Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 23 août 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée d'un an.
Par un jugement n° 2205008 du 7 avril 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 avril 2023, M. B..., représenté par Me Galinon, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 avril 2023 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 août 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée d'un an ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
La décision portant obligation de quitter le territoire français :
- méconnaît, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les dispositions du 6° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne sont pas applicables à sa situation dès lors qu'elles visent les seuls étrangers travaillant sans y être autorisés et présents en France depuis moins de trois mois ;
- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Les décisions portant refus d'accorder un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français :
- doivent être annulées par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
La décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er août 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 2 août 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 11 septembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Chalbos a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 6 janvier 1993, est entré en France en octobre 2018, selon ses déclarations. Par un arrêté du 23 août 2022, le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. B... fait appel du jugement du 7 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation d'un tel arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 6° L'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois a méconnu les dispositions de l'article L. 5221-5 du code du travail (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas contesté par M. B... que ce dernier a exercé une activité professionnelle en France sans obtenir au préalable une autorisation de travail dès lors qu'il a été recruté par son employeur en lui présentant une carte d'identité espagnole falsifiée. Contrairement à ce que soutient M. B..., les dispositions précitées, qui permettent à l'autorité administrative de prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger résidant régulièrement en France depuis moins de trois mois s'il a méconnu la législation du travail, ne lui interdisent pas de prendre la même mesure à l'encontre d'un étranger résidant irrégulièrement en France depuis plus de trois mois et ayant également méconnu la législation du travail. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que l'appelant n'entrait pas, eu égard à sa date d'entrée en France, au demeurant non établie, dans le champ d'application du 6° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
5. M. B..., qui était présent, selon ses déclarations, depuis moins de quatre ans sur le territoire français à la date de la décision litigieuse, se prévaut de son intégration professionnelle en France, dès lors qu'il y a exercé une activité de carrossier. Une telle circonstance n'a toutefois été rendue possible que par l'utilisation par l'intéressé d'une carte nationale d'identité espagnole falsifiée. M. B... soutient également avoir tissé de nombreux liens sur le territoire. Il se prévaut en ce sens de sa relation avec une ressortissante roumaine résidant en France et produit diverses attestations émanant de connaissances tels que des amis ou des collègues. Aucune de ces relations n'apparaît toutefois suffisamment ancienne, stable et intense pour être de nature à faire regarder M. B... comme disposant du centre de ses attaches personnelles en France, alors qu'il a vécu la majeure partie dans son pays d'origine. Si M. B... se prévaut enfin d'une promesse d'embauche, ce seul élément ne suffit pas à caractériser une intégration particulière en France. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
6. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions portant refus d'accorder un délai de départ volontaire, fixation le pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français.
7. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ".
8. M. B..., qui ne conteste pas le motif ayant conduit le préfet de la Haute-Garonne à refuser de lui accorder un délai de départ volontaire, se borne à faire état de ce qu'il ne constitue pas une menace à l'ordre public et n'a jamais fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement. Il n'apparaît toutefois pas, eu égard aux éléments propres à sa situation personnelle rappelés au point 5, que l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an prononcée par le préfet de la Haute-Garonne en application des dispositions précitées serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent donc également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 29 août 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Chalbos, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 septembre 2024.
La rapporteure,
C. Chalbos
Le président,
É. Rey-BèthbéderLe greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL00863