La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2024 | FRANCE | N°23TL00955

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 25 juin 2024, 23TL00955


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2022 par lequel le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 2202590 du 23 novembre 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée au greffe le 22 a

vril 2023, et des pièces complémentaires produites le 1er mai 2023, et les 27 mars, 27 mai et 29 mai 2024, ces d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2022 par lequel le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 2202590 du 23 novembre 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée au greffe le 22 avril 2023, et des pièces complémentaires produites le 1er mai 2023, et les 27 mars, 27 mai et 29 mai 2024, ces dernières n'ayant pas été communiquées, M. A..., représenté par Me Braccini, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 novembre 2022 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 juin 2022 par lequel le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour de dix ans ou à titre subsidiaire une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ou " salarié ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, et, subsidiairement, dans le même délai et sous la même astreinte, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- cette décision est entachée d'une erreur de droit ; en effet, le préfet ne pouvait au regard de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 lui opposer l'absence de présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, dès lors qu'il était lui-même compétent pour viser le contrat de travail qu'il avait présenté à l'appui de sa demande de titre de séjour en qualité de salarié ;

- par ailleurs, la production d'un visa de long séjour ou d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes n'est pas requise lorsqu'est présentée une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il ne pouvait être exigé de sa part la détention d'une autorisation de travail dès lors que le titre de séjour " vie privée et familiale " qu'il détenait depuis plus de cinq ans l'autorisait à travailler ;

- le préfet de Vaucluse devait lui appliquer le second alinéa de l'article 3 de l'accord franco-marocain et lui délivrer une carte de résident de dix ans ;

- en lui refusant le séjour sans examiner sa demande au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a méconnu son pouvoir de régularisation ; il remplit les conditions de régularisation posées par cet article ;

- en ce qui concerne l'application de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la rupture de la vie commune en février 2022 avec son épouse, dont il n'est pas divorcé, n'a eu pour cause que l'internement de cette dernière en hôpital psychiatrique ; la communauté de vie entre les époux ayant duré plus de cinq ans, il aurait dû se voir délivrer une carte de résident sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans que lui soit opposable la rupture de la vie commune ;

- le refus de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et de libertés fondamentales ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- cette décision est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;

- le préfet s'est estimé à tort lié par la décision de refus de séjour en prenant la décision d'obligation de quitter le territoire et a méconnu son pouvoir d'appréciation qu'il devait exercer en vertu de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'illégalité au regard de l'article L. 611-3 du code dès lors que la communauté de vie entre les époux a duré presque six ans ;

- elle se trouve entachée d'illégalité au regard de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et de libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité qu'elle emporte sur sa situation personnelle et professionnelle.

Par une décision du 22 mars 2023, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Toulouse a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

-le code du travail ;

- le code de justice administrative

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Bentolila a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 22 août 1990 et de nationalité marocaine, après son mariage le 22 mars 2016 au Maroc avec une ressortissante française, est entré sur le territoire français le 5 août 2016 sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité de conjoint de Français valable du 29 juillet 2016 au 29 juillet 2017. À l'expiration de celui-ci, M. A... a obtenu un titre de séjour pluriannuel de deux ans, valable jusqu'au 24 janvier 2021, toujours en qualité de conjoint de Français. Il a sollicité, le 20 janvier 2022, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 23 juin 2022, le préfet de Vaucluse a rejeté cette demande, et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

2. M. A... relève appel du jugement du 23 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande dirigée contre ces deux décisions.

Sur le bien-fondé du jugement et de l'arrêté attaqué :

Sur les moyens communs aux décisions en litige :

S'agissant de la légalité externe :

3. La décision de refus de séjour mentionne les dispositions dont le préfet a entendu faire application, les conditions d'entrée de M. A... en France, les différents titres de séjour qui lui ont été accordés jusqu'à la date du 24 janvier 2021, les raisons du refus de délivrance d'un nouveau titre de séjour tenant à l'absence de communauté de vie avec son épouse de nationalité française, le fait qu'en l'absence d'autorisation de travail l'intéressé ne pouvait se prévaloir des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 et les circonstances selon lesquelles, d'une part, il ne justifierait pas de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires justifiant son admission exceptionnelle au séjour et, d'autre part, il ne serait pas porté une atteinte disproportionnée à sa situation privée et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il s'évince de ce qui vient d'être exposé que le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté. Par voie de conséquence, dès lors que l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas où elle fait notamment suite à un refus de délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire, doit être également écarté.

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

S'agissant de la légalité interne :

4. En premier lieu, en vertu l'article 3 de l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable portant la mention " salarié " éventuellement assorties de restrictions géographiques ou professionnelles. / Après trois ans de séjour en continu en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent pourront obtenir un titre de séjour de dix ans (...) ". L'article 9 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". Selon l'article L. 5221-5 du même code : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2. (...) ". En vertu de l'article R. 5221-14 de ce code : " Peut faire l'objet de la demande prévue à l'article R. 5221-1 [c'est-à-dire de la demande d'autorisation de travail] l'étranger résidant hors du territoire national ou l'étranger résidant en France et titulaire d'un titre de séjour prévu à l'article R. 5221-3 ".

5. L'accord franco-marocain renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord. Les stipulations de l'article 3 de cet accord ne traitent que de la délivrance d'un titre de séjour pour exercer une activité salariée et cet accord ne comporte aucune stipulation relative aux conditions d'entrée sur le territoire français des ressortissants marocains. Les dispositions précitées de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui subordonnent de manière générale la délivrance de toute carte de séjour à la production par l'étranger d'un visa de long séjour, ne sont pas incompatibles avec les stipulations de cet accord. Il s'évince par ailleurs des dispositions combinées précitées du code du travail que seuls les étrangers autorisés à séjourner en France en une autre qualité que celle de salarié peuvent solliciter un changement de statut vers le statut de salarié, le préfet devant instruire la demande de titre de séjour notamment en la transmettant à la direction du travail. Dans l'hypothèse, d'un étranger qui comme en l'espèce se trouve en situation irrégulière à défaut de renouvellement de son titre de séjour obtenu sous un autre statut, le préfet peut rejeter la demande de titre de séjour en qualité de salarié au motif de l'absence de présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes comme l'exige l'article 3 précité de l'accord franco-marocain.

6. En conséquence, dès lors que M. A... se trouvait en situation irrégulière depuis le 24 janvier 2021, date de l'échéance du titre de séjour dont il bénéficiait en qualité de conjoint de Français, lorsqu'il a présenté le 20 janvier 2022 sa demande de titre de séjour en qualité de salarié, il était soumis, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la détention d'un visa de long séjour, et le préfet a pu dès lors à bon droit lui refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié au motif qu'il ne justifiait pas, contrairement à ce que lui imposaient les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain, la détention d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

8. Il ne ressort des pièces du dossier ni que le préfet aurait méconnu son pouvoir de régularisation au regard de ces dispositions, ni que la situation de M. A..., en dépit des circonstances invoquées, tenant à une ancienneté de séjour en France de plus de six ans à la date de la décision attaquée, à la présence en France de sa tante et d'amis et à son insertion professionnelle, suffirait pour considérer qu'il relevait de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires qui justifiaient son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale.

9. En troisième lieu aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; 3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". Aux termes de l'article L. 423-3 du même code : " Lorsque la rupture du lien conjugal ou la rupture de la vie commune est constatée au cours de la durée de validité de la carte de séjour prévue aux articles L. 423-1 ou L. 423-2, cette dernière peut être retirée. Le renouvellement de la carte est subordonné au maintien du lien conjugal et de la communauté de vie avec le conjoint qui doit avoir conservé la nationalité française ". Aux termes de l'article L.423-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant français se voit délivrer une carte de résident d'une durée de dix ans à condition qu'il séjourne régulièrement en France depuis trois ans et que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) elle peut être retirée en raison de la rupture de la vie commune dans un délai maximal de quatre année à compter de la célébration du mariage ".

10. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes mêmes de la demande de titre de séjour présentée en qualité de salarié par M. A... le 20 janvier 2022, qu'indépendamment du fait que son épouse était hospitalisée depuis le 2 février 2022, la vie commune avec celle-ci avait cessé. Par ailleurs, la circonstance selon laquelle, compte tenu d'une vie commune avec son épouse de nationalité française depuis plus de cinq ans, il aurait dû se voir délivrer une carte de résident sur le fondement des dispositions précitées de l'article L.423-6 du code, doit être écartée, faute en tout état de cause pour l'intéressé d'avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Pour l'application de ces stipulations et dispositions, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

12. M. A..., entré en France en 2016, n'a bénéficié d'un titre de séjour qu'en qualité de conjoint de Français. Lorsqu'il a sollicité, le 20 janvier 2022, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié, la communauté de vie avec son épouse avait cessé. Dans ces conditions, l'appelant, célibataire sans enfant et qui n'allègue pas l'inexistence de liens familiaux dans son pays d'origine, n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour serait entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni qu'elle porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation familiale et personnelle de l'intéressé.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

13. En premier lieu, il ne résulte ni de la décision attaquée ni des pièces du dossier, que le préfet se serait estimé lié par la décision de refus de séjour en prenant la décision d'obligation de quitter le territoire et aurait méconnu le pouvoir d'apprécier s'il y avait lieu ou non d'obliger l'intéressé à quitter le territoire français.

14. En deuxième lieu, en l'absence d'illégalité de la décision de refus de séjour, le moyen invoqué contre l'obligation de quitter le territoire par voie d'illégalité du refus de séjour, doit être écarté.

15. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 6° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; (...) ". Faute pour M. A... de justifier à la date de la décision attaquée, d'une communauté de vie avec son épouse de nationalité française, le moyen invoqué sur le fondement des dispositions précitées doit être écarté.

16. En quatrième lieu, et pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 10 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut en tout état de cause qu'être écarté.

17. En cinquième et dernier lieu, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 12, la mesure d'éloignement de M. A... n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et le préfet n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation familiale et personnelle de l'intéressé.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 23 juin 2022 du préfet de Vaucluse. Dès lors, ses conclusions en annulation doivent être rejetées et il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative combinées à celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2024 à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami , première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2024.

Le rapporteur

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23TL00955 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00955
Date de la décision : 25/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: M. Pierre Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : BRACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-25;23tl00955 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award