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09/07/2024 | FRANCE | N°22TL22281

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 09 juillet 2024, 22TL22281


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.



Par un jugement n° 2104896 du 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2022, Mme A..., représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2104896 du 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2022, Mme A..., représentée par Me Gaillot, demande à la cour :

2°) d'annuler ce jugement ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 8 juillet 2021 ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros à verser à son avocat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- la mesure d'éloignement viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :

- elle n'est pas motivée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, à défaut de mise en œuvre d'une procédure contradictoire préalable ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet s'étant cru à tort en situation de compétence liée et n'ayant pas examiné sérieusement sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est insuffisamment motivée.

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 avril 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 6 avril 2023, la clôture de l'instruction a été reportée et fixée en dernier lieu au 19 avril 2023.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale de New-York des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Haïli, président-assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante béninoise, a sollicité le 21 janvier 2021 son admission au séjour au regard de sa vie privée et familiale en France et au regard du travail. Par un arrêté du 8 juillet 2021, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé son pays de destination. Par la présente requête, Mme A... relève appel du jugement du 21 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur les moyens communs à l'arrêté attaqué :

2. L'arrêté contesté vise les textes dont le préfet a fait application et mentionne les circonstances de fait sur lesquelles celui-ci s'est fondé pour prendre la décision en litige à l'encontre de Mme A.... Il expose notamment avec une précision suffisante les principaux éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressée. Si la requérante fait valoir qu'il n'est pas fait état dans la décision de la nationalité française du père de son enfant, et partant celle de son enfant, alors que le caractère suffisant de la motivation d'une décision administrative ne se confond pas avec le bien-fondé de ses motifs, il ressort des pièces du dossier que la requérante a mentionné dans le formulaire préfectoral de demande d'admission exceptionnelle au séjour que son enfant possédait la nationalité béninoise. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige doit être écarté.

3. Il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté attaqué, ni des autres pièces du dossier, que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé avant de prendre l'arrêté en litige.

Sur la décision portant refus d'admission au séjour :

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale (...) ".

5. L'appelante se borne à invoquer devant le juge d'appel les mêmes moyens et les mêmes circonstances de fait afférentes que ceux développés en première instance et tirés de ce que l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et familiale. D'une part, l'intéressée n'apporte aucun commencement de preuve permettant d'établir la nationalité française du père de son enfant, M. B..., alors que le préfet de la Haute-Garonne fait valoir sans être contesté que les services de la préfecture de Montpellier, par courriel du 10 mars 2023, l'ont informé que les demandes de carte d'identité et de passeport déposées au nom de l'enfant ont toutes fait l'objet d'un rejet pour reconnaissance frauduleuse de paternité, le père de l'enfant ayant reconnu 19 enfants de mères différentes en situation irrégulière. D'autre part, il n'est pas davantage établi que l'enfant de Mme A..., de nationalité béninoise, sous autorité parentale exclusive de sa mère et résidant habituellement chez cette dernière, entretiendrait des liens particuliers avec son père, M. B..., également ressortissant béninois. Si l'appelante fait valoir que le père de cet enfant bénéficie d'un droit de visite et d'hébergement selon le jugement du 20 juillet 2020 du juge des affaires familiales du tribunal judiciaire de Toulouse lequel, au reste, dans ses attendus fait état de l'absence de comparution du père à l'audience, et de l'absence de son investissement auprès de l'enfant, son exercice n'est pas étayé par des pièces justificatives contemporaines à la date de l'acte en litige, de sorte que cette seule circonstance ne permet pas de juger que l'arrêté attaqué porterait une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de la vie privée et familiale et qu'il serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de Mme A.... Enfin, la requérante ne peut utilement se prévaloir de sa relation avec un ressortissant de nationalité française, dont la réalité et l'ancienneté ne sont pas établies par la seule attestation de l'intéressé en date du 7 novembre 2022, et qui présente, en tout état de cause, un caractère très récent. Pour les mêmes motifs, la décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Pour le surplus, il y a lieu d'écarter les moyens de l'appelante par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 6 à 8 de leur jugement.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Il résulte de ce qui précède que la requérante ne démontre pas l'illégalité de la décision portant refus de séjour. Par voie de conséquence, elle n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait privée de sa base légale.

7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt, et même en tenant compte des conséquences spécifiques à la mesure d'éloignement, alors qu'il n'est pas établi que Mme A... serait dépourvue de toute attache personnelle et familiale au Bénin où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans et où sa mère y réside toujours, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Sur la décision fixant le pays de destination :

8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en prenant la décision en litige.

Sur la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :

9. Au soutien des moyens tirés de la méconnaissance de la procédure contradictoire préalable, de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation, la requérante ne se prévaut devant la cour d'aucun élément nouveau par rapport à son argumentation soulevée en première instance. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par le tribunal aux points 14 à 18 du jugement attaqué.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions en annulation contre l'arrêté en litige. Par voie de conséquence, les conclusions de l'intéressée à fin d'injonction et d'astreinte, et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., à Me Gaillot et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2024.

Le rapporteur,

X. HaïliLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22TL22281


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22281
Date de la décision : 09/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Xavier Haïli
Rapporteur public ?: Mme Meunier-Garner
Avocat(s) : GAILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-09;22tl22281 ?
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