en Belgique, puis en Roumanie. S'il soutient avoir effectué au cours de ces années des allers et retours en France pour rendre visite à sa famille, il ne produit que quelques justificatifs en ce sens. Il ressort encore des propres déclarations de M. B... que celui-ci est retourné vivre au Cameroun en 2020 et 2021. Séparé de sa compagne depuis 2019, son installation en février 2023 à C... en compagnie de ses filles était très récente à la date de la décision litigieuse. En outre, s'il produit les certificats de scolarité de ses filles au titre des années scolaires 2021-2022 et 2022-2023, ainsi que ceux de son aînée pour les années scolaires 2015-2016 et 2016-2017, il n'établit pas que ses filles auraient toujours été scolarisées en France. Enfin, M. B... se prévaut de son intégration professionnelle en France. Celle-ci apparaît toutefois insuffisante, le requérant ne jouant plus pour le Gazélec Football Club d'Ajaccio depuis 2016 et ses perspectives d'embauche au sein de la société Vitalliance étant incertaines, l'entreprise ayant fait part de son intérêt de le recruter tout en refusant de lui établir une promesse d'embauche. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Hérault aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa durée de présence régulière et de son intégration professionnelle en France en refusant de lui délivrer un titre de séjour. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
7. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".
8. Il résulte notamment des motifs exposés au point 6 que M. B... ne justifie pas, par la seule production d'attestations de son ex-compagne, de la fréquence de ses visites auprès de ses filles au cours des années où il travaillait à l'étranger. Il ne justifie pas davantage avoir résidé en compagnie de ses filles en 2020 et 2021, années de résidence au Cameroun, alors qu'il était à cette date déjà séparé de son ex-épouse. L'installation de M. B... avec ses filles à C... datait de seulement un mois à la date de la décision attaquée. À supposer que l'intérêt supérieur de ses filles mineures commande qu'elles demeurent auprès de leur père, qui en avait la garde à la date de la décision litigieuse, celle-ci n'a ni pour objet, ni pour effet de séparer l'intéressé de ses enfants, qui peuvent poursuivre leur scolarité au Cameroun, dont leur mère est également ressortissante. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit donc être écarté.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour pour demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
10. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté, ni des pièces du dossier, que le préfet de l'Hérault se serait cru lié par le prononcé de la décision portant refus de séjour pour édicter une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. B....
11. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.
12. En quatrième lieu, d'une part, M. B... ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que celles-ci créent seulement des obligations entre États sans ouvrir de droits aux intéressés. D'autre part, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent donc également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Norddin Hennani et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 29 août 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Chalbos, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 septembre 2024.
La rapporteure,
C. Chalbos
Le président,
É. Rey-BèthbéderLe greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01630