Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... veuve B..., M. C... B... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 10 janvier 2020 déclarant d'utilité publique le projet d'aménagement d'un parc urbain sur le site des anciennes pépinières Pichon, la cessibilité des biens nécessaires à la réalisation du projet et approuvant la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°2000919 du 8 mars 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande et rejeté les conclusions présentées par la préfète du Gard au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ainsi que celles présentées par la commune de Nîmes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 mai 2022, Mme D..., Jeanne A... veuve B..., M. C..., Boris B... et M. A..., Jean-Claude B..., représentés par la SCP SVA, agissant par Me Borkowski, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 8 mars 2022 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 10 janvier 2020 déclarant d'utilité publique le projet d'aménagement d'un parc urbain sur le site des anciennes pépinières Pichon, la cessibilité des biens nécessaires à la réalisation du projet et approuvant la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- en ce qui concerne le vice de procédure tiré de la méconnaissance des modalités de concertation préalable fixées par la commune, le tribunal a fait une mauvaise appréciation des éléments qui lui étaient soumis et n'a pas répondu au moyen tel que soulevé devant lui ; les modalités de concertation prévues par la délibération du 7 avril 2018, soit la mise en place d'un accueil spécifique à la direction de l'urbanisme de la ville où serait consultable un dossier d'information, n'ont pas été mises en œuvre ;
- en ce qui concerne le vice de procédure tiré du caractère incomplet du dossier d'enquête publique, le tribunal a mal apprécié les éléments qui lui étaient soumis ; le dossier d'enquête publique a un caractère incomplet en ce que l'estimation sommaire des dépenses contenue dans ce dossier est lacunaire et manifestement sous-évaluée ;
- en ce qui concerne le vice de procédure tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact sur le volet hydraulique, le tribunal a fait une mauvaise appréciation des éléments qui lui étaient soumis ; l'étude d'impact est lacunaire sur les aspects hydrauliques du projet ; ses insuffisances ont nui à l'information complète de la population et ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative ;
- le projet n'a pas d'utilité publique en ce que les coûts qu'il implique surpassent très largement ses éventuels avantages ;
- l'arrêté méconnaît les articles L. 132-1 et R.132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2023, la commune de Nîmes, représentée par le cabinet Earth Avocats, agissant par Me Perrineau, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge des consorts B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 février 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 132-1 et R.132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique est, à titre principal, irrecevable et, à titre subsidiaire, infondé et que les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 19 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 juillet 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,
- les observations de Me Gimenez, représentant les consorts B... et les observations de Me Boitel, représentant la commune de Nîmes.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté en date du 10 janvier 2020, le préfet du Gard a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement d'un parc urbain paysager sur le site des anciennes pépinières Pichon, la cessibilité des terrains nécessaires à la réalisation du projet et approuvé la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes. Les consorts B..., propriétaires sur le territoire de la commune de Nîmes d'une maison d'habitation sise sur la parcelle cadastrée section ... et située au ..., ont demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cet arrêté préfectoral. Par un jugement en date du 8 mars 2022, dont les consorts B... relèvent appel, ce tribunal a notamment rejeté leur demande.
Sur la régularité du jugement :
2. Les requérants soutiennent que le tribunal administratif de Nîmes n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance des modalités de concertation préalable fixées par la commune, tel qu'il a été soulevé devant lui. Cependant, les premiers juges ont écarté ce vice de procédure au point 3 du jugement contesté après avoir notamment relevé qu'un registre de participation au format papier était laissé à disposition des citoyens à l'accueil de la direction de l'urbanisme et qu'il a été clôturé en même temps que le registre numérique, et précisé que la commune de Nîmes avait d'ailleurs versé aux débats une copie du registre papier ainsi que des documents mis à la disposition du public. Ce faisant, ils ont répondu au moyen tiré de l'absence de mise en place d'un accueil spécifique à la direction de l'urbanisme de la commune avec mise à disposition d'un dossier d'information consultable par le public, tel qu'ils l'ont d'ailleurs visé et sans le dénaturer. Par suite, le moyen de régularité soulevé par les requérants doit être écarté comme manquant en fait.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article L. 103-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : " Font l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées : (...) ; 3° Les projets et opérations d'aménagement ou de construction ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie, notamment ceux susceptibles d'affecter l'environnement, au sens de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, ou l'activité économique, dont la liste est arrêtée par décret en Conseil d'Etat ; (...). ". Aux termes de l'article L. 103-3 du même code : " Les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation sont précisés par : (..) 3° L'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement public dans les autres cas. Toutefois, lorsque la concertation est rendue nécessaire en application du 2° ou du 3° de l'article L. 103-2 ou lorsqu'elle est organisée alors qu'elle n'est pas obligatoire, les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation peuvent être précisés par le président de l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement public compétent. ".
4. Par une délibération du 7 avril 2018, le conseil municipal de Nîmes a approuvé les objectifs poursuivis par le projet d'aménagement et fixé les modalités de la concertation préalable avec le public. Il a ainsi décidé, par l'article 3 de cette délibération, de la mise en place d'un accueil spécifique à la direction de l'urbanisme de la ville où serait consultable un dossier d'information sur les objectifs poursuivis pour ce projet de parc urbain public, complété par la mise à disposition d'un registre permettant de recueillir les observations, avis et suggestions. Le même article précise que le public pourra également consigner ses observations et propositions par voie de courrier électronique sur le site internet de la ville (création d'une adresse spécifique au projet de parc urbain). Bien que le bilan de la concertation préalable précise, au point 2.1, que l'information et la participation du public durant cette étape de concertation ont été assurées par l'existence d'une page internet sur le site de la ville et par la tenue de nombreuses rencontres avec les habitants nîmois, il ressort du point 2.1.4 de ce même document qu'un registre de participation au format papier a été laissé à disposition des citoyens à l'accueil de la direction de l'urbanisme et qu'il a été clôturé en même temps que le registre numérique, cet élément attestant de la mise en place d'un accueil à la direction de l'urbanisme. La commune de Nîmes a d'ailleurs versé aux débats une copie de ce registre papier mais également du document d'information mis à la disposition du public. Sur ce dernier point, les requérants ne soutiennent ni n'allèguent qu'il ne correspondrait pas au dossier d'information consultable auquel la délibération du 7 avril 2018 faisait référence. Enfin, la circonstance qu'un seul avis ait été recueilli suivant cette modalité papier, alors que soixante-trois l'ont été par voie numérique, est sans incidence sur le respect des modalités de la concertation préalable. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les modalités de concertation préalable telles que fixées par la commune auraient été méconnues.
5. Aux termes de l'article R. 112-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages, l'expropriant adresse au préfet du département où l'opération doit être réalisée, pour qu'il soit soumis à l'enquête, un dossier comprenant au moins : (...) 5° L'appréciation sommaire des dépenses. ".
6. L'appréciation sommaire des dépenses jointe au dossier d'enquête publique a pour objet de permettre à tous les intéressés de s'assurer que les travaux ou ouvrages, compte tenu de leur coût total réel, tel qu'il peut être raisonnablement estimé à l'époque de l'enquête, ont un caractère d'utilité publique. Toutefois, la seule circonstance que certaines dépenses auraient été omises n'est pas par elle-même de nature à entacher d'irrégularité la procédure si, compte tenu de leur nature, leur montant apparaît limité au regard du coût global de l'opération et ne peut être effectivement apprécié qu'au vu d'études complémentaires postérieures, rendant ainsi incertaine leur estimation au moment de l'enquête.
7. En l'espèce, les consorts B... persistent en appel à soutenir que l'estimation sommaire des dépenses jointe au dossier soumis à l'enquête publique est lacunaire en ce qu'elle omet le coût de l'acquisition du fonds de commerce du garage automobile (parcelle HE n°592) situé sur le boulevard Natoire et qui est destiné à être exproprié, ainsi que celui des indemnités d'éviction, et le coût des éventuelles mesures et aménagements de nature à limiter le risque d'inondation sur le projet. Cependant, en se bornant à soutenir que les coûts de l'acquisition du fonds de commerce du garage automobile et des indemnités d'éviction peuvent représenter des sommes importantes, à indiquer que la commune, propriétaire de la parcelle HE n° 592 sur laquelle a été édifié le garage automobile, ne fournit aucun élément établissant le coût d'achat du fonds commercial et à invoquer le coût supplémentaire des aménagements hydrauliques nécessaires qui n'a pas été arrêté par le maître d'ouvrage à la date de l'enquête, les requérants n'apportent aucun élément permettant d'évaluer les indemnités et coûts dont ils soutiennent qu'ils auraient dû être inclus dans cette appréciation et, ce faisant, ne permettent pas au juge d'apprécier les effets de cette omission sur l'information du public. En outre, s'il est constant que le commissaire enquêteur a relevé le caractère imprécis de l'évaluation ne prenant pas en compte la valeur du fonds de commerce du garage automobile et les indemnités d'éviction qui n'avaient pas pu être estimées à ce stade de la procédure, il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé le tribunal, que la parcelle sur laquelle est sis le garage automobile appartient à la commune de Nîmes, que ce garage ne recevait plus de clientèle depuis plusieurs mois, au moins depuis le début de l'année 2019 mais servait uniquement de lieu de stockage, et qu'en tout état de cause, la commune de Nîmes lui a signifié, le 5 mars 2020, son refus de renouvellement du bail, ce qui déchargera la commune de Nîmes de l'allocation d'une indemnité d'éviction ou en minimisera considérablement le montant. Enfin, la circonstance que le montant du budget prévisionnel exposé sur le site internet de la ville pour ce projet de parc urbain a été réévalué à 19 millions d'euros toutes taxes comprises en mars 2020, soit postérieurement à la réalisation de l'enquête et à l'acte attaqué, n'est pas de nature à établir une sous-évaluation manifeste de l'estimation sommaire des dépenses telle qu'arrêtée dans le dossier d'enquête publique à 14,8 millions d'euros hors taxes. Par suite, le moyen tiré du caractère incomplet du dossier d'enquête publique en raison d'une estimation sommaire des dépenses lacunaire et manifestement sous-évaluée, doit être écarté.
8. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / II. - En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : (...) 3° Une description des aspects pertinents de l'état actuel de l'environnement, dénommée "scénario de référence", et de leur évolution en cas de mise en œuvre du projet ainsi qu'un aperçu de l'évolution probable de l'environnement en l'absence de mise en œuvre du projet, dans la mesure où les changements naturels par rapport au scénario de référence peuvent être évalués moyennant un effort raisonnable sur la base des informations environnementales et des connaissances scientifiques disponibles ; 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; (...) 8° Les mesures prévues par le maître de l'ouvrage pour : - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses correspondantes, de l'exposé des effets attendus de ces mesures à l'égard des impacts du projet sur les éléments mentionnés au 5° ; 9° Le cas échéant, les modalités de suivi des mesures d'évitement, de réduction et de compensation proposées ;(...) ".
9. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
10. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la commune de Nîmes a produit, à l'appui de sa demande de déclaration d'utilité publique, un dossier " volume III- Etude d'impact sur l'environnement ", qui comprend notamment le zonage du plan de prévention du risque inondation avec l'indication de la nature des enjeux de 1'aléa inondation au sein de chacune des zones repérées, ainsi que le plan de gestion des risques inondation Rhône Méditerranée. Sont également appréhendés dans l'étude d'impact, avec une précision suffisante, les risques inondation, tant en phase travaux qu'en phase d'exploitation, et la prévention du risque inondation au sein de chacune des zones du projet. A ce titre, en indiquant, s'agissant de la phase exploitation, que l'ensemble des aménagements sera réalisé à la cote du terrain naturel ou bien de telle sorte que le bilan des déblais et remblais soit strictement nul ou négatif et que sera retenue une hauteur d'eau de 1,3 mètre, conformément au règlement du plan de prévention du risque inondation, l'étude d'impact ne comporte pas un niveau de précision insuffisant. Le dossier comporte également des parties traitant des eaux souterraines (nappes de la Vistrenque et des Costières), des eaux superficielles, de la création du bassin de rétention de la Tour de l'Evêque et des travaux en cours de réalisation dans le cadre des programmes d'action de prévention des inondations mis en œuvre sur le territoire de la commune de Nîmes, incluant le recalibrage du Vistre de la Fontaine, le remodelage du lit du cours d'eau et l'ajout des risbermes sur les rives afin d'augmenter les capacités d'écoulement du cadereau au niveau d'une crue centennale. Si les requérants soulignent en particulier l'insuffisance des mesures d'évitement et de compensation par rapport au risque inondation telles que mentionnées en page 137 du document, la circonstance que des mesures de cette séquence " éviter, réduire et compenser " soient susceptibles, en tant que de besoin, d'être précisées ou complétées ultérieurement, notamment à l'occasion de la délivrance des autorisations requises au titre des polices d'environnement, n'est pas de nature, par elle-même, à entacher l'étude d'impact d'illégalité. Pour ces motifs, l'étude d'impact ne peut être regardée comme comportant une information insuffisante s'agissant du risque inondation.
11. D'autre part, si, comme le soutiennent les consorts B..., l'étude d'impact indique que les aménagements relatifs au volet hydraulique ne sont pas traités dans le dossier mais seront traités dans des dossiers réglementaires spécifiques au regard notamment de la législation sur l'eau, ce renvoi n'emporte, en lui-même, aucune insuffisance de l'étude d'impact menée dans le cadre de la procédure d'expropriation et il ressort également des pièces du dossier que ladite étude a précisé, à titre informatif, le positionnement des ouvrages de compensation de l'imperméabilisation, même si ce dernier devait cependant encore être confirmé par une étude complémentaire sur l'emprise de la zone inondable vicennale sur le secteur.
12. Il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédents que les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'aucune étude du risque inondation n'aurait été réalisée antérieurement à l'enquête publique.
13. Enfin, ni l'avis émis par le directeur départemental des territoires et de la mer du Gard du 13 juin 2019 selon lequel " il existe un réel risque que ce qui est prévu pour ce projet dans le cadre de la DUP et du PLU puisse être remis en cause selon les problématiques hydrauliques et environnementales rencontrées pour l'élaboration de la demande d'autorisation environnementale ", ni la lettre du 12 juillet 2019 par laquelle le maire de Nîmes a précisé à l'autorité préfectorale que le calendrier prévisionnel sera amené à être modifié lors de la mise à jour de l'étude d'impact, lorsque sera demandée l'autorisation environnementale, que deux enquêtes publiques seront menées et que l'enquête menée en vertu du code de l'expropriation, du code de l'urbanisme et du code de la construction, vise à obtenir la déclaration d'utilité publique du projet, la mise en compatibilité du plan local d'urbanisme et la cessibilité des terrains concernés, aucun accord amiable n'ayant été trouvé pour la maîtrise foncière des terrains des indivisaires, tandis que la seconde enquête publique devra s'inscrire dans le cadre de la demande d'autorisation environnementale, amenant à mettre à jour et compléter l'étude d'impact sur l'environnement par de nouveaux éléments de programmation, ne sont de nature à révéler, par eux-mêmes, le caractère lacunaire ou insuffisant de l'étude d'impact dans ses aspects hydrauliques.
14. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact au regard des dispositions précitées de l'article R. 122-5 du code de l'environnement doit être écarté.
15. Il appartient au juge, lorsqu'il se prononce sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente. Il lui appartient également, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, de s'assurer, au titre du contrôle sur la nécessité de l'expropriation, que l'inclusion d'une parcelle déterminée dans le périmètre d'expropriation n'est pas sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique.
16. En l'espèce, le projet déclaré d'utilité publique a pour objet l'aménagement d'un parc urbain paysager d'une superficie d'environ 14,5 hectares, sur le site des anciennes pépinières Pichon dont l'activité a cessé depuis l'année 2000, au sud du triangle de la gare SNCF de Nîmes, dans l'axe directeur " diagonale verte ". Ce projet constitue, ainsi que l'a relevé le commissaire enquêteur, un équipement public structurant permettant de pallier l'état d'abandon du site et de répondre au problème d'insécurité pour les riverains généré par cet état. S'il est exact que la commune dispose déjà d'un ensemble de 21 parcs, jardins et squares et présente, ainsi que le soulignent les requérants, un taux d'espaces verts supérieur à la moyenne nationale, il ressort cependant du rapport du commissaire enquêteur, qui s'appuie sur le diagnostic du plan local d'urbanisme, qu'il manque un parc urbain structurant, facilement accessible et proche des lieux de vie et qu'il existe un déséquilibre de l'offre en espaces verts urbains de proximité, ceux-ci étant essentiellement concentrés dans la partie nord et ouest de la ville. Par suite, le projet, qui doit permettre de rééquilibrer cette offre, répond également à un besoin avéré dans un secteur populaire où les ensembles collectifs s'immiscent dans les quartiers pavillonnaires, ainsi que l'indique le commissaire enquêteur dans ses conclusions. Pour ces motifs, ce projet, qui reçoit d'ailleurs une adhésion majoritaire de la population ainsi qu'en témoigne le bilan de la concertation publique, répond à une finalité d'intérêt général, ce qui n'est d'ailleurs pas véritablement contesté.
17. S'il est constant que 75% des parcelles concernées par le projet sont des propriétés privées qui doivent faire l'objet d'une acquisition par la commune au besoin par la voie d'une expropriation, il n'est pas contesté qu'aucun autre espace public présentant les mêmes qualités et pour lequel la collectivité disposerait de la maîtrise foncière ou, le cas échéant, qui serait la propriété d'un ou de plusieurs particuliers, n'existe en ville. Le commissaire enquêteur a également relevé, dans son rapport d'enquête publique, l'absence de solution alternative permettant de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes, sauf à revoir le projet dans ses fondements et sa globalité, après avoir précisé que les deux scénarios qui ont été présentés au maître d'ouvrage étaient sensiblement similaires, qu'ils couvraient la même assiette et impliquaient, par conséquent, l'expropriation des mêmes parcelles, dont celle des consorts B.... Il a également indiqué, dans ce même document, que l'acquisition desdites parcelles appartenant aux propriétaires privés était en adéquation avec l'emprise du projet. Si les requérants soutiennent que l'expropriation de leur maison n'est pas nécessaire alors que la commune est propriétaire de la parcelle HE n° 592 abritant un garage pouvant accueillir le futur parvis à l'entrée Nord et dont les contours ne sont pas finalisés comme l'a indiqué le rapport du commissaire enquêteur, il ne ressort cependant pas des pièces du dossier que la séquence du projet correspondant à l'entrée du parc depuis le cœur de ville, prise dans le périmètre que lui a donné la collectivité, pourrait être réalisée en utilisant seulement ce terrain lui appartenant alors que le dossier soumis à enquête publique n'envisageait l'intégration de cette parcelle au parvis qu'à moyen ou long terme et que l'aménagement retenu consiste à ouvrir ce futur parvis sur un bel alignement de marronniers et platanes et à l'étendre à l'ouest de l'allée, donnant ainsi directement sur le patrimoine architectural emblématique des anciennes pépinières et qu'il privilégie ainsi pour la réalisation du parvis d'entrée le côté ouest. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier que l'inclusion de la parcelle des consorts B... dans le périmètre d'expropriation serait sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique comprenant l'aménagement d'un parvis d'entrée à l'échelle du site dans le prolongement du cheminement piéton depuis la zone d'aménagement concerté du Triangle de la gare. Pour ces motifs, les requérants ne sont pas fondés à invoquer l'absence de nécessité de l'expropriation.
18. Enfin, les requérants persistent à soutenir que les coûts qu'implique le projet surpassent très largement les éventuels avantages qu'il peut procurer. Cependant, le seul fait que le coût financier estimé représente une part non négligeable, de l'ordre de 23 à 28 % du budget d'investissement de la commune, ne suffit pas, par lui-même, à établir que ce budget communal ne pourrait supporter une telle charge financière, ni qu'elle aurait ainsi un caractère disproportionné. Au contraire, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport du commissaire-enquêteur, lequel estime que " le bilan coûts-avantages penche en faveur de l'utilité publique du projet ", que le coût financier de l'opération apparaît en adéquation avec le but recherché, à savoir l'amélioration de la qualité de la vie de la population par une offre d'aménités paysagères, sportives, culturelles, de loisirs, actuellement déficitaire au sud de la ville et que les inconvénients d'ordre social constitués par les atteintes à la propriété privée qu'implique la réalisation de l'opération, ne constituent pas des points de blocages, la création d'espaces verts urbains répondant à une forte demande de la population telle qu'elle ressort de la concertation préalable.
19. Il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que les atteintes à la propriété privée et le coût financier que comporte l'opération ne sont pas, eu égard à la finalité d'intérêt général de l'opération, de nature à retirer au projet son caractère d'utilité publique. Il en est de même de l'inconvénient tenant à la nécessité, le cas échéant, de déplacer et reloger Mme D... A... veuve B....
20. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 17, le moyen tiré de l'absence de nécessité de l'expropriation et de la cession de leur parcelle, au regard des dispositions des articles L. 132-1 et R.132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
21. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse aux requérants la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des consorts B... le versement à la commune de Nîmes de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête des consorts B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Nîmes au titre des dispositions l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D..., Jeanne A... veuve B..., M. C..., Boris B..., à M. A..., Jean-Claude B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la commune de Nîmes.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 7 mai 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
M. Teulière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mai 2024.
Le rapporteur,
T. Teulière
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22TL21103