Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme D... C... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2018 par lequel le maire de Gignac a accordé un permis de construire à la société par actions simplifiée Lafargeholcim Bétons pour l'implantation d'une centrale à béton sur la parcelle cadastrée section BZ n° 5 située au lieu-dit Jourmac sur le territoire de cette commune, ainsi que de la décision du 16 avril 2019 par laquelle la même autorité a rejeté leur recours gracieux présenté le 15 février 2019.
Par un jugement avant dire droit n° 1903033 rendu le 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a sursis à statuer sur la demande de M. et Mme C... pendant un délai de trois mois pour permettre la régularisation du vice tiré de la méconnaissance de l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Gignac s'agissant du raccordement du projet au réseau public de distribution d'eau potable.
Par un jugement mettant fin à l'instance n° 1903033 rendu le 30 septembre 2021, le même tribunal a annulé l'arrêté du maire de Gignac du 22 novembre 2018, a mis à la charge de la commune de Gignac une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions présentées tant par ladite commune que par la société Lafargeholcim Bétons sur le fondement de ces mêmes dispositions.
Procédures devant la cour :
I - Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 novembre 2021 et 10 mai 2023 sous le n° 21MA04515 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis sous le n° 21TL04515 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la commune de Gignac, représentée par Me Pilone, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 30 septembre 2021 en ce qu'il a annulé le permis de construire accordé le 22 novembre 2018 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de Montpellier ;
3°) à titre subsidiaire, de prononcer un sursis à statuer pendant un délai de trois mois pour permettre la régularisation du permis ;
4°) de mettre à la charge de M. et Mme C... une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif de Montpellier a commis une irrégularité en reconnaissant l'intérêt pour agir de M. et Mme C... contre le permis de construire ;
- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en estimant que le permis litigieux méconnaissait l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac s'agissant du raccordement au réseau public de distribution d'eau potable ;
- la demande de première instance était irrecevable pour avoir été introduite après l'expiration du délai de recours ouvert à l'encontre du permis de construire ;
- les autres moyens invoqués par les demandeurs devant le tribunal administratif de Montpellier à l'encontre du permis de construire en litige ne sont pas fondés ;
- à supposer que la cour estime fondé le moyen accueilli par les premiers juges, un sursis à statuer devra être prononcé pour permettre la régularisation de ce vice au regard de la modification n° 1 du plan local d'urbanisme intervenue le 31 janvier 2023.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 et 26 avril 2023, M. et Mme D... C..., représentés par Me Perroux, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Gignac une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que :
- les premiers juges ont retenu à juste titre qu'ils justifiaient d'une qualité et d'un intérêt pour agir contre le permis de construire accordé le 22 novembre 2018 ;
- les premiers juges ont estimé à bon droit que le projet de construction en litige méconnaissait l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac s'agissant du raccordement du projet au réseau public de distribution d'eau potable ;
- leur demande de première instance n'était pas tardive dans la mesure où leur recours gracieux avait régulièrement prorogé le délai de recours contentieux ;
- le permis de construire a été signé par une autorité incompétente ;
- le permis de construire méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme compte tenu des nuisances du projet pour les riverains, de sa proximité avec une zone inondable et des risques liés à l'augmentation de la circulation des camions poids-lourds ;
- le permis méconnaît également, au regard de ces derniers risques, l'article 4AUa 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Gignac, ainsi que les prescriptions du service départemental d'incendie et de secours auxquelles renvoie cet article ;
- le permis méconnaît l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme ;
- le dossier de demande de permis ne satisfait pas aux exigences des articles R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme, ainsi que de l'article R. 431-30 du même code ;
- le projet ne respecte pas l'article 4AUa 1 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors qu'il prévoit la réalisation d'un dépôt de matériaux ; à supposer que ce moyen ne soit pas retenu, le projet méconnaît alors l'article 4AUa 13 du même règlement ;
- le projet n'est pas conforme aux prescriptions de l'article 4AUa 4 du même règlement s'agissant de l'eau potable, des eaux pluviales et des ordures ménagères.
Par une ordonnance en date du 10 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 juin 2023.
II - Par une requête et des mémoires, enregistrés les 29 novembre 2021, 7 avril 2023 et 5 mai 2023 sous le n° 21MA04590 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis sous le n° 21TL04590 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la société par actions simplifiée Lafargeholcim Bétons, nommée désormais Lafarge Bétons, représentée par la SELARL Atmos Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement avant dire droit du 15 avril 2021 et, par voie de conséquence, le jugement mettant fin à l'instance du 30 septembre 2021 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de Montpellier ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme C... une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les jugements attaqués sont irréguliers au regard de l'article R. 741-7 du code de justice administrative dès lors que les minutes ne sont pas signées ;
- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en reconnaissant la qualité et l'intérêt pour agir de M. et Mme C... ;
- ils ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en estimant que le permis méconnaissait l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac s'agissant du raccordement au réseau public de distribution d'eau potable ;
- à supposer que la cour estime fondé le moyen accueilli par les premiers juges, le vice relevé aura été régularisé par la modification n° 1 du plan local d'urbanisme intervenue le 31 janvier 2023 et la cour pourra le constater sans avoir à surseoir à statuer ;
- les autres moyens invoqués par les demandeurs devant le tribunal administratif de Montpellier à l'encontre du permis de construire en cause ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 et 26 avril 2023, M. et Mme D... C..., représentés par Me Perroux, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Gignac une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que :
- les minutes des jugements telles que notifiées aux parties comportent les signatures prescrites par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- les premiers juges ont retenu à juste titre qu'ils justifiaient d'une qualité et d'un intérêt pour agir contre le permis de construire accordé le 22 novembre 2018 ;
- les premiers juges ont estimé à bon droit que le projet de construction en litige méconnaissait l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac s'agissant du raccordement du projet au réseau public de distribution d'eau potable ;
- leur demande de première instance n'était pas tardive dans la mesure où leur recours gracieux avait régulièrement prorogé le délai de recours contentieux ;
- le permis de construire a été signé par une autorité incompétente ;
- le permis de construire méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme compte tenu des nuisances du projet pour les riverains, de sa proximité avec une zone inondable et des risques liés à l'augmentation de la circulation des camions poids-lourds ;
- le permis méconnaît également, au regard de ces derniers risques, l'article 4AUa 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Gignac, ainsi que les prescriptions du service départemental d'incendie et de secours auxquelles renvoie cet article ;
- le permis méconnaît l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme ;
- le dossier de demande de permis ne satisfait pas aux exigences des articles R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme, ainsi que de l'article R. 431-30 du même code ;
- le projet ne respecte pas l'article 4AUa 1 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors qu'il prévoit la réalisation d'un dépôt de matériaux ; à supposer que ce moyen ne soit pas retenu, le projet méconnaît alors l'article 4AUa 13 du même règlement ;
- le projet n'est pas conforme aux prescriptions de l'article 4AUa 4 du même règlement s'agissant de l'eau potable, des eaux pluviales et des ordures ménagères.
Par un mémoire en observations, enregistré le 10 mai 2023, la commune de Gignac, représentée par Me Pilone, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 30 septembre 2021 en ce qu'il a annulé le permis de construire accordé le 22 novembre 2018 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de Montpellier ;
3°) à titre subsidiaire, de prononcer un sursis à statuer pendant un délai de trois mois pour permettre la régularisation du permis ;
4°) de mettre à la charge de M. et Mme C... une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif de Montpellier a commis une irrégularité en reconnaissant l'intérêt pour agir de M. et Mme C... contre le permis de construire ;
- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en estimant que le permis litigieux méconnaissait l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac s'agissant du raccordement au réseau public de distribution d'eau potable ;
- la demande de première instance était irrecevable pour avoir été introduite après l'expiration du délai de recours ouvert à l'encontre du permis de construire ;
- les autres moyens invoqués par les demandeurs devant le tribunal administratif de Montpellier à l'encontre du permis de construire contesté ne sont pas fondés ;
- à supposer que la cour estime fondé le moyen accueilli par les premiers juges, un sursis à statuer devra être prononcé pour permettre la régularisation de ce vice au regard de la modification n° 1 du plan local d'urbanisme intervenue le 31 janvier 2023.
Par une ordonnance en date du 10 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 juin 2023.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de l'environnement ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,
- les observations de Me Crottet, représentant la société requérante.
Considérant ce qui suit :
1. La société Larfargeholcim Bétons a présenté, le 12 juillet 2018, une demande de permis de construire en vue de l'implantation d'une centrale à béton comprenant un malaxeur de 2 mètres cubes ainsi que trois bâtiments modulaires à usage de bureaux, sur la parcelle cadastrée section BZ n° 5, située au lieu-dit Jourmac, sur le territoire de la commune de Gignac (Hérault). Par un arrêté du 22 novembre 2018, le maire de cette commune lui a accordé le permis ainsi sollicité. M. et Mme C... ont introduit, le 15 février 2019, un recours gracieux contre ce permis de construire, lequel a été rejeté par le maire par une décision du 16 avril suivant. Les intéressés ont demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2018 et de la décision du 16 avril 2019. Par un jugement avant dire droit rendu le 15 avril 2021, le tribunal administratif a sursis à statuer sur cette demande pendant un délai de trois mois pour permettre la régularisation du vice tiré de la méconnaissance, par le permis en litige, de l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Gignac s'agissant du raccordement de l'opération au réseau public de distribution d'eau potable. Par un jugement mettant fin à l'instance rendu le 30 septembre 2021, le même tribunal a prononcé l'annulation du permis de construire. Par sa requête n° 21TL04515, la commune de Gignac interjette appel du jugement du 30 septembre 2021. Par sa requête n° 21TL04590, la société Lafargeholcim Bétons, nommée désormais Lafarge Bétons, relève appel des deux jugements susmentionnés. Ces deux requêtes étant dirigées contre les jugements rendus dans le cadre de la même instance, il y a lieu pour la cour de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité des jugements attaqués :
2. L'article R. 741-7 du code de justice administrative mentionne que : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ". En l'espèce, il ressort des pièces des dossiers que les copies des minutes des jugements, telles que notifiées aux parties, sont revêtues des signatures exigées par cet article. Le moyen soulevé par la société appelante en ce sens ne peut donc qu'être écarté comme manquant en fait.
3. La commune de Gignac soutient que les jugements attaqués sont irréguliers en ce que le tribunal administratif de Montpellier aurait considéré à tort que M. et Mme C... justifiaient d'un intérêt suffisant pour agir contre le permis de construire accordé à la société Lafargeholcim Bétons le 22 novembre 2018. Le moyen ainsi soulevé se rapporte toutefois au bien-fondé des jugements en cause. Il est dès lors sans incidence sur leur régularité.
Sur le bien-fondé des jugements attaqués :
4. La commune et la société appelantes soutiennent que le tribunal administratif de Montpellier a commis des erreurs de droit et des erreurs d'appréciation en écartant leurs fins de non-recevoir tirées de l'absence de qualité et d'intérêt pour agir de M. et Mme C... et en accueillant le moyen tiré de la méconnaissance, par le permis en litige, de l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac. Les moyens ainsi invoqués par les appelantes relèvent cependant du contrôle du juge de cassation et non de celui du juge d'appel, auquel il appartient seulement de statuer, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, sur les mérites de la demande en annulation présentée par M. et Mme C... contre ledit permis.
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :
5. En premier lieu, l'article R. 600-4 du code de l'urbanisme dispose que : " Les requêtes dirigées contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées du titre de propriété, de la promesse de vente, du bail, du contrat préliminaire mentionné à l' article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation , du contrat de bail, ou de tout autre acte de nature à établir le caractère régulier de l'occupation ou de la détention de son bien par le requérant. ".
6. M. et Mme C... ont produit à l'appui de leurs écritures une attestation notariale établie le 6 décembre 1994 justifiant de l'acquisition d'un domaine d'une superficie de près de 17 hectares, situé au lieu-dit Jourmac sur le territoire de la commune de Gignac et incluant notamment une maison d'habitation et ses dépendances. Les intéressés ont également versé au dossier un extrait du cadastre actualisé permettant d'identifier la propriété concernée malgré les changements de numéros de parcelles intervenus depuis cette acquisition. Ils ont ainsi satisfait aux exigences de l'article R. 600-4 du code de l'urbanisme et la fin de non-recevoir soulevée par la société pétitionnaire sur ce point doit en conséquence être écartée.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".
8. Il ressort des pièces du dossier que la propriété de M. et Mme C... n'est séparée de la parcelle BZ n° 5 constituant le terrain d'assiette du projet que par un chemin rural servant d'accès commun à cette propriété et à cette parcelle. S'il est vrai que l'habitation des intimés se situe à plus de 200 mètres de la zone d'emprise du projet dont elle se trouve séparée par un plan d'eau et une végétation importante, ce qui sera de nature à atténuer les nuisances visuelles et sonores ainsi que les impacts des émissions de poussière sur cette habitation, la réalisation de l'opération entraînera, par rapport à la situation existante, une augmentation de la circulation de camions poids-lourds sur le chemin rural bordant la propriété. Il en résulte que le projet contesté est de nature à affecter de manière suffisamment directe les conditions de jouissance des biens de M. et Mme C..., lesquels justifient par conséquent d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre le permis de construire du 22 novembre 2018.
9. En troisième lieu, l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme mentionne que : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court, à l'égard des tiers, à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. ".
10. Les appelantes ne précisent pas à quelle date la société pétitionnaire a procédé à l'affichage du permis de construire sur le terrain d'assiette du projet et ne contestent notamment pas les indications contenues dans les attestations de voisins produites par les intimés, selon lesquelles le panneau règlementaire a été implanté sur le site le 22 janvier 2019 au plus tôt. Le recours gracieux daté du 15 février 2019, reçu par la commune le 18 février suivant, a ainsi été introduit dans le délai de deux mois prévu par l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme et a eu par suite pour effet de proroger le délai de recours contentieux, lequel n'était pas expiré lors de l'enregistrement de la demande de première instance le 14 juin 2019. Il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par la commune sur ce point ne peut qu'être également écartée.
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :
11. Selon l'article L. 151-39 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut fixer les conditions de desserte par les voies et réseaux des terrains susceptibles de recevoir des constructions ou de faire l'objet d'aménagements. ". Selon l'article R. 151-49 du même code : " Afin de satisfaire aux objectifs, mentionnés à l'article L. 101-2, de salubrité, d'amélioration des performances énergétiques (...), le règlement peut fixer : / 1° Les conditions de desserte des terrains mentionnés à l'article L. 151-39 par les réseaux publics d'eau, d'énergie et notamment d'électricité et d'assainissement (...) ; / (...) ". En l'espèce, aux termes de l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Gignac, tel qu'il était applicable, à la date du permis de construire en litige, dans la zone à urbaniser 4AUa au sein de laquelle est situé le terrain d'assiette du projet : " Desserte par les réseaux : / 1 - Eau potable : / Toute construction ou installation nouvelle doit être raccordée par des canalisations souterraines au réseau public de distribution d'eau potable de caractéristiques adaptées et alimentée en quantité suffisante par une ressource conforme à la réglementation en vigueur. / (...) ".
12. D'une part, les auteurs du plan local d'urbanisme de Gignac ont pu légalement imposer, sur le fondement des dispositions précitées du code de l'urbanisme, le raccordement de toute construction ou installation nouvelle au réseau public de distribution d'eau potable dans la zone à urbaniser 4AUa identifiée sur le secteur de Jourmac, au sein de laquelle l'urbanisation n'est au demeurant prévue, selon le préambule du règlement de la zone, qu'au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à ladite zone. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article 4AUa 4 du règlement que les auteurs du plan local d'urbanisme n'ont prévu aucune possibilité de dérogation à l'obligation de raccordement au réseau public de distribution d'eau potable, y compris pour les installations industrielles susceptibles d'être implantées au sein du secteur de Jourmac. En conséquence, la société Lafarge Bétons n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de raccordement ainsi instituée ne serait pas opposable au projet en litige.
13. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice de présentation du projet, de l'avis émis par le service des eaux de la communauté de communes de la Vallée de l'Hérault le 7 novembre 2018 et de l'attestation établie par la société pétitionnaire le 19 mars 2021, que les installations projetées ne seront pas raccordées au réseau public de distribution d'eau potable, lequel est d'ailleurs inexistant à proximité du site d'implantation, mais que l'alimentation de ces installations en eau potable est prévue à partir d'un système de captage privé existant via une station de traitement. Dans ces conditions et compte tenu de ce qui a été mentionné au point précédent, le tribunal administratif de Montpellier a pu retenir à bon droit que le permis contesté n'était pas conforme aux prescriptions alors en vigueur de l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme s'agissant des modalités de desserte des installations en eau potable.
14. Selon l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".
15. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance du permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis de construire modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Il peut, de même, être régularisé par un permis de construire modificatif si la règle relative à l'utilisation du sol qui était méconnue par le permis initial a été entretemps modifiée. En revanche, la seule circonstance que le vice dont est affectée l'autorisation initiale résulte de la méconnaissance d'une règle d'urbanisme qui n'est plus applicable à la date à laquelle le juge se prononce est insusceptible d'entraîner, par elle-même, une telle régularisation.
16. Il ressort des pièces du dossier que, par une délibération adoptée le 31 janvier 2023, le conseil municipal de Gignac a approuvé la modification n° 1 du plan local d'urbanisme et notamment le nouvel article 4AU 4 du règlement, lequel est applicable au terrain d'assiette du projet en lieu et place de l'ancien article 4AUa 4 et mentionne désormais : " Desserte par les réseaux : / 1 - Eau potable et eau brute : / Les constructions ou installations nouvelles doivent être raccordées par des canalisations souterraines au réseau public de distribution d'eau potable de caractéristiques adaptées et alimentées en quantité suffisante par une ressource conforme à la réglementation en vigueur. / Par exception à ce principe, les nouvelles installations à vocation industrielle, artisanale, commerciale ou de bureaux prévues pour être implantées dans le secteur de Jourmac ne sont soumises à l'obligation de raccordement au réseau public de distribution d'eau potable que si cela est nécessaire à leurs activités. ".
17. Il ressort de la notice de présentation du projet que les installations industrielles projetées par la société Lafarge Bétons au sein du secteur de Jourmac seront alimentées en eau pour partie par le système de captage privé existant et pour partie par recyclage de l'eau issue du nettoyage du matériel, sans qu'un approvisionnement en eau potable ne soit nécessaire pour ces installations. Il ressort par ailleurs de l'attestation du 19 mars 2021 évoquée au point 13 du présent arrêt et il n'est au demeurant pas contesté que la société appelante pourra desservir les locaux sociaux en eau potable au moyen du système de captage et de la station de traitement mentionnés au même point 13. Il s'ensuit que le projet ne nécessite pas un raccordement au réseau public de distribution d'eau potable et qu'il entre donc dans le champ d'application de l'exception désormais prévue par l'article 4AU 4 du règlement du plan local d'urbanisme, permettant de l'exonérer de l'exigence de raccordement à ce réseau. L'illégalité entachant ainsi le permis de construire initial est dès lors susceptible d'être régularisée par l'octroi d'un permis modificatif sur le fondement des règles d'urbanisme adoptées le 31 janvier 2023.
18. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme C..., tant en première instance qu'en appel, au soutien de leur demande d'annulation du permis litigieux.
En ce qui concerne les autres moyens invoqués par M. et Mme C... :
19. En premier lieu, selon l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir (...) est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu (...). ". Et aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints, à des membres du conseil municipal (...). ".
20. L'arrêté en litige a été signé, au nom du maire de Gignac, par M. B... A..., premier adjoint, lequel disposait d'une délégation de signature consentie par le maire et couvrant notamment l'urbanisme en vertu d'un arrêté du 2 avril 2014, transmis aux services du préfet de l'Hérault le lendemain et régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la commune. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté doit être écarté.
21. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / (...) / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ". Selon l'article R. 431-9 de ce code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. / (...) / Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder. (...) ".
22. Il ressort des pièces produites par la société pétitionnaire à l'appui de sa demande de permis de construire, notamment du plan cadastral, de la photographie aérienne et du plan de masse, que la parcelle BZ n° 5 constituant le terrain d'assiette du projet est directement desservie par le chemin rural de Jourmac, lequel est ouvert à la circulation publique et donne déjà accès à plusieurs constructions ainsi qu'aux installations d'une carrière en cours d'exploitation sur les parcelles BZ nos 5 et 6. Il ressort par ailleurs de la notice de présentation et du plan de masse que la société appelante a prévu de réaménager un autre accès existant sur le chemin de Journac pour permettre de rejoindre la zone d'implantation du projet à travers la parcelle BZ n° 6, par une voie portée à 8 mètres de large. Le plan de masse joint à la demande de permis permet de visualiser l'emplacement et les caractéristiques de cette voie réaménagée passant sur la parcelle BZ n° 6. Le service instructeur a ainsi pu apprécier en toute connaissance de cause l'organisation et l'aménagement des accès au terrain et aux constructions. Dès lors, le dossier de demande de permis satisfait aux exigences des articles R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme.
23. En troisième lieu, selon l'article R. 431-30 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur un établissement recevant du public, la demande est accompagnée des dossiers suivants, fournis en trois exemplaires : / a) Un dossier permettant de vérifier la conformité du projet avec les règles d'accessibilité aux personnes handicapées, comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 111-19-18 et R. 111-19-19 du code de la construction et de l'habitation ; / b) Un dossier permettant de vérifier la conformité du projet avec les règles de sécurité, comprenant les pièces mentionnées à l'article R. 123-22 du même code. ". Selon l'article R. 123-2 du code de la construction et de l'habitation : " Pour l'application du présent chapitre, constituent des établissements recevant du public tous bâtiments, locaux et enceintes dans lesquels des personnes sont admises, soit librement, soit moyennant une rétribution ou une participation quelconque, ou dans lesquels sont tenues des réunions ouvertes à tout venant ou sur invitation, payantes ou non. / Sont considérées comme faisant partie du public toutes les personnes admises dans l'établissement à quelque titre que ce soit en plus du personnel. ".
24. La notice de présentation produite à l'appui de la demande de permis de construire indique que l'ensemble de la production issue de la centrale à béton projetée sera utilisée hors du site et que l'opération n'entre donc pas dans le cadre de la législation relative aux établissements recevant du public. La même notice précise que le local identifié avec la mention " commercial " sur le " plan de distribution " de l'un des bâtiments modulaires constitue le " bureau privé " du salarié de la société pétitionnaire en charge de la fonction commerciale et les intimés n'apportent pas le moindre élément de nature à laisser présumer que les installations litigieuses auraient vocation à accueillir du public. Par suite, le projet n'était pas soumis aux exigences de l'article R. 431-30 du code de l'urbanisme et le moyen soulevé en ce sens doit donc être écarté.
25. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé où n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Il appartient à l'autorité administrative et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire ou l'édiction de prescriptions spéciales, de tenir compte de la probabilité de réalisation de ces risques ainsi que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.
26. Selon l'article 4AUa 3 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac alors en vigueur : " Accès et voirie : / Les accès et les voiries devront respecter les prescriptions du service départemental d'incendie et de secours figurant en annexe du présent règlement. / 1 - Accès : / (...) / Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation. / 2 - Voirie : / Les dimensions, formes et caractéristiques techniques des voies doivent être adaptées aux usages qu'elles supportent ou aux opérations qu'elles doivent desservir. / (...) ". En outre, selon les prescriptions techniques générales du service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault, annexées au règlement du plan local d'urbanisme de Gignac : " I - Accessibilité : / Règles générales : / 1.1 - En application des dispositions et de la règlementation spécifique attachée aux constructions selon leur destination ou leur distribution intérieure, celles-ci doivent être desservies par une voie répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé. / (...) / D - Si la nouvelle voie dessert (...) une installation classée pour la protection de l'environnement (...), cette voie devra respecter les caractéristiques minimales de la " voie-engins " ou de la " voie-échelles " telles que définies par l'article CO2 de l'arrêté ministériel du 25/06/1980 modifié. / 1.2 - " Voie-engins " : / (...) / - largeur minimale de la voie : 8 mètres. / (...) / 1.9 - " Chemins " : Quand il est nécessaire de réaliser des chemins (privés ou non) reliant les voiries aux bâtiments ou plusieurs bâtiments entre eux dans une même enceinte et lorsque ces chemins doivent être nécessairement utilisés par les services de secours, ceux-ci doivent répondre aux caractéristiques figurant ci-après : / (...) / ICPE : / longueur : = 100 mètres. / (...) ".
27. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point 22 du présent arrêt, le terrain d'assiette du projet est desservi par le chemin rural de Jourmac, lequel est ouvert à la circulation publique et permet déjà d'accéder à plusieurs constructions ainsi qu'aux installations d'une carrière. En se bornant à produire des photographies non cotées, les intimés ne démontrent pas que ce chemin rectiligne présenterait un caractère dangereux ou inadapté à la circulation des camions. Ils n'établissent pas davantage, en tout état de cause, qu'un aménagement particulier serait rendu nécessaire par le projet au débouché du chemin de Jourmac sur la route départementale n° 32. Par ailleurs et comme il a été également indiqué au point 22, la société pétitionnaire a prévu de réaménager un accès existant pour desservir le site à travers la parcelle voisine, par une voie dont la largeur sera portée à 8 mètres, répondant ainsi aux caractéristiques d'une " voie-engins " au sens des prescriptions précitées du service départemental d'incendie et de secours auxquelles renvoie le règlement du plan local d'urbanisme. Les intimés ne peuvent enfin utilement invoquer les prescriptions de ce même service relatives aux " chemins ", dès lors que les installations en litige seront regroupées au sein d'une vaste aire de circulation directement accessible depuis la " voie-engins ". Par conséquent, le permis de construire du 22 novembre 2018 ne méconnaît pas l'article 4AUa 3 précité du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac. Pour les mêmes raisons, il n'est pas non plus entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme s'agissant de la sécurité des accès et de la voirie.
28. D'autre part, si le plan de prévention des risques naturels d'inondation applicable sur le territoire de la commune de Gignac identifie une zone d'aléa fort sur la partie nord du secteur de Jourmac, il ressort de la carte des aléas et il n'est au demeurant pas contesté que la parcelle BZ n° 5 constituant le terrain d'assiette du projet litigieux n'est en elle-même impactée par aucun aléa au titre de ce plan de prévention des risques. En outre, si le règlement du plan local d'urbanisme identifie également d'autres zones inondables correspondant aux " trous des anciennes carrières " au sein de la zone 4AUa, il ressort du plan de masse de l'opération que la société pétitionnaire n'a prévu aucune construction ou installation dans la partie nord de la parcelle BZ n° 5 impactée par cette contrainte, à l'exception d'un bassin d'eau claire, lequel est insusceptible d'aggraver par lui-même les conséquences d'une inondation. Dans ces conditions, le maire de Gignac n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme s'agissant de la prévention du risque d'inondation.
29. Enfin, s'il est vrai que l'activité de la centrale à béton est de nature à engendrer des nuisances sonores et des émissions de poussières, non seulement le secteur ne compte qu'un nombre limité de maisons d'habitation dont les plus proches se situent à plus de 200 mètres de l'emplacement des installations projetées, mais le règlement du plan local d'urbanisme interdit l'implantation de nouvelles habitations dans un rayon encore plus large. Par ailleurs, la société pétitionnaire a conçu son projet de telle sorte que le processus de transformation des matériaux se déroule intégralement à l'intérieur du bardage métallique du bâtiment industriel, ce qui permettra de réduire les nuisances liées à l'activité. Par suite, le permis de construire contesté ne procède pas d'une appréciation manifestement erronée au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme s'agissant de la préservation de la salubrité publique.
30. En cinquième lieu, selon l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé où n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est susceptible, en raison de sa localisation, d'être exposé à des nuisances graves, dues notamment au bruit. ". Aux termes de l'article R. 111-1 de ce code : " Les dispositions des articles R. 111-3, R. 111-5 à R. 111-19 et R. 111-28 à R. 111-30 ne sont pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu. ".
31. Le territoire de la commune de Gignac étant couvert par un plan local d'urbanisme, les intimés ne peuvent utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme à l'encontre du permis de construire en litige.
32. En sixième lieu, selon l'article 4AUa 1 du règlement du plan local d'urbanisme : " Occupations ou utilisations du sol interdites : / Sont interdits : / (...) / - le dépôt extérieur de véhicules, matériel ou matériaux, / (...) ". Aux termes de l'article 4AUa 13 de ce règlement : " Espaces libres et plantations : / (...) / Des haies vives destinées à masquer les divers dépôts et installations doivent être créées à des emplacements judicieusement choisis. ".
33. Il ressort des plans annexés à la demande de permis de construire que la société Lafarge Bétons envisage l'aménagement d'une zone de réception et de stockage de granulats à l'angle est de la zone d'emprise du projet. Les cinq cases prévues à cet effet, bordées par des murets de 2 mètres de hauteur et non pourvues de couvertures, ne sont destinées qu'à stocker provisoirement les matériaux indispensables à la production du béton avant leur utilisation dans les installations industrielles autorisées. De tels éléments de construction ne sauraient être regardés comme constituant des dépôts extérieurs de matériaux au sens et pour l'application de l'article 4AUa 1 précité du règlement du plan local d'urbanisme. De plus, il ressort des mêmes plans que, contrairement à ce que soutiennent les intimés, la société appelante a prévu la mise en place de haies vives sur le pourtour de l'emprise du projet, lesquelles contribueront à masquer les cases susmentionnées, en particulier depuis le chemin de Jourmac. Par voie de conséquence, les moyens tirés de la méconnaissance des deux articles précités doivent être écartés.
34. En septième lieu, selon l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à l'arrêté en litige : " Desserte par les réseaux : / (...) / 3 - Assainissement - eaux pluviales : / (...) / En l'absence de réseau d'eaux pluviales, le constructeur doit réaliser sur son terrain et à sa charge des dispositifs appropriés et proportionnés permettant l'évacuation directe et sans stagnation des eaux pluviales vers un déversoir prévu à cet effet. Ces aménagements ne doivent pas faire obstacle au libre écoulement des eaux de ruissellement conformément aux dispositions du code civil. Les rejets devront être conformes à la législation de la loi sur l'eau. / (...) / 5 - Ordures ménagères : / La collecte des ordures ménagères doit pouvoir être assurée suivant les prescriptions définies par le service de la collectivité compétente. ".
35. D'une part, la notice de présentation du projet mentionne que les eaux pluviales du site seront recueillies dans un bassin d'orage avant d'être pompées et réinjectées dans le cycle de production du béton. Elle ajoute qu'en cas d'impossibilité de réutilisation pour la production, en particulier en cas de précipitations importantes, les eaux pluviales ne seront rejetées qu'après un passage par un séparateur à hydrocarbures. Les intimés n'avancent aucun argument précis de nature à établir l'irrégularité des modalités de gestion ainsi prévues au regard des prescriptions précitées. D'autre part, la même notice indique que les déchets de bureaux seront enlevés par une société de nettoyage spécialisée, si bien que le projet ne nécessitera pas l'intervention du service public de collecte des ordures ménagères, ce que confirme d'ailleurs la déclaration déposée par la société appelante au titre de la législation relative aux installations classées. Il s'ensuit que l'opération litigieuse n'est soumise à aucune prescription particulière à ce titre et que le permis ne méconnaît donc pas les dispositions règlementaires énoncées au point précédent.
36. Il résulte de tout ce qui précède que seul est fondé le moyen, retenu au point 13 du présent arrêt, tiré de ce que le permis de construire en litige méconnaissait l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme de Gignac alors en vigueur s'agissant du raccordement du projet au réseau public de distribution d'eau potable. Le vice entachant ainsi le permis initial est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif sur le fondement des règles issues de la modification n° 1 du plan local d'urbanisme adoptée le 31 janvier 2023. Par suite, il y a lieu de surseoir à statuer sur les requêtes présentées par la commune de Gignac et la société Lafarge Bétons, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, pendant un délai de quatre mois suivant la notification du présent arrêt, pour permettre une telle régularisation.
D E C I D E :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur les requêtes de la commune de Gignac et de la société Lafarge Bétons, pendant un délai de quatre mois suivant la notification du présent arrêt, pour permettre la régularisation de l'illégalité entachant le permis de construire en litige, tenant à la méconnaissance de l'article 4AUa 4 du règlement du plan local d'urbanisme alors en vigueur, s'agissant du raccordement au réseau public de distribution d'eau potable.
Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt avant dire droit sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Gignac, à la société par actions simplifiée Lafarge Bétons et à M. et Mme D... C....
Délibéré après l'audience du 13 juin 2024, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2024.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
J.F. Moutte
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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Nos 21TL04515, 21TL04590