Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de l'arrêté du 21 juillet 2022 par lequel le maire de Codognan a accordé un permis de construire à la société à responsabilité limitée Corim associés pour la réalisation de trente-neuf logements et d'un local d'activités, ainsi que de la décision du 7 octobre 2022 par laquelle la même autorité a rejeté leur recours gracieux contre cet arrêté.
Par un jugement n° 2203870 du 18 juillet 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. A... et Mme B..., ainsi que les conclusions présentées par la société Corim associés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles R. 723-26-1 et R. 723-26-2 du code de la sécurité sociale.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 septembre 2023, M. D... A... et Mme C... B..., représentés par Me Avallone, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 18 juillet 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Codognan du 21 juillet 2022 ainsi que sa décision du 7 octobre 2022 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Codognan une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le projet en litige méconnaît l'article 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Codognan applicable à la zone UC dès lors que l'accès ne respecte pas la largeur minimale et que l'opération crée un nouvel accès sur la route nationale n° 113 ;
- le projet n'est pas conforme à l'article 13 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme s'agissant de la superficie des places de stationnement ;
- le permis de construire méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en ce que le terrain d'assiette du projet se situe en zone inondable et que l'opération va conduire à aggraver les risques pour le voisinage en termes de ruissellement des eaux pluviales ;
- les mesures prévues par la société pétitionnaire s'agissant du stationnement des vélos ne sont pas suffisantes au regard de l'article L. 151-30 du code de l'urbanisme, de l'article L. 113-18 du code de la construction et de l'habitation, des prescriptions règlementaires prises pour l'application de cet article, de l'article 12 du règlement du plan local d'urbanisme régissant la zone UC et de l'article 13 des dispositions générales de ce même règlement ;
- le projet en litige contrevient à l'article 11 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme s'agissant du recul par rapport à la route nationale n° 113 ; à supposer que l'orientation d'aménagement et de programmation du secteur de " Garet " soit regardée comme permettant de déroger à la règle de recul, ladite orientation sera écartée en ce qu'elle méconnaît la loi du 2 février 1995 et le schéma de cohérence territoriale Sud Gard ;
- le projet méconnaît l'article 12 de ces mêmes dispositions générales s'agissant de la longueur maximale de la voie en impasse et de la largeur minimale des trottoirs.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 octobre 2023, la société à responsabilité limitée Corim associés, représentée par la SCP SVA, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à l'application des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et, en tout état de cause, à ce que soit mise à la charge solidaire des appelants une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête d'appel est irrecevable en ce qu'il n'est pas justifié de l'accomplissement de la notification imposée par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;
- les moyens invoqués sont inopérants ou ne sont pas fondés ;
- à supposer que le projet soit regardé comme contraire à l'article 12 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme s'agissant de la largeur minimale des trottoirs, la prescription en cause procède d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2023, la commune de Codognan, représentée par la SCP Bouyssou et associés, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à l'application des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et, en tout état de cause, à ce que soit mise à la charge des appelants une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la demande de première instance est irrecevable en ce que les requérants ne justifient pas d'un intérêt suffisant pour contester le permis de construire en litige ;
- les moyens nouvellement soulevés par les requérants en appel sont irrecevables au regard de la cristallisation des moyens intervenue en première instance ;
- les moyens invoqués sont inopérants ou ne sont pas fondés.
Par une ordonnance en date du 18 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 avril 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de la voirie routière ;
- la loi n° 95-101 du 2 février 1995 ;
- l'arrêté du ministre des transports, de l'équipement et du tourisme du 15 janvier 2007 portant application du décret n° 2006-1658 du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l'accessibilité de la voirie et des espaces publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,
- les observations de Me Cadet, représentant les appelants,
- les observations de Me Bouyssou, représentant la commune de Codognan,
- et les observations de Me Monflier, représentant la société Corim associés.
Une note en délibéré, présentée par M. A... et Mme B..., représentés par Me Avallone, a été enregistrée le 9 juillet 2024.
Considérant ce qui suit :
1. La société Corim associés a sollicité, le 25 février 2022, un permis de construire valant division pour la réalisation, après démolition d'une maison existante, d'un ensemble de trente-neuf logements, répartis entre trente-cinq villas individuelles et un immeuble de quatre logements, ainsi qu'un local d'activités à usage de bureaux, sur une unité foncière de 9 950 m2 regroupant onze parcelles situées au secteur de " Garet ", au bord de la route nationale n° 113, sur le territoire de la commune de Codognan (Gard). Par un arrêté du 21 juillet 2022, le maire de ladite commune lui a accordé ce permis de construire. M. A... et Mme B... ont présenté le 19 septembre 2022 un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté, lequel a été rejeté par le maire par une décision du 7 octobre suivant. Par la présente requête, les intéressés relèvent appel du jugement du 16 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 juillet 2022 et de la décision du 7 octobre 2022.
Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :
2. L'article R. 600-1 du code de l'urbanisme mentionne que : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre (...) d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code. / (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... et Mme B... ont justifié avoir procédé à la notification de leur requête d'appel auprès de la commune de Codognan et de la société Corim associés, le 18 septembre 2023, soit le jour même de l'enregistrement de ladite requête au greffe de la cour. Par suite, les formalités prévues par les dispositions précitées de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ont été accomplies et la fin de non-recevoir opposée par la société Corim associés sur ce point ne peut, en conséquence, qu'être écartée.
Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :
4. L'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...). ". Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat, justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... et Mme B... sont propriétaires de la parcelle cadastrée ..., laquelle supporte leur maison d'habitation et jouxte l'unité foncière constituant le terrain d'assiette de l'opération en litige. Eu égard à leur qualité de voisins immédiats, à l'importance du projet immobilier autorisé et à sa situation en surplomb de leur parcelle dans un secteur classé en zone inondable par le plan de prévention des risques naturels régissant le territoire de la commune de Codognan, les requérants justifient d'un intérêt suffisant leur donnant qualité pour contester le permis de construire accordé à la société intimée. Dès lors, la fin de non-recevoir invoquée par ladite commune sur ce point doit être écartée.
Sur la légalité du permis de construire en litige :
En ce qui concerne les moyens de première instance repris en appel :
6. En premier lieu, aux termes de l'article 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Codognan applicable à la zone UC dans laquelle se situe le terrain d'assiette du projet litigieux, relatif aux accès et à la voirie : " 1. Accès : / Pour être constructible, tout terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin. Tout nouvel accès individuel doit présenter des caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de la sécurité, de la défense contre l'incendie et de la protection civile. / (...) / A partir de 3 constructions réalisées en double front, avec passage sur fonds voisin, et dans le cas d'opérations groupées et de lotissements, la largeur de voie est au minimum de 6 mètres. / (...) / Le nombre des accès sur les voies publiques est limité à un par unité foncière. / Toute création de nouvel accès ou transformation d'un accès existant reste soumise à autorisation du gestionnaire du domaine public auquel il se raccorde, avec possibilité de refus pour des motifs de sécurité routière ou de préservation du patrimoine routier. / La création de nouveaux accès sur la RN 113 est interdite. / (...) ".
7. D'une part, il ressort des pièces jointes à la demande de permis de construire que l'opération projetée sera accessible depuis la route nationale n° 113 et que les constructions seront desservies par une voie interne en impasse présentant une chaussée de 5 mètres de large et se terminant par une aire de retournement. Si, s'agissant d'une opération groupée, l'article 3 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone UC impose une largeur minimale de voie de 6 mètres, il résulte toutefois du lexique annexé à ce même règlement que les cotes mentionnées pour les voies nouvelles doivent s'entendre de la largeur totale de la plate-forme " trottoirs compris ". Dès lors qu'il ressort de la notice et du plan de masse que la chaussée de 5 mètres prévue par la société pétitionnaire sera bordée de part et d'autre par des cheminements piétons ayant une largeur d'au moins 1,3 mètre, l'article 3 précité est respecté sur ce point.
8. D'autre part, il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies produites par les parties que le terrain en litige dispose déjà d'un accès pour les véhicules sur la route nationale n° 113, lequel est situé à l'angle nord-est de l'unité foncière. S'il est vrai que l'accès à l'opération projetée est prévu une vingtaine de mètres plus loin vers l'ouest, il ressort néanmoins du plan de masse que l'accès préexistant ne sera pas maintenu, de sorte que le nombre d'accès sur la route nationale restera inchangé une fois les travaux réalisés. Par suite, le projet en litige ne peut être regardé comme entraînant la création d'un nouvel accès sur la route nationale n° 113 au sens et pour l'application du dernier alinéa de l'article 3 du règlement du plan local d'urbanisme régissant la zone UC. Les requérants ne peuvent utilement se prévaloir, pour l'application de cette règle de fond instituée par le plan local d'urbanisme, des principes retenus par la jurisprudence pour l'application de la règle de procédure prescrite par l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme, lesquels ont pour seule vocation de préciser les cas dans lesquels s'impose la consultation de l'autorité ou du service gestionnaire de la voie publique. Il ressort au demeurant des pièces du dossier que la direction interdépartementale des routes Méditerranée a rendu un avis favorable, le 30 juin 2022, sur la proposition d'aménagement de l'accès présentée par la société pétitionnaire. Par conséquent, le permis de construire contesté ne méconnaît pas non plus l'article 3 du règlement du plan local d'urbanisme sur ce point.
9. En deuxième lieu, selon l'article 13 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme, relatif aux obligations à respecter en matière de stationnement des véhicules : " (...) / 2. Dimensionnement des places : / La superficie à prendre en compte pour une place de stationnement doit être adaptée à la vocation des constructions et installations auxquelles la place est liée et conforme à la règlementation en vigueur : / - Pour une place de stationnement pour un véhicule léger : 25 m2 minimum y compris les accès et dégagements ; / - Pour une place de stationnement accessible aux personnes à mobilité réduite (PMR) : 3,5 m x 5 m minimum. Cette règle s'applique aux aires de stationnement de plus de 5 unités. / (...) ".
10. Il résulte des termes mêmes des dispositions précitées que la surface minimale de 25 m2 applicable aux places de stationnement pour véhicules légers s'entend non seulement de la surface affectée au stationnement proprement dit, mais également de la surface utilisée par les véhicules pour accéder à ces places ou pour s'en dégager. En se bornant à relever que les sept places de stationnement pour véhicules légers prévues le long du bâtiment à usage de bureaux présentent une longueur de 5 mètres pour une largeur de 2,5 mètres, sans tenir compte de la largeur supplémentaire de 5 mètres disponible sur la chaussée de la voie interne pour permettre l'accès et le dégagement des véhicules, les appelants n'établissent donc pas que le projet serait irrégulier à cet égard. Il ressort par ailleurs du plan de masse que la place de stationnement réservée aux personnes à mobilité réduite située devant ce même bâtiment présente la largeur requise de 3,5 mètres et non de 3,3 mètres comme il est soutenu à tort. Par suite, les requérants ne démontrent pas que le projet méconnaîtrait les dispositions citées au point précédent.
11. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant de présenter une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.
12. Il est vrai que le terrain d'assiette du projet est impacté par les zones d'aléas fort, modéré et résiduel du plan de prévention des risques naturels d'inondation applicable sur le territoire de la commune de Codognan, tel qu'approuvé par le préfet du Gard par un arrêté du 17 juillet 2017. Il n'est cependant pas allégué que l'opération litigieuse ne respecterait pas les prescriptions de ce plan et il ressort notamment des pièces du dossier, d'une part, que la société intimée n'a prévu aucune construction sur la partie du terrain impactée par l'aléa fort et, d'autre part, que les planchers des bâtiments seront rehaussés par rapport au niveau du sol naturel pour réduire leur vulnérabilité au risque. Si les requérants soutiennent que l'imperméabilisation des sols liée au projet aurait pour conséquence d'aggraver les phénomènes de ruissellement des eaux pluviales vers leur parcelle située en contrebas, la notice hydraulique présentée par la société pétitionnaire à l'appui de sa demande de permis de construire, ainsi que le dossier de déclaration produit par elle au titre de la législation sur l'eau, précisent au contraire qu'un bassin de rétention permettra de stocker un volume d'eau pouvant aller jusqu'à 3 450 m3 et qu'un caniveau sera réalisé près de la propriété des appelants pour capter les eaux et les renvoyer vers ce bassin. Les intéressés n'apportent aucun élément précis de nature à remettre en cause la pertinence des mesures ainsi adoptées, alors que la préfète du Gard a d'ailleurs décidé le 23 septembre 2022 de ne pas faire opposition à la déclaration déposée par la société intimée au titre de la législation sur l'eau. En accordant le permis de construire en litige sans l'assortir de prescriptions particulières sur ce point, le maire de Codognan n'a donc pas commis d'erreur manifeste dans l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme au regard de la gestion du risque inondation.
En ce qui concerne les moyens nouvellement soulevés en appel :
S'agissant de la fin de non-recevoir opposée par la commune :
13. L'article R. 600-5 du code de l'urbanisme prévoit que : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. (...) ".
14. La cristallisation des moyens résultant de l'application des dispositions de l'article R. 600-5 précité du code de l'urbanisme est limitée à l'instance pendante lors de laquelle elle intervient. Elle perd son objet et cesse de produire ses effets avec la clôture de l'instruction dans le cadre de cette instance. Dès lors, les requérants sont recevables à soulever en appel tous moyens nouveaux se rapportant aux mêmes causes juridiques que ceux soulevés en première instance. En l'espèce, les moyens nouvellement soulevés par M. A... et Mme B... dans leur requête d'appel se rapportent à la légalité interne du permis de construire en litige, à l'identique des moyens qu'ils avaient invoqués en première instance. En conséquence, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Codognan sur ce point doit être écartée.
S'agissant du bien-fondé des moyens nouveaux :
15. En premier lieu, l'article L. 151-30 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque le règlement prévoit des obligations en matière de stationnement des véhicules motorisés, il fixe des obligations minimales pour les vélos pour les immeubles d'habitation et de bureaux, dans le respect des conditions prévues à l'article L. 113-18 du code de la construction et de l'habitation. ". Selon l'article L. 113-18 du code de la construction et de l'habitation : " Toute personne qui construit : / 1° Un ensemble d'habitations équipé de places de stationnement individuelles couvertes ou d'accès sécurisé ; / 2° Un bâtiment à usage industriel ou tertiaire constituant principalement un lieu de travail et équipé de places de stationnement destinées aux salariés ; / (...) / le dote des infrastructures permettant le stationnement sécurisé des vélos. / Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article (...). ".
16. L'article 12 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Codognan régissant la zone UC, relatif au stationnement des véhicules, prévoit que : " (...) / 2. Dispositions particulières : / (...) / En matière de stationnement pour les vélos, il est exigé la création d'un emplacement sécurisé et abrité pour les opérations de plus de 4 logements. ". En outre, selon l'article 13 des dispositions générales du même règlement : " (...) / 3. Stationnement des vélos : / Toute opération d'ensemble à dominante habitat de plus de 3 logements, (...), à caractère administratif, de bureaux, (...), prendra en compte l'accessibilité et le garage des vélos. / En conséquence, à l'exception des opérations d'habitat de moins de 4 logements, un local vélo sera prévu. / Celui-ci devra être facilement accessible à partir de l'extérieur du bâtiment et situé en rez-de-chaussée au plus près des lieux d'activité ou de logement. Il sera conçu pour répondre aux besoins : / - De sécurité : local clos et muni de dispositifs pour séparer et attacher individuellement chaque vélo ; / - De confort : local couvert et éclairé. / A titre indicatif, son dimensionnement répondra à : / - Pour les bureaux, activités : 1 m2 par tranche complète de 50 m2 de surface de plancher ou un emplacement vélo pour cinq employés ; / (...) ".
17. D'une part, les appelants n'apportent aucune précision à l'appui de leur allégation selon laquelle les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme citées au point précédent seraient insuffisantes au regard de l'article L. 151-30 du code de l'urbanisme. D'autre part, il ressort de la notice et des plans intérieurs du projet que, contrairement à ce que soutiennent les intéressés, la société intimée a prévu l'aménagement de deux locaux pour le stationnement des vélos, le premier dans le bâtiment à usage de bureaux, le second dans l'immeuble collectif. Les locaux en cause sont situés en rez-de-chaussée, aisément accessibles, clos et couverts. La notice précise par ailleurs qu'ils seront équipés de dispositifs de séparation et d'attache des vélos. Les requérants ne peuvent utilement se prévaloir à cet égard des prescriptions règlementaires prises pour l'application de l'article L. 113-18 précité du code de la construction et de l'habitation, lesquelles ne sont pas opposables à l'autorisation d'urbanisme en litige. Enfin, le local à vélos projeté dans le bâtiment à usage de bureaux présentera une surface de 8 m2, soit une taille supérieure à celle résultant de l'application du ratio mentionné par les dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme, à titre d'ailleurs seulement indicatif, pour ce bâtiment présentant une surface totale de plancher de 320 m2. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance des mesures prévues pour le stationnement des vélos doit être écarté.
18. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, issu de la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement : " En dehors des espaces urbanisés des communes, les constructions ou installations sont interdites dans une bande de cent mètres de part et d'autre de l'axe des autoroutes, routes express et déviations au sens du code de la voirie routière et de soixante-quinze mètres de part et d'autre de l'axe des autres routes classées à grande circulation. ". Selon l'article 11 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme de la commune intimée, relatif aux reculs le long des voies nationales et départementales : " Au-delà des entrées d'agglomération, des reculs par rapport à l'axe des voies sont exigés, notamment au niveau de la : / - RN 113 régie par (...) la loi du 2 février 1995 dite " Loi Barnier ", relative à la maîtrise du développement urbain en bordure des voies importantes telles que les autoroutes, les déviations, les voies expresses et les routes classées à grande circulation : un recul de 75 mètres est imposé. / (...) ".
19. Il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies aériennes produites par les parties que, si le terrain d'assiette du projet est situé au bord de la route nationale n° 113, il est inséré au sein d'un espace urbanisé de la commune de Codognan, si bien que l'opération prévue par la société intimée ne se trouvait pas soumise à l'obligation d'un recul de 75 mètres prescrite par l'article 11 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme, pris pour l'application de l'article L. 111-6 précité du code de l'urbanisme. Par voie de conséquence, le moyen soulevé sur le fondement de l'article 11 susmentionné ne peut qu'être écarté.
20. En troisième lieu, selon l'article 12 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme, applicable aux voies nouvelles publiques et privées : " 1. Dispositifs de retournement dans les voies en impasse : / Les voies en impasse doivent comporter un dispositif de retournement permettant aux véhicules lourds de tourner ou de faire demi-tour (...). / Ces dispositifs devront être conformes aux dispositions fixées par le SDIS. / 2. Caractéristiques des voies : / La longueur des voies en impasse ne pourra excéder 80 mètres, ouvrage de retournement inclus, sauf si une orientation d'aménagement et de programmation prévoit un prolongement ou une longueur d'impasse supérieure. / (...) / Les accès et les voies nouvelles devront être compatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation. Il pourra être exigé que les voies en impasse soient prolongées jusqu'à une voie existante ou jusqu'en limite de l'unité foncière (...). / Largeur minimale de la plateforme de la chaussée : / Voies en impasse : / 5 mètres pour la voie / 1,60 mètre pour les trottoirs accessibles aux PMR. / (...) / Largeur minimale de la chaussée : / Voies en impasse : / 5 mètres / (...) ".
21. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, par une délibération adoptée le 4 juillet 2022, le conseil municipal de Codognan a approuvé la modification simplifiée n° 3 du plan local d'urbanisme intégrant à ce plan une orientation d'aménagement et de programmation relative au " secteur de Garet ", laquelle recouvre le même périmètre que le terrain d'assiette du projet litigieux. Le schéma d'aménagement contenu dans l'orientation d'aménagement et de programmation permet la réalisation d'une voie interne en impasse à partir de la route nationale jusqu'à une aire de retournement située au fond de l'unité foncière, soit sur une longueur d'au moins 150 mètres. Par suite et en application des dispositions précitées, le projet n'était pas soumis à la règle limitant la longueur maximale à 80 mètres pour les voies en impasse. Dès lors, le moyen invoqué par les requérants à ce titre ne peut qu'être écarté comme inopérant.
22. D'autre part, il a été indiqué au point 7 du présent arrêt que les constructions en projet seront desservies par une voie interne en impasse présentant une chaussée de 5 mètres de large et bordée de part et d'autre par des cheminements piétons. Il ressort plus précisément de la notice et du plan de masse que les cheminements ainsi prévus auront une largeur d'1,3 mètre sur l'essentiel de leur tracé, à l'exception de la partie située le long du bâtiment à usage de bureaux, laquelle aura une largeur d'1,6 mètre pour permettre l'accès des personnes à mobilité réduite au bâtiment en cause. Il résulte toutefois de l'article 12 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme, notamment du tableau inséré au sein de cet article, que les auteurs du plan ont entendu imposer, pour les voies en impasse, outre une largeur minimale de chaussée de 5 mètres, une largeur d'au moins 1,6 mètre pour l'ensemble des trottoirs ayant vocation à être accessibles aux personnes à mobilité réduite, sans que cette exigence ne soit limitée aux seules parties de trottoir destinées à desservir un bâtiment " ouvert au public " comme le fait valoir à tort la société Corim associés en défense. Dès lors que les cheminements piétonniers projetés par la société pétitionnaire ont également vocation à être accessibles aux personnes à mobilité réduite pour leurs parties desservant les logements et que ladite société a d'ailleurs prévu la réalisation de places de stationnement adaptées de part et d'autre de l'impasse sur toute sa longueur, les cheminements en cause devaient présenter une largeur d'au moins 1,6 mètre sur l'intégralité de leur linéaire. Faute de respecter l'exigence ainsi prescrite, l'opération en litige méconnaît sur ce point l'article 12 des dispositions générales mentionnées au point 20.
23. En vertu d'un principe général, il incombe à l'administration de ne pas appliquer un règlement illégal. Ce principe trouve à s'appliquer, même en l'absence de toute décision juridictionnelle qui en aurait prononcé l'annulation ou les aurait déclarées illégales, lorsque les prescriptions d'un plan local d'urbanisme, ou certaines d'entre elles si elles en sont divisibles, sont entachées d'illégalité. En l'espèce, la société intimée fait valoir que la règle imposant la réalisation d'un trottoir d'une largeur minimale d'1,6 mètre sur l'ensemble du linéaire de l'impasse devrait être écartée comme illégale en ce qu'une telle exigence serait excessive au regard de l'article 1er de l'arrêté ministériel du 15 janvier 2007 portant application du décret du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l'accessibilité de la voirie et des espaces publics, lequel fixe la largeur minimale des cheminements accessibles aux personnes à mobilité réduite à 1,40 mètre, voire 1,20 mètre en l'absence de mur ou d'obstacle. Il est toutefois loisible aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de prévoir des règles plus exigeantes que celles prescrites par la législation relative à la voirie routière s'agissant des caractéristiques des accès et voies de desserte des terrains et le conseil municipal de Codognan n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en approuvant, en l'espèce, un règlement imposant une largeur d'au moins 1,6 mètre pour les trottoirs accessibles aux personnes à mobilité réduite le long des voies prévues en impasse. Dans ces conditions, la société intimée n'est pas fondée à soutenir qu'il y aurait lieu d'écarter l'application des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme dont la méconnaissance par le projet de construction en litige a été relevée au point précédent.
24. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que seul est fondé le moyen, retenu au point 22 du présent arrêt, tiré de ce que le permis en litige méconnaît l'article 12 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme s'agissant de la largeur des trottoirs.
Sur la possibilité d'une régularisation :
25. L'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. (...). ". Un vice entachant le bien-fondé du permis de construire est susceptible d'être régularisé en application de ces dispositions, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet, dès lors que les dispositions d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.
26. Le vice entachant le permis de construire en litige, tenant à la méconnaissance de l'article 12 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme s'agissant de la largeur des trottoirs, reste susceptible d'être régularisé par un permis modificatif sans apporter au projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même. Dès lors, ainsi que le sollicitent notamment tant la société Corim associés que la commune de Codognan à titre subsidiaire, il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête de M. A... et Mme B..., en application de l'article L. 600-5-1 précité du code de l'urbanisme, pendant une période de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, pour permettre la régularisation du vice ainsi constaté.
D E C I D E :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de M. A... et Mme B..., en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, pendant une période de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, pour permettre la régularisation du vice entachant le permis en litige, tenant à la méconnaissance de l'article 12 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Codognan s'agissant de la largeur des trottoirs.
Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Mme C... B..., à la commune de Codognan et à la société à responsabilité limitée Corim associés.
Délibéré après l'audience du 8 juillet 2024, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juillet 2024.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
D. Chabert
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet du Gard, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23TL02335