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16/07/2024 | FRANCE | N°22TL21203

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 16 juillet 2024, 22TL21203


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 10 septembre 2019 du directeur général de Tarn et Garonne Habitat, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 11 octobre 2019 formé contre cette décision, en tant que le directeur général de Tarn et Garonne Habitat a refusé de faire droit à une partie de ses demandes au titre de la protection fonctionnelle et en tant qu'il a refusé de lui accorder cette protection

après le 16 juillet 2019, d'enjoindre au directeur général de Tarn et Garonne Habitat ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 10 septembre 2019 du directeur général de Tarn et Garonne Habitat, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 11 octobre 2019 formé contre cette décision, en tant que le directeur général de Tarn et Garonne Habitat a refusé de faire droit à une partie de ses demandes au titre de la protection fonctionnelle et en tant qu'il a refusé de lui accorder cette protection après le 16 juillet 2019, d'enjoindre au directeur général de Tarn et Garonne Habitat de lui verser la somme de 38 713,28 euros à parfaire, de lui rembourser les frais justifiés qui interviendront postérieurement à son recours, et de mettre fin à sa mise à l'écart dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de condamner Tarn et Garonne Habitat à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice spécifique subi pour refus abusif de protection fonctionnelle et de mettre à sa charge une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2000948 du 25 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 10 septembre 2019 du directeur général de Tarn et Garonne Habitat et la décision implicite de rejet du recours gracieux du 11 octobre 2019 en tant qu'elles refusent d'accorder à Mme C... la protection fonctionnelle pour la période du 16 juillet 2019 au 25 septembre 2019 et le versement de la somme de 8 440 euros, a enjoint au directeur général de Tarn et Garonne Habitat d'accorder à Mme C... le bénéfice de la protection fonctionnelle en raison de faits de harcèlement subis pour la période du 16 juillet 2019 au 25 septembre 2019, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, et de lui verser la somme de 8 440 euros, a rejeté le surplus des conclusions et enfin a mis à la charge de l'établissement une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mai 2022, et un mémoire enregistré le 7 septembre 2023, Tarn et Garonne Habitat, représenté par M. A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2000948 du 25 mars 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de rejeter les demandes présentées par Mme C... ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision du 10 septembre 2019, qui a accordé la protection fonctionnelle pour la période antérieure au 16 juillet 2019 en exécution de l'ordonnance du juge des référés, ne saurait être regardée comme valant reconnaissance d'une situation de harcèlement ; Mme C... n'apporte aucune preuve d'un harcèlement moral, sinon la reconnaissance par un juge des référés qui ne saurait lier le juge du fond ;

- la décision mettant fin à l'exercice par Mme C... de ses fonctions de directrice financière avait vocation à mettre fin à une situation conflictuelle et a trait à l'organisation du service ; le changement de poste est justifié par les nécessités du service et son incapacité à organiser le passage de la comptabilité publique à la comptabilité privée ;

- la définition du poste de Mme C... est intervenue dans le cadre d'une réorganisation des services, deux fiches de poste correspondant à celui qui allait lui être affecté à compter de son remplacement au poste de directrice financière lui ont été communiquées à compter du 1er janvier 2019 ;

- la fiche de poste n'était pas une coquille vide et comportait des missions précises à accomplir ;

- il n'était pas possible de la positionner sur l'organigramme du 18 avril 2019, le poste devait être redéfini puisqu'elle a fait part au mois d'avril 2019 de sa volonté de reprise au mois de mai 2019, cette situation tenait ainsi aux nécessités de service et n'était pas dirigée contre l'intéressée ;

- des missions lui été confiées lors de sa reprise de fonctions au début du mois de mai 2019, or elle a été réticente à les exercer et a adopté une position de défiance et refusé le dialogue ;

- la circonstance qu'elle n'ait pas été convoquée à la réunion du comité de direction du 13 mai 2019 est justifiée, elle n'occupait plus de poste de directrice ;

- la situation postérieure au 16 juillet 2019 ne s'inscrivait pas dans une continuité ;

- Mme C... était dans une attitude d'opposition au moins envers la personne qui a pris sa succession ;

- l'existence d'un harcèlement moral dans le cadre de sa demande de reconnaissance de l'imputabilité de sa maladie n'a pas été retenue pour la période postérieure au 16 juillet 2019 ;

- la protection fonctionnelle n'était pas due en l'absence de harcèlement moral et les montants alloués par le tribunal sont en tout état de cause trop importants ;

- les frais d'avocat intègrent les frais engagés dans le cadre de l'action en référé, de sorte qu'il a été amené à payer deux fois les mêmes frais ; il n'est pas indiqué à quel titre les frais de psychologues devraient être pris en charge ;

- le préjudice d'image n'est pas établi.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 janvier 2023, Mme C..., représentée par Me Panfili, conclut au rejet de la requête et demande, par la voie de l'appel incident, la réformation du jugement en ce qu'il a limité à 6 500 euros la somme que Tarn et Garonne Habitat a été condamné à lui verser en réparation de son préjudice moral, en ce qu'il a rejeté sa demande de versement d'une somme de 12 500 euros au titre des primes qu'elle n'a pas perçues, et en ce qu'il n'a pas fait droit à la prise en charge des soins non pris en charge par sa couverture sociale et sollicite le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le juge des référés liberté, en faisant injonction à Tarn et Garonne Habitat de mettre fin à sa mise à l'écart et de la réinvestir dans des missions correspondant à son grade et de la réaffecter à un poste correspondant à ces exigences à compter du 16 juin 2019, a pris une mesure définitive ;

- elle a subi un harcèlement moral à compter à compter de la fin du mois de septembre 2018 où elle a été écartée de son poste de directrice financière et ces faits se sont poursuivis entre le 16 juillet et le 25 septembre 2019 ;

- les contours du nouveau poste qui lui a été proposé n'étaient pas clairement définis et ne correspondaient pas à une affectation réelle et sérieuse ;

- elle n'était pas dans une attitude d'opposition et n'a montré aucune rancœur à l'encontre de la personne qui a été nommée sur son ancien poste ;

- sa rétrogradation dans l'intérêt du service constitue une sanction disciplinaire déguisée ;

- le refus du directeur de lui octroyer les mesures de protection qu'elle a demandées caractérise un détournement de procédure, voire un détournement de pouvoir ;

- le harcèlement moral qu'elle a subi a porté une atteinte grave à sa santé à la suite de plusieurs chocs psychologiques qui ont généré un état anxiogène dépressif, de graves troubles pour elle-même et sa famille et des préjudices professionnels, avec la perte d'un poste à responsabilité, l'atteinte à son image et un avenir professionnel compromis du fait de son âge et doit être réparé par le versement d'une somme de 20 000 euros ;

- en raison des faits de harcèlement moral qu'elle a subis, la prime d'objectif 2017, correspondant à une somme de 2 500 euros, ainsi que celle de 2018, correspondant à une somme de 5 000 euros ne lui ont pas été versées, de même que les primes de 2019 pour un même montant ;

- elle sollicite le versement une somme de 615 euros qu'elle a été contrainte d'engager du fait du harcèlement qu'elle a subi et correspondant à des frais de psychologues et 671 euros au titre du non-paiement de 4 jours de carence ; Tarn et Garonne Habitat n'a pas versé la somme de 976 euros qu'il a pourtant été condamné à lui verser par le jugement attaqué.

Par une ordonnance du 15 décembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 janvier 2024 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me Danguy représentant Tarn et Garonne Habitat et celles de Me Feres-Massol représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., directrice territoriale depuis le 18 décembre 2009, occupait depuis le 1er janvier 2005 le poste de directrice administrative et financière de l'office public départemental d'habitations à loyer modéré de Tarn et Garonne, devenu Tarn et Garonne Habitat, établissement public local à caractère industriel et commercial. L'intéressée a été affectée au mois d'octobre 2018 sur un autre poste, avant qu'une nouvelle directrice administrative et financière soit nommée le 1er janvier 2019. Par une ordonnance n° 1902887 du 14 juin 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a enjoint à Tarn et Garonne Habitat de mettre fin à la mise à l'écart de Mme C..., de la réinvestir dans des missions correspondant à ses compétences et à son grade, et de la réaffecter à compter du 16 juin 2019, dans les formes légales à un poste correspondant à ces exigences. Mme C... a sollicité, le 13 juillet 2019, le bénéfice de la protection fonctionnelle et la réparation de l'intégralité des préjudices qu'elle estimait avoir subis pour un montant de 33 931,64 euros. Par lettre du 10 septembre 2019, le directeur général de Tarn-et-Garonne Habitat a accordé à Mme C... la protection fonctionnelle pour la période précédant le 16 juillet 2019, validé le principe du remboursement de quatre jours de carence pour un montant de 671 euros et de deux consultations de psychologues pour un montant de 305 euros et refusé la prise en charge des frais d'avocat, des primes d'objectif non versées entre 2017 et les six premiers mois de 2019 et, dans l'attente d'éléments de fait justifiant la somme demandée, la réparation de son préjudice moral. Mme C... a formé, le 11 octobre 2019, un recours gracieux contre cette décision et présenté une demande indemnitaire d'un montant de 34 491 euros, complétée le 10 juillet 2020, toutes deux implicitement rejetées. Tarn et Garonne Habitat relève appel du jugement du 25 mars 2022, par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 10 septembre 2019 du directeur général de Tarn et Garonne Habitat, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux en tant qu'elles refusent de lui accorder la protection fonctionnelle pour la période du 16 juillet 2019 au 25 septembre 2019 et de verser la somme de 8 440 euros, a enjoint au directeur général de Tarn et Garonne Habitat d'accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle pour la période du 16 juillet 2019 au 25 septembre 2019 et de lui verser la somme de 8 440 euros et enfin a mis à la charge de l'établissement une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Par la voie de l'appel incident, Mme C... demande la réformation du jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de ses prétentions.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...)". Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement, notamment lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

3. Aux termes des dispositions du troisième alinéa de l'article 11 de la même loi dans sa version applicable au litige, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 134-5 du code général de la fonction publique : " La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté ". Ces dispositions établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis. La mise en œuvre de cette obligation peut notamment conduire l'administration à assister son agent dans l'exercice des poursuites judiciaires qu'il entreprendrait pour se défendre. Il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.

4. Tarn et Garonne Habitat soutient que les éléments de fait invoqués par Mme C... ne sont pas susceptibles de laisser présumer une situation de harcèlement moral et en particulier que la définition du poste et les missions qui devaient lui être confiées à compter du 1er janvier 2019 étaient connues et impliquaient de réelles responsabilités nécessitant des compétences particulières et qu'il était impossible de positionner l'intéressée sur l'organigramme du 18 avril 2019, date à laquelle elle n'avait pas encore repris ses fonctions ou accepté d'autres missions.

5. Il ressort des pièces du dossier que la décision de la fin du mois de septembre 2018 du directeur de Tarn et Garonne Habitat consistant à confier le poste de directrice administrative et financière occupé jusque-là par Mme C... à un autre agent, a été prise à la suite des réorganisations impliquées par les réformes fiscales successives et le passage de l'Office d'une comptabilité publique à commerciale, que l'intéressée avait des difficultés à mettre en œuvre, et n'a ainsi pas été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service. A la suite de cette éviction du poste de directrice, deux fiches de poste " contrôleur de gestion ", ou " chargé de mission stratégie financière " datées du 3 octobre 2018 ont alors été présentées à l'intéressée, dont les missions relevaient de fait pour l'essentiel de celles assurées par le nouveau directeur administratif et financier ou le comptable ou étaient en réalité réparties en interne ou en externe et étaient ainsi sans contenu ou activité réelle. Mme C... a ensuite été placée en arrêt de travail reconnu imputable au service à compter du 26 novembre 2018 à la suite d'une réunion ayant acté la réorganisation des services, prolongé jusqu'au 30 avril 2019. Interrogé par Mme C... sur les conditions de sa reprise et les missions qui lui seraient effectivement confiées, le directeur de l'établissement l'a informée, par lettre du 24 avril 2019, qu'il n'a pas été possible de trouver une solution à son emploi, que sa reprise se ferait sur les missions énumérées en annexe, sauf à ce qu'elle préfère demeurer à son domicile en étant rémunérée, démontrant l'absence de volonté de lui confier des missions et la mise à l'écart de Mme C.... L'intéressée justifie par ailleurs avoir demandé à plusieurs reprises entre les mois de juillet et septembre 2019 à suivre les projets correspondants à sa fiche de poste, mais que peu de tâches lui ont été réellement confiées en n'étant pas associée par ailleurs, même ponctuellement, à la plupart des réunions. Les conditions normales de l'exercice des missions correspondant aux nouvelles fonctions et au positionnement de Mme C... au sein de la structure entre le 16 juillet et le 25 septembre 2019 ne peuvent ainsi être regardées comme ayant été organisées, l'intéressée ayant été positionnée sur un emploi sans contenu effectif. Contrairement à ce qu'indique l'établissement, il ne ressort pas des pièces du dossier que le comportement de Mme C... traduise une opposition ou un refus de dialogue systématiques. La circonstance que les arrêts de travail dont elle a bénéficié durant cette période n'aient pas retenu la qualification de harcèlement moral est à cet égard sans incidence. Dans ces conditions, Tarn et Garonne Habitat, qui ne contestait pas d'ailleurs dans ses écritures de premières instance les faits de harcèlement pour la période antérieure au 16 juillet 2019, n'est pas fondé à soutenir que la situation correspondant à cette première période ou celle s'étant prolongée jusqu'au 25 septembre 2019 ne traduisait pas des faits de harcèlement moral.

6. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prononçant le retrait des fonctions de directrice administrative et financière de Mme C..., Tarn et Garonne Habitat ait eu l'intention de sanctionner l'intéressée. La circonstance que le directeur général de l'établissement n'ait pas reconnu de préjudice moral consécutif au harcèlement moral alors que des faits constitutifs de harcèlement ont été reconnus par le juge des référés, ou celle supplémentaire que l'intégralité de ses primes ne lui ai pas été versée, ne sont pas non plus de nature à établir l'existence d'une sanction disciplinaire déguisée. Les moyens tirés du détournement de procédure et de pouvoir doivent ainsi être écartés.

En ce qui concerne le préjudice moral sollicité au titre de la protection fonctionnelle :

7. Eu égard au contexte rappelé au point 5, à l'âge et à la durée durant laquelle Mme C... a fait l'objet d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral, à leurs répercussions sur sa vie professionnelle, personnelle et sur sa santé, la réparation du préjudice moral en ayant découlé sera justement apprécié en fixant à 6 500 euros la somme destinée à le réparer, ainsi que l'ont retenu les premiers juges.

En ce qui concerne les préjudices financiers sollicités au titre de la protection fonctionnelle :

8. Par décision du 10 septembre 2019 le directeur général de Tarn et Garonne Habitat a indiqué prendre en charge au titre de la protection fonctionnelle accordée à Mme C... une somme totale de 305 euros au titre des frais de psychologues, justifiés du fait de la dégradation de son état de santé et le syndrome dépressif réactionnel relevé par son médecin traitant, ainsi qu'une somme de 671 euros, en compensation du non-paiement de quatre jours de carence. La circonstance que l'établissement n'aurait pas procédé au versement de ces montants constitue un litige distinct de celui de la légalité de la décision accordant partiellement à Mme C... le bénéfice de la protection fonctionnelle dont le tribunal se trouvait saisi. Sa demande à ce titre est irrecevable et doit ainsi être rejetée.

9. Mme C... ayant subi des faits de harcèlement moral à compter de la fin du mois de septembre 2018 et n'occupant plus depuis cette même date le poste de directeur administratif et financier sans que cette décision ne révèle par elle-même des faits constitutifs de harcèlement moral, n'est pas fondée à solliciter la réparation d'une perte de prime d'objectif attribuée aux directeurs pour l'année 2017 ou les années suivantes, qui ne présente pas de lien direct et certain avec les faits de harcèlement retenus.

En ce qui concerne les frais d'avocat sollicités au titre de la protection fonctionnelle :

10. Mme C... sollicite le remboursement des frais d'avocat qu'elle a été amenée à engager afin de faire cesser les agissements de harcèlement moral auxquels elle était exposée et produit une facture de son conseil d'un montant de 1 500 euros correspondant au référé liberté introduit devant le juge des référés du tribunal administratif, ainsi qu'une autre de 300 euros correspondant au recours gracieux du 11 octobre 2019 engagé en vue de sa réintégration dans le service. Une somme de 1 000 euros au titre des frais liés au litige ayant été mise à la charge de Tarn et Garonne Habitat au bénéfice de Mme C... par l'ordonnance du 14 juin 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse devenue définitive, le montant des frais d'avocat restés à la charge de l'intéressée et dont elle est fondée à solliciter la prise en charge par Tarn et Garonne Habitat doit ainsi être ramené de 1 800 à 800 euros.

11. Il résulte de tout ce qui précède d'une part que la somme que Tarn et Garonne Habitat doit verser à Mme C... du fait de l'annulation partielle de la décision du 10 septembre 2019 du directeur général de Tarn et Garonne Habitat et de la décision implicite de rejet du recours gracieux du 11 octobre 2019 doit être ramenée de 8 440 euros à 7 440 euros et, d'autre part, que l'appel incident formé par Mme C... doit être rejeté.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

12. Les dispositions de l'article L761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Tarn et Garonne Habitat la somme demandée par Mme C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme C... la somme demandée par Tarn et Garonne Habitat en application des mêmes dispositions

D E C I D E :

Article 1er : La somme que Tarn et Garonne Habitat a été condamné à verser à Mme C... est réduite à 7 440 euros.

Article 2 : Les articles 1er et 2 du jugement n° 2000948 du 25 mars 2022 du tribunal administratif de Toulouse sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Tarn et Garonne Habitat est rejeté.

Article 4 : L'appel incident de Mme C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Tarn et Garonne Habitat et à Mme B... C....

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

M. Teulière, premier conseiller,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2024.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet de Tarn-et-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 22TL21203


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21203
Date de la décision : 16/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers - Protection contre les attaques.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Céline Arquié
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : BOISSY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-16;22tl21203 ?
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