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02/04/2024 | FRANCE | N°22TL00231

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 02 avril 2024, 22TL00231


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société civile immobilière Kawai, la société civile immobilière Serguier-Malortigue, la société 2MCA, MM. Cécil D... et A... C... ont, tout d'abord, demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune d'Agde à verser aux sociétés Kawai et Serguier-Malortigue la somme de 6 660 000 euros en réparation du préjudice lié à l'impossibilité de revendre les parcelles leurs appartenant, objet de l'échange et de condamner cette commune à verser, respec

tivement, à MM. D... et C... la somme de 2 305 000 euros et celle de 384 000 euros, correspond...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière Kawai, la société civile immobilière Serguier-Malortigue, la société 2MCA, MM. Cécil D... et A... C... ont, tout d'abord, demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune d'Agde à verser aux sociétés Kawai et Serguier-Malortigue la somme de 6 660 000 euros en réparation du préjudice lié à l'impossibilité de revendre les parcelles leurs appartenant, objet de l'échange et de condamner cette commune à verser, respectivement, à MM. D... et C... la somme de 2 305 000 euros et celle de 384 000 euros, correspondant à la perte de marge nette escomptée lors de la réalisation de l'opération immobilière.

Ces mêmes demandeurs ont, ensuite, demandé à ce tribunal, à titre de provision, de condamner la commune d'Agde à verser aux sociétés Kawai et Serguier-Malortigue et à MM. D... et C... les mêmes sommes.

Enfin, la société par actions simplifiée 2MCA a demandé à ce tribunal, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner, à titre de provision, la commune d'Agde à lui verser la somme de 1 517 613 euros correspondant à la perte nette en résultat au titre des frais de gestion avant impôt sur les sociétés.

Par un jugement n° 2002556, 2003329, 2005986 du 25 novembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les requêtes de la société Kawai et autres et de la société 2MCA tendant au versement d'une provision et, d'autre part, a rejeté le surplus de conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2022, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et des mémoires, enregistrés le 17 février 2022 et le 22 mars 2023, les sociétés Kawai, Serguier-Malortigue, 2MCA, MM. D... et C..., représentés par Me Garreau, demandent à la cour dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 25 novembre 2021 ;

2°) de condamner la commune d'Agde à verser à la société 2MCA la somme de 1 517 613 euros correspondant à la perte nette en résultat au titre des frais de gestion avant impôt sur les sociétés ;

3°) de condamner cette commune à verser aux sociétés Kawai et Serguier-Malortigue la somme de 6 660 000 euros en réparation du préjudice lié à l'impossibilité de revendre les parcelles acquises d'un échange de terrains avec cette collectivité ;

4°) de condamner cette commune à verser à M. D... la somme de 2 305 000 euros et à M. C... la somme de 384 000 euros en réparation du préjudice résultant de la perte de marge nette escomptée de la réalisation de l'opération immobilière en litige ;

5°) de mettre à la charge de cette commune la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il prononce un non-lieu à statuer sur la demande n° 2005986 en référé-provision présenté par la société 2MCA alors que les premiers juges n'étaient pas saisis d'une demande indemnitaire au fond ;

- l'illégalité de la délibération du 24 septembre 2019 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune d'Agde ; l'annulation de la délibération illégale a pour effet de faire revivre la délibération du 28 juin 2016, qui acte l'échange des parcelles en litige ;

- la commune d'Agde a commis une obstruction fautive à l'échange des parcelles en s'abstenant de prendre les diligences permettant la signature de l'acte authentique, à savoir, le déclassement des parcelles en litige alors que l'objet et le prix de l'échange étaient parfaitement définis par la délibération du 28 juin 2016 ;

- cette commune a commis une faute en ne procédant pas au déclassement des parcelles, objet de l'échange ; elle ne pouvait ignorer l'obligation dans laquelle elle se trouvait de déclasser les parcelles en litige ;

- la commune d'Agde a également commis une faute de nature à engager sa responsabilité du fait de sa promesse non tenue ; ainsi, par la délibération du 28 juin 2016, qui définit précisément la chose et le prix, n'est subordonnée à aucune condition et autorise son maire à signer tous les actes nécessaires à sa mise en œuvre, la commune a pris un engagement qui doit s'analyser comme une promesse d'échange ; la promesse de la commune se matérialise également par un ensemble de pièces et d'engagements de son maire qui s'était personnellement engagé vis-à-vis de ses administrés et de ses cocontractants ;

- du fait de la rupture unilatérale du programme immobilier, la société 2MCA a subi un préjudice résultant de la perte de résultat avant impôt sur les sociétés d'un montant de 1 517 613 euros ;

- l'annulation de l'échange par la délibération litigieuse les prive du bénéfice de la vente de terrains constructibles pour y construire des immeubles résidentiels dont la valeur est bien supérieure à celle de terrains actuellement intégrés en zone UC du plan local d'urbanisme dont l'affectation est limitée aux seuls loisirs diurnes ; ils ont également subi une perte de marge nette liée à l'impossibilité de réaliser l'opération immobilière.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2023, la commune d'Agde, représentée par Me Crétin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des appelants une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- si le jugement attaqué a prononcé le non-lieu à statuer sur la requête en référé provision de la société 2MCA, il n'en est pas moins régulier ; en effet, si cette société n'a pas formulé de demande indemnitaire au fond, elle était néanmoins partie à l'instance indemnitaire qu'elle avait introduite avec la société Kawai et autres ; dans sa requête en référé provision, la société 2MCA se prévalait des mêmes fautes commises par la commune d'Agde que celles invoquées dans cette demande indemnitaire ; de plus, aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obstacle à ce qu'une formation collégiale statue sur une requête en référé ;

- la délibération du 24 septembre 2019, qui procède au retrait de la délibération du 28 juin 2016, n'est pas illégale et n'est donc pas constitutive d'une faute ; aucun accord sur l'objet de l'échange étant intervenu, les appelants ne bénéficiaient d'aucun droit acquis à l'échange de parcelles appartenant au domaine public ;

- l'absence de déclassement des parcelles en litige ne révèle aucune faute de sa part ;

- la délibération du 28 juin 2016 a seulement acté du principe de l'échange des parcelles et du paiement d'une soulte et ne peut être qualifiée de promesse ou de compromis de vente ; aucun contrat d'échange, compromis ou promesse n'ont été conclu du seul fait de l'inertie des appelants qui, en dépit de relance, ne se sont pas manifestés auprès du notaire ;

- les appelants ne font état d'aucun préjudice réel et certain ;

- le préjudice allégué par la société 2MCA est hypothétique ; cette société qui était l'un des opérateurs en charge de la conception et du montage du programme immobilier en projet, ne démontre pas avoir effectué une quelconque opération en lien avec sa mission pour laquelle elle n'aurait pas été rémunérée ; la prétendue perte de la marge nette n'est pas liée à la délibération du 24 septembre 2019 ;

- le préjudice matériel lié à une perte de valeur des terrains appartenant aux appelants n'est pas établi ; même si l'échange entre les appelants et la commune s'était concrétisé, la perte du bénéfice de la revente des terrains acquis par l'échange, est hypothétique ;

- l'impossibilité de réaliser le projet n'est pas seulement lié à la délibération du 24 septembre 2019.

En application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par lettre du 14 mars 2024, que la cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité de la demande indemnitaire au fond présentée pour la première fois en cause d'appel par la société 2MCA.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Beltrami,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Garreau, représentant les appelants et celles de Me Wattrisse, représentant la commune d'Agde.

Une note en délibéré, enregistrée le 21 mars 2024, et une pièce complémentaire, enregistrée le 28 mars 2024, ont été présentées pour les appelants.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 28 juin 2016, le conseil municipal de la commune d'Agde (Hérault) a décidé d'échanger les parcelles ..., pour une superficie de 10 500 m² environ à extraire de la totalité de la parcelle, évaluées à 5 millions d'euros, avec les sociétés Ila, Kawai et Serguier-Malortigue, propriétaires quant à elles d'un ensemble de parcelles de 19 793 m² évalué à 1 225 000 euros et le versement par ces dernières d'une soulte de 3 775 000 euros. Par une délibération du 24 septembre 2019, la commune d'Agde a décidé de retirer la délibération du 28 juin 2016. Par un arrêt n° 21TL01464 du 21 février 2023, la présente cour a annulé, d'une part, le jugement du 26 mars 2021 du tribunal administratif de Montpellier ayant rejeté la demande de la société civile immobilière Kawai et autres tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal d'Agde du 24 septembre 2019 et, d'autre part, cette dernière délibération. La société civile immobilière Kawai, la société civile immobilière Serguier-Malortigue, la société 2MCA, MM. D... et C... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune d'Agde à verser aux sociétés Kawai et Serguier-Malortigue la somme de 6 660 000 euros au titre du préjudice lié à l'impossibilité de revendre les parcelles acquises de l'échange et à MM. D... et C... les sommes de, respectivement, 2 305 000 euros et de 384 000 euros, correspondant à la perte de marge nette escomptée lors de la réalisation de l'opération immobilière. Ces demandeurs ont demandé à ce tribunal, à titre de provision, de condamner cette commune à verser aux sociétés Kawai et Serguier-Malortigue et à MM. D... et C... ces mêmes sommes. Enfin, la société 2MCA a demandé à ce tribunal, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner, à titre de provision, la commune d'Agde à lui verser la somme de 1 517 613 euros correspondant à la perte nette en résultat au titre des frais de gestion avant impôt sur les sociétés. Ces sociétés et MM. D... et C... relèvent appel du jugement du 25 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les demandes de la société Kawai et autres et de la société 2MCA tendant au versement d'une provision et, d'autre part, rejeté le surplus de conclusions des parties.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Est entaché d'irrégularité le jugement qui a prononcé, à tort, un non-lieu à statuer.

3. D'une part, l'article R. 541-1 du code de justice administrative dispose que : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. (...) ". Même en l'absence d'une demande au fond, l'intervention d'une décision de l'administration rejetant une demande de provision formée devant elle par un requérant sur le fondement de cet article, lie le contentieux tant en référé provision qu'au fond.

4. Le 11 septembre 2020, la société 2MCA a présenté à la commune d'Agde une demande préalable de versement d'une provision d'un montant de 1 517 613 euros correspondant à la perte nette en résultat au titre des frais de gestion avant impôt sur les sociétés résultant de sa promesse non tenue et du défaut fautif du déclassement des parcelles, objet de l'échange litigieux. Si la société 2MCA était ainsi dispensée de lier le contentieux au fond en présentant une nouvelle demande indemnitaire, elle était cependant tenue, si elle entendait contester la décision implicite de rejet et faire valoir ses droits, de présenter des conclusions indemnitaires au fond devant le tribunal administratif. Or, il résulte de l'instruction que si, certes, la société 2MCA s'était jointe à la demande indemnitaire présentée par la société Kawai et autres devant les premiers juges, toutefois, à la différence des autres sociétés demanderesses, elle ne réclamait aucune indemnité pour elle-même. Elle ne pouvait, par conséquent, pas être regardée comme ayant présenté des conclusions indemnitaires au fond devant les premiers juges. Dans ces conditions, le tribunal administratif de Montpellier, qui ne pouvait pas s'estimer saisi au fond de la part de la société 2MCA, a prononcé, à tort, un non-lieu à statuer sur la demande de provision de la société 2MCA. Le jugement qui est entaché d'irrégularité, doit être annulé. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de la société 2MCA.

Sur la demande de la société 2MCA :

5. D'une part, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative cité au point 3, la demande de provision de la société 2MCA présentée sur le fondement de ces dispositions relève de l'appréciation du juge des référés. Toutefois, conformément à l'article L. 511-2 de ce code, l'affaire peut être renvoyée à une formation de jugement collégiale lorsque la nature de l'affaire le justifie.

6. D'autre part, la saisine du juge des référés aux fins de versement d'une provision interrompt le délai de recours contentieux contre la décision de l'administration ayant rejeté la demande d'indemnisation. Ce délai commence à courir à nouveau à compter de la notification au requérant de l'ordonnance du juge des référés.

7. La saisine, le 23 décembre 2020, du juge des référés par la société 2MCA a interrompu le délai de recours contentieux contre la décision de l'administration ayant rejeté la demande d'indemnisation. En l'absence d'ordonnance du juge des référés, ce délai de recours n'a pas commencé à courir à nouveau. Dès lors, la société 2MCA n'était pas forclose à présenter, devant les premiers juges, une demande indemnitaire au fond pour l'ensemble des dommages causés par les fautes imputées à la commune d'Agde. En revanche, elle n'est pas recevable à présenter pour la première fois en cause d'appel une telle demande qui présente un caractère nouveau et ne peut donc qu'être rejetée.

Sur la responsabilité pour faute de la commune d'Agde :

En ce qui concerne le principe de la responsabilité :

8. En premier lieu, par un arrêt n° 21TL01464 du 21 février 2023, la présente cour a annulé la délibération du conseil municipal d'Agde du 24 septembre 2019, au motif qu'elle a méconnu les dispositions de l'article L. 243-3 du code des relations entre le public et l'administration. Cette illégalité constitutive d'une faute est de nature à engager la responsabilité de la commune d'Agde.

9. En deuxième lieu, d'une part, l'annulation de la délibération du 24 septembre 2019 procédant au retrait illégal de la délibération du conseil municipal d'Agde du 28 juin 2016, a eu pour effet de faire revivre cette dernière délibération. Toutefois, pour les motifs exposés dans l'arrêt n° 21TL01464 précité, la délibération du 28 juin 2016, qui autorise la cession des parcelles litigieuses constitutives d'une dépendance du domaine public de la commune d'Agde à des personnes privées, doit être regardée, compte tenu du principe d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public, comme n'accordant cette autorisation que sous la réserve qu'il soit procédé préalablement à la désaffectation et au déclassement de ces biens. Cette délibération qui n'est donc pas, par elle-même, créatrice de droits, ne confère pas à la personne qu'elle désigne comme l'acquéreur un droit à la réalisation de la vente ou de l'échange.

10. D'autre part, aucun principe ni aucun texte n'imposait à la commune d'Agde de procéder au déclassement des parcelles en litige. Dans ces conditions, en s'abstenant de les déclasser afin de permettre la signature de l'acte authentique d'échange, cette commune n'a commis aucune obstruction ou carence fautive.

11. En dernier lieu, les appelants soutiennent que, de manière fautive, la commune d'Agde ne tiendrait pas sa promesse, actée par la délibération du 28 juin 2016, de procéder à l'échange des parcelles en litige. Toutefois, pour les motifs qui viennent d'être exposés, cette délibération se borne à adopter un accord de principe sur l'échange de parcelles sous la réserve qu'il soit procédé préalablement à leur désaffectation et à leur déclassement formel. Par suite, elle n'engage pas, de manière ferme et définitive, la commune d'Agde. Cette délibération ne peut donc être regardée comme constituant une promesse d'échange des parcelles en litige.

12. De plus, ni les déclarations du maire, prononcées lors de cérémonies de vœux ou figurant dans le magazine communal, ni ses engagements de campagne ne sauraient constituer des actes de nature à engager la commune d'Agde. En outre, la lettre du 27 juillet 2018 adressée à la gérante de l'aquarium et aux termes de laquelle le maire d'Agde confirmait l'engagement de la commune de lui céder les parcelles nécessaires à l'implantation de l'aquarium sur la base d'un prix de 60 euros par mètre carrés, ne constitue pas davantage une promesse à l'égard des appelants, qui ne sauraient, dès lors, s'en prévaloir. Enfin, en ce qui concerne le permis de construire, délivré le 21 mars 2019 par le maire sur les parcelles communales concernées par le principe de l'échange en litige, il ne saurait être regardé comme valant promesse de procéder à l'échange de ces parcelles dès lors qu'il n'a été délivré qu'au regard des règles d'urbanisme et ne pouvait avoir d'effet utile qu'à la condition que les pétitionnaires deviennent effectivement propriétaires de l'ensemble des parcelles concernées par le projet. Il en résulte que les appelants ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité pour faute de la commune d'Agde sur le fondement de promesses qui n'auraient pas été tenues.

13. Il résulte de ce qui précède que les appelants sont seulement fondés à soutenir que la commune d'Agde a commis une faute du fait de l'irrégularité de la délibération du 24 septembre 2019 portant retrait de la délibération du 28 juin 2016.

En ce qui concerne le lien de causalité :

14. Les appelants se prévalent d'une perte de bénéfice et de marge nette liée à l'impossibilité de réaliser l'opération immobilière escomptée consistant à la mise en vente des parcelles acquises de l'échange avec la commune d'Agde. Toutefois, même si la délibération du 28 juin 2016 n'avait pas été illégalement retirée par la délibération du 24 septembre 2019, elle n'aurait pas permis à elle seule, en l'absence de désaffectation et de déclassement préalables des parcelles en litige appartenant au domaine public communal, la réalisation de l'opération immobilière envisagée. Par suite, les préjudices invoqués par les appelants n'étant pas en lien avec l'illégalité fautive de la délibération du 24 septembre 2019, leur demande indemnitaire doit être rejetée.

15. Au demeurant, et à supposer même que la commune d'Agde puisse être regardée comme ayant donné pendant plusieurs années aux appelants des assurances précises et constantes, constitutives d'une promesse, ces derniers ne peuvent pas avoir droit à une indemnité au titre de la perte de bénéfice et de marge nette liée à l'impossibilité de réaliser l'opération immobilière escomptée, ce manque à gagner ne constituant qu'un préjudice éventuel. De plus et tout état de cause, ils ne soutiennent pas avoir engagé des frais pour l'étude du programme concerné et n'en demandent pas le remboursement.

Sur la demande tendant à l'obtention d'une provision de la société 2MCA :

16. Il y a lieu de statuer immédiatement sur la demande tendant à l'obtention d'une provision de la société 2MCA qui n'a pas été expressément abandonnée par cette dernière. Toutefois, pour les motifs qui viennent d'être exposés, celle-ci doit être rejetée.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Agde, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme réclamée par les appelants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de chacun des appelants le versement à cette commune de la somme de 400 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE:

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande n° 2005986 de la société 2MCE.

Article 2 : La requête des sociétés Kawai et autres est rejetée.

Article 3 : La demande tendant au versement d'une provision présentée par la société 2MCA est rejetée.

Article 4 : La société Kawai, la société Serguier-Malortigue, la société 2MCA, M. D... et M. C... verseront, chacun, à la commune d'Agde, la somme de 400 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Kawai, à la société civile immobilière Serguier-Malortigue, à la société par actions simplifiée 2MCA, à M. B... D..., à M. A... C... et à la commune d'Agde.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2024 à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2024.

La rapporteure,

K. Beltrami

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 22TL00231


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