Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... E... et M. F... D... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 février 2020 par lequel le maire de Sète n'a pas fait opposition à la déclaration préalable déposée le 24 janvier 2020 par M. G... en vue de la construction d'une pergola bioclimatique sur une terrasse existante avec extension des garde-corps.
Par un jugement n° 2004953 du 17 février 2022, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 avril 2022, M. G..., représenté par Me Doux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. E... et M. D... devant le tribunal administratif de Montpellier ;
3°) de mettre à la charge solidaire de M. E... et M. D... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande de première instance est tardive ;
- MM. E... et D... n'ont pas intérêt pour agir ;
- la jurisprudence Sekler n'est pas applicable au projet en litige dès lors qu'il existe des dispositions dans le plan local d'urbanisme réglementant la modification des constructions existantes ;
- le projet en litige est conforme aux dispositions de l'article 4 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Sète.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2022, M. E... et M. D..., représentés par Me Pons, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge solidaire de la commune de Sète et de M. G... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. G... n'est fondé.
Par ordonnance du 1er septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 2 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,
- et les observations de Me Rémi, représentant MM. E... et D....
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 10 février 2020, le maire de Sète (Hérault) n'a pas fait opposition à la déclaration préalable déposée le 24 janvier 2020 par M. G... en vue de la construction d'une pergola bioclimatique sur une terrasse existante avec extension des garde-corps sur un terrain situé sur la parcelle cadastrée BT n° 584. Par jugement du 17 février 2022, sur demande de MM. E... et D..., le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté. Par la présente requête, M. G... demande au tribunal d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée en première instance par MM. E... et D....
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :
S'agissant de la tardiveté de la requête :
2. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention (...) de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ". Aux termes de l'article A. 424-16 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " Le panneau prévu à l'article A. 424-15 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l'architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. Il indique également, en fonction de la nature du projet : a) Si le projet prévoit des constructions, la surface de plancher autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel / (...) ".
3. En imposant que figurent sur le panneau d'affichage de la déclaration préalable de travaux diverses informations sur les caractéristiques de la construction projetée, les dispositions citées au point 2 ont pour objet de permettre aux tiers, à la seule lecture de ce panneau, d'apprécier l'importance et la consistance du projet, le délai de recours contentieux ne commençant à courir qu'à la date d'un affichage complet et régulier. Il s'ensuit que si les mentions prévues par l'article A. 424-16 doivent, en principe, obligatoirement figurer sur le panneau d'affichage, une erreur affectant l'une d'entre elles ne conduit à faire obstacle au déclenchement du délai de recours que dans le cas où cette erreur est de nature à empêcher les tiers d'apprécier l'importance et la consistance du projet. La circonstance qu'une telle erreur puisse affecter l'appréciation par les tiers de la légalité de l'autorisation de construire est, en revanche, dépourvue d'incidence à cet égard, dans la mesure où l'objet de l'affichage n'est pas de permettre par lui-même d'apprécier la légalité de cette autorisation.
4. En l'espèce, il est constant que la hauteur par rapport au sol naturel du projet de pergola en litige, lequel viendra en surélévation du toit-terrasse existant situé en R+1, ne figurait pas sur le panneau d'affichage. Si le panneau d'affichage portait la mention " Pose d'une pergola bioclimatique sur terrasse existante + garde-corps " et l'arrêté de non opposition du 10 février 2020, lui-même affiché sur le panneau d'affichage, indiquait : " Vu l'objet de la déclaration pour pose d'une pergola bioclimatique sur terrasse existante avec extension garde-corps ", il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies annexées à la déclaration préalable de travaux que l'habitation de M. G... comporte, outre une toiture terrasse avec garde-corps, une autre terrasse en rez-de-chaussée séparée de la piscine par un garde-corps. Ainsi, en omettant de mentionner la hauteur du projet de pergola par rapport au terrain naturel sur le panneau d'affichage, M. G... n'a pas permis aux tiers d'appréhender l'importance et la consistance de son projet. Dans ces conditions, l'irrégularité de cet affichage n'a pas permis de déclencher le délai de recours contentieux à l'encontre de l'arrêté attaqué. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par M. G... tirée de la tardiveté de la demande de première instance a été écartée à bon droit par le tribunal.
S'agissant du défaut d'intérêt pour agir de M. E... et M. D... :
5. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".
6. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'une déclaration préalable, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance et à la localisation du projet de construction.
7. Il ressort des pièces du dossier que M. E... et M. D... sont copropriétaires de la maison d'habitation voisine de la parcelle supportant le projet ayant fait l'objet de la déclaration préalable en litige. Ce projet, qui consiste à agrandir la terrasse existante sur le toit de la maison, à y implanter une pergola bioclimatique et à étendre les garde-corps en limite de toiture est de nature à créer de nouvelles vues plongeantes sur leur fond ainsi qu'une perte d'intimité. Dès lors, M. E... et M. D... justifient d'un intérêt pour agir à l'encontre de l'arrêté en litige ne s'opposant pas à la déclaration préalable de travaux déposée par M. G.... Par suite, M. G... n'est pas fondé à soutenir que M. E... et M. D... ne disposent pas d'un intérêt à agir à l'encontre de cet arrêté.
En ce qui concerne le motif retenu par les premiers juges :
8. Saisi d'un jugement ayant annulé une décision prise en matière d'urbanisme, il appartient au juge d'appel, pour confirmer cette annulation, de se prononcer sur les différents motifs d'annulation que les premiers juges ont retenus, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui.
9. D'une part, aux termes de l'article UV 7 du règlement du plan local d'urbanisme de Sète, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : " En secteurs UV3 et UV3a : La distance L comptée horizontalement de tout point du bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude H entre ces 2 points, sans pouvoir être inférieure à 3 m. A... secteur UV3 uniquement, les annexes pourront avoir un linéaire en limite de propriété au plus égal à 10 m et une hauteur maximale égale à 4 m. ".
10. D'autre part, aux termes de l'article 4 des dispositions générales du plan local d'urbanisme relatif aux travaux dans le volume des constructions existantes, " dans le cas où la construction n'est pas conforme à une ou plusieurs règles de la zone dans laquelle elle est située, les travaux, soumis à déclaration ou permis de construire sont autorisés dès lors qu'ils sont sans incidence sur le volume existant ou améliorent la conformité de la construction vis à vis des règles qu'elle méconnait ". Aux termes de ce même article 4 relatif aux extensions des constructions, " constructions existantes conformes à la vocation de la zone : Lorsque existe une construction, conforme de par sa nature à la vocation de la zone dans laquelle elle se situe, c'est à dire qui respecte les articles 1 et 2 de la zone, mais que celle-ci ne respecte pas l'une ou plusieurs des dispositions des articles 3 à 14 de la zone, son extension est autorisée dans la mesure où elle n'aggravera pas la non-conformité de la construction d'origine. Constructions existantes non conformes à la vocation de la zone : Lorsque existe une construction non conforme de par sa nature à la vocation de la zone dans laquelle elle se situe et qu'en vertu de l'article 1 de la zone, elle ne pourrait pas être autorisée, son extension n'est possible que lorsque l'article 2 de la zone le prévoit explicitement, et selon les conditions qu'il expose. En outre, l'extension doit respecter les dispositions des articles 3 à 14 de la zone ". En l'absence de précision dans le règlement du plan local d'urbanisme de Sète de la notion d'extension d'une construction existante, celle-ci doit, en principe, s'entendre d'un agrandissement de la construction existante présentant, outre un lien physique et fonctionnel avec elle, des dimensions inférieures à celle-ci.
11. Pour annuler l'arrêté en litige, le tribunal administratif a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UV 7 du règlement du plan local d'urbanisme de Sète.
12. Il ressort des pièces du dossier que la décision de non-opposition à déclaration préalable litigieuse autorise la transformation d'une toiture plate de la maison d'habitation existante en toiture-terrasse d'agrément, accessible à partir du niveau R+1 de l'habitation, munie de garde-corps et surmontée d'une pergola. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la partie de bâtiment sur laquelle s'appuie cette toiture terrasse ne constitue pas une annexe au sens des dispositions précitées de l'article UV 7 puisqu'elle abrite une extension du séjour située en rez-de-chaussée. Ainsi, les travaux autorisés par la décision en litige, qui ne sont en retrait de 3 mètres par rapport aux limites séparatives, ne respectent pas les dispositions de l'article UV 7 rappelées au point 9 du présent arrêt. En outre, les travaux autorisés par la décision en litige, qui ne sont pas effectués dans le volume de la construction existante, en constituent un agrandissement présentant, outre un lien physique et fonctionnel avec elle, des dimensions inférieures à celle-ci et doivent être regardés en conséquence comme une extension de celle-ci. Dans ces conditions, et dès lors qu'elle aggrave la non-conformité de la construction d'origine, cette extension ne peut pas être autorisée sur le fondement des dispositions de l'article 4 des dispositions générales du plan local d'urbanisme de Sète rappelées au point 10 du présent arrêt. Par suite, l'arrêté du 10 février 2020 par laquelle le maire de Sète ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux de M. G... méconnaît les dispositions de l'article UV 7 du règlement du plan local d'urbanisme de Sète.
13. Il résulte de ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 10 février 2020 par laquelle le maire de Sète ne s'est pas opposé à sa déclaration préalable de travaux.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. E... et M. D..., qui ne sont pas les parties perdantes à la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Elles font aussi obstacles aux conclusions dirigées contre la commune de Sète qui n'a pas fait appel du jugement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. G... la somme de 1 500 euros à verser à M. E... et M. D... en application de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : M. G... versera à M. E... et M. D... une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de MM. E... et D... présentées contre la commune de Sète au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... G..., à M. C... E..., à M. F... D... et à la commune de Sète.
Délibéré après l'audience du 13 juin 2024, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2024.
La rapporteure,
N. Lasserre
Le président,
J.-F. MoutteLa greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°22TL20993