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02/04/2024 | FRANCE | N°22TL21470

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 02 avril 2024, 22TL21470


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée Gaillac Distribution et son assureur, la société Allianz Iard, ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'État à leur payer, d'une part, la somme de 257 898 euros correspondant à la somme versée par la société Allianz Iard à la société Gaillac Distribution en réparation des préjudices subis du fait des blocages et filtrages effectués du 15 novembre au 15 décembre 2018 par les manifestants dits " gilets jaunes "

à proximité de l'hypermarché Leclerc, exploité par la société Gaillac Distribution, ainsi qu'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Gaillac Distribution et son assureur, la société Allianz Iard, ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'État à leur payer, d'une part, la somme de 257 898 euros correspondant à la somme versée par la société Allianz Iard à la société Gaillac Distribution en réparation des préjudices subis du fait des blocages et filtrages effectués du 15 novembre au 15 décembre 2018 par les manifestants dits " gilets jaunes " à proximité de l'hypermarché Leclerc, exploité par la société Gaillac Distribution, ainsi qu'à raison des actions commises par les lycéens le 4 décembre 2018, et, d'autre part, de verser à cette dernière société la somme de 7 939 euros correspondant à la franchise restée à sa charge après paiement de l'indemnité d'assurance.

Par un jugement n° 2003142 du 21 avril 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 juin et 11 octobre 2022, les sociétés Gaillac Distribution et Allianz Iard, représentées par Me Esquelisse, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de condamner l'État à leur payer, d'une part, la somme de 257 898 euros correspondant à la somme versée par la société Allianz Iard à la société Gaillac Distribution en réparation des préjudices subis du fait des blocages et filtrages effectués du 15 novembre au 15 décembre 2018 par les manifestants dits " gilets jaunes " à proximité de l'hypermarché Leclerc exploité par la société Gaillac Distribution, ainsi qu'à raison des actions commises par les lycéens le 4 décembre 2018, et, d'autre part, de verser à cette dernière société la somme de 7 939 euros correspondant à la franchise restée à sa charge après paiement de l'indemnité d'assurance ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à la société Allianz Iard en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que l'indemnisation des préjudices subis du fait, d'une part, des blocages réalisés du 15 novembre au 15 décembre 2018 par des " gilets jaunes " à proximité de l'hypermarché Leclerc et d'autre part, de la tentative d'intrusion par des lycéens, le 4 décembre 2018, ne relevait pas du régime de responsabilité sans faute prévu par l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure ;

- en effet les conditions d'engagement de la responsabilité de l'État, sur le fondement de ce régime de responsabilité, sont réunies, dès lors que les dommages subis résultent de la commission d'un délit, qu'ils sont consécutifs à un rassemblement ou à un attroupement au sens donné aux dispositions de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure par le Conseil d'État, compte tenu du caractère spontané de ce rassemblement et de cet attroupement, notamment caractérisé par le fait que des lycéens se sont joints aux " gilets jaunes " ;

- le lien de causalité entre les faits s'étant produits entre le 15 novembre et le 15 décembre 2018 et notamment le 4 décembre 2018, et les préjudices subis, qui présentent un caractère direct et certain, est établi ; la réalité et la consistance des préjudices subis sont établies par le rapport d'expertise privée produit au dossier ;

- à titre subsidiaire, la responsabilité de l'État doit être engagée sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques, les préjudices subis présentant un caractère anormal et spécial.

Par un mémoire, enregistré le 29 janvier 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 17 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 20 février 2024.

Vu les autres pièces de ce dossier.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code pénal ;

- le code de la route ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bentolila, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,

Considérant ce qui suit :

1. La société Gaillac Distribution exploite un hypermarché sous l'enseigne Leclerc dans la zone commerciale de Piquerouge à Gaillac (Tarn). Dans le cadre du mouvement national dit des " gilets jaunes ", des groupes de manifestants se sont installés entre le 17 novembre 2018 et le 15 décembre 2018 sur le carrefour giratoire d'accès à ce centre commercial et ont mis en place des barrages bloquants et filtrants. Par ailleurs, le 4 décembre 2018, après qu'environ 300 lycéens ont rejoint les ronds-points occupés par les " gilets jaunes ", 70 lycéens, ainsi qu'un certain nombre de membres des " gilets jaunes ", se sont dirigés vers l'établissement Leclerc, dont le directeur a décidé de fermer les accès. Après le rejet, le 7 mai 2020, par la préfète du Tarn de leur demande préalable d'indemnisation, les sociétés Gaillac Distribution et Allianz Iard ont demandé au tribunal administratif de Toulouse la condamnation de l'État à leur verser les sommes de 257 898 euros et de 7 939 euros correspondant, respectivement, à l'indemnité versée par Allianz Iard à la société Gaillac Distribution, sur le fondement du contrat d'assurance, et à la franchise restée à la charge de cette dernière après paiement de cette indemnité. Les sociétés Gaillac Distribution et Allianz Iard relèvent appel du jugement du 21 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

S'agissant de la responsabilité sans faute de l'État :

En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure :

2. Aux termes de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure : " L'État est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens. (...) ". L'application de ces dispositions est subordonnée à la condition que les dommages dont l'indemnisation est demandée résultent de manière directe et certaine de crimes ou de délits déterminés, commis par des rassemblements ou attroupements précisément identifiés.

S'agissant des blocages et filtrages réalisés entre le 17 novembre 2018 et le 15 décembre 2018 :

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 412-1 du code de la route : " Le fait, en vue d'entraver ou de gêner la circulation, de placer ou de tenter de placer, sur une voie ouverte à la circulation publique, un objet faisant obstacle au passage des véhicules ou d'employer, ou de tenter d'employer un moyen quelconque pour y mettre obstacle, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende. (...) ".

4. Il résulte de l'instruction, et notamment des constats d'huissier produits par les sociétés appelantes, que des actions de blocage et de filtrage de la circulation ont été menées entre le 17 novembre 2018 et le 15 décembre 2018 au niveau des carrefours giratoires desservant les deux zones dans lesquelles sont implantés les différents commerces exploités par la société Gaillac distribution. À cet effet, des manifestants, revêtus de gilets jaunes, ont mis en place des barrages, à l'aide de camions, de palettes et de pneus ou encore de divers objets, pour filtrer le passage, en laissant passer seulement les véhicules légers et en interdisant l'accès aux poids-lourds. Ces actions, qui se sont succédées pendant presque un mois, s'inscrivaient alors dans le cadre d'un mouvement national de contestation en réaction à la hausse du prix des carburants, qui a conduit à la mise en place de nombreux barrages routiers, visant à paralyser l'économie française. Elles ont constitué des délits d'entrave à la circulation réprimés par l'article L. 412-1 du code de la route et ont été commis de manière concertée et préméditée. Par conséquent, les préjudices qui en ont résulté pour les sociétés Gaillac Distribution et Allianz Iard ne sauraient, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, être considérés comme imputables à un attroupement ou à un rassemblement au sens des dispositions précitées de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure et ne sauraient donc engager la responsabilité de l'État sur ce fondement.

S'agissant des événements survenus le 4 décembre 2018 :

5. Ainsi qu'il est dit au point 2 du présent arrêt, l'application des dispositions précitées de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure est subordonnée à la condition que les dommages dont l'indemnisation est demandée résultent de manière directe et certaine de crimes ou de délits déterminés, commis par des rassemblements ou attroupements précisément identifiés.

6. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'à l'occasion d'une manifestation qui s'est tenue contre la réforme du baccalauréat et de l'enseignement supérieur, un groupe composé de 300 lycéens a rejoint, le 4 décembre 2018 au matin, des " gilets jaunes " qui participaient au blocage du carrefour giratoire menant à la zone où se situe le centre commercial exploité par la société Gaillac distribution. Puis, un groupe de 70 lycéens, accompagnés de quelques " gilets jaunes " a quitté ce rond-point pour prendre la direction de ce centre commercial. Ce groupe doit être regardé comme ayant constitué un rassemblement au sens de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure.

7. En deuxième lieu, en vertu de l'article 222-14-2 du code pénal : " Le fait pour une personne de participer sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende ".

8. Il résulte de l'instruction que le groupe cité au point 6, qui comprenait notamment, selon les déclarations du gérant de l'hypermarché Leclerc de Gaillac, lors de son audition du 5 décembre 2018 par les services de gendarmerie, un ancien salarié de cet établissement, a pris la direction du centre commercial depuis le rond-point occupé par les " gilets jaunes ", dont certains en courant, pour s'introduire, vers 10 heures, dans les magasins " Sport 2000 " et GIFI pour y opérer des dégradations, avant de se diriger, à 10 h 20, dans le même but, vers l'entrée principale de l'hypermarché précité. Après que les premiers éléments de ce groupe ont été refoulés par les agents de sécurité de ce dernier, ils n'ont été empêchés d'y pénétrer que par la fermeture des grilles décidée par la direction de l'établissement. Une seconde tentative a eu lieu, vers une autre sortie, par laquelle les clients avaient été autorisés par la direction à passer, vers 13 heures, mais a échoué en raison de ce que les grilles ont été fermées juste avant. Eu égard à ces circonstances, qui révèlent une intention manifeste et persistante de pénétrer par la force dans l'hypermarché pour y commettre des dégradations, et alors même que les auteurs de ces faits n'ont pas fait l'objet de poursuites pénales, ils relevaient de l'infraction pénale dont les éléments constitutifs sont définis par les dispositions précitées de l'article 222-14-2 du code pénal .

9. En troisième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment des procès-verbaux de gendarmerie, qu'alors que la tentative d'intrusion dans l'hypermarché, qui a contraint son directeur à en fermer les portes, s'est produite à 10 h 20, les forces de l'ordre n'ont été présentes sur le site qu'à 14 heures pour sécuriser la sortie des clients par la porte n° 3. Par suite, le préjudice dont se prévalent les appelantes procède de faits commis à force ouverte au sens des dispositions précitées de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure.

10. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment que la responsabilité sans faute de l'État sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure doit être regardée comme engagée à raison des préjudices qui ont résulté pour les sociétés Gaillac Distribution et Allianz IARD des agissements de lycéens et de " gilets jaunes " le 4 décembre 2018.

En ce qui concerne la responsabilité sans faute de l'État pour rupture d'égalité devant les charges publiques :

11. Lorsque le dommage invoqué a été causé à l'occasion d'une série d'actions concertées ayant donné lieu sur l'ensemble du territoire ou une partie substantielle de celui-ci à des crimes ou délits commis par plusieurs attroupements ou rassemblements et que les conditions d'application de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure ne sont pas réunies, la responsabilité de l'État peut être engagée sur le fondement des principes généraux du droit de la responsabilité sans faute si le dommage indemnisable présente le caractère d'un préjudice anormal et spécial.

12. Les sociétés Gaillac Distribution et Allianz Iard n'apportent pas davantage en appel qu'en première instance les éléments de nature à caractériser la spécialité du préjudice financier qu'elles soutiennent avoir subi en raison des blocages et filtrages réalisés entre le 17 novembre 2018 et le 15 décembre 2018, décrits au point 4. À ce titre, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, elles n'établissent ni même n'allèguent que les autres enseignes exploitant des surfaces commerciales similaires aux leurs n'auraient pas été impactées par les actions qui ont été menées, durant la période concernée, sur l'ensemble du territoire national par des manifestants dans le cadre du mouvement dit des " gilets jaunes ". Par conséquent, les sociétés appelantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de ce que leur situation était constitutive d'une rupture d'égalité devant les charges publiques susceptible de donner lieu à indemnisation sur le fondement des principes généraux du droit de la responsabilité administrative.

Sur les préjudices indemnisables :

13. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 121-12 du code des assurances : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur (...) ". Il résulte de ces dispositions que le versement, par l'assureur, de l'indemnité à laquelle il est tenu en vertu du contrat d'assurance le liant à son assuré, le subroge, dès cet instant et à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de son assuré contre le tiers responsable du dommage.

14. Ainsi qu'il a été exposé précédemment, la tentative d'intrusion dans les locaux de l'hypermarché a contraint son gérant à en fermer les portes le 4 décembre 2018. Il résulte, de plus de l'instruction, s'agissant du lendemain, que le mouvement des lycéens avait été reconduit pour cette journée et qu'en raison, notamment, des délais incompressibles de préparation des produits frais, l'ouverture le 5 décembre 2018 n'a pas été possible.

15. Par ailleurs, si le rapport établi à la demande de la société Gaillac distribution par la société Polyexpert, le 10 juillet 2019, fait état des pertes de chiffre d'affaires qui auraient été subies pour l'hypermarché au titre des journées des 4 et 5 décembre 2018, les éléments permettant de déterminer la perte de marge nette, sur le fondement de laquelle doit s'opérer l'indemnisation, ne sont pas produits au dossier. Il y a donc lieu de procéder à un supplément d'instruction sur ce point.

16. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part que les sociétés Gaillac Distribution et Allianz Iard sont seulement fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande en tant qu'elle tend à la réparation des préjudices subis à raison de la fermeture de l'hypermarché Leclerc pour les journées des 4 et 5 décembre 2018, et, d'autre part, qu'il y a lieu de procéder à un supplément d'instruction à l'effet de production par les sociétés appelantes, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, des extraits de la comptabilité de la société Gaillac Distribution portant sur le chiffre d'affaires et les éléments permettant de déterminer le taux de marge nette afférents à ces deux journées des 4 et 5 décembre 2018 et de réserver, jusqu'en fin d'instance, les droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt.

DÉCIDE:

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions présentées par les sociétés Gaillac Distribution et Allianz Iard tendant à la réparation des préjudices subis à raison de la fermeture du centre commercial Leclerc pour les journées des 4 et 5 décembre 2018, procédé à un supplément d'instruction à l'effet de production par les sociétés appelantes, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, des extraits de la comptabilité de la société Gaillac Distribution, portant sur le chiffre d'affaires et les éléments permettant de déterminer le taux de marge nette pour les 4 et 5 décembre 2018.

Article 2 : Le jugement du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus de la demande indemnitaire des sociétés Gaillac Distribution et Allianz Iard devant le tribunal administratif de Toulouse est rejeté.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Allianz Iard, à la société par actions simplifiée Gaillac Distribution et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Tarn.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Pierre Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani Laclautre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2024.

Le président-assesseur,

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-BèthbéderLa greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 22TL21470 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21470
Date de la décision : 02/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-05-01 RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITÉ. - RESPONSABILITÉ RÉGIE PAR DES TEXTES SPÉCIAUX. - ATTROUPEMENTS ET RASSEMBLEMENTS (ART. L. 2216-3 DU CGCT). - RÉGIME DE RESPONSABILITÉ SANS FAUTE DE L'ÉTAT RÉGI PAR LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE L. 211-10 DU CODE DE LA SÉCURITÉ INTÉRIEURE - DOMMAGES RÉSULTANT DE MANIÈRE DIRECTE ET CERTAINE DE DÉLITS DÉTERMINÉS COMMIS PAR DES RASSEMBLEMENTS OU ATTROUPEMENTS PRÉCISÉMENT IDENTIFIÉS - EXISTENCE - FERMETURE D'UN HYPERMARCHÉ POUR PARER LA TENTATIVE D'INTRUSION D'UN GROUPE DE MANIFESTANTS, LYCÉENS ET « GILETS JAUNES », TENTATIVE RELEVANT DE L'INFRACTION PÉNALE DONT LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS SONT DÉFINIS PAR LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 222-14-2 DU CODE PÉNAL.

60-01-05-01 À l'occasion d'une manifestation qui s'est tenue contre la réforme du baccalauréat et de l'enseignement supérieur, un groupe composé de 300 lycéens a rejoint, le 4 décembre 2018 au matin, des « gilets jaunes » qui participaient au blocage du carrefour giratoire menant à la zone où se situe le centre commercial exploité par la société Gaillac distribution. Puis, un groupe de 70 lycéens, accompagnés de quelques « gilets jaunes » a quitté ce rond-point pour prendre la direction de ce centre commercial. Ce groupe doit être regardé comme ayant constitué un rassemblement au sens de l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure. Ce groupe s'est ensuite introduit dans des magasins exploités sous d'autres enseignes pour y opérer des dégradations, avant de se diriger dans le même but, vers l'entrée principale de l'hypermarché précité. Après que les premiers éléments de ce groupe ont été refoulés par les agents de sécurité de ce dernier, ils n'ont été empêchés d'y pénétrer que par la fermeture des grilles décidée par la direction de l'établissement. Une seconde tentative a eu lieu, vers une autre sortie, par laquelle les clients avaient été autorisés par la direction à passer mais a échoué en raison de ce que les grilles ont été fermées juste avant. Eu égard à ces circonstances, qui révèlent une intention manifeste et persistante de pénétrer par la force dans l'hypermarché pour y commettre des dégradations, et alors même que les auteurs de ces faits n'ont pas fait l'objet de poursuites pénales, ils relevaient de l'infraction pénale dont les éléments constitutifs sont définis par les dispositions de l'article 222-14-2 du code pénal.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : SOULIE COSTE-FLORET & AUTRES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-02;22tl21470 ?
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