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04/07/2024 | FRANCE | N°23TL02926

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 1ère chambre, 04 juillet 2024, 23TL02926


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 1er juin 2023 par lequel la préfète de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2302561 du 7 novembre 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 14 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Gilbert, demande à la cour :



1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 1er juin 2023 par lequel la préfète de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2302561 du 7 novembre 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Gilbert, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er juin 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet de Vaucluse qui n'a pas produit de mémoire.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 1er mars 2024.

Par ordonnance du 13 mai 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 31 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Alain Barthez a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 1er janvier 1989 et déclarant être entré sur le territoire français au mois d'août 2017, a sollicité l'asile le 10 octobre 2017 et sa demande a été rejetée le 17 avril 2019 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 31 janvier 2020. Par un arrêté du 8 avril 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé l'admission exceptionnelle au séjour de M. A... et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français. Le 24 janvier 2023, M. A... a sollicité à nouveau son admission exceptionnelle au séjour au titre du travail. Par un arrêté du 1er juin 2023, la préfète de Vaucluse a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... fait appel du jugement du 7 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de la décision de la préfète de Vaucluse que celle-ci n'aurait pas examiné la situation personnelle du requérant avant de rejeter sa demande de titre de séjour et de l'obliger à quitter le territoire français. Le moyen soulevé à cet égard doit donc être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. M. A... déclare être entré en France au cours de l'année 2017. Toutefois, les éléments produits par le requérant ne permettent d'établir sa présence habituelle en France qu'à compter du mois d'avril 2019. En outre, alors qu'il est sans charge de famille sur le territoire français, le requérant n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de sa vie et où résident notamment ses deux enfants mineurs. Enfin, les six attestations de proches versées au débat ne permettent pas d'établir, à elles seules, que M. A... aurait fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux. Dans ces conditions, et nonobstant ses efforts d'insertion professionnelle, l'arrêté de la préfète de Vaucluse ne porte pas à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

6. Il appartient à l'autorité administrative, en application de ces dispositions, de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

7. Eu égard aux circonstances de fait de l'espèce, notamment à celles précédemment mentionnées au point 4, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que la préfète de Vaucluse a estimé que l'admission exceptionnelle au séjour de M. A... au titre de la vie privée et familiale ne répondait pas à des considérations humanitaires ni ne se justifiait au regard de motifs exceptionnels.

8. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. A... a signé le 26 juillet 2022 un contrat à durée indéterminée pour un poste d'employé polyvalent dans le domaine de la restauration. En outre, les éléments versés au débat établissent qu'il a conclu plusieurs contrats à durée déterminée pour un emploi de cuisinier à temps partiel entre 2020 et 2022. Toutefois, ils ne sont pas suffisants pour justifier d'une qualification, de diplômes ou d'une expérience professionnelle significative en qualité de cuisinier, alors notamment que l'activité de manutentionnaire - vendeur qu'il établit avoir exercé entre le 1er juin 2021 et le 27 juillet 2022 est sans rapport avec ce domaine. Au surplus, les deux enfants mineurs du requérant résident en Guinée. Ainsi, il ne peut être regardé comme justifiant de circonstances humanitaires ou d'un motif exceptionnel permettant la régularisation de son séjour en tant que salarié au sens des dispositions précitées. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. En dernier lieu, eu égard aux circonstances de fait précédemment mentionnées aux points 4 et 8, l'arrêté de la préfète de Vaucluse n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'il emporte sur la situation personnelle de M. A....

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent également être rejetées, ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Flora Gilbert et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Barthez, président,

M. Lafon, président assesseur,

Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

Le président-rapporteur,

A. Barthez

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

N. Lafon Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23TL02926 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL02926
Date de la décision : 04/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Barthez
Rapporteur ?: M. Alain Barthez
Rapporteur public ?: M. Clen
Avocat(s) : GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-04;23tl02926 ?
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